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La forme originale comme critère essentiel et remis en cause de l’œuvre

B. La forme, critère essentiel et incertain de l’œuvre

1. La forme originale comme critère essentiel et remis en cause de l’œuvre

une forme perceptible par les sens « l’œuvre ne peut donner prise au droit d’auteur qu’à partir du moment où elle quitte le monde de la spéculation pour entrer dans le monde sensible de la forme »87.

86Pascal Kamina, Droit anglo-americain des propriétés intellectuelles, 1ère édition, Issy-les-

Moulineaux, LGDJ, 2017 à la p 100.

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On va retrouver cette exigence dans le Code de propriété intellectuelle d’abord à l’article L 111-1 « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création », puis à l’article L 111-2 « l’œuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l’auteur ». Pour avoir un monopole sur une œuvre il faut donc qu’un auteur conçoive une œuvre, c’est-à-dire lui donne une forme. On trouve également cette exigence à l’article L 112-1 où l’on dit que les œuvres sont protégées « quels qu’en soit […] la forme d’expression ».

Cette forme est donc une exigence légale pour la protection, mais on remarque que dans les textes, à aucun moment le mot n’est employé et qu’aucune définition n’est donnée, laissant le soin à la doctrine et aux juridictions de déterminer ce qu’est cette forme. Les articles nous donnent quand même quelques éléments supplémentaires. D’abord, l’article L 111-3 nous explique que le support matériel ne doit pas être pris en compte « la propriété incorporelle définie par l'article L. 111-1 est indépendante de la propriété de l'objet matériel ».

Ainsi, la propriété ne concerne pas le support matériel, l’œuvre est une chose incorporelle, mais elle doit également être perceptible par les sens, c’est ce que signifie l’exigence de forme. Comme le précise l’article L 112-1, peu importe comment elle va être perceptible, la forme en tant que tel importe peu, elle peut être écrite ou orale ou graphique ou tout autre. C’est ainsi que la Cour administrative d’appel de Nancy a considéré que la sonorité d’un orgue était bien une forme, donc il pouvait bien y avoir une protection par le droit d’auteur88.

Grâce à l’article L 111-1, on sait que la protection apparaît par le seul fait que l’œuvre soit créée et l’article suivant nous apprend qu’elle n’a pas besoin d’être achevée. Ainsi, si l’œuvre n’est pas terminée, à partir du moment où elle a une forme, elle est susceptible d’être protégée par le droit d’auteur. Cela permet aux croquis, aux ébauches d’acquérir la protection.

88CAA Nancy, 2 mai 1996, D., 1999, p. 81-84, note Edelman, confirmé par CE, 14 juin 1999,

JCP, II, 2147-2150, concl. Combrexelle ; CCE, Juris-Classeur, nov. 1999, p. 18-19, note Caron ; l’Actualité juridique – Droit administratif, 20 nov. 1999, Jurisp., p. 938-941, note Guiheux.

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Mais dans l’ensemble il est difficile de savoir exactement qu’est-ce que la forme ? L’absence de définition de celle-ci contribue aux questions posées dans la partie précédente sur les idées.

Philippe Gaudrat va expliquer alors qu’il existe deux niveaux de formes : la forme externe et la forme interne89. La forme externe donne à chaque œuvre une apparence unique et qui va être déterminée par le genre de l’œuvre90. Parmi les formes externes on retrouve la forme sensible et la forme conventionnelle.

La forme sensible est, comme son nom l’indique, perçue par les sens. C’est-à-dire que c’est la façon dont les individus vont voir l’œuvre, si on parle d’un tableau ça va être le fait de voir ce tableau. Selon Philippe Gaudrat, il ne faut pas associer cette forme sensible à l’œuvre, car « une œuvre peut exister sans forme sensible propre de même qu’une forme sensible peut ne pas être une œuvre »91. Il donne ainsi l’exemple du livre pour lequel la forme sensible va être les lettres dans le texte alors que les lettres ne sont pas l’œuvre. À l’inverse, un arbre sera de forme sensible, mais ne sera pas une œuvre. L’origine de cette forme va être soit l’auteur si on parle d’une sculpture par exemple, soit de l’interprète lorsque l’on parle d’une musique par exemple, si on prend un instrument différent, la forme sensible sera différente. Enfin, la forme sensible n’a pas besoin d’être continue, elle peut être multiple. Différents objets peuvent constituer une forme sensible s’il y a un rapport stable entre eux92. Par exemple, une décision a considéré qu’une exposition était une œuvre93.

