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Chapitre 1 : Introduction générale

B. Description du modèle SWAT

6. Fonctionnement de l’impact anthropique

Le module agronomique

Le modèle SWAT accorde une grande importance au module agronomique et en particulier à la croissance des plantes. Le module agronomique utilise une version simplifiée de EPIC (Erosion- Productivity Impact Calculator ; Williams et al., 1989). SWAT possède une base de données modulable des végétations comportant initialement 121 typologies de végétations qui sont répertoriées en sept groupes de classification : (1) légumineuses annuelles de saison chaude, (2) légumineuses annuelles de saison froide, (3) légumineuses pérennes, (4) plantes annuelles de saison chaude, (5) plantes annuelles de saison froide, (6) plantes pérennes, et (7) arbres.

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La croissance des plantes se fonde sur une approche basée sur l’efficacité de l’utilisation du rayonnement à partir d’équations empiriques. La croissance de la plante peut être inhibée par des stress liés à la température, la disponibilité en eau ou en nutriments. Tout d’abord, un taux de croissance optimal est calculé et ce taux sera contraint par des facteurs limitant. Le développement des plantes est fonction de l’accumulation de chaleur mesurée à partir des unités de chaleur (Heat Units – HU). La température en particulier la température moyenne journalière régit la croissance potentielle des plantes représentées par l’emmagasinement des HU. Les HU indiquent le stade de développement de la plante variant de 0 à 1,5, avec 0 au moment de la semence des graines et 1 au moment optimal où la plante doit être récoltée. L’accumulation des HU est uniquement possible lorsque la température moyenne journalière, 𝑇𝑎𝑣 (°C), est supérieur au minimum de température requis pour que la plante grandisse

(Tbase). Le nombre total de HU requis pour qu’une plante atteigne son stade de maturité est calculé comme suit :

𝑃𝐻𝑈 = ∑𝑚𝑑=1𝐻𝑈= ∑𝑚𝑑=1(𝑇̅̅̅̅ − 𝑇𝑎𝑣 𝑏𝑎𝑠𝑒) (eq. 30)

Avec PHU la somme d’unité de chaleur requise pour atteindre le stade final de maturité, HU l’unité de chaleur accumulée au jour d avec d=1 correspondant au jour de semence et m le nombre de jours requis pour qu’une plante puisse atteindre son stade de maturité final.

La biomasse potentielle se fonde sur la méthode développée par Monteith (1977) en utilisant l’Efficacité de l’Utilisation du Rayonnement (EUR) qui correspond à la quantité de biomasses sèches produite par interception de la radiation lumineuse. L’EUR est définie par défaut dans la base de données végétales et est supposée être indépendante du stade de développement de la plante. La biomasse totale, calculée pour un jour d, correspond à la somme des augmentations potentielles de la biomasse végétale totale définie à partir du rayonnement photosynthétiquement actif intercepté :

𝑏𝑖𝑜 = ∑𝑑𝑖=1𝛥𝑏𝑖𝑜𝑖 = ∑𝑑𝑖=1𝐸𝑈𝑅. 𝐻𝑝ℎ𝑜𝑠𝑦𝑛 (eq. 31)

Avec bio la biomasse totale de la plante (kg.ha-1), Δbioi la croissance de la biomasse totale de la plante au jour j (kg.ha-1), EUR l’efficacité de l’utilisation du rayonnement (kg.ha-1.(MJ.m-2)-1) et H

phosyn la quantité de rayonnement photosynthétiquement actif intercepté au jour d (MJ.m-2).

Le calcul de la biomasse produite dépend entre autres de l’indice de développement foliaire (LAI) représentant le développement de la canopée qui influe sur l’efficacité du rayonnement intercepté (EUR). Le stade de croissance indiqué par la valeur du HU permet au modèle de répartir la biomasse totale de la plante entre les parties aériennes et les parties souterraines (racines). Lorsque la plante est à maturité (HU = 1) le taux de transpiration se réduit, les cultures devraient être récoltées. Quant aux plantes pérennes et aux arbres, le système de HU est couplé à un nombre d’années, spécifique à chaque espèce.

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Au sein du modèle, la récolte des plantes est modélisée comme une partie de la biomasse qui est retirée du HRU, c’est le rendement agricole. Une partie de la plante est retirée du système et une autre partie est convertie en résidus végétaux qui seront dégradés par la suite. Chaque espèce végétale possède un indice de rendement (Harvest Index, HI) variant de 0,0 à 1,0 pour la plupart des espèces. Les espèces où les racines sont également récoltées par exemple les patates douces peuvent avoir un HI supérieur à 1,0.

