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Partie I : La ville et le souterrain urbain

4- Fonctionnalité du souterrain

4.1. Fonctions souterraines

En regardant la fonctionnalité des ouvrages urbains souterrains, deux façons de les classer peuvent être citées : La première correspond à la nature de l’usage « fonction », alors que la deuxième correspond à la nature de l’ouvrage « géométrie ».

4.1.1. Expression de « fonction »

L’utilisation de l’espace souterrain urbain a commencé en tant qu’annexe d’un bâtiment aérien, ou en tant qu’infrastructure. Elle s’est ensuite développée pour répondre à plusieurs autres besoins. La fonctionnalité de l’ouvrage souterrain représente un attribut défini à la conception de l’ouvrage de construction souterrain.

Une fonction autrement dite « destination » d’un ouvrage de construction exprime ce pourquoi une construction a été conçue, réalisée ou transformée [Inserguet, 2012]. Une fonction s’exprime littérairement par un verbe accompagné de compléments. Le verbe correspond à la forme grammaticale permettant de définir une action, les compléments permettent ensuite de donner des informations supplémentaires sur cette action [Fund, 2016]. Cela nous parait indispensable pour exprimer les différentes fonctions repérées dans l’analyse bibliographique ci-après, et ensuite pour exprimer l’unité fonctionnelle de l’évaluation environnementale dans le chapitre 2.

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4.1.2. Classification selon la fonction de l’ouvrage

La classification selon la nature de l’usage a été adoptée par Carmody et Sterling. Ils ont regroupé les fonctions urbaines en 4 catégories : résidentielle, non résidentielle, infrastructure et militaire

[Carmody and Sterling, 1993]. Ensuite, ces catégories ont été développées en ajoutant d’autres fonctions [Edelenbos et al, 1998]. La première catégorie est relative à un usage résidentiel. On y trouve l’habitat d’une ou plusieurs familles. Edelenbos y a ajouté les activités résidentielles urbaines et rurales (suburbaines). La seconde catégorie est relative à un usage non résidentiel. On y trouve les usages religieux, industriels, commerciaux, ou les parcs de loisirs (ex. usines, stationnements, stockage, agriculture, etc.). Edelenbos y a ajouté les salles de sport et de détente, les activités culturelles, les équipements de loisirs (bars, discothèques, etc.). Il a également ajouté l’usage pour le travail, qui peut comprendre les activités économiques et services, les activités de distribution, les laboratoires de recherche, etc. La troisième catégorie est relative aux infrastructures (linéaires et ponctuelles à la fois). Elle comprend le transport des personnels ou des biens, services, centraux d’énergie ou de déchets, les galeries techniques. La quatrième catégorie est relative à un usage militaire. On y trouve les ouvrages de défense civile, et les autres ouvrages militaires.

Parker a proposé un regroupement similaire des fonctions souterraines en trois catégories [Parker,

2004] : circulation (gares, tunnels et micro-tunnels), stockage (énergie, liquides, matériaux, etc.), et

puis habitat et commerce. La dernière a été appelée par Admiraal « usage urbain » et désigne un usage qui se trouve essentiellement dans les villes, tels que les centres commerciaux, les ouvrages hébergeant des loisirs, les parcs des stationnements, et les espaces de travail [Admiraal, 2007 ; Thewes et al, 2012]. Admiraal avait également ajouté un « usage d’archives » qui comprend les ressources souterraines, les ressources archéologique et de sciences de la terre, ainsi que la biodiversité souterraine.

De la même façon, les études menées par le thème 1 (aspects socioéconomiques) du projet national « Ville10D – ville d’idées » ont conduit à une classification similaire [Gautier et al. 2014a ; Gautier et al. 2014b] : usage de circulation ; usage de loisirs et commerces ; usage économique et industriel ; usage agricole ; usage pour l’intérêt général ; usage d’habitation.

4.1.3. Classification selon la géométrie de l’ouvrage

La deuxième classification, selon la nature de l’ouvrage, a été adoptée par Duffaut qui propose cinq catégories d’ouvrages [Duffaut, 2007] : Les petits réseaux classiques et indépendants qui sont utilisés pour la circulation des fluides (assainissement, eaux, électricité, etc.) ; les grands réseaux qui sont pour le transport en commun de masse ou les véhicules particuliers, pour les personnes et pour le fret souterrain ; les annexes souterraines aux réseaux qui sont utilisés pour les activités de traitement des eaux et des déchets, la production de chaleur et de froid, le parking et les stations-services, les postes de comptage et de vannage, d’interconnexion, les plates-formes logistiques, etc. ; les ouvrages d’entrepôt et de stockage qui représentent une extension du concept de cave d’immeuble privé, mais utilisée pour l’entrepôt de grand magasin et pour les stocks industriels ; les autres ouvrages qui comprennent les usages correspondant au commerce, aux activités culturelles ou sportives, aux loisirs. C’est-à-dire toute activité où l’accès du public n’est ni permanent, ni obligatoire.

