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II) Les techniques de dépollution de solutions aqueuses

6) La filtration membranaire

La filtration membranaire est un procédé de séparation utilisant des membranes semi- perméables qui vont permettre l’arrêt ou le passage sélectif de substances dissoutes (ou non) dans un mélange, entre les deux milieux qu’elle sépare sous l’effet d’une force motrice de transfert. La partie de la solution retenue par la membrane est le rétentat tandis que celle qui traverse la membrane est le perméat. Cette technique est adaptée au traitement de solutions aqueuses.

La filtration membranaire présente comme avantages d’être facile à mettre en œuvre, de nécessiter des unités compactes assez peu coûteuses, d’être souvent très efficace, et de présenter plusieurs variantes comme l’osmose inverse, l’ultrafiltration, la microfiltration ou la nanofiltration. Ces différentes techniques se distinguent principalement par la taille des pores

des membranes utilisées. Le classement des différents procédés membranaires est présenté figure 2.

Figure 2 : Classement des procédés membranaires selon la taille des molécules à séparer.

6.a. La microfiltration

La microfiltration est un procédé membranaire qui utilise des membranes dont la taille des pores est comprise entre 0,1 et 10 µm tandis que l’épaisseur de la couche sélective est comprise entre 1 et 100 µm. Cette technique de filtration permet d’éliminer bactéries, pigments de peinture, particules en suspension, ainsi que certains virus. La microfiltration est également utilisée pour le traitement de l’eau et des effluents (Han, 2012), la stérilisation des boissons (Cimini, 2015) ou la clarification des jus de fruits et du vin (Youravong, 2010). Par ailleurs, la pollution médicamenteuse étant un problème de société important, Han et al. ont étudié, à l’aide d’une membrane de type microfiltration en nylon, l’adsorption d’effluents contenant des œstrones (hormones œstrogènes sécrétées par l'ovaire). Ils sont parvenus à adsorber jusqu’à 100% des œstrones (présents à une concentration de 200 µg/L). Il a également été montré que des phénomènes de physisorption entre l’hormone et le nylon étaient à l’œuvre lors de ce traitement.

6.b. L’ultrafiltration

L’ultrafiltration est une technique membranaire utilisant des membranes dont la taille des pores est comprise entre 0,001 et 0,1 µm. Elle permet de séparer des virus, des silices

colloïdales, de la gélatine… L’ultrafiltration est très largement utilisée dans l’industrie, spécialement dans l’industrie alimentaire et laitière, mais également dans le traitement des solutions polluées par des métaux lourds (Kumar, 2014), ou pour l’élimination de matières colloïdales. Elle sert aussi parfois de pré-traitement avant de passer à la nanofiltration ou à l’osmose inverse (Gao, 2017). Ainsi, Kumar et al. ont préparé une membrane d’ultrafiltration en mélangeant du polysulfone et du chitosane/N-succinyle chitosane/N-propylephosphonyle chitosane, membrane qui s’est avérée capable d’éliminer jusqu’à 78% du cuivre, 73% du nickel et 68% du cadmium présents en solution pour des solutions mères préparées à 1000 mg.L-1 à pH 5,5 (Kumar, 2014).

Le principal avantage de cette technique est de travailler à basse pression transmembranaire, ce qui diminue les coûts énergétiques. Comme nous le détaillerons dans ce manuscrit, il est parfois délicat d’éliminer les métaux lourds en utilisant des membranes d’ultrafiltration brutes, dont le diamètre des pores est plus grand que le diamètre hydraté des ions. C’est pourquoi il peut être intéressant de venir modifier chimiquement les membranes d’ultrafiltration afin de favoriser l’élimination des polluants en solution, ou de la combiner à d’autres traitements comme : (i) la formation de micelles ou de polymères avant filtration ou (ii) l’adsorption des polluants persistants sur des adsorbants après filtration.

