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Si la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique ancre au niveau législatif le droit à la formation des agents contractuels, l’un des avantages de principe du recours à ces derniers pour les employeurs publics réside dans la possibilité de bénéficier des services d’un agent immédiatement opérationnel, compte tenu des compétences dont il dispose ; cela le distingue de l’agent titulaire, dont la formation initiale est souvent à parfaire dans le cadre d’une école d’application ou de parcours de formation parfois assez lourds218. Dans la pratique, les agents contractuels ont de réels besoins de formation, y compris au plan déontologique, puisque leurs obligations sont alignées dans ce domaine sur celles des fonctionnaires.

Le recrutement d’agents contractuels permet en principe d’économiser le coût de la formation statutaire

Les dépenses de formation statutaires (c’est-à-dire obligatoires, en particulier dans le cadre des formations initiales des lauréats de concours de la fonction publique), spécifiques aux agents titulaires, représentent une part importante des dépenses de formation des employeurs publics. C’est surtout le cas dans la FPE, du fait du nombre important de formations longues suite à réussite à un concours219. Ainsi, en 2017, les dépenses de formation statutaire représentaient 4,1 % de la masse salariale des personnels civils de tous les ministères hors enseignement (soit 1,02 Md€), et 0,5 % de la masse salariale du ministère de l’enseignement (soit 179,8 M€), alors que les dépenses relatives à la formation professionnelle (qui peuvent aussi concerner les agents contractuels) représentaient respectivement 3,8 % (soit 926,8 M€)et 3,2 %220 (soit 1,17 Md€).

218 Ces cas visent les recrutements externes et non les postes pourvus dans le cadre de la mobilité interne.

219 La formation des magistrats de l’ordre judiciaire, la plus longue recensée, dure ainsi 31 mois.

220 Ce coût est moindre dans la FPT (0,2 % de la masse salariale des collectivités) et la FPH (le montant est inconnu mais est en tout état de cause inférieur à celui de la FPT, les formations initiales les plus lourdes précédant l’entrée dans la FPH). Cependant, dans un contexte financier tendu, ce coût demeure un point d’attention.

A contrario, les agents contractuels sont réputés avoir un coût de formation initiale quasi-nul car ils sont recrutés sur des compétences et non via un concours généraliste.

Certains employeurs publics relèvent cependant qu’un agent contractuel dispose d’une compétence adaptée à l’exercice d’une fonction précise indiquée dans son contrat, alors que le fonctionnaire, seulement titulaire de son grade, peut occuper plusieurs postes différents, du fait de sa formation généraliste. Le coût de la formation initiale du fonctionnaire serait donc amorti au fil de sa carrière. A contrario, l’agent contractuel, renforcé en cela par son contrat, peut poser davantage de problème d’évolution de ses compétences et de sa carrière. L’absence de formation initiale par l’employeur public se révéler alors à terme contre-productive.

En pratique, s’il est vrai que, pour certains métiers techniques, les agents contractuels recrutés disposent des compétences attendues, de gros volumes de recrutement concernent des emplois d’exécution faisant appel sur des durées courtes à des agents à la formation initiale limitée, qui génèrent des coûts de formation significatifs.

L’Office français pour la biodiversité dresse un constat similaire, s’agissant des agents contractuels recrutés sur de courtes période : « ces agents ont le plus souvent un parcours antérieur dans le secteur privé et rarement connaissance des spécificités du secteur public. Ils doivent être formés, avec un effort important et pour une valorisation limitée dans le temps, sans possibilité de capitaliser. »

D’une manière générale, pour les agents contractuels en CDD courts, qui sont particulièrement nombreux, surtout si l’on raisonne en effectifs physiques et non en ETP, les coûts de formation sont importants quand on les compare à la durée effective des contrats. Dès lors, le retour sur investissement en matière de formation professionnelle, même s’il est moindre que pour un agent titulaire, est incertain.