La forme conventionnelle « permet l’expression et la notation d’une forme interne non dotée d’une forme sensible inhérente (comme c’est le cas pour les œuvres plastiques). La forme conventionnelle est celle que nous livre la partition de musique, l’écrit d’une œuvre littéraire ou le plan d’une œuvre d’architecture etc. »94. Si elle est conventionnelle c’est parce qu’au lieu de se reposer sur la forme sensible, elle se repose sur des éléments

89 Philippe Gaudrat, « Réfléxion sur la forme des oeuvres de l’esprit » dans Propriétés

intellectuelles: Mélanges en l’honneur de André Françon, Dalloz, 1995, 195 à la p 200.

90 Ibid à la p 200. 91 Ibid à la p 201. 92 Ibid à la p 202.

93 CA Paris, 4e ch., 8 juin 1983, D. 1983. IR. 511, obs Colombet. 94 Gaudrat, supra note 89 à la p 202.

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classiques que tout le monde connait95. Le plan ou la partition de musique sont des formes classiques, la plupart des individus sont capables de se les représenter.

La forme sensible et la forme conventionnelle ne sont pas présentes dans toutes les œuvres, par exemple une sculpture n’a pas de forme conventionnelle, elle est directement dans sa forme sensible. Mais on trouve des œuvres qui combinent les deux types de formes comme par exemple l’œuvre théâtrale qui présente une forme conventionnelle avec l’écriture de la pièce puis une forme conventionnelle avec la représentation de la pièce96.

Avant la forme externe, il y a la forme interne qui « on peut dire que la présomption fondamentale est qu’il y a eu conception d’une forme interne précédant l’expression d’une forme externe lorsque, de l’intériorisation du monde extérieur à l’extériorisation de l’œuvre, le processus s’est déroulé sans hiatus dans le for intérieur d’un individu »97. Cette forme interne est ce qui provient finalement de la personne elle- même, comment cette personne en raison de son vécu et de ce qu’elle pense, va être capable de concevoir cette œuvre.

Cette forme interne est de nature composite, c’est-à-dire que tout ce qui fait la forme interne n’est pas forcément de l’auteur. Il va y avoir des éléments extérieurs qui vont participer à la création de cette forme, ce qui fait qu’elle est composite. Ces éléments extérieurs sont finalement ce qui fait partie du fond comme le genre ou les idées, tous les éléments qui ne sont pas appropriables98.

La forme interne est également de nature subjective, car « en tant que forme mentale, la forme interne ne vit que dans l’esprit de l’homme : dans l’esprit de l’auteur, d’abord, qui l’y infuse ; dans l’esprit de l’amateur, ensuite, qui l’y recherche »99. C’est finalement comment l’œuvre va vivre dans l’esprit de l’auteur et dans celui du spectateur, qu’est-ce que cette œuvre va représenter, comment elle va être interprétée.

Pour résumer, il y a une forme interne subjective nécessaire à la création et une forme externe qui est nécessaire à l’expression. Ces différentes formes vues ne sont pas là pour expliquer ce qu’est la forme, ce ne sont pas des conditions pour avoir la forme,

95 Ibid. 96 Ibid à la p 203. 97 Ibid à la p 204. 98 Ibid à la p 206. 99 Ibid.

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mais bien juste des justifications. Pour expliquer de quoi on parle lorsque l’on parle de la forme, à défaut d’avoir une définition.

Bernard Edelman, en commentant l’arrêt reconnaissant la qualité d’œuvre de l’esprit à une sonorité d’un orgue, a défini la forme comme « une organisation de signes, en vue de produire un effet esthétique. Par organisation, on entendra la volonté de créer un ordre, par signe, tout élément matériel ou immatériel inclus dans cet ordre, par effet esthétique, le projet d'intervenir dans la sphère des représentations, ou des émotions, ce qui distingue la création littéraire et artistique de l'invention »100.

