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Chapitre I : Généralités sur les siliciures

III.1. Formation des siliciures de nickel

- Diagramme de phase Ni-Si

La figure 11 présente le diagramme d’équilibre des phases du système binaire Ni-Si réalisé par Nash et al36. Ce diagramme nous renseigne sur les composés qui se forment entre le nickel et le silicium. Lorsque nous regardons l’évolution des composés intermétalliques en fonction de la température, le diagramme est assez complexe. Dans cette partie, nous ne détaillerons pas tous les points du diagramme d’équilibre Ni-Si. Par contre, nous présentons dans le tableau 1 les différentes phases qui se forment à une température inférieure à 800°C et leurs structures cristallines. En effet, nos études concernent la formation des siliciures en films minces à basse température et plus particulièrement à des températures inférieures à 700°C.

Figure 11 : Diagramme d’équilibre de phases du système binaire nickel-silicium36

A partir du diagramme de phase (Figure 11) et à une température de 700°C, la solubilité limite du nickel dans le silicium est de l’ordre de 0.03%, par contre la solubilité limite du silicium dans le nickel est importante, de l’ordre de 10%.

Nous constatons que ce diagramme compte de nombreux composés intermétalliques riches en nickel mais un seul siliciure riche en silicium. Les principales caractéristiques cristallographiques de chaque phase sont résumées dans le Tableau 1:

Composé Température

Tableau 1 : Données cristallographiques de tous les siliciures de nickel.

- Films minces de siliciures de Ni

Le diagramme d’équilibre du système Ni-Si montre qu’il existe plusieurs siliciures de nickel. Les nombreuses études réalisées sur la réaction des films minces de nickel avec le silicium, ont apporté beaucoup de connaissances sur les mécanismes de formation des siliciures, notamment sur la formation séquentielle des siliciures de nickel. Seuls Ni2Si, NiSi et NiSi2 ont été observés lors de la réaction entre un film mince de nickel et le silicium37,38 jusqu’à ce que de récentes études mettent en évidence l’apparition de phases transitoires comme Ni3Si239

etNi31Si1240

.

Tu, Chu et Mayer41 et Olowolafe, Nicolet et Mayer42 ont montré que Ni2Si est la première phase cristalline qui se forme entre un film de nickel polycristallin de 100 nm d’épaisseur et un substrat de silicium. En effet, le gain d’énergie pour former Ni2Si est le plus important. Ils ont montré aussi que la séquence de formation des siliciures de nickel se poursuit par la formation de la phase NiSi et enfin se termine par NiSi2. Cette formation séquentielle peut être expliquée par un modèle de germination11. Une autre explication a été proposée dans le contexte de la germination dans un gradient de concentration43. D’autre part, la formation séquentielle des phases est aussi la conséquence d’une instabilité cinétique9 due à une compétition entre les vitesses de réaction aux interfaces et la diffusion dans les phases en croissance : la cinétique de formation de la phase Ni2Si semble être la plus rapide.

Clevenger et al44 et Knauth et al45 ont montré que lors de la réalisation de bicouches ou de multicouches de nickel et de silicium amorphe, une phase amorphe NiSi approximativement

de 4 nm d’épaisseur se forme aux interfaces Ni/Si. Ensuite les phases cristallines Ni2Si, NiSi et NiSi2 se forment successivement en température. Dans ce cas, la formation préliminaire d’un siliciure amorphe a été expliquée par la présence d’une barrière de germination pour la phase cristalline Ni2Si44 à température ambiante. La phase NiSi amorphe continue à croitre simultanément avec Ni2Si jusqu’à la consommation complète du nickel.

Le schéma ci-dessous (figure 12) montre ce mode de formation des siliciures de nickel lors de la réaction d’un film de nickel avec le silicium amorphe.

Figure 12 : Schéma des mécanismes de formation des phases lors de la réaction d’un film de nickel polycristallin avec du silicium amorphe.

La cinétique de formation des siliciures de nickel a été aussi largement étudiée.

L’évolution de l’épaisseur de chaque phase en fonction de temps permet de déterminer les phénomènes qui contrôlent leur formation. La mesure de cinétique lors la réaction d’un film de nickel avec un substrat de silicium a été mesurée principalement par RBS46. Il a d’abord été montré que la phase NiSi a une croissance linéaire47 lors de réaction d’un film de nickel avec un substrat de silicium orienté (001) ou (111) avec une énergie d’activation de 1.4±0.1eV. Quelques années plus tard, plusieurs auteurs ont observé toujours dans le cas d’un substrat de silicium monocristallin que les phases Ni2Si et NiSi ont une croissance parabolique, autrement dit, que leur formation est contrôlée par la diffusion. Nous avons vu précédemment que la formation des intermétalliques par réaction à l’état solide nécessite un transport de la matière. Plusieurs expériences, soit par des marqueurs radioactifs ou par

implantation des gaz rares jouant le rôle de marqueur de Kirkendal, ont montré que l’espèce diffusant majoritairement est le nickel lors de la formation de Ni2Si48,49, NiSi50 et NiSi251

. Le Tableau 2 récapitule le domaine de température d’étude, la nature du substrat utilisé ainsi que le facteur pré-exponentiel et l’énergie d’activation correspondante, trouvés dans la littérature.

