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PARTIE III. ANTHROPOMETRIE ET RISQUE DE TUMEURS COLORECTALES

4. D ISCUSSION

4.7. Forces et limites de l’étude

Les forces de notre étude reposent sur son caractère prospectif, sa large population, un suivi assez long avec une mise à jour tous les deux ans de l’état de santé et des expositions, permettant un ajustement sur de multiples facteurs.

Pour les analyses sur les adénomes, nous avons exclu les participantes ayant un adénome ou un cancer prévalent, un polype hyperplasique ou de nature indéterminé prévalent ou incident

pour plusieurs raisons : la possibilité d’un changement des habitudes alimentaires ou de mode de vie après un premier diagnostic de tumeurs, une moins grande assurance dans la qualité et l’homogénéité des comptes-rendus histologiques anciens que récents, et une probable différence d’étiologie entre les adénomes incidents et les adénomes récurrents. De plus, nous avons limité les biais de classement non différentiels en confirmant par comptes-rendus histologiques tous les cas ainsi que par l’inclusion de patients n’ayant jamais eu de polype comme non-cas. Enfin, grâce à l’obtention des comptes-rendus histologiques et de coloscopie, nous disposions d’informations détaillées nous permettant d’effectuer les analyses par sous-groupes. En ce qui concerne les cancers, nous avons validé 97% des cas inclus dans les analyses, permettant aussi d’effectuer les analyses par sous-groupes.

Cependant, notre étude comporte plusieurs limites. Tout d’abord, concernant les adénomes, comme dans la grande majorité des études de la littérature, nous avons étudié le diagnostic du premier adénome plutôt que l’incidence en elle-même. En effet, les adénomes étant généralement asymptomatiques, la formation de ces derniers peut avoir lieu plusieurs années avant leur diagnostic. Pour éviter ce problème, il serait nécessaire de disposer d’une large population ayant bénéficié d’une coloscopie complète normale à l’inclusion, suivie par la suite régulièrement par coloscopies. Ainsi, l’étude de l’incidence des adénomes parait difficilement réalisable.

Afin d’éviter un biais de classement, nous avons restreint notre population pour les analyses sur les adénomes aux femmes ayant déclaré au moins une fois une coloscopie durant le suivi. Une étude de validation a montré que l’auto-déclaration des coloscopies était fiable (Partie II : 2.3.). Nous avons comparé les caractéristiques des participantes incluses pour les analyses sur les adénomes à celles des autres participantes d’E3N âgées de plus de 50 ans, mais n’ayant jamais bénéficié d’une coloscopie. Toutes les caractéristiques étaient similaires, sauf les antécédents de cancer colorectal au premier degré qui étaient beaucoup plus fréquents dans notre population d’analyses sur les adénomes que dans le reste de la cohorte. D’autre part, la fin de suivi pour l’étude sur les adénomes était antérieure à la mise en place du dépistage organisé. Ainsi les indications pour coloscopie complète avant la mise en place du dépistage et donc au moment de l’étude sur les adénomes correspondaient surtout aux douleurs abdominales ou aux antécédents familiaux de cancer colorectal.

Le ratio cas / non-cas de 8,8 dans notre population est plus faible que celui observé dans d’autres populations (13,5 dans une population allemande (42) et 22,1 dans une étude

française évaluant l’efficacité de la phase pilote du dépistage organisé (274)), mais il est cohérent avec les résultats d’une étude suggérant que les coloscopies réalisées sur indications de symptômes digestifs ont une efficacité assez faible en termes de détection de tumeurs (275).

Le niveau d’éducation élevé des femmes incluses dans la cohorte pourrait donner lieu à un recours à des consultations en gastroentérologie et à une prescription de coloscopies pour des symptômes mineurs plus fréquents que dans la population générale. Nos résultats ne sont donc pas directement extrapolables à la population générale.

Une autre limite importante tient dans l’auto-déclaration des variables anthropométriques étudiées. Comme déjà présenté (Partie II : 2.1.), une étude de validation a été menée sur un échantillon de femmes de la cohorte et la majorité des variables utilisées peuvent être considérées comme fiables (247). Pour les variables de naissance, nous n’avons pas pu mener d’étude de validation dans notre propre population, mais la concordance entre des valeurs auto-rapportées et des données des registres a été jugée correcte chez des femmes blanches américaines avec un niveau d’éducation élevé (248). En ce qui concerne les variables de prise de poids ou de fluctuations de poids moyennes annuelles, nous n’avons pu considérer que des changements effectués sur une période de temps assez longue puisque nous ne disposions des actualisations du poids qu’à chaque questionnaire, soit environ tous les 2 à 3 ans. Ainsi, nous n’avons pas pu prendre en compte des variations saisonnières (par exemple les régimes à l’approche de l’été), et il est possible que les associations observées avec les fluctuations de poids soient sous-estimées. Enfin, concernant les silhouettes aux différents âges, leur utilisation a été validée pour l’âge adulte (247), ce qui n’a pas été possible pour les mesures dans l’enfance. Cependant, il semble que le recueil rétrospectif, vers 50 ans, d’une silhouette que l’on pouvait avoir à 8 ans serait plus facile que le recueil d’un poids et d’une taille précis. Enfin, nous avons effectué un grand nombre de tests statistiques, il n’est donc pas à exclure que certaines associations observées soient dues au hasard, et nos résultats sur les facteurs anthropométriques dans l’enfance notamment, devront donc être confirmés par d’autres études