Enfin, une partie des agents contractuels a vocation à passer des concours pour être titularisés. Or les formations à la préparation au concours sont généralement supportées par l’employeur, sauf s’il s’agit d’une démarche strictement individuelle de l’agent contractuel. Ainsi, au sein de la ville de Villeurbanne qui accompagne ses agents contractuels vers la réussite aux concours de la fonction publique, 11,3 % des jours de formations sont consacrés à la préparation des concours221.

221 La commune de Château-Gontier indique faire de même.

Les agents contractuels doivent cependant fréquemment être formés à l’exercice de leur l’emploi

Pour les emplois permanents, l’idée générale selon laquelle les agents contractuels, par opposition aux agents titulaires, seraient directement opérationnels et prêts à l’emploi n’est pas toujours vraie.

Ce constat n’est confirmé que lorsque les emplois en cause ne demandent aucune qualification particulière ou seulement des qualifications limitées (agents d’entretien, par exemple) ou lorsque les fonctions sont substituables entre secteurs public et privé ou entre employeurs publics (masseur-kinésithérapeute ou data scientist, par exemple).

Lorsque les fonctions requièrent des qualifications particulières (ou une expérience professionnelle préalable similaire), les agents contractuels doivent recevoir une formation, sauf à accepter une dégradation de la qualité du service rendu. Cette situation s’observe au ministère de l’éducation nationale pour les enseignants contractuels remplaçants, ce qui a conduit ce dernier à mettre en œuvre un dispositif robuste de formation (cf. encadré ci-après). Ce dispositif est d’autant plus nécessaire que les enseignants contractuels recrutés sont de jeunes diplômés, sans aucune expérience préalable.

Les enseignants contractuels : la nécessité d’être formés222 Jusqu’en 2016, aucune règle ne précisait la quantité et la nature de la formation au bénéfice des enseignants contractuels effectuant des remplacements d’enseignants titulaires. Malgré des initiatives locales, les intéressés se trouvaient face aux classes sans préparation, parfois sans maîtriser le programme. Certains n’avaient qu’une connaissance vague de l’organisation de l’institution scolaire et du fonctionnement d’un établissement.

Un décret du 29 août 2016223 prévoit qu’une formation d’adaptation à l’emploi est délivrée aux agents contractuels en fonction de leur parcours professionnels antérieurs.

222 Cour des comptes, Le recours croissant aux personnels contractuels - Un enjeu désormais massif pour l’éducation nationale, communication à la commission des finances du Sénat, mars 2018, disponible sur www.ccomptes.fr.

223 Décret n° 2016-1171 du 29 août 2016 relatif aux agents contractuels recrutés pour exercer des fonctions d’enseignement, d’éducation et d’orientation dans les écoles, les établissements publics d’enseignement du second degré ou les services relevant du ministre chargé de l’éducation nationale.

Une formation préalable s’impose également lorsque l’administration crée un nouveau métier, exclusivement occupé par des agents contractuels, nécessitant des compétences que l’on ne peut acquérir dans le cadre des formations de droit commun. C’est le cas, par exemple, pour les adjoints de sécurité de la police nationale.

La formation des adjoints de sécurité de la police nationale Les adjoints de sécurité (ADS) bénéficient d’une formation professionnelle rémunérée224 de 12 semaines en école de police.

Cette formation recouvre les missions principales d’un ADS et vise à développer sa faculté d’adaptation aux situations professionnelles par un soutien personnalisé lors de mises en situation réelles.

La formation est complétée par 2 semaines de stage d’adaptation dans le service d’affectation.

Durant son contrat de travail, des stages de formation continue lui sont dispensés pour renforcer et diversifier ses savoir-faire nécessaires à l’exercice de ses missions (gestes techniques de protection en intervention, faux documents, rédaction administrative...).

De tels cas de figure pourraient se multiplier. Du fait de la pénurie de main d’œuvre dans certains territoires et sur certains segments du marché du travail, les employeurs publics, en l’absence d’agents titulaires, peuvent être conduits à recruter des agents contractuels dont ils assurent la formation pour exercer des fonctions spécifiques. Le centre de gestion (CDG) de la Haute-Marne a ainsi, recruté deux agents dont il a assuré la formation au métier d’archiviste départementale pour l’un, à la fonction d’inspection hygiène et sécurité pour l’autre, pour être en mesure de continuer à assurer ces missions225.

