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14 — La forêt de Finfonds

Éliandre avait quitté le défilé des Tréfonds et chevauchait dans la forêt depuis le milieu du matin, lorsqu’il perçut un son incongru en ce lieu. Il lui semblait entendre tinter l’acier à un endroit, où le chant des oiseaux constituait le seul bruit habituel. Il pressa son cheval en tendant l’oreille.

À quelque distance, il distingua clairement le tumulte d’une bataille et à un détour du chemin, il découvrit un homme qui en affrontait deux autres. Un troisième gisait au sol, le crâne fendu. Le défendeur semblait en difficulté, car il s’opposait à deux redoutables bretteurs.

Il intervint :

— Holà ! Braves gens, quelle affaire ?

— Ne vous mêlez pas de ça, répondit un des deux agresseurs sur un ton méprisant qui irrita Éliandre.

— Ah çà ! Monsieur, dussé-je le tuer moi-même ensuite s’il le mérite, je ne vous laisserai pas massacrer un homme, à deux contre un !

Ce disant, il avait sauté de cheval et s’avançait vers les bellicistes. Sans autre avertissement, un des deux agresseurs se retourna et l’attaqua latéralement d’un coup d’épée qui l’aurait pourfendu s’il ne l’avait esquivé en se courbant pour passer sous la lame. Son assaillant, emporté par son élan, entama un tour sur lui-même, dont Éliandre profita pour dégainer son épée et dans le même mouvement, frapper dans le côté droit ainsi offert.

La pointe de l’arme de carbonace se fraya sans difficulté un chemin dans les côtes flottantes de l’homme, tranchant sur son passage le vêtement, la chair, les os, les organes et le fil de sa vie. Le cri d’agonie de celui-ci troubla une fraction de seconde l’attention de son compère. Bérulon s’engouffra dans la brèche et l’estoqua proprement. Il se retourna et se retrouva avec une lame sur la gorge.

Éliandre, accoutumé au commandement d’hommes beaucoup plus jeunes, avait conservé les automatismes acquis durant sa vie militaire. Il le tutoya par habitude :

— Maintenant, les explications s’il te plaît.

Bérulon avait reconnu le style et la technique des gardes du palais. Il hasarda : — Est-ce que j’ai l’honneur de me trouver en présence du capitaine Éliandre ?

— Éliandre tout court, mon garçon. Les officiers abandonnent leur grade à la caserne lorsqu’ils la quittent. Comment te nommes-tu ?

— Le roi Gauddis m’a pourtant certifié le contraire. Je m’appelle Bérulon. À ces mots, Éliandre abaissa son arme :

— C’est lui qui t’a envoyé ici ?

Bérulon répondit par l’affirmative, lui rapporta, par le menu, les circonstances qui l’avaient amené là et tout ce que le roi lui avait confié. Pour finir, il ajouta :

— La vieille mule du palais requiert votre présence.

Ces mots firent naître un sourire sur les lèvres d’Éliandre. Il avait acquis la certitude, à présent que son compagnon venait bien de la part du roi. Nul autre que lui, ne pouvait connaître cette expression, qu’il lui avait assénée au cours d’une discussion privée, à propos d’une décision que Gauddis voulait irrévocable. Il désigna les cadavres de leurs adversaires :

— Et ces trois-là ?

— Ho ! Certainement des hommes sans ombre. Ils me suivaient depuis Brunnen. Je croyais les avoir semés, mais ils sont… plutôt ils étaient entêtés et ils m’ont rejoint ici.

— Qu’est-ce qu’ils te voulaient ?

— Je suppose qu’ils désiraient connaître le véritable but de mon voyage. Maintenant que je vous ai trouvé, mes ordres stipulent que je dois m’attacher à vos pas. Par quelle route retournerons-nous à Vadonia ?

— Nous ne rentrerons pas à Vadonia, pas encore. Si tu m’as rencontré ici, c’est parce que je rebroussais chemin…, il lui expliqua pourquoi en lui racontant son rêve, je parierais que Gauddis requiert ma présence, pour m’envoyer à la recherche du veilleur en Finfonds. Or, à quoi bon rentrer à Vadonia si c’est pour revenir ici ensuite ? Celui que je dois joindre m’a indiqué ce que je devrai… ce que nous devrons chercher pour l’atteindre, car si je t’ai bien compris, tu ne me quittes plus.

