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Il paraît invraisemblable que l’auto-focalisation se poursuivre jusqu’à atteindre la singularité sans être arrêtée au préalable par des effets de saturation lorsque l’intensité devient suffisamment élevée. Au fur et à mesure que l’intensité lumineuse augmente, une première intuition quant au mécanisme responsable de l’arrêt de l’effondrement viendrait de l’implication des ordres supérieures de la réponse non linéaire du milieu, auxquels on peut faire référence en tant que EKO d’ordre supérieur (Béjot et al.,2010). Responsable d’une saturation de n(I), une propagation non linéaire et stationnaire de la lumière sous la forme d’un filament invoquerait alors exclusivement l’EKO. En ce qui concerne une impulsion laser d’une centaine de femtosecondes centrée à 800 nm dans l’eau, les ionisations photo-induites perturbent au préalable sa propagation pour des intensités lumineuses bien inférieures à celles nécessaires à une manifestation notable des ordres supérieurs de EKO. Les ionisations par le champ optique conduisent à la génération d’un plasma. La présence de porteurs de charges libres dans la bande de conduction du milieu définit une densité de courant J, qui dépend de la densité du plasma ρ (Couairon et Mysyrowicz, 2007) :

∂J ∂t =

e2

meρE (2.22)

où e et me sont respectivement la charge et la masse de l’électron. La considération de cette densité de courant modifie l’équation de propagation 2.2 :

ΔE − ∇(∇ · E) − 1 c2 2E ∂t2 = μ0( 2P ∂t2 + ∂J ∂t) (2.23)

Ainsi, la génération du plasma introduit un nouveau terme dans l’ESNL 2.19 :

∂E ∂z = i 2k⊥E + ik0n2|E| 2E − ik0 2n0 ρ ρcE (2.24)

avec ρc= 0meω02/e2 la densité critique associée à la fréquence centrale de l’impulsion laser ω0. Bien qu’en réalité le processus global de photo-ionisation responsable de la

génération d’un plasma lors de la filamentation d’une impulsion laser ultra courte est complexe et encore sujet à débat (voir section 2.6 et 2.7), résumons dans un premier temps ce processus à l’ionisation multi-photonique de l’eau à 800 nm. L’évolution temporelle de la densité du plasma est alors définie par :

∂ρ

∂t = σKI

Kρn (2.25)

où ρn est la densité de molécules neutres (6.7×1022 cm−3 dans l’eau). Le taux de ionisation est défini par WM P I= σKIK, où K, partie entière de [Ui/¯hω0+ 1], est le nombre de photons nécessaire pour ioniser l’eau, dont le potentiel d’ionisation Ui est estimé autour de 6.5 eV (Vogel et al., 2005; Linz et al.,2016).

La présence de porteurs de charge libres dans la bande de conduction du milieu modifie son indice de réfraction :

Δn = − ρ 2ρc

(2.26)

La condition d’une propagation stationnaire sous la forme d’un filament de lumière qui véhicule une puissance égale à la puissance critique Pcr s’écrit alors (Braun et al.,

1995) : n2I = ρ 2ρc +(1.22λ0) 2 8πn0a20 (2.27)

où la divergence causée par la variation négative de l’indice de réfraction induite par la génération du plasma s’ajoute à celle due à la diffraction intrinsèque du faisceau gaussien, définie en fonction de son rayon minimum a0, pour venir compenser

exactement l’auto-focalisation par EKO. L’équation 2.27réhabilite le concept d’un filament de lumière dont la propagation invariante est similaire à un soliton spatial, l’instabilité du mode de Townes étant ici palliée par la défocalsation introduite par la génération du plasma. Ainsi, la résolution de l’équation 2.24 couplée à celle de l’équation2.25permet de définir un modèle simplifié de la propagation d’une impulsion laser dans un milieu de Kerr stabilisée par les ionisations photo-induites. Pionnier en ce qui concerne la description de la filamentation d’une impulsion laser femtoseconde

(Braun et al.,1995), ce modèle parvient à fournir une bonne estimation du diamètre transversal du filament, de l’intensité lumineuse maximum au coeur du filament et de la densité maximum atteinte par le plasma correspondant. Dans l’eau, la puissance portée par le filament Pf = Pcr= πa