Cette définition permet de donner une idée claire de ce qu’est la forme, ou en tout cas de ce qui va pouvoir y rentrer et donc être protégé par le droit d’auteur. Bien évidemment pour être protégée, il faut que cette forme soit originale. On l’a vu à plusieurs reprises, l’originalité de l’œuvre va être finalement l’empreinte de la personnalité de l’auteur. La forme originale va correspondre au fait s’il y a cette forme-là, c’est parce que c’est cet auteur qui a conçu l’œuvre. L’originalité de la forme est donc un critère impératif pour obtenir la protection de l’œuvre par le droit d’auteur.

Cela a été dit dans la partie précédente, si les idées sont laissées en dehors de la protection c’est parce qu’elles ne peuvent pas être originales. Pourtant, certains auteurs vont considérer que les idées peuvent effectivement être originales et que si elles ont une forme elles vont pouvoir être protégées. Si les idées peuvent être originales et qu’elles peuvent être protégées, le critère de la forme est-il toujours pertinent ?

Un certain nombre de types d’œuvre vont entrainer une remise en question de ce critère de la forme. En effet, le critère de la forme va être discuté en présence des œuvres immatérielles, des œuvres d’art contemporain, des logiciels, des bases de données etc.

Commençons par les œuvres immatérielles, on l’a vu la sonorité d’un orgue a été protégée par le droit d’auteur. Dans cette affaire, la question qui est soulevée est bien par rapport à la forme. La cour nous dit que c’est une œuvre de l’esprit, donc concrétisée dans une forme originale, pourtant cela pose plusieurs questionnements « la “ sonorité ”, elle est, certes, extérieure, mais... à quoi ? Elle est “ concrète ”, mais... par rapport à quoi ? Elle “ existe ”, mais... pour des interprétations musicales à venir ! »101.

100 Bernard Edelman, « La sonorité d’un orgue est une oeuvre de l’esprit » [1999] 5 Dalloz 81. 101 Ibid.

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Pour considérer la sonorité comme une forme, Bernard Edelman va créer sa propre définition et faire en sorte qu’elle fonctionne pour la sonorité. Ainsi, il nous explique « On serait en présence d'une organisation (l'accord des différents jeux de l'instrument) de signes (les sons eux-mêmes), en vue de produire un effet esthétique (l'utilisation de l'orgue par des organistes) »102.

Pourtant cette protection est contestable, à retenir la sonorité de l’orgue comme une œuvre de l’esprit et donc comme une forme, qu’en est-il des différents morceaux de musiques joués sur cet orgue. Chaque musique jouée sur cet instrument aura cette sonorité, la forme de ces morceaux de musiques n’est pas dans la sonorité de l’instrument, mais est sur les feuilles de partition. C’est ce que va expliquer Nadia Walravens « la sonorité d’un orgue ne peut selon nous être qualifiée d’œuvre de l’esprit, car la sonorité de l’orgue ne peut être comparée à une œuvre constituée de notes »103.

Cette protection est d’autant plus contestable, puisque comme le soulève Nadia Walravens, les fragrances de parfum ne sont toujours pas protégées par le droit d’auteur « dans les deux cas, la forme est immatérielle, mais dans le cas de l’orgue, on peut douter de la qualification d’œuvre de l’esprit, l’activité créatrice pouvant être réfutée, alors que s’agissant du parfum, elle est tout à fait envisageable »104.

En effet, on retrouve une différence entre les œuvres immatérielles, d’un côté on a des sonorités, ou encore un éclairage105, qui sont protégés, et de l’autre les fragrances de parfum qui ne le sont toujours pas. Le parfum est bien immatériel, mais comme la fixation de l’œuvre est indifférente cela ne devrait pas poser de problème. Mais qu’en est- il du critère de la forme perceptible par les sens ?