— Ce sont mes ordres. Dans ma situation, le roi m’a affirmé que vous constitueriez mon sauf-conduit vis-à-vis du guet.

— D’accord. Pour trouver le veilleur, nous devons découvrir l’épée gravée à la base du roc. Pour cela, nous sommes tenus de savoir où la chercher et je ne connais qu’une seule personne qui ait une chance de pouvoir nous renseigner.

— Et où la rencontrerons-nous ?

— Loin dans les montagnes, au sud de Selva-la-verte.

— Holà ! Cela va nous obliger à repasser par Brunnen ! Un fameux détour en perspective. — Ce ne sera pas nécessaire, je connais tous les sentiers, qui courent sous bois, d’ici à

Selva. Ça nous évitera le crochet par les agglomérations pour rejoindre sa demeure et ce sera plus rapide. J’espère seulement l’y trouver, sans quoi nous devrons aller le chercher en forêt.

— Et eux, qu’est-ce qu’ils deviennent ? demanda Bérulon en désignant les cadavres de ses agresseurs.

— Nous manquons de temps pour les enterrer et rien de pire ne peut leur arriver.

Ils tirèrent malgré tout, les corps hors du chemin et les recouvrirent de feuilles et de branchages.

— À l’occasion, nous enverrons quelqu’un qui s’occupera d’eux, si les loups ne les trouvent pas avant, ajouta Éliandre.

Ils enfourchèrent leurs chevaux et à travers la forêt, se dirigèrent vers l’ouest. Éliandre allait devant. Il avait confié les rênes de ses bêtes de charge à Bérulon, qui suivait en veillant à ne rien perdre. Ils chevauchèrent sous les frondaisons, dans la lumière tamisée de la forêt, gravirent les Monts-du-milieu et s’engagèrent sur les crêtes vers le sud, jusqu’aux premières pentes du massif des fontaines. Là, ils reprirent vers l’ouest par de bons sentiers, qu’Éliandre semblait connaître à la perfection, et ils progressèrent rapidement. Les deux hommes parlaient peu. De temps à autre, cependant, lorsque le chemin leur permettait d’aller de front, ils s’interrogeaient mutuellement, chacun cherchant à mieux connaître l’autre.

— Quel âge as-tu, Bérulon ?

— J’ai eu vingt-cinq ans le mois dernier. Et vous ? — Moi, j’approche de la soixantaine.

Pour les Vadons, la longévité moyenne s’étendait sur une centaine d’années. — Vous n’en avez pas l’air. Je vous en aurai donné à peine cinquante. — Tu cherches à me flatter !

— Pas du tout, je parle avec sincérité. J’ai l’habitude de dire les choses comme je les ressens.

Éliandre le dévisagea. Il avait commandé longtemps à de jeunes hommes comme lui et savait reconnaître la flagornerie. Il dut admettre que celui-ci n’en usait pas. Il reprit :

— Es-tu lié à une amie ou une fiancée ?

— Aucunement, du moins, rien de sérieux. Seulement des aventures. Et vous, une femme, des enfants ?

Éliandre se rembrunit quelque peu et marqua un temps pour répondre : — Non… personne.

— J’ai pourtant rencontré une jeune fille qu’apparemment, vous ne laissez pas indifférente.

— Je suppose que tu parles de Sylvena, la serveuse de l’auberge du chêne et du charme ? — Elle-même.

— Chère Sylvena, je l’ai débarrassée deux ou trois fois de clients trop entreprenants et depuis elle se croit amoureuse, mais elle pourrait être ma petite fille. J’apprécie sa gentillesse. Mais ce qui nous lie ne dépassera jamais le stade d’une amitié profonde, même si elle me reste très chère.

— Voilà qui me met du baume au cœur. Je craignais de piétiner vos platebandes.