Plus généralement, les employeurs publics font état de la nécessité de former les agents contractuels, y compris de haut niveau, aux fondamentaux du service public qu’ils n’ont que rarement acquis dans le cadre de leur parcours professionnel. Certains employeurs, tel le département de la Haute-Savoie, notent en effet une différence dans la compréhension des enjeux et des valeurs de la fonction publique.

224 Salaire mensuel net de 1 310 € en Île-de-France et de 1 236 € en province, correspondant au 1er échelon du grade d’un agent de catégorie C.

225 Au cas particulier, après avoir été formés, les deux agents ont renoncé à l’exercice de ces métiers, sans que le centre de gestion puisse être remboursé du coût des formations.

En particulier, l’agent titulaire dispose le plus souvent d’acquis transmis au cours de sa formation sur la hiérarchie des normes et le respect des règles de la déontologie que n’ont pas nécessairement les agents contractuels. Les infractions pénales spécifiques à l’exercice des missions de service public ne distinguent pas selon le statut de l’agent public226, aussi il importe que les agents contractuels soient informés du cadre juridique de leur intervention.

D’une manière générale, les agents contractuels doivent être pleinement informés de la spécificité des enjeux entourant la gestion publique, afin de garantir l’exercice de leurs nouvelles fonctions dans les meilleures conditions.

L’élargissement du recours au contrat ne doit en effet pas entraîner une dilution des valeurs du service public ou du savoir administratif.

Au demeurant, la loi du 6 août 2019, qui élargit le recours au contrat pour occuper des emplois supérieurs ou de direction dans les trois versants de la fonction publique, dispose que les agents contractuels devront suivre une formation les préparant à leurs nouvelles fonctions notamment en matière de déontologie ainsi que d’organisation et de fonctionnement des services publics. De même, le décret n° 2019-1414 du 19 décembre 2019 relatif à la procédure de recrutement pour pourvoir les emplois permanents de la fonction publique ouverts aux agents contractuels, prévoit désormais l’obligation pour les employeurs d’informer les candidats retenus pour un entretien de recrutement des règles déontologiques du secteur public.

Des obligations déontologiques largement alignées avec celles des agents titulaires

La plupart des obligations légales relatives à la déontologie des agents publics mentionnent exclusivement les fonctionnaires227.

L’art 32 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que : « Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, sont applicables aux agents contractuels le chapitre II de la présente loi (garanties), les deux derniers alinéas de l’article 21 (autorisation d’absence), l’article 22 (congé pour invalidité temporaire), l’article 22 ter (compte personnel d’activité), l’article 22 quater (compte personnel de formation), l’article 23 bis à l’exception de ses II et III (décharges pour activité syndicale), l’article 24 (cessation définitive de fonctions) et le présent chapitre IV (obligation et déontologie), à l’exception de l’article 30 (suspension pour faute grave) ».

226 Le code pénal retient la formule « une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public » dans les articles 432-4 et suivants.

227 Voir la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, chapitre IV « Des obligations et de la déontologie », art. 25, 25 bis, 25 ter.

L’article 34 de la loi de transformation de la fonction publique crée un contrôle déontologique spécifique pour les personnes, fonctionnaires ou agents contractuels, ayant exercé une activité dans le secteur privé au cours des trois dernières années qui souhaitent revenir dans la fonction publique ou y accéder sur ces postes exposés. Pour certains emplois de direction prévus par la loi, ce contrôle est effectué directement par la HATVP sur saisine de l’autorité hiérarchique. Pour les autres emplois ou fonctions listées par décret, le contrôle est effectué par l’administration qui peut saisir son référent déontologue en cas de doute sérieux, et si ce dernier n’est pas en mesure d’apprécier la situation, la HATVP.

L’article 36 étend les dispositions de l’article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, relatif au cumul d’activités, aux agents contractuels de droit public et de droit privé des autorités administratives indépendantes, des autorités publiques indépendantes et des établissements publics, organismes ou autorités mentionnés au I de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique.

Annexe n° 5 : le recours au contrat dans six pays