Dans un arrêt de 2006, la Cour de cassation énonce « la fragrance d'un parfum, qui procède de la simple mise en œuvre d'un savoir-faire, ne constitue pas au sens des textes précités, la création d'une forme d'expression pouvant bénéficier de la protection des œuvres de l'esprit par le droit d'auteur »106. La Cour de cassation associe alors les

102 Ibid.

103 Walravens, supra note 14 à la p 67. 104 Ibid à la p 68.

105 TGI Créteil, 3 mars 1998, Gaz. Pal., vendredi 31 juillet, samedi 1er août 1998, somm., p. 5-6.

106 Civ. 1re, 13 juin 2006, n° 02-44.718, Bull. civ. I, n° 307, p. 267; D. 2006. 2470, note

Edelman; ibid. 1741, obs. Daleau ; ibid. 2991, obs. Sirinelli ; RTD com. 2006. 587, obs. Pollaud- Dulian ; RIDA, oct. 2006, p. 342 et p. 203, obs. Sirinelli ; Gaz. Pal. 2006-2, p. 2555, avis Sainte- Rose et obs. Lesueur ; JCP 2006. II. 10138, avec obs. Pollaud-Dulian, RCJB 2007-1, p. 5, obs. Van Bunnen.

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parfums à un savoir-faire, qui, on le rappelle, n’est pas protégé par le droit d’auteur. Si c’est un savoir-faire, alors effectivement il ne peut pas y avoir de forme, donc il ne peut pas être une œuvre de l’esprit.

La Cour de cassation associe le parfum alors à une création industrielle, ce qui est contestable selon nous puisque ce n’est pas un simple savoir-faire. Un auteur peut créer un parfum, on peut retrouver l’empreinte de sa personnalité dans les senteurs qu’il va utiliser. L’originalité peut donc être présente dans un parfum. Et il y a bien une forme perceptible par les sens, celle-ci se traduisant par l’odeur, perceptible par l’odorat.

En commentant cet arrêt, Frédéric Pollaud-Dulian considère que lorsque l’on parle de perceptible par les sens, il n’est pas question des cinq sens, mais plus que « ces formes sont les instruments d'une communication : elles s'adressent non aux sens en eux-mêmes, mais à la sensibilité et à l'intelligence de l'homme. Elles servent à transmettre des idées et des émotions. C'est à l'humanité de l'être humain que l'œuvre s'adresse, pas à ses cinq sens, qui ne sont que des truchements pour accéder à la forme et à ce qu'elle véhicule »107. Il avance même l’argument comme quoi l’article L 112-2 ne contient, dans sa liste exhaustive, que des œuvres perceptibles par la vue ou le toucher.

Pourtant, admettons que la forme ne concerne pas les cinq sens, mais « la sensibilité et l’intelligence de l’homme », le parfum peut affecter ces critères-là, il peut affecter la sensibilité des individus. Quant à l’article L 112-2, ce n’est qu’une liste exhaustive. Pour nous, les arguments contre la protection du parfum sont contestables, et le parfum répond aux conditions pour pouvoir être protégé.

À partir de 2013, la Cour de cassation changera son argumentation et adoptera le critère de précision pour justifier l’absence de protection108. Cette nouvelle solution, qui sera étudiée par la suite, semble en tout plus correcte et offre une vraie justification pour la non protection des parfums en droit d’auteur.

Dans la même idée, on retrouve la question de la protection des saveurs. La protection est refusée sur le même genre de raisons, le fait qu’il y ait une instabilité alimentaire, que les goûts sont différents pour tout le monde etc. Pourtant récemment, la

107 Frédéric Pollaud-Dulian, « Droit d’auteur - Oeuvres protégées - Oeuvre de l’esprit - Création

de forme - Parfum - Concurrence déloyale » [2014] 1 RTD com 103.

108 Cass. Com., 10 déc. 2013, n° 11-19.872, F-D, Lancôme, Modefine et Prestige collection

international c/ P. Farque, D. 2014. 8 ; PIBD 2014, n° 999. III. 113 ; P.I., janv. 2014, p. 51, obs.

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question a été posée devant la Cour de justice de l’Union européenne. En l’espèce, une société produisait un fromage qu’une société concurrente aurait contrefait selon elle. La justice néerlandaise posa alors une série questions préjudicielles à la Cour pour qu’elle se prononce sur la question109.