— Eh bien ! La rivalité ne nous opposera pas, si c’est cela qui te tracasse. Seulement, prends garde si tu t’approches d’elle. Choisis bien tes mots, car sa langue est très acérée envers ceux qu’elle soupçonne de la considérer comme ce qu’elle se refuse à paraître.

— Je m’en suis déjà aperçu et j’ai dû mettre les points sur les I.

Ils rirent tous les deux, détendus. Ils commençaient à s’apprécier mutuellement. Cependant, le sentier se rétrécissait. Ils durent se replacer en file indienne, ce qui suspendit leur causerie.

Le voyage se déroulait sans autre interruption que les courtes périodes de repos qu’ils s’accordaient régulièrement pour se restaurer et ménager leurs forces et celles de leurs montures.

La piste qu’ils suivaient les amena dans une vaste clairière dont une chaumière occupait le centre. Elle était cernée d’appentis ouverts sur les côtés, sous lesquels du bois stocké séchait. Quelques pintades, poules et dindons picoraient alentour, sous la garde vigilante de deux grands chiens qui aboyèrent, aussitôt qu’ils aperçurent les deux arrivants.

Alertée, une vieille femme, voûtée par les années, parut sur le pas de la porte. Elle se déplaçait lentement en s’appuyant sur un bâton. Son vêtement, de toile grossière, descendait jusque sur ses pieds enfouis dans des sabots de bois qu’elle avait garnis de foin, pour en améliorer le confort.

Elle les regarda venir sans crainte, en peignant maladroitement ses longs cheveux blancs avec ses doigts. Quand ils se furent rapprochés suffisamment, son visage s’éclaira d’un sourire. Elle avait reconnu un des deux visiteurs et avança de quelques pas vers lui en tendant les bras pour l’embrasser :

— Éliandre ! Cher Éliandre ! Quel bonheur de te revoir ! lui dit-elle en l’étreignant. — C’est une joie pour moi également, Madame Sherwood.

— Venez, entrez, vous me présenterez votre jeune compagnon !

— Hélas ! Mère Sherwood, nous manquons de temps. Nous nous serions fait un plaisir de rester bavarder avec vous, mais c’est votre fils que nous voulions rencontrer. Savez-vous où

nous pourrions le trouver ?

— Il s’est rendu aux sources de la Fontanne, avec son équipe. Il est parti… il y a cinq jours. Il semblait très pressé, car il y est allé seul et les autres ne l’ont suivi que le lendemain.

— Je vous remercie, mère Sherwood. Je suis désolé de vous abandonner comme ça, mais nous devons absolument le rejoindre rapidement.

La joie de la vieille femme se changea soudain en crainte. Elle s’inquiéta : — Pourquoi ? Que lui voulez-vous ? Ce n’est pas pour du mal ?

— Nullement, non, rassurez-vous. Simplement, pour le service du roi, nous avons besoin d’une information qu’il doit être le seul à pouvoir nous donner.

— Ah ! Alors, si c’est comme ça, allez ! Et que l’esprit de la forêt vous garde ! Mais revenez me voir un de ces jours ! J’aurai plaisir à connaître ce jeune homme, conclut-elle en désignant Bérulon qui n’avait pas ouvert la bouche.

— C’est promis, mère Sherwood. J’apporterai la provende et nous ferons bombance. Mais, encore une chose… Puis-je laisser mes chevaux de charge dans votre écurie ?

— Oui, bien sûr.

— Je vous remercie. Je vous dédommagerai lorsque je viendrai les récupérer. — Ce ne sera pas nécessaire, mon cher Éliandre. Je peux rendre service à un ami. — Je sais, mère Sherwood, mais mon absence risque de durer, alors j’y tiens. — Comme tu voudras.

Il réfléchit deux secondes et reprit :

— Si je ne revenais pas, ils vous appartiendraient de plein droit.

— Ne dis donc pas de bêtise et fais attention à toi ! Et toi aussi jeune homme, ajouta-t-elle à l’adresse de Bérulon. Allez ! Et que les esprits vous gardent.