En rapprochant ces cinq catégories proposées par Duffaut des configurations géométriques présentées dans le paragraphe précédent, on peut les reclasser en : ouvrages linéaires (petits réseaux, grands réseaux) ; ouvrages ponctuels (annexes aux réseaux, entrepôts et stockage, autres ouvrages). Cette

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façon de classifier a été également adoptée dans le cadre du projet Deep-City conduite en Suisse

[Parriaux et al. 2010], comme le montre le Tableau 3.

Tableau 3 : Classification des ouvrages urbains souterrains selon leur géométrie (projet Deep-City)

Géométrie Fonction Ouvrages réalisés

Linéaire horizontale Transport

Rail Route Piétons Technique Technique Linéaire verticale Technique Fondations profondes Captage d’eau souterraine Exploitation géothermique

Ponctuelle

Technique et industrie Parking

Stockage/technique/industrie

Tertiaire Gares, pôles d’échange

Bâtiments commerciaux Bâtiments récréatifs

Auparavant, Barles et Jardel en ont donné un exemple [Barles and Jardel, 2005], (Tableau 4), il s’agit d’une analyse des équipements souterrains (espaces publics) dans la ville de Montréal selon leur géométrie.

Tableau 4 : Exemple de classification des équipements souterrains selon leur géométrie

Géométrie Equipements souterrains à la ville souterraine de Montréal

linéaire Corridors simples : axes à vocation de circulation, de connexion et de distribution Galeries commerciales ajoutant la fonction commerciale à la fonction de circulation

ponctuelle

Places souterraines aveugles (sans éclairage naturel) Places souterraines avec puits de lumière

Places souterraines avec mezzanines

Places semi-enterrées ou atriums avec mezzanines, autour desquelles se s’élèvent des immeubles à vocations multiples, dont le commerce, et à partir desquelles

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4.1.4. Synthèse des fonctions souterraines

En résumé des différents éléments bibliographiques abordés ci-dessus, la fonctionnalité des ouvrages de construction souterrains façonne leur géométrie. Le Tableau 5 propose une classification des ouvrages souterrains selon leur géométrie et leur usage (identifié comme nature de la fonction) avec des exemples actuellement existants.

Tableau 5 : Proposition de classification des ouvrages souterrains selon leur géométrie et leurs fonctions

Ty p e de l’ou vr ag e Type de la fonction Expression de la fonction Activités

correspondantes Exemple d’ouvrages

lin

éa

ir

e

Circulation Assurer la circulation entre deux points donnés pour X de personnes ou biens Transport de biens

Galeries techniques (câbles électriques, téléphoniques, data), conduites (de gaz,

d'eau, d'assainissement), etc. Transport de

personnels et de fret

Tunnels routiers, ferroviaires, piétonniers, etc.

Pon

ct

u

e

l

stationnement public Parking public

Gare Gare de métro (ou de train), gare routière, etc. Résidentielle Loger X de personnes ou annexes résidentielles

Habitat Etage en sous-sol pour un bâtiment en surface ; maison enterrée ou semi-enterrée Annexes techniques

en utilisation résidentielle

Annexes de logement, stationnement, canalisation, etc. Non résidentielle Assurer une activité urbaine non-résidentielle pour X de personnes Activités agricoles et

forestières Caves, abris pour les animaux, etc.

Activités culturelles et spirituelles, loisirs.

Salle de sport, piscine, cinéma, théâtre, centre religieux, bibliothèques, évènementiel, salle de congrès, salle

d'expositions, salle de spectacles Activités d'intérêt

général : administratives, financières, sanitaires,

et sociales.

Bureaux, banques, studios

d'enregistrement, de radio et de télévision, poste, laboratoire et centre de recherche,

hôpitaux, cliniques, cimetières

Activités économiques / industrielles

Supermarché, magasin, stations de service, centre d'achats, discothèque, restaurant,

bar, etc. Logistique Assurer une activité logistique Vocation industrielle

Installations industrielles pour l'équipement ou les marchandises, usine de traitement des eaux usées, installation

pour le chauffage urbain, etc.

Stockage

Stockage des marchandises commerciales, salle d'archive, data centers, réservoir d'eau, d'hydrocarbures, d'autres biens (nourritures, liquides, gaz, produits

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Ainsi, Les fonctions urbaines associées à un ouvrage de construction souterrain répondent essentiellement à des besoins des utilisateurs, ou à des contraintes précises. Elles sont catégorisées comme suit :

 Fonction principale ou destination de l’ouvrage (FP) : définie comme « fonction de service » dans les normes NF X50-101 [AFNOR, 1995] et NF EN 1325 [AFNOR, 2014c]. Elle répond à un besoin principal pour lequel l’ouvrage a été construit. Fonction annexe (FA) : définie comme « fonction de contrainte » dans les normes NF EN 16271 [AFNOR, 2013a] et NF EN 1325

[AFNOR, 2014c], elle est nécessaire pour assurer une fonction principale.

 Fonction secondaire (FS) : Elle répond à un besoin différent et secondaire par rapport à l’ouvrage principal, elle est créée grâce à la réalisation de l’ouvrage.

Cela introduit la notion de la « multifonctionnalité souterraine », on trouve en effet rarement dans la ville un ouvrage souterrain monofonctionnel.