Mais l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne se prononça sur la question et estima que la protection d’une saveur n’était pas possible110. La Cour doit encore rendre son arrêt, mais il y a peu de chance que la solution change.

On retrouve également comme œuvre qui questionne la notion de forme toutes les œuvres issues de l’informatique, comme les logiciels et les bases de données. Cette remise en question de la forme est d’autant plus vraie que pour être protégées, ces œuvres-là bénéficient d’un droit spécial. Droit spécial qui permet finalement la protection de données111.

Les logiciels sont rentrés dans la protection du droit d’auteur par une loi de 1985112 puis par une directive européenne de 1991, qui ont toutes deux créé ce droit spécial. Mais la création d’un droit spécial n’empêche pas le fait qu’il faut répondre aux conditions d’accès à la protection et il a fallu trouver une forme pour ces œuvres. La forme serait alors constituée de deux séquences « le “ code-source ”, préparation de l’opération en langage clair et le “ code-objet ”, instructions proprement dites, adressées en langage codé (chiffré) à la machine »113.

Ainsi, ce n’est pas la forme exécutée qui protégée, c’est-à-dire ce que l’on va voir sur l’ordinateur, mais bien la forme exécutable114. Ce qui va être contraire à ce que doit remplir la condition de forme. En effet, on l’a vu, la forme doit être perceptible par les sens, or ce qui est perceptible par les sens ici c’est bien la forme exécutée, le visuel de

109Marc Rees, « La justice européenne dira si les saveurs peuvent être protégées par le droit

d’auteur » (20 juillet 2018), en ligne : <https://www.nextinpact.com/news/106243-la-justice- europeenne-dira-si-saveurs-peuvent-etre-protegees-par-droit-dauteur.htm> (consulté le 30 juillet 2018).

110Marc Rees, « Pas de droit d’auteur sur la saveur d’un aliment, selon l’avocat général (CJUE) »

(25 juillet 2018), en ligne : <https://www.nextinpact.com/news/106897-pas-droit-dauteur-sur- saveur-dun-aliment-selon-lavocat-general-cjue.htm> (consulté le 30 juillet 2018).

111 Bensamoun, supra note 13.

112L. n° 85-660 du 3 juillet 1985 relative aux droits d'auteur et aux droits des artistes-interprètes,

des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et des entreprises de communication audiovisuelle.

113 Gautier, supra note 11 à la p 130. 114 Bensamoun, supra note 13.

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l’ordinateur et non les codes qui servent d’instructions à la machine. Pourtant un jugement n’a pas hésité à dire qu’ils étaient bien perceptibles par les sens « si les programmes d’ordinateur ne sont pas immédiatement perceptibles par les sens de tout un chacun comme le sont les œuvres littéraires ou plastiques, ils sont néanmoins accessibles et intelligibles grâce à leur transcription sur divers supports matériels »115.

La décision a en plus ajouté que même si la lecture des codes n’est pas accessible à tout le monde, cela ne les différencie pas des partitions de musiques qui elles aussi nécessitent un apprentissage particulier pour être capable de les lire. Mais cette comparaison est contestée par André Lucas, Henri-Jacques Lucas et Agnès Lucas- Schloetter qui expliquent que même si le solfège est effectivement difficile d’accès, l’œuvre musicale est pour l’auditeur contrairement au code qui va être seulement adressé à la machine « la vérité est que l’exécution du programme en machine n’a aucunement pour finalité d’en communiquer le contenu à autrui »116. Alors qu’on le sait, la communication au public est un élément essentiel en droit d’auteur.

On le voit bien, il y a une réelle création d’un droit spécial pour les logiciels qui va tordre les notions établies pour accéder à la protection par le droit d’auteur. La notion de forme en est profondément chamboulée. Plus que ça même, la définition de l’originalité va être modifiée par l’arrêt Pachot qui va la définir comme la marque d’un apport personnel117.

La même chose va pouvoir être constatée pour les bases de données qui par une directive de 1996118 se sont vu également reconnaître la protection par le droit d’auteur.

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