Pour gagner, au plus court, les sources de la Fontanne, ils devaient s’enfoncer profondément dans la forêt de Finfonds, vers le sud-ouest. Parvenus au bord de la rivière, ils devraient encore en remonter le cours, tout au long d’une vallée qui s’encastrait loin, dans le massif des fontaines. Ils se remirent en route sans perdre plus de temps.

Après une chevauchée longue et pénible, car les sentiers se révélaient difficiles, ils trouvèrent les bûcherons au travail sur une pente assez raide, parmi des ifs d’une rectitude rare pour cette essence. Éliandre s’avança et s’adressa à celui qui commandait :

— Je te salue maître Sherwood ! Comment vas-tu ?

— Éliandre, mon ami, quel plaisir de te revoir ! Comment as-tu su où me chercher ? — Je suis passé par chez toi et j’ai parlé à ta mère.

me cause du souci de la laisser seule, maintenant.

— Je l’ai trouvé en pleine forme, mais tu devrais embaucher quelqu’un pour lui tenir compagnie ou te dégoter une gentille femme et la marier.

— J’y pense de plus en plus souvent, mais je crois que je vais devoir m’y résoudre.

— Ce serait bien pour elle… et pour toi. Dis-moi ! Nous courons la campagne depuis pas mal de temps, et n’avons rencontré personne. Quelles nouvelles as-tu apprises ces derniers temps ?

Le visage de Sherwood s’assombrit. C’était un homme simple qui ne comprenait pas grand-chose à la politique et ne s’y intéressait d’ailleurs pas. Son métier et la forêt où il le pratiquait constituaient tout ce qui comptait pour lui. Il y était né, y avait grandi et y mourrait vraisemblablement. Il lui vouait un amour si profond que chaque fois qu’il devait la quitter, c’était avec déchirement qu’il s’en allait. Aussi longtemps que durait l’éloignement, il languissait de la rejoindre et c’était toujours avec un immense bonheur qu’il la retrouvait. Nombre de femmes voudraient pouvoir en dire autant de leurs maris.

— Les nouvelles ? Rien de bien bon, je le crains. Si j’en juge par la commande, que l’on m’a adressée, de bois d’arcs et de flèches, la guerre éclaterait quelque part, un de ces jours, que je n’en serai pas autrement surpris.

— Qui t’a transmis cette commande ?

Sherwood regarda Bérulon, saisit Éliandre par le bras, l’entraîna à l’écart et parla à voix basse :

— Me croiras-tu si je te dis que c’est un rêve ?

— Oui, mon ami, car si je suis venu ici, c’est également à cause d’un songe.

— Alors, tu me rassures. Je commençais à me demander si je ne devenais pas un peu fou. Tu sais ce qui se trame ?

— Vraisemblablement, une monstruosité que l’on croyait disparue depuis de nombreux siècles est réapparue et elle représente un danger important pour notre nation, mais aussi pour toutes les autres.

— Alors, c’est grave.

— Ça l’est assez pour justifier que, Gauddis d’abord, moi ensuite et toi, pour finir, ayons reçu la visite dans notre sommeil de ce vieillard qui se fait appeler le veilleur.

— Et lui, qui est-ce ?

En parlant, il s’était légèrement décalé pour observer Bérulon par-dessus l’épaule d’Éliandre. Celui-ci avait suivi son regard. Il désigna Bérulon, du menton :

semble bénéficier des faveurs de Gauddis.

Sherwood s’avança et tendit la dextre à Bérulon : — Bienvenue en forêt de Finfonds, ami du roi !

Bérulon serra la main offerte et Sherwood, s’adressant de nouveau à Éliandre, enchaîna : — Qu’est-ce qui vous amène aussi loin dans mon domaine ?

— Juste la question suivante, mon cher : connais-tu l’endroit, où la sylve rejoint la montagne, au pied d’une haute falaise absolument lisse, à la base de laquelle une épée est gravée dans la roche ?

Sherwood, qui savait sa forêt comme un musicien chacune des notes de son œuvre, lui indiqua le plus court chemin et interrogea :

— Qu’allez-vous chercher par là-bas, si ce n’est trop vous demander ?