L’absorption de l’eau par la plante dépend en partie de la profondeur des racines et de la teneur en eau du sol. En cas de sol sec, la plante peut réquisitionner l’eau des horizons inférieurs régie dans le modèle par le facteur de compensation de prélèvement, EPCO, variant de 0,01 à 1. L’absorption de l’eau par la plante peut être influencée par des pratiques culturales modélisables dans SWAT, par exemple avec l’irrigation. L’indice HI est calculé de façon journalière tout au long du développement de la plante comme suit :

𝐻𝐼 = 𝐻𝐼𝑜𝑝𝑡.

100.𝑓𝑟𝑃𝐻𝑈

(100.𝑓𝑟𝑃𝐻𝑈+𝑒11,1−10.𝑓𝑟𝑃𝐻𝑈) (eq. 32) Avec HI, l’indice de rendement pour un jour d, HIopt l’indice de rendement potentiel pour une plante à maturité ayant eu des conditions de croissance idéale, et frPHU la fraction d’unité de chaleur potentielle accumulée par la plante pour un jour donné durant sa période de croissance. La variation de l’indice HIopt varie selon une courbe sigmoïde durant la période de croissance de la plante. Le rendement de la plante d’une année donnée se calcule par :

𝑦𝑙𝑑 = ⁡ 𝑏𝑖𝑜𝑎𝑔. 𝐻𝐼 avec HI ≤ 1 (eq. 33)

𝑦𝑙𝑑 = ⁡𝑏𝑖𝑜. (1 − 1

(1+𝐻𝐼)) avec HI ≥ 1 (eq. 34)

Avec yld le rendement de culture (kg.ha-1), bio

ag la biomasse aérienne au jour de récolte (kg.ha-1), HI l’indice de rendement au jour de récolte et la biomasse total de la plante au jour de récolte (kg.ha-1) Le facteur bioag se calcule à partir de la fraction racinaire de la biomasse totale au jour de récolte et de la biomasse totale de la plante telle que :

𝑏𝑖𝑜𝑎𝑔= (1 − 𝑓𝑟𝑟𝑜𝑜𝑡). 𝑏𝑖𝑜 (eq. 35)

Le modèle SWAT donne la possibilité d’intégrer des itinéraires techniques de façon plus ou moins précise.

La modélisation des activités humaines dans SWAT

SWAT a été développé dans l’objectif de quantifier l’impact de l’homme via les pratiques culturales et la gestion de l’eau sur les cycles biogéochimiques. Le modèle intègre donc de nombreuses possibilités d’intégration de l’impact de l’homme.

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On peut les diviser en quatre catégories de gestion : (1) les pratiques agricoles liées à la production agricole, (2) les pratiques de productions du secteur primaire, secondaire et/ou tertiaire liées à la gestion de l’eau, (3) la gestion de l’eau en zone urbaine, (4) les pratiques environnementales liées à la gestion de l’eau.

Les pratiques agricoles sont très diversifiées dans SWAT. On peut simuler la récolte des cultures, mais également l’impact du pâturage, l’épandage de fumier, le labour, l’application des pesticides ou encore la fertilisation (N, P, K).

La gestion de l’eau à des fins agricoles ou sociétales peut être également être mise en place dans SWAT par exemple la pratique de l’irrigation. Il est possible de simuler plus en détails ces pratiques en intégrant des barrages, des réseaux de drainage, des transferts d’eau hors du bassin versant ou encore des voies d’eau et des rigoles d’interception engazonnées.

L’influence des zones urbaines peut également être simulée que ce soit en émission ou interception de volume d’eau, de sédiments ou de polluants. Il est possible d’intégrer la consommation en eau d’une ville, mais également le rejet urbain et industriel à travers l’intégration de « points- sources » ou sources ponctuelles. À l’intérieur des HRU possédant une occupation de sol urbaine le calcul de l’écoulement est différent notamment avec l’intégration des zones bétonnées accélérant le lessivage, mais le stockage d’eau est également possible (récupération des eaux de pluie). Le modèle intègre même un module de nettoyage des rues ayant une influence sur le lessivage des polluants.

Finalement, le modélisateur peut avoir une influence sur la gestion environnementale par l’intégration de forêts ou bandes riveraines, ayant un rôle de zones tampons, de mares, de zones humides ou même de grotte ou des zones de dénivelées.

