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La fonction de partition

Dans le document Cours de Physique Statistique (Page 84-87)

8.4 Généralisation aux molécules de plus de deux atomes

9.1.2 La fonction de partition

Comment prendre en compte ce potentiel dans l’écriture d’une fonction de partition ? Comme d’habitude, on décrit les micro-états par les positionsxi et impulsionspi des particules, et on écrit l’énergie totale du système (voir section 7.7.1)

E(x1,p1,x2,p2, . . . ,xN,pN) = p21

2m+ p22

2m +· · ·+p2N

2m +Eint(x1,x2, . . . ,xN), (9.2) où Eint est l’énergie d’interaction. La fonction de partition est donnée, voir (7.60), par

Z = 1 N! h13N Z · · · Z d3x1d3p1d3x2d3p2 . . . d3xNd3pNe−βE(x1,p1,x2,p2,...,xN,pN). (9.3) Exercice : Justifiez que l’approche classique prise dans (9.3)est valide.

Les intégrales sur les impulsions se factorisent et se calculent, il reste

Z= 1

N! λ13NZpositions avec Zpositions =Z · · ·

Z

d3x1 . . . d3xNe−βEint(x1,...,xN). (9.4) Noter que si on prend Eint = 0, l’intégrale se calcule et vaut Zpositions =VN; on retrouve le gaz parfait. Que vautEint dans le système en interaction ? En supposant qu’il n’y a que les interactions de paires1 données par Lennard-Jones, (9.1), on écrit

Eint(x1, . . . ,xN) =X (i,j) i6=j upot(|xixj|) =X i 1 2 X j6=i upot(|xixj|) (9.5)

La première somme se fait sur les N(N −1)/2 paires de points (i, j). Exercice : Comprenez-vous le1/2?

Personne ne sait faire exactement le calcul deZpositions. SiEint était de la forme

Eint(x1, . . . ,xN) =X

i

ueff(xi), (9.6)

où chaque terme de la somme ne dépendait que de xi et pas des autres positions, on pourrait factoriserZpositionset mener le calcul à terme. Ce n’est malheureusement pas le cas dans l’expression (9.5), mais nous allons faire l’approximation que tout se passe comme si on pouvait écrire Eint

de la forme (9.6), où ueff(xi) serait le potentiel moyenressenti par la particule i quand elle est en xi. En comparant avec (9.5), on écrit donc

ueff(xi) = 12X

j6=i

D

upot(|xixj|)E

. (9.7)

Dans chaque terme de la somme, la moyenne est prise sur la position xj de l’autre particule. On remplace donc le potentiel aléatoire ressenti par la particule i par l’espérance de ce potentiel, ou potentiel moyen, ou champ moyen, ressenti par cette particule. Mathématiquement, cette approximation n’est pas justifiable et donne des résultats vaguement corrects dans les grandes lignes mais faux quand on regarde un peu dans les détails.

À partir de là, c’est facile. Comme l’espace est homogène,ueff(xi) n’a aucune raison de dépendre de xi et on noteueff cette constante. Dans (9.4),Zpositions se calcule facilement

Zpositions=VNe−βN ueff. (9.8) Le terme VN est un terme d’entropie (comment placer les particules) et l’exponentielle un terme d’énergie, qui dépend de la température. En fait, l’expression (9.8) est un peu trop simpliste et on va devoir la modifier dans la suite.

Calculons maintenant ueff. Dans (9.7), tous les termes de la somme sont égaux (le champ moyen dû à la particulej ne peut pas dépendre dej) et il suffit d’en calculer un. On a besoin de savoir comment est distribuée la particule j dans l’espace pour faire cette moyenne. Idéalement, il faudrait estimer cette distribution étant donnée la présence de la particuleienxi, mais en première approximation on va supposer que la particule j n’est pas trop perturbée par la présence dei et que sa distribution est uniforme dans l’espace. Il y a donc une probabilité 4πr2dr/V de trouverj

à une distancerdrprès) de i, et on écrit

ueff = N2 Z

0

4πr2dr

V upot(r). (9.9)

Exercice : Justifier la borne supérieure de l’intégrale.