— Crois-le ou non, mais je l’ignore. Tout ce qui compte, c’est que le roi m’ait commandé d’y aller et je pense qu’il doit avoir de bonnes raisons.

— En tout cas, prudence ! Si le chemin que je vous ai indiqué s’avère le plus court, il ne se révèle pas le plus facile.

Éliandre le remercia et après maintes formules d’amitié et de souhaits d’au revoir, ils reprirent leur voyage.

Suivant les explications de Sherwood, ils escaladèrent le flanc de la vallée où ils s’étaient enfoncés. Puis ils franchirent un petit col en tenant leurs chevaux par la bride, car le sentier bordait un abîme profond. Enfin, ils descendirent de l’autre côté, jusqu’à rencontrer un torrent qui venait des neiges éternelles en cascadant. Ils suivirent la piste qui le longeait, vers l’amont.

Aux abords des chutes d’eau, les embruns saturaient l’air d’humidité, générant un brouillard artificiel, dans lequel les rayons du soleil créaient des arcs-en-ciel miniatures. Le fracas des flots, qui bondissaient de rocher en rocher, emplissait les alentours d’un grondement continu. Ils parcoururent huit bons kilomètres le long du ruisseau et leurs oreilles bourdonnèrent longtemps de ce bruit, alors qu’ils s’éloignaient après l’avoir traversé.

La forêt s’élevait maintenant sur les pentes de la montagne et l’étagement des essences témoignait du changement d’altitude. Ils avaient déjà laissé loin derrière eux la limite des feuillus et cheminaient sous des épicéas centenaires, lorsqu’ils arrivèrent au pied d’une immense muraille de roche bleue, lisse comme la surface d’un lac, un jour sans vent.

L’un, vers la droite, l’autre vers la gauche, ils entreprirent la recherche de l’épée gravée à sa base. Ce fut Bérulon qui la découvrit, en un lieu, où la forêt avait cédé la place à un parterre de gazon qui venait jusqu’au pied du rocher.

Ça correspondait exactement à l’endroit que le veilleur avait montré à Éliandre quand il l’avait visité durant son sommeil. Ils laissèrent leurs montures pâturer dans la clairière et s’avancèrent vers l’épée. Éliandre imita le geste dont il avait rêvé, et frappa la paroi à trois reprises avec une pierre. Rien ne bougea. Alors qu’il s’apprêtait à recommencer, un grondement naquit dans le sein même du rocher. Les contours d’une énorme bouche se dessinèrent sur la muraille au-dessus de l’épée. Lentement, elle articula, d’une voix grave, profonde et caverneuse, qui traînait sur les mots, comme si elle s’échauffait après un long silence :

— Qui… ose… troubler… la… quiétude… de… ce… lieu ? — Je suis Éliandre, celui qui a rêvé.

Sur le même ton et avec une lenteur égale, la voix reprit :

— Introduisez votre épée dans la fente qui sert de garde à celle gravée. Mais, attention ! Si elle ne s’avère pas adéquate, vous serez anéantis.

Cet avertissement menaçant effraya Bérulon qui s’inquiéta :

— Comment savoir si nos lames sont appropriées ou non ? Et conforme à quoi ? — À part une arme en carbonace, je ne vois pas à quoi il pourrait faire allusion. — Dans ce cas, nous n’avons plus qu’à faire demi-tour.

— Je constate que Gauddis ne t’a pas tout dit à mon sujet.

Éliandre tira son épée et il l’enfonça jusqu’à la garde dans la fente du mur. Alors, la bouche commença à se dilater, de plus en plus, avec le même grondement que pour son apparition et une infinie lenteur, jusqu’à faire descendre la garde de l’épée au niveau du sol.

L’ouverture ainsi ménagée découvrait un corridor sombre. Des torches s’allumèrent d’elles-mêmes et ils purent distinguer l’intérieur. Ils s’y engagèrent résolument.

Ils avançaient sans crainte, ne redoutant rien de fâcheux. Le couloir, horizontale sur quelques mètres, donnait sur un escalier qui montait en spirale assez raide, dans la montagne.

Après une ascension qui leur parut bien longue, ils débouchèrent enfin dans l’antre du