Tableau 2 : Données cinétiques des formations de Ni2Si, NiSi et NiSi2 contrôlées par la diffusion du Ni.

Lors de la réaction d’un film de nickel avec le silicium amorphe dans le cadre de la réaction des multicouches, la cinétique de formation des siliciures de nickel a été mesurée principalement par la calorimétrie différentielle à balayage. Certains auteurs confirment une cinétique de formation de Ni2Si contrôlée par la diffusion45 mais d’autres auteurs ont montré que la cinétique de formation de Ni2Si est en premier lieu limitée par la germination12,44. Récemment, Nemouchi et al21 ont montré que la phase Ni2Si a une croissance linéaire-parabolique (contrôlée par la diffusion et la réaction) grâce à des mesures de DSC lors de la réaction d’un film de nickel avec le silicium amorphe.

Une particularité de la phase NiSi est une très forte anisotropie des coefficients de dilatation thermique liée à l’anisotropie de sa structure cristalline (orthorhombique). Des

mesures de dilatation thermique sur les couches minces57 montrent que le paramètre de maille suivant l’axe (b) du cristal se contracte au cours du chauffage tandis que les deux autres paramètres suivant (a) et (c) augmentent. Ces grandes variations de coefficient de dilatation thermique avec l'orientation cristalline sont d’autant plus critiques pour l’intégration de NiSi du fait que la taille des contacts devient toujours plus petite. Ainsi, dans un contact, le monosiliciure va se comporter différemment selon les orientations des grains qui le composent.

D’autre part, il a été montré que la phase NiSi s’oriente selon un nouveau type de texture appelé axiotaxie58 sur le substrat de silicium monocristallin. Cette texture « axiotaxie » se produit lorsque des plans atomiques dans les grains de NiSi sont alignés préférentiellement de façon à ce qu’une distance interréticulaire d de la phase NiSi coïncide avec la distance interréticulaire du substrat de silicium. L’axiotaxie conduit à une périodicité le long d’une direction dans le plan d’interface, soit une interface périodique à 1D, pouvant être considérée comme un cas intermédiaire entre une interface aléatoire (pas de périodicité) et l’épitaxie (interface périodique à 2D). La présence d’une axiotaxie entre NiSi et le silicium a pour conséquence une plus forte agglomération de la phase NiSi à haute température sur Si(100), ce qui est à éviter pour réaliser des contacts électriques.

De récentes études59,60,40 ,61

ont montré la formation d’une phase supplémentaire, la phase Ni3Si2. Cette phaseapparaît et disparaît très rapidement au cours de la réaction d’un film de nickel avec un substrat de silicium (100). C’est pourquoi elle est considérée comme

« éphémère ». Cependant, les observations diffèrent suivant les auteurs à propos du stade de la formation de cette phase transitoire. Lavoie et al60,40 ont observé sa formation après la formation complète de Ni2Si et avant que NiSi ne commence à se former. Par contre, Gergaud et al59,39 l’observent avant la formation complète de Ni2Si et voient sa consommation au cours de la formation de NiSi. La température de formation de cette phase Ni3Si2 ne dépend pas de l’épaisseur de la couche de nickel et sa morphologie n’est pas uniforme latéralement61. La phase Ni3Si2 présente des fronts dans la couche homogène de Ni2Si, qui ont été expliqués par la germination de Ni3Si2. La cinétique de formation en film mince de cette phase est linaire avec le temps61.

Le schéma ci-dessous montre la forme de croissance de la phase Ni3Si2 décrite par Lavoie et al61 :

Figure 13 : Schéma de formation de la phase Ni3Si261

Des observations similaires ont été obtenues par Gas el al62 lors des mesures de MET et de RBS que la formation de la phase Ni3Si2 est contrôlée par la germination dans des bicouches Ni2Si/NiSi.

Enfin, la formation de la phase NiSi256,11

est contrôlée par la germination lors de la réaction d’un film de nickel avec un substrat de silicium. Lorsque le substrat de silicium est cristallin, la formation a lieu à haute température. En revanche, dans le cas du silicium amorphe, elle a lieu à basse température. La force motrice de la formation de NiSi2 est plus grande lorsque le substrat est amorphe que lorsqu’il est cristallin. Ceci est lié à la différence d’énergie de Gibbs entre le silicium amorphe et le silicium cristallin.