2

2 Imax approxime l’intensité maximale Imax et ρmax∼ σKImaxK ρntp, où tp∼ 100 fs est la durée d’impulsion, fixe la densité maximale. L’équation 2.27 permet alors de déterminer grossièrement la taille du filament ( 10 μm), son intensité maximale (∼ 5 TW.cm−2) et sa densité maximale (∼ 1019 cm−3). Ce modèle introduit également un aspect fondateur de la filamentation laser : la saturation de l’intensité lumineuse qui est maintenue relativement constante par l’équilibre atteint tout au long de la propagation filamentaire (Liu et al.,2002). De manière analogue, le sillon plasma maintient une densité saturée et constante le long du filament, aspect vérifié expérimentalement (Tzortzakis et al., 1999).

Néanmoins, le maintien de la propagation stationnaire symbolisé par l’équation 2.27 fait face à un paradoxe rédhibitoire, le déséquilibre introduit par les pertes d’énergie non linéaires intrinsèques aux IMP. Dans une tentative d’outrepasser cette aporie, l’introduction du paradigme de l’auto-guidage subdivise spatialement le filament selon un gradient transversal d’indice de réfraction (Nibbering et al.,1996). Le sillon plasma au coeur du filament octroie un indice de réfraction négatif au centre. L’absence de plasma dans sa proche périphérie, d’intensité qui reste élevée, est supposée constituer un revêtement d’indice non linéaire positif conféré par l’EKO. L’ensemble semble établir un pseudo guide d’onde grâce à la réflexion-réfraction de la lumière à l’interface plasma-revêtement suite à l’auto-défocalisation par le plasma. Une partie de la lumière s’échappe du guide, tandis que l’autre fraction est réfléchie vers le centre du filament. Le parachèvement de ce paradigme attribue un caractère dynamique au revêtement, qui fournit l’énergie nécessaire à la compensation des pertes au sein du plasma. Le modèle basé sur l’auto-guidage a l’avantage d’introduire l’idée d’un réservoir d’énergie pour la compensation des pertes d’énergie non linéaires au coeur du filament. Il tente également d’apporter une explication à l’émission conique de lumière accompagnant la filamentation (voir section 2.4), qui correspond ici à la lumière réfractée du guide d’onde.

De manière générale, pour un faisceau laser caractérisé spatialement par un profil transversal d’intensité gaussien, l’impulsion laser correspondante affiche de surcroît un profil d’intensité temporel de type gaussien, tel que I = I(x, y, z) exp[−2tt2p2]. La

considération d’une propagation indépendante des différentes tranches temporelles de l’impulsion, chacune contenant une puissance spécifique, définit un modèle dit

de foyers mouvants. Dans le référentiel du laboratoire, les tranches centrales dont la puissance dépasse Pcr auto-focalisent plus ou moins rapidement et à des distances plus ou moins importantes déterminées selon l’équation2.21. La juxtaposition longitudinale de l’ensemble de ces foyers non linéaires donne l’illusion d’un filament de lumière (Figure 2.1).

Figure 2.1 – Illustration du modèle de focus mouvant : trois tranches temporelles de l’impulsion (0, 1, 2) focalisent pour converger à des distances différentes (respectivement zf il, début du filament ; z1 et z2) en fonction de la puissance associée à chacune des tranches ; Figure extraite de (Kandidov et al.,2009).

Néanmoins, l’utilisation d’une lentille physique convergente pour assister la filamen- tation redéfinit la position du foyer non linéaire (Liu et al., 2003) :

zc = zcf

zc+ f (2.28)

où zc est la distance par rapport à la lentille de focale f. Le modèle du foyer mouvant prédit alors l’impossibilité de la formation d’un filament au delà du foyer géométrique associé à la lentille, en contradiction avec les observations expérimentales (Lange et al.,