Par la suite, une explication non exhaustive des pratiques utilisées dans le cadre de cette thèse sera apportée.

Les pratiques agricoles liées à la production agricole,

La fertilisation est la pratique la plus importante à intégrer au sein de chaque HRU agricole car directement liée au lessivage des nitrates. L’utilisateur peut choisir d’intégrer la fertilisation de manière planifiée ou automatique. Concernant la fertilisation planifiée, l’utilisateur choisit le type de fertilisants, la quantité à appliquer et les jours d’application en fonction des jours juliens ou en fonction des HU indiquant le stade de développement de la plante. L’autofertilisation s’enclenche lorsque le seuil de stress azoté de la plante, déterminé par l’utilisateur, est atteint. Dans le cas de l’autofertilisation, l’utilisateur indique le type de fertilisation, la fraction totale de fertilisant appliqué à la surface du sol, la quantité maximale annuelle de fertilisant pouvant être appliquée, la quantité maximale de fertilisation à chaque application et l’efficacité de l’application de fertilisant. L’efficacité de l’application de fertilisant est assignée par l’utilisateur et indique l’efficacité de la plante à absorber les fertilisants. Si l’utilisateur

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veut simuler un lessivage des fertilisants, la valeur de l’efficacité d’application sera supérieure à 1, à l’inverse, si l’utilisateur veut simuler une application optimale, le paramètre sera égal à 1.

Les pratiques de productions des secteurs primaires, secondaires

et/ou tertiaires liées à la gestion de l’eau

À l’image de la fertilisation, l’irrigation peut être intégrée par l’utilisateur de manière planifiée ou automatique. L’irrigation planifiée est mise en place par l’utilisateur en indiquant le moment d’application, le volume d’eau à appliquer, et la source de l’eau irriguée. En effet, l’eau peut provenir de quatre sources différentes : du cours d’eau, des nappes phréatiques, d’un réservoir ou d’une source extérieure. Une source extérieure simule un canal artificialisé amenant de l’eau de l’extérieur du bassin versant, dans ce cas, un volume d’eau est ajouté. L’auto-irrigation est enclenchée chaque fois que la plante atteint un certain seuil de stress hydrique ou lorsque le sol atteint un certain seuil de sécheresse. Ces seuils de déclenchement de l’irrigation sont définis par l’utilisateur ainsi que le volume d’eau maximale pouvant être appliqué. Si l’utilisateur choisit une auto-irrigation régulée par le déficit hydrique du sol, le phénomène d’irrigation est beaucoup plus fréquent.

Le secteur primaire avec l’irrigation peut influer la gestion de l’eau et avoir une influence sur les plans de gestion. Dans le bassin versant de la Garonne, les eaux de surface des coteaux de Gascogne sont gérées par la Compagnie d’Aménagement des Coteaux de Gascogne (CACG) afin d’assurer un partage équitable des eaux de surface sur le territoire pour l’alimentation en eau potable, la préservation de la biodiversité, le besoin des industries et de l’agriculture, la pêche… Dans cette région, des canaux artificiels sont mis en place pour alimenter les lits mineurs des cours d’eau de Gascogne, naturellement à sec en surface, à partir du débit de la Neste. Il y a alors un transfert d’eau entre sous-bassins versants modélisables par le modèle SWAT de plusieurs manières différentes. La première en utilisant le module de transferts d’eau en considérant un volume d’eau à transférer d’un bassin à un autre ou un volume d’eau apporté d’une source extérieure. Le modélisateur peut également choisir de prélever de l’eau d’un sous-bassin en utilisant le module « consommation de l’eau » et d’ajouter un volume à un autre bassin versant en utilisant des sources ponctuelles. Finalement, le cours d’eau peut être alimenté par un barrage.

