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2. Le centrosome

2.5. La centrine

2.5.3. Fonctions de la centrine 2 humaine

2.5.3.1. Phosphorylation et séparation des centrosomes

La centrine est phosphorylée dans son extrémité C-terminale au niveau du résidu serine 170 au moment de l’entrée des cellules en mitose et de la séparation des centrosomes (Lutz et al, 2001). Elle présente un motif consensus qui est la cible de la protéine kinase A. Cette modification post-traductionnelle intervient très tôt dans la mitose, quand les deux centrosomes se séparent pour mettre en place le fuseau mitotique (Figure 11). En effet, dans des cellules HeLa, des anticorps dirigés spécifiquement contre la centrine phosphorylée se localisent au centrosome en phase G2/M. La présence de la centrine phosphorylée reste élevée jusqu’en métaphase, puis diminue pour atteindre un niveau basal à la télophase. La chronologie de phosphorylation de la centrine implique que cette modification pourrait initier la séparation des centrosomes et donc la formation du fuseau mitotique. Dans des cellules interphasiques, la stimulation de l’activité de la PKA entraîne la phosphorylation de la centrine et la séparation des centrioles, suggérant que la phosphorylation de la centrine au résidu sérine 170 pourrait être aussi impliquée dans la séparation des centrioles.

N N--terter C C--terter N N--terter C C--terter

Dans des adénocarcinomes du sein (Lingle et al, 1998), les centrosomes présentent de nombreuses anormalités comme une augmentation de leur nombre et de leur volume, une accumulation de PCM, et des centrioles surnuméraires. Il a été observé également une phosphorylation anormale de la centrine. Dans des cellules épithéliales de sein normales, la centrine phosphorylée est détectée pendant la mitose. Dans les adénocarcinomes, la phosphocentrine est détectée tout au long du cycle cellulaire, et elle s’accumule dans de larges centrosomes tumoraux. L’hypertrophie centrosomale a été détectée dans 34 des 35 adénocarcinomes étudiés. La phosphorylation anormale de la centrine pourrait être une conséquence de la dérégulation du cycle cellulaire dans ce type de cancer.

2.5.3.2. Duplication des centrioles

L’interférence ARN a été utilisée pour étudier le rôle de la centrine 2 lors de la division cellulaire des cellules humaines (Salisbury et al, 2002 ; Rice et Agard, 2002). Un siRNA dirigé spécifiquement contre l’ARNm de la centrine 2 a permis de réduire de 90% son niveau d’expression dans des cellules HeLa. Une réduction du nombre de centrioles a été observée dès 48 heures après transfection, où des cellules peuvent présenter aucun, un ou deux centrioles. Une analyse quantitative montre une réduction progressive du nombre de centriole, accompagnée de la formation de fuseaux mitotiques monocentriolaires ou acentriolaires.

Les auteurs suggèrent un modèle où la centrine 2 a un rôle essentiel dans la duplication des centrioles (Figure 17). Après réduction de l’expression de la centrine 2, il n’y a pas eu de duplication des centrioles. Pendant la mitose, chaque cellule fille a hérité d’un centriole unique qui a pu mettre en place les pôles du fuseau et achever la cytokinèse. A la division suivante, quand la cytokinèse a pu avoir lieu, une cellule fille aura reçu un centriole alors que la deuxième sera acentriolaire. Il a ainsi été observé de nombreux fuseaux mitotiques anormaux qui sont la conséquence de défauts de cytokinèse aux cycles précédents. Finalement, à partir de 72 heures, la majorité des cellules se détachent de leur support et meurent. La duplication des centrioles requerrait donc la présence de la centrine 2.

Figure 17. Modèle représentant l’effet de la réduction de centrine 2 sur la duplication des centrioles. La cellule contrôle complète la duplication de ses centrioles (vert), et chaque centrosome mitotique (rouge) contient deux centrioles. La cellule présentant une faible quantité de centrine 2 ne peut pas dupliquer ses centrioles. Les centrosomes mitotiques sont constitués d’un seul centriole incapable de se répliquer. La division suivante génère des cellules unicentriolaires ou acentriolaires. Cette « dilution » de centrioles entraîne irrémédiablement la mort cellulaire. (D’après Rice et Agard, 2002)

2.5.3.3. Un rôle dans l’export de l’ARNm et des protéines ?

Cdc31p et la centrine 2 seraient impliquées dans l’export de l’ARNm. Chez la levure, Cdc31p est localisée dans le SPB et au niveau des pores nucléaires. Une séquence appelée CID, un domaine C-terminal du facteur d’export nucléaire Sac3 recrute Cdc31p dans un complexe Sac3-Thp1-Sus1 impliqué dans l’export de l’ARNm. De plus, certaines mutations du gène Cdc31p entraînent un défaut dans l’export de l’ARNm (Fischer et al, 2004).

Chez les vertébrés, le pore nucléaire est composé d’une multitude de nucléoporines comme le complexe Nup107-170. Un certain nombre d’entre elles ont également un rôle durant la mitose : elles se localisent au kinétochore et/ou au pôle du fuseau mitotique. Par exemple, le complexe Nup107-160 est essentiel pour l’export de l’ARNm, l’assemblage et la structure du pore nucléaire mais il est également indispensable à un assemblage correct du fuseau (Orjalo et al, 2006). Une interaction entre la centrine 2 et ce complexe a été mise en évidence chez les mammifères et le xénope (Resendes et al, 2008). Après une fixation classique au formaldéhyde, le traitement de cellules HeLa à la digitonine permet de visualiser

contrôle RNAi-centrine 2 contrôle RNAi-centrine 2

la présence de la centrine 2 au bord du noyau et la colocalisation de la centrine 2 avec des nucléoporines à l’interphase. En utilisant l’interférence ARN dirigée contre l’ARNm codant pour une protéine d’assemblage du pore nucléaire ELYS/MEL-28, il y a une réduction du signal de la centrine 2 au niveau de la membrane nucléaire. De plus, la surexpression des domaines N et C-terminaux de la centrine 2 provoque l’accumulation d’ARN poly(A)+ dans le noyau des cellules, indiquant que la centrine 2 a un rôle fonctionnel dans l’export de l’ARNm. Enfin, la surexpression des deux domaines de la centrine 2, et pas de Nup160, inhibe l’export des protéines alors qu’elle n’a aucun effet sur leur import. La centrine 2 pourrait donc être impliquée dans l’export de l’ARNm mais aussi des protéines. Il a été observé que le Ca2+ pouvait influencer la structure et la fonction du pore nucléaire. L’identification de la centrine 2 au pore nucléaire en fait un senseur possible du Ca2+ dans ces structures particulières.

La centrine 2, identifiée au niveau du MTOC et étudiée pour son rôle dans le centrosome et la division cellulaire aurait donc d’autres fonctions. Comme d’autres protéines centrosomales, la centrine 2 est présente en quantité non négligeable dans le noyau des cellules mais leurs rôles précis et l’éventuelle relation entre leurs fonctions centrosomales et nucléaires demeurent peu connues à ce jour. La découverte récente de son interaction avec XPC suggère un lien entre la réparation de l’ADN et la division cellulaire.