1998). Cette discordance trouve son origine dans la restriction du modèle à un cadre statique. Or, dans une vision plus dynamique et globale, la génération d’un plasma par les tranches au voisinage de l’intensité crête perturbe la propagation des tranches suivantes et retarde leur effondrement. Le couplage entre les différentes tranches introduit par la génération du plasma permet d’expliquer la possibilité d’une extension de la filamention assistée par une lentille convergente au delà du foyer géométrique. L’approximation impliquée par l’indépendance des tranches temporelles de l’im- pulsion laser suppose un effet négligeable des processus physiques responsable de leur couplage. L’impulsion est définie temporellement par sa phase spectrale. La propagation regroupée des différentes fréquences de l’impulsion sous la forme d’un

paquet d’onde détermine une vitesse de groupe vg= ∂k∂ωω

0. Lors de la traversée d’un

milieu dispersif, chaque fréquence définit une vitesse de phase vϕ= c/n(ω) de l’onde correspondante. La disparité des vitesses de phase implique l’étalement du paquet d’onde selon le principe de dispersion de vitesse de groupe (DVG) symbolisée par k0= ∂ω2k2

ω0, le coefficient du second ordre du développement perturbatif de k(ω) autour de la fréquence centrale de l’impulsion ω0 :

k(ω) = k0+ (ω − ω0)k0+21(ω − ω0)2k0+ ... (2.29)

La DVG accroît la durée de l’impulsion et diminue son intensité crête. Son effet devient notable seulement après que l’impulsion ait parcouru une certaine distance dans le milieu (Couairon et Mysyrowicz,2007) :

LDV G= t

2

p

2k0 (2.30)

où k0∼ 257 fs2.cm−1 à 800 nm dans l’eau (Scarborough et al., 2008). Pour tp∼ 100 fs, une LDV G∼ 20 cm plaide pour un modèle qui néglige la DVG, mais qui n’empêche donc pas d’approximer de manière satisfaisante la filamentation d’une impulsion laser d’une centaine de femtosecondes sur une distance de quelques centimètres dans l’eau.

Figure 2.2 –Représentation schématique du processus dynamique d’alternance entre auto- focalisation et auto-defocalisation au coeur du faisceau laser (ligne continue), générateur périodique de foyers plasma de basse densité le long de l’axe de propagation. La partie du faisceau moins intense à la périphérie supporte le filament au centre en tant que réservoir d’énergie (ligne discontinue) ; Figure extraite de (Couairon et Mysyrowicz,2007).

Pour résumer, la propagation non linéaire de l’impulsion laser ne se distingue pas seulement par une modulation spatiale de sa phase, mais également par sa modulation temporelle. Ainsi, un modèle plus dynamique permet de mieux appréhender le processus de filamentation. Une description plus exhaustive de la propagation dépeint une évolution initialement déterminée par l’auto-focalisation de l’impulsion. Lorsque sa proue devient suffisamment intense, elle génère un plasma dans son sillage, responsable de la défocalisation de sa poupe. Isolé, le front de l’impulsion décline à cause de l’absorption multi-photonique. Le plasma s’estompe et autorise une refocalisation de l’arrière de l’impulsion, qui revitalise son intensité. Ce processus dynamique de réapprovisionnement spatial se répète de manière périodique (Figure 2.2) jusqu’à ce que l’épuisement de l’impulsion instaure P < Pcr (Mlejnek et al., 1998).

L’absorption multi-photonique (AMP) augmente avec l’intensité lumineuse et donc perturbe la phase spatiale du faisceau initialement caractérisée par un certain gradient d’intensité, à l’origine de l’auto-focalisation. Au delà de son implication dans la géné- ration du plasma, il devient nécessaire d’intégrer une AMP qui contribue de manière indépendante au contrebalancement de l’effondrement du faisceau laser. L’AMP s’assimile à un courant dissipatif JAM P = 0cn0βKIK−1E, où βK = σKK ¯hω0ρn est la section efficace d’AMP. L’intégration de l’AMP dans l’ESNL se lit (Porras et al.,

2004) : ∂E ∂z = i 2k⊥E + ik0n2|E| 2E − ik0 2n0 ρ ρcE − βK 2 |E| 2K−2E (2.31)

L’AMP affecte également l’évolution temporelle du plasma :

∂ρ ∂t = ( βK K ¯hω0I K)(1 ρ ρn) (2.32)

La revitalisation de l’énergie absorbée intronise un élément primordial de la filamen- tation laser : le réservoir d’énergie constitué par la partie de l’impulsion laser de plus faible intensité (Figure 2.2).

