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Fonctions discursives des personnages dans la narration

CHAPITRE 4 : Fréquence de -mm et dämmo dans la narration

1. Analyse macro-discursive

1.1. Fonctions discursives des personnages dans la narration

Au niveau discursif, les données montrent une courbe qui va croissant pour le maintien des personnages dans la chaîne thématique, et décroissant pour la réintroduction :

Figure 3 Moyenne des % des fonctions discursives.

Une fois introduit (IN), le personnage peut être maintenu (M). Nous disons qu’il est promu (P) quand l’argument en objet ou oblique d’une clause devient le sujet ou l’agent (S/A) de la clause suivante. La réintroduction (R) concerne l’argument qui est repris plus loin dans une autre séquence.

Les plus petits identifient les personnages individuellement, et changent de thème constamment parce qu’ils ont tendance à raconter chaque image séparément.

La différence entre les plus petits et les plus grands est reflétée par la longueur de clauses par phrase. Comme nous l’avons vu au chapitre 3.4, une clause est une micro unité de sens. Elle peut à elle seule exprimer une idée. Dans les phrases complexes, elle a pour équivalent la proposition simple. La clause comme la proposition sont définies à partir du prédicat verbal. Une phrase peut contenir une seule proposition (PH1), comme elle peut en avoir onze (PH11). La figure ci-dessous montre que les enfants produisent en général des phrases plutôt courtes : 0,00% 20,00% 40,00% 60,00% 80,00% IN M P R

Moyenne des % des fonctions discursives

5-6ans 7-8ans 10-12ans Adultes

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Figure 4: Nombre moyen de clauses par phrase.

PH1 = phrase à une seule clause/proposition.

Les enfants produisent majoritairement des phrases à une ou deux clauses. Avec l’âge, les phrases se complexifient, et s’allongent progressivement. Une phrase peut ne contenir qu’une seule clause, elle peut être simple quand elle a un seul verbe. Elle peut être coordonnée, elle comporte alors deux clauses reliées par un coordonnateur enna69 « et » ou un subordonnant (cf. page 51). Elle peut refermer plusieurs clauses, auquel cas seule la proposition principale, celle placée à la fin, porte le verbe fini ; tous les autres verbes sont des subordonnés, des propositions non finies.

Figure 5 : Moyenne des % de la nature des propositions

La figure ci-dessus montre la nature des propositions. Les suffixes introducteurs de la subordination que nous avons appelés « subordonnant » sont variés (Tableau 4). Les enfants utilisent majoritairement se « quand » (Figure 6, ci-dessous) :

69 enna est le seul vrai coordonnateur en amharique (Cohen, 1936).

nombre moyenne de clauses par PH

0 10 20 30 40 50 60 PH1 PH2 PH3 PH4 PH5 PH6 PH7 PH8 PH9 PH11 (% ) 5-6 ans 7-8 ans 10-12 ans adultes 0 5 10 15 20 25

Subordonnant Gérondif Coordonnant Progressif Relatif

(%

)

Moyenne des % de la nature des clauses

5-6 ans 7-8 ans 10-12 ans adultes

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Figure 6: Moyenne des % de la forme des subordonnants dans la narration

Cette figure montre clairement que la variété de la subordination augmente avec l’âge. /se/ « quand » est le plus fréquent chez les enfants. En effet, comme nous allons le voir plus loin, le suffixe se- leur permet d’exprimer non seulement la relation temporelle interprétable en termes de simultanéité, mais aussi causale.

Le tableau ci-après présente deux extraits (un enfant de 6 ans et un adulte) pour montrer la différence de structure phrastique. La phrase de l’adulte est évidemment complexe. En une seule phrase et onze propositions, l’adulte racontent deux événements en parallèle. Grâce aux connecteurs et surtout grâce aux conjonctions de subordination, il hiérarchise les différents événements et constituent des blocs informationnels complexes. L’enfant construit des phrases plutôt courtes. Le subordonnant qu’il maîtrise est surtout /se/ (quand) qui lui sert à marquer une relation de temporalité, simultanéité, et causal. Dans les cinq phrases du tableau ci-après, deux indépendantes sont coordonnées par « et », et deux subordonnées reliées par « quand ».