On remplace upot(r) par le potentiel de Lennard-Jones (9.1) et on réalise que cette intégrale diverge enr = 0. Le problème vient de l’hypothèse que la position dej n’est pas perturbée par la présence dei. Autant cette hypothèse est raisonnable pourr > r0, où le potentiel de Lennard-Jones est faible (voir les ordres de grandeur deu0), autant elle est profondément fausse pourr < r0.Le potentiel de Lennard-Jones est très répulsif à courte distance. La distance entre deux particules ne peut pas vraiment être inférieure à r0, la taille d’une particule2.On doit prendre ce phénomène d’exclusion en compte ; pour calculer ueff on suppose donc que r > r0. Il vient ueff= N 2 Z r0 4πr2dr V upot(r) =aN V avec a= 16 9 πr30u0. (9.10) Si on interdit à deux particules d’être trop proches, on doit aussi modifier le préfacteur VN dans (9.8) ; en effet, ce préfacteur se justifie par l’idée que chacune des particules dispose d’une place

V dans le système. Or, si la première particule peut effectivement être mise n’importe où dans le volume V, la deuxième ne dispose plus que de V4

3πr3

0 pour ne pas être trop proche de la

2. Si on imagine que les particules sont des sphères dures (penser au billard ou à la pétanque), on peut donc considérer quer0 est lediamètre (et non le rayon !) d’une particule.

première, la troisième n’a plus queV −2×4 3πr3

0 pour ne pas être trop proche des deux premières, etc. Combinant cette remarque et l’expression (9.10) deueff on arrive à

ZpositionsV V −4 3πr30 V −2×4 3πr03 · · · V −(N−1)×4 3πr03 eβaN2/V. (9.11) (4/3)πr3

0 est de l’ordre du volume d’une particule3. Même multiplié parN, c’est très petit devant

V puisque les particules ne sont pas tassées les unes sur les autres. Cette remarque permet de montrer qu’une expression plus maniable de Zpositions équivalente à (9.11) au premier ordre est

Zpositions ≈(VbN)NeβaN2/V avec b= 23πr03 (9.12) (attention, 2/3 et non pas 4/3) ; il suffit pour s’en convaincre de prendre le logarithme des deux expressions et de tout développer en utilisant ln[V]lnV/V.

On est enfin en mesure de calculer l’énergie libreF =−kBTlnZ en utilisant (9.4). On trouve

F =N kBT ln N VbN + 3 lnλ−1βaN V (9.13) et, puisquep=−∂F/∂V|T,N, p= N kBT VbNaN 2 V2 (9.14)

qui est la célèbre équation de van der Waals. (Remarque : on utilise kB, et N est un nombre de particules ; a est donc une pression×volume2 et b est un volume. Dans les livres, on utilise plutôtR et le nombre de moles. Dans les livres, donc, aest une pression×volume2/mole2 etb un volume/mole. Traduire entre les deux descriptions est facile.)

L’approximation de champ moyen permet donc de relier les paramètres microsco-piques du gaz (u0 et r0) aux paramètres a et b de l’équation de van der Waals.

En utilisantbN V, développons encore 1/(VbN) dans (9.14). Il vient

pVN kBT +N2

V (bkBTa) =N kBT +N2

V b[kBT−(8/3)u0], (9.15) (on a utilisé (9.10) et (9.12) pour calculer a/b), ou

pV N kBT ≈1 +N b V h 1− 8u0 3kBT i . (9.16)

On voit donc que le décalage entre le gaz réel est le gaz parfait est typiquement très faible : N b/V

est d’ordre 10−3 et u0/(kBT) est d’ordre 1. On observe effectivement de manière expérimentale dans les conditions standard que pV /(N kBT) 1±10−3. Même quand le gaz coexiste avec le liquide, la partie gazeuse est souvent bien décrite par l’approximation du gaz parfait.

De plus, l’effet des interactions dépend de la température :

À basse température, pour kBT de l’ordre de u0 ou plus petit, le terme correctif est négatif. Physiquement, les particules ressentent l’attraction de Van der Waals, se rassemblent, etoccupent un moins grand volume que le gaz parfaitce qui, à terme, peut conduire à une liquéfaction. C’est la possibilité d’abaisser l’énergie du système qui pousse les particules à se rassembler.

À haute température(kBT u0), la situation est inversée : le terme correctif est positif ; les particules ne ressentent plus la petite bosse attractive de profondeur u0 et seule la partie répulsive du potentielle a de l’importance. Elles vont donc avoir tendance à s’éloigner et à occuper un plus grand volume que le gaz parfait. C’est la diminution d’entropie due au volume exclu qui est déterminante.

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