Bien que ce modèle de réapprovisionnement dynamique ait permis de mettre en exergue le concept de réservoir d’énergie, il échoue à prédire une qualité spectaculaire du filament, sa robustesse, particulièrement exacerbée par ses propriétés de régé- nération. En effet, l’étude expérimentale du devenir d’un faisceau laser, subissant un processus de filamentation, lorsque sa partie centrale la plus intense est bloquée,

observe une reconstruction rapide du filament en amont de l’obstacle (Kolesik et Moloney, 2004; Dubietis et al., 2004). En revanche, lorsque à l’aide d’un diaphragme, seule la partie périphérique moins intense du faisceau correspondant au réservoir d’énergie est annihilée, le filament disparait rapidement et de manière irréversible. Les pertes non linéaires peuvent être identifiées à un obstacle diffus étendu le long de l’axe de propagation au centre du faisceau laser. Ces pertes sont compensées uniquement en présence du réservoir d’énergie. Ce contrebalancement apparaît essentiel dans la dynamique de propagation non linéaire de l’impulsion laser dans l’eau. De telles observations encouragent à s’intéresser à un modèle qui prendrait en considération uniquement l’AMP en plus de la diffraction et l’EKO. Suite à l’auto-focalisation d’un faisceau gaussien, l’atténuation en son centre aplatit le sommet de son profil d’intensité transversal, initiant la formation d’un profil équivalent à une super gaus- sienne, défini par I(x, y) = I0exp[2(

x2+y2)n

an0 ]. L’élévation de l’ordre n accentue l’aplatissement du profil d’intensité transversal correspondant, qui converge alors vers une fonction rectangulaire. L’auto-focalisation d’un faisceau super gaussien est connue pour entraîner l’apparition d’une structure annulaire. L’aplatissement puis la diminution de l’intensité au centre du profil spatial transversal d’un champ laser, E(x, y, z, ω) = E(x, y, z, ω) exp(ik0z) dans le domaine fréquentiel, peut s’interpréter comme l’excavation d’une singularité en (x, y) = 0. Le profil transversal du fais- ceau se distingue par la formation d’un anneau dont la propagation doit satisfaire (Gaižauskas et al., 2009) :

+ k⊥2)E = −4πδ(r) (2.33)

où δ(r) correspond à une distribution de Dirac sur r = (x, y) et k2 = k2n2− k02. La résolution de l’équation2.33extrait deux solutions indépendante pourk1= k⊥r +k0z,

E1(r) = iπH0(1)(k⊥r) et k2=−k⊥r+k0z, E2(r) = iπH0(2)(k⊥r), où H0(1,2)représentent

les fonctions de Hankel d’ordre zéro du premier et second type. Le vecteur d’onde k1, respectivement k2, symbolise la propagation d’une onde divergente, respectivement convergente. La combinaison linéaire de ces solutions particulières fournit la solution générale (Gaižauskas et al., 2009) :

Cette solution correspond à une famille d’ondes coniques d’angle ∼ k/k0. L’orien-

tation de son flux d’énergie est déterminée par une balance entre les composantes divergente et convergente. Lorsque cette balance est équilibrée (ad = ac), la superpo- sition des faisceaux de Hankel s’assimile à un faisceau de Bessel E ∼ J0(k⊥r), avec J0

la fonction de Bessel d’ordre zero, dont la propagation se distingue par une absence de diffraction et surtout des propriétés de régénération (Durnin et al., 1987). Or, la présence des pertes non linéaires au centre du faisceau déséquilibre cette balance de telle sorte que ac> ad instaure la propagation d’un faisceau de Bessel déséquilibré (Gaižauskas et al., 2009; Porras et al., 2004). Ce déséquilibre se caractérise par une convergence du flux d’énergie depuis la périphérie et vers le centre du faisceau. Ainsi, la filamentation s’assimile à la transformation spontanée et auto-régulée du faisceau laser incident en un faisceau de Bessel déséquilibré correspondant à une onde conique, pour lequel le flux d’énergie du réservoir dirigé vers le centre compense les pertes dues à l’AMP (Gaižauskas et al.,2009; Porras et al.,2004). Contrairement à la pro- pagation invariante d’un soliton spatial, la propagation plus dynamique d’un faisceau de Bessel non linéaire déséquilibré en tant que solution stationnaire stable de la filamentation laser sous-entend une localisation relativement plus faible, caractérisée par une diffraction minimisée et des propriétés de régénération.