6.c. La nanofiltration

La nanofiltration est un procédé membranaire de séparation très efficace en raison de la petite taille des pores des membranes utilisées mais elle présente l’inconvénient de nécessiter de travailler à haute pression transmembranaire ce qui génère une forte consommation électrique et donc des coûts plus importants. Aussi, la technique de nanofiltration est principalement utilisée dans le domaine de la purification de l’eau, de l’élimination de micropolluants, de pesticides, de sucres ou de sels. A titre d’exemple, Murthy et al. ont déjà pu montrer qu’il est possible d’éliminer efficacement du nickel ou du cadmium présents en solution en utilisant des membranes en polyamide (Murthy, 2008). En effet, ils ont montré que ce type de membrane était capable de retenir jusqu’à 98% et 92% des ions nickel présents en solution pour une concentration initiale d’alimentation de 5 mg.L-1 et 250 mg.L-1 respectivement.

6.d. L’osmose inverse

L’osmose inverse consiste à faire transférer un solvant à travers une membrane sous l’effet d’un gradient de concentration. Elle laisse passer l’eau à travers la membrane et permet

de retenir les composés de petite taille. Le processus est décrit par la figure 3 : on dispose d’un système à deux compartiments séparés par une membrane semi-perméable contenant deux solutions de concentrations différentes. Il apparaît alors un flux d’eau dirigé de la solution diluée vers la solution concentrée qui va équilibrer les concentrations entre les compartiments : il s’agit de l’osmose (figure 3a). Si on applique une pression au niveau de la solution concentrée (figure 3b), la quantité d’eau qui va traverser la membrane par osmose va diminuer. Si cette pression est suffisamment élevée, le flux va alors s’annuler : cette pression se nomme pression osmotique. Lorsque l’on dépasse cette pression le flux s’inverse, il s’agit du phénomène d’osmose inverse (figure 3c).

Figure 3 : Schéma de principe du processus d’osmose inverse.

Comme la nanofiltration, l’osmose inverse utilise des membranes dont les tailles des pores sont de l’ordre du nanomètre, de sorte qu’elle nécessite une pression élevée (quelques dizaines de bars) afin de pouvoir forcer le transfert du solvant à travers la membrane. Les taux de rejet de membranes d’osmose inverse sont généralement élevés. Cette technique est utilisée pour la production d’eau potable à partir d’eau de mer (dessalement), la production d’eau ultra- pure ou le traitement des effluents industriels, comme montré par Mohsen-Nia et al. qui ont utilisé l’osmose inverse pour dépolluer une solution aqueuse contenant des ions cuivre et nickel (Mohsen-Nia, 2007). La membrane de polyamide utilisée dans leur travail est capable de filtrer les ions Cu2+ et Ni2+ jusqu’aux alentours de 98% avec une concentration d’alimentation de 500 mg.L-1 dans un système mixte cuivre/nickel. Le taux de rejet de ces ions métalliques est amélioré jusqu’à 99,5% en ajoutant un produit chélatant (Na2EDTA) aux solutions ioniques.

Solution diluée Solution concentrée Membrane a) b) c)

Pression = Pression osmotique Pression > Pression osmotique Pas de pression eau eau eau eau eau eau

7) L’adsorption

La technique d’adsorption consiste à venir fixer des polluants présents en solution aqueuse à la surface d’un solide éventuellement modifié chimiquement au préalable. C’est une technique très aisée à mettre en œuvre et qui se révèle efficace. Il existe de nombreux adsorbants dont le charbon actif, qui est le plus utilisé en raison de sa grande surface spécifique, mais aussi des bioadsorbants qui se développent de plus en plus. Cette méthode est parfois utilisée pour le traitement de certains effluents industriels même si ce procédé demeure assez coûteux et même si son efficacité en matière de rétention des métaux lourds fluctue en fonction de la nature des métaux et de la nature des adsorbants.

Ainsi, Kongsuwan et al. sont parvenus à traiter des solutions contenant du cuivre et du plomb de 0,1 à 10 mmol.L-1 de concentration initiale au moyen de charbon actif (Kongsuwan, 2009) tandis qu’Ajjabi et al. ont traité des solutions de cuivre et zinc de 0,5 à 10 mmol.L-1 au

moyen d’un bioadsorbant extrait d’une algue verte (Ajjabi, 2009). D’autres adsorbants à bas coût font actuellement l’objet de travaux. C’est le cas de la kaolinite et de la montmorillonite, naturelles ou modifiées, qui ont permis de traiter des solutions contenant du plomb et du cuivre à une concentration de 10 à 250 mg.L-1, mais aussi du cadmium et du nickel à une concentration

de 50 mg.L-1(Bhattacharyya, 2008).

III) Les techniques de modification chimique de membranes