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 s e -b e -e y y ä -le -y ä -s e -lä + in f k ä …b h w la e n d e -b ä + in f e n d ä -b ä .. .g iz é k ä …b e fi t e s k ä …d e s (% )

Moyenne des % de la forme des subordonnants

5-6ans 7-8ans 10-11ans adultes

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Tableau 25 : Extrait de passages de texte d’adulte et d’enfant. 1) wädä lay bä-mäzläl

vers haut par-sauter.INF par des sauts vers le haut

2) mäTTarat-u end-al-awwaT-a-w

appeler-POSS.3M que-NEG-réussir.ACP-3.M-O.3M que son appelle ne lui a pas réussi

3) selä-tärädd-a

car-comprendre.ACP-3M parce qu’il a compris

4) wesha-w zaf-u-n bä eJ-occ-u bä-mannäQanäQ chien-DET arbre-DET-ACC avec main-PL-POSS.3M par-remuer.INF le chien, en remuant l’arbre avec les mains

5) yä-tän-TäläTäl-ä-we-n nägär qui-PASS-suspendre-3M-DET-ACC chose la chose qui est suspendu

6) s-y-anZäweZä-w

quand-3M-balancer.INAC.O3M quand il la secoue

7) leJ-u agonbbes-o

garçon-DET s’abaisser.GER-3M le garçon, s’étant abaissé

8) s-i-fällege-bb-ät k-ä-näbbärä-w Qädada wesT dägmo quand-3M-chercher.INAC-LOC-O.3M de-où-AUX.PS-DET trou dans dämmo

et du trou où il cherchait

9) andit ayeT afenCa-we-n selä-bwaCärä-cce-w une souris nez-POSS.3M-ACC comme-griffer-3F-O.3M comme une souris lui a griffé le nez

10) dängeT-o avoir.GER peur-3M ayant eu peur

11) wädä-hwala y-afägäffeg-al vers-arrière 3M-reculer-AUX il recule vers l’arrière

(Comme il a compris que son appel ne lui réussissait pas, le chien secouait la chose qui était suspendue en remuant l’arbre de ses pattes ; le garçon, du trou où il cherchait en se penchant, une souris l’ayant griffé le nez, a pris peur et se rétracte.)

1) wesha-w dämmo endä-zzih annäQannäQ-ä enna chien-DET dämmo comme-ça secouer.ACP-3M et et le chien a secoué comme ça

2a) dub s-i-l

Tomber.brusquement quand-3M-verbe quand il tombe brusquement

2b) neb-occ waTT-u-nna abeille-PL sortir.ACP-3PL -et des abeilles sont sorties et

3) abbarrär-u-t

chasser.ACP-3PL-O.3M elles l’ont chassé

4a) yaNNaw dämmo zaf lay enQurarit s-il

celui.là dämmo arbre sur grenouille quand-dire-3M et celui-là, quand il dit grenouille sur l’arbre

4b) essu dängeT-o lui sursauter.GER-3M lui, ayant sursauté

4c) wedQ al-ä-nna Tomber.brusquement AUX.3M-et il est tombé brusquement, et 5) abbarrär-ä-cc-ew chaser.ACP-3F-0.3M elle l’a chassé

(Le chien a secoué comme ça. Et quand il tombe, des abeilles sont sorties, et elles l’ont chassé. Quant à l’autre, quand il crit « grenouille » sur l’arbre, (lui) il a sursauté et il est tombé brusquement. Et, elle l’a pourchassé.)

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1.2. Conclusion

Notre corpus montre que les plus jeunes favorisent les énoncés prédicatifs que présentatifs. En outre, ils rapportent les événements selon la perspective du personnage principal (le garçon). Leurs productions sont souvent morcelées, découpées en fonction des images qu’ils ont devant eux. C’est là l’un des inconvénients du livret70 que nous avons utilisé pour la production des récits. En effet, les images qui se succèdent étant figées, il n’est pas toujours évident pour l’enfant de comprendre l’enchainement logique des événements, ni le rapport entre les personnages. De plus, il arrive qu’une seule image présente les actions de plusieurs personnages, mais aussi qu’un épisode s’étale sur plusieurs images. Cette combinaison est cognitivement assez complexe à démêler pour l’enfant, puisqu’il n’est pas encore à même de faire une analyse d’ensemble (Hickman, 2001).

L’activité narrative demande une attention constante. Elle est cognitivement coûteuse pour les enfants parce qu’ils doivent structurer leur récit en gardant en mémoire ce qui a été dit, et organiser la suite en conséquence.

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2. Fréquence et distribution de -mm et dämmo dans la