La forme de la solution stationnaire et faiblement localisée est intrinsèque au modèle décrivant la propagation filamentaire et donc aux phénomènes physiques que ce dernier prend en compte. Le faisceau de Bessel déséquilibré décrit de manière convenable la propagation d’une onde quasi monochromatique, valable dans le cadre d’une approximation qui néglige la DVG. Néanmoins, le polychromatisme de l’impulsion laser et surtout l’auto-modulation de sa phase décrit dans la section 2.4, responsable d’un élargissement considérable de sa bande spectrale, questionnent quant au rôle de la DVG au cours de la filamentation laser. Ici, un élément de réponse est fourni par un modèle de propagation non linéaire d’un paquet d’onde polychromatique qui ne prend en considération que sa diffraction, sa dispersion et l’EKO :

∂E ∂z = i 2k⊥E − i k 2 2E ∂t2 + ik0n2|E| 2E (2.35)

De manière analogue, la propagation stationnaire associée à l’équation 2.35 implique une métamorphose spontanée de l’impulsion laser en onde conique. L’angle du cône étant défini par k⊥/k0, ce dernier affiche une dépendance en fonction de la longueur

d’onde λ du spectre polychromatique de l’impulsion dans un milieu dispersif telle que n = n(λ) :

k⊥(Ω) = 

k0k0Ω2+ 2k0βX (2.36) où Ω = 2πcλ − ω0. Cette forme de la relation de dispersion définit une onde conique affranchie de toutes diffraction et dispersion. De manière similaire à la représentation de la dispersion angulaire θ(λ) dans le plan fréquentiel (k, Ω) (Figure 2.3.a), cette famille d’onde exhibe une forme doublement conique en X dans le domaine spatio- temporel (Figure 2.3.b), intense noyau entouré d’une réserve d’énergie sous la forme d’un piédestal conique dans le champ proche (r, t), forme conservée dans le domaine analogue, le champ lointain (k, Ω) (Kolesik et Moloney, 2004;Faccio et al., 2006,

2007; Conti et al., 2009; Gaižauskas et al.,2009). La conservation du profil en X lors du passage du champ proche vers le champ lointain plaide en faveur d’une propagation stationnaire.

a b

Figure 2.3 – a. Représentation de la relation de dispersion par rapport à une fréquence

de référence ω0 (Ω =ω − ω0) pour l’eau en tant que milieu dispersif dit normal. b. Coupes de la distribution spatio-temporelle de l’intensité de l’onde conique correspondante ; extrait de (Conti et al.,2009;Faccio et Di Trapani,2011)

Dans la mesure où l’impulsion laser se transforme en une onde conique X portée par la fréquence ω0, sa propagation ne peut plus être amalgamée à celle d’une onde plane.

Ainsi, la relation de dispersion 2.36redéfinie pour l’onde X correspondante un vecteur d’onde axial raccourci k0− βX. Soit k0+ Δk la modulation du vecteur d’onde de la

porteuse associée à l’impulsion laser assujettie à l’EKO tel que Δk = ω0n2I/c. L’exci- tation d’une onde X subissant elle même cette modulation impose l’accord de phase

k0+ Δk = (k0+ Δk) − βX+ Δk = k0−βX+ 2Δk et donc βX = ω0n2I/c (Faccio et al.,

2006). Sous cette forme, βX définit une solution stationnaire et faiblement localisée de l’ESNL 2.35pour laquelle la modulation de la phase de l’impulsion laser par les propriétés dispersives du milieu de propagation contrebalance la modulation de phase par EKO. La solution du cas polychromatique se présente logiquement sous la forme d’une combinaison linéaire de faisceaux de Bessel monochromatiques (Couairon et al.,

2016). En tant que famille d’onde coniques, les ondes X possèdent également des propriétés intrinsèques de régénération.