Il existe plusieurs types de barrages (en remblais, poids, voûte, mobiles…) pour différents usages notamment pour le contrôle des crues, l’hydroélectricité, l’irrigation, l’industrie, une réserve en eau potable... Les barrages peuvent avoir une grande influence sur le régime hydrique d’un bassin. C’est le cas pour certaines parties de la Garonne. Par exemple, l’amont du barrage Pareloup, situé dans le Massif Central, ne reçoit plus de débit en son sein et l’eau du barrage permet d’alimenter le Viaur et le Tarn par des canaux artificiels (Figure 27). SWAT permet de modéliser des retenues appelées « Réservoirs » situées au niveau des cours d’eau (Figure 28). Le bilan en eau s’exprime comme suit :

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Avec V le volume d’eau présent dans la retenue à la fin du jour d (m3 H

2O), Vstored le volume d’eau stocké dans la masse d’eau au début du jour d (m3 H2O), Vflowin le volume rentrant dans la masse d’eau au jour d (m3 H

2O),Vflowout le volume sortant de la masse d’eau au jour d (m3 H2O), Vpcp le volume qui tombe dans la masse d’eau au jour d (m3 H2O), Vevap le volume d’eau retiré de la masse d’eau par évaporation au jour d (m3 H2O), Vseep le volume d’eau perdu par la masse d’eau par infiltration (m3 H2O). Le détail de calcul de chacun de ces volumes se trouve dans Neitch et al. (2011). Le calcul de Vflowout peut être calculé de quatre manières différentes à partir (i) des débits sortants journaliers mesurés, (ii) des débits sortants mensuels mesurés (iii) le taux annuel moyen de lâcher ou (iv) un débit sortant automatisé à partir d’objectif de lâcher. Les deux premières méthodes reposent sur des prélèvements effectués en sortie de barrages. Le modèle intègre ces sorties de barrage au modèle. Pour la troisième méthode, les flux sortants du réservoir sont déterminés à partir du degré de remplissage des réservoirs. Le réservoir stocke l’eau jusqu’à ce que le premier déversoir soit atteint. Une fois cette limite atteinte, le réservoir stocke une partie de l’eau et rejette le volume d’eau restant. Si la capacité maximale du barrage est atteinte, il y a débordement. Finalement, la dernière méthode de détermination du débit sortant du réservoir est calculée à partir de la capacité de stockage mensuelle visée. L’utilisateur indique un volume mensuel de stockage visé ou une gamme de débits sortants en indiquant le minimum et le maximum des débits sortant pour chaque mois. Le modèle optimise ainsi le stockage d’eau des barrages ainsi que les volumes rejetés. La simulation des barrages dans SWAT est complexe, mais est primordiale pour certains bassins où l’hydrologie est impactée par la présence d’un barrage (par exemple celui de Pareloup).

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Figure 28: Schématisation d'un réservoir dans SWAT d'après Ward and Elliot (1995)

La gestion de l’eau en zone urbaine

En zone urbaine, déterminée par l’occupation du sol, une gestion de l’eau urbaine est mise en place par défaut pour notamment simuler le lessivage plus important que dans les zones forestières par exemple. Il est également possible de paramétrer et de calibrer toutes ces activités, notamment, en ajoutant des sources ponctuelles, nommées « Point Source », PS. Ces PS permettent d’ajouter un volume d’eau ou de polluants dans le milieu non associé à une partie du territoire, par exemple une source des stations d’épuration ou une zone industrielle. L’utilisateur paramètre alors le modèle en indiquant un volume d’eau et/ou de polluant à l’échelle journalière, mensuelle ou annuelle. Ces volumes sont alors transférés au cours d’eau.

Autres pratiques liées à la gestion de l’eau.

Les bandes enherbées peuvent être simulées dans SWAT et ont un impact sur le lessivage des nutriments et des pesticides. Les mares et zones humides dans le modèle fonctionnent comme une petite masse d’eau au sein d’un sous-bassin. La mare ou zone humide reçoit alors une fraction du flux d’eau total du sous-bassin qui est corrélé à la superficie de la mare ou de la zone humide. La balance en eau utilise la même équation que celle utilisée pour les barrages (eq. 36) mais les volumes entrants et sortants sont associés à la mare ou à la zone humide.

L’ensemble des détails de la modélisation de ces pratiques se trouve dans Neitch et al. (2011). La majorité des applications se fait par HRU. L’utilisateur peut donc effectuer une pratique très spécifique par HRU ou beaucoup plus généralisée pour une zone du sous-bassin ou par type de culture. Cette panoplie et diversité de pratiques est un des avantages du modèle SWAT. La modélisation de ces pratiques a été développée au fil des années par la grande communauté d’utilisateur de SWAT et est donc en constante progression. Cependant, le développement et la multiplication des paramètres

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complexifient la prise en main du modèle et son calibrage. La mise en place de ces pratiques alourdit le processus de calibration du modèle, mais s’avère nécessaire sur des bassins versants anthropisés afin d’avoir une bonne représentation du cycle de l’azote à l’échelle d’un bassin.