Une interprétation plus pragmatique de la genèse d’ondes X considère d’abord le mode de Townes obtenu pour une propagation localisée de l’impulsion laser, fruit de l’installation d’une équilibre stationnaire entre l’auto-focalisation et la diffraction. La stabilité de cette solution à symétrie radiale est notamment remise en cause par les instabilités de modulation azimutale, qui correspondent à de faibles perturbations infinitésimales et radialement asymétriques auxquelles sont associés les vecteurs d’ondes transverses k de l’impulsion laser. Sous certaines conditions, l’amplification exponentielle de ces instabilités de modulation brise la symétrie radiale du champ initial. Dans un milieu dispersif, le contrebalancement entre les effets de l’auto- focalisation et de la DVG peut aboutir de manière analogue à la formulation d’un mode de Townes. L’amplification des faibles perturbations affectant cette solution stationnaire conduit alors à la formation d’ondes X. Le processus sous-jacent à l’amplification s’assimile à un mélange à quatre ondes (MQO), propice dans le cadre d’une impulsion laser assujettie à une réponse non linéaire du troisième ordre. Ce mélange implique l’amplification d’une instabilité de modulation, le signal ks sous la forme d’une onde X, et de son complémentaire kc, qui se nourrissent de deux photons pompes kp de l’impulsion laser incidente. La fréquence d’une onde X amplifiée est redéfinie de manière plus général par ω0+ ΩX tel que :

k⊥(Ω) = 

k0k0− ΩX)2+ 2k0βX (2.37)

L’onde X portée par (ω0+ ΩX) se spécifie dans le cadre de l’approximation des faibles perturbations (|ΩX| << ω0 et |βX| << k0) par une vitesse de phase vX(ϕ)= 0+ ΩX)/(k(ω0+ ΩX)−βX) et une vitesse de groupe vX(g)= 1/k(ω0+ ΩX). Le MQO impose l’accord de phase 2kp= ks+ kc, avec Ωs=−Ωc, kp= k0+ Δk et ks,c= k(ω0+ Ωs,c)− βs,c. L’approximation des faibles perturbations autorise le développement k(ω0+ Ωs,c) = k0+ k0Ωs,c+ k0Ω2s,c/2 et permet donc d’écrire 2Δk = k0Ω2s,c−βs−βc=

0n2I/c. L’amplification est favorisée énergétiquement pour l’intensité crête au centre

de l’impulsion, d’autant plus que la croissance des ondes X peut alors également se nourrir de l’auto-modulation de phase de la fréquence centrale ω0, expliquant

au passage la nature conique de l’émission du super-continuum (voir section 2.4). Le croisement des ondes X signal et complémentaire avec le centre de l’impulsion doit satisfaire k⊥= 0 pour Ω = 0. L’injection de cette condition dans l’équation 2.37impose βs,c=−k0Ω2s,c/2 = −Δk/2 = −ω0n2I/2c. Le processus de filamentation d’une impulsion laser femtoseconde dans un milieu dispersif résulte alors en la métamorphose spontanée d’un paquet d’onde gaussien en un couple d’ondes X portées par les fréquences ΩX1,X2=±ω0n2I/ck0 décalées de part et d’autre de

la fréquence centrale de l’impulsion ω0 telles qu’un saut de fréquence |2ΩX1,X2| les

séparent. La projection de ce couple d’ondes X non linéaire dans le champ lointain se distingue par la présence de franges témoignant de l’interférence entre les deux composantes du couple (Figure 2.4) (Faccio et Di Trapani, 2011)).

Figure 2.4 – Mesure de la dépendance angulaire du spectre d’une impulsion laser femto- seconde suite à sa filamentation dans plusieurs centimètres d’eau ; extrait de (Faccio et al.,

2007).

Dans un milieu dispersif, les deux ondes voyagent selon des vitesses de groupe différentes, l’une étant subluminale et l’autre supraluminale relativement à la vitesse de groupe de l’impulsion initiale. La prise en compte de la DVG permet de mieux interpréter la modulation spatio-temporelle de l’impulsion laser au cours de sa

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