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3.2 Article 2

4.1.1 Effet direct de l’irradiation laser

De manière analogue à la capture résonante de l’électron par une molécule d’eau décrite dans le premier chapitre, une molécule d’ADN peut se dissocier suite à son interaction avec un électron de subexcitation (Alizadeh et Sanche, 2012). De nombreuses études de l’interaction de ces électrons dits lents ou de basse énergie (EBE  10eV) avec différentes sous unités plus ou moins complexes de l’ADN en phase gazeuse et condensée ont permis de mieux appréhender les mécanismes sous-jacents à l’induction des dommages associés à l’ADE (Hanel et al., 2003; Li et al., 2004;

Ptasinska et al., 2005). La version déshydrogénée des bases présentées dans la Figure 4.1 est caractérisée par une importante affinité électronique positive, ce qui favorise la perte d’un atome hydrogène, accentuée au niveau des atomes d’azote, suite à l’occupation d’une orbitale vacante de la base par l’électron (B + EBE → (B−) → (B-H)− + H ; résonance de forme). La transposition de cette déshydrogénation à un nucléoside voit la nature plus fragile du lien glycosidique N-C, relativement à

N-H, plaider pour sa rupture préférentielle suite à la formation de l’ion transitoire dans un état dissociatif, libérant ainsi la base (Zheng et al., 2004). La complétion du nucléoside en nucléotide par l’ajout d’un groupement phosphaté en C5 du sucre offre de nouvelles perspectives à un électron éventuellement capturé par la base. Dans son état natif, la liaison C5-O se caractérise par deux orbitales moléculaires liantes σ et π∗, l’une remplie et l’autre vacante. Ainsi, il a été démontré que l’orbitale π∗ est énergétiquement favorable à l’accueil de l’électron en excès (Berdys et al.,2004). Tout d’abord transféré depuis la base pour venir se localiser au niveau du complexe sucre-phosphate, l’électron peut trouver au sein de l’orbitale anti-liante σ∗ de ce dernier une destination finale qui entraîne la rupture dissociative de la liaison C-O (Li et al.,2010). Le transfert de l’électron depuis la base nécessite un tant soit peu

d’énergie cinétique.

Figure 4.2 – Voies de dé-excitation d’un anion transitoire formé suite à la capture

résonnante d’un électron par une base de l’ADN. L’électron d’énergie cinétique initiale E0

peut être émis de nouveau dans la bande conduction , ec , ou transféré vers le groupement

phosphate, et ; Figure extraite de (Liet al.,2010).

Globalement, suite à sa capture résonante par l’ADN, un électron peut être réémis en ayant simplement subit l’équivalent d’une diffusion élastique. Le transfert de l’électron vers le groupement phosphate peut conduire à une rupture de la colonne vertébrale de l’ADN, soit une cassure simple brin (voie 1 Figure4.2). L’électron peut s’attarder et endommager l’ADN en libérant la base ou en modifiant sa composition

chimique (voie 2 Figure 4.2). Finalement, au dessus d’un certain seuil d’énergie cinétique, les EBE accèdent à une résonance de coeur excité. Dans ce contexte, l’électron peut être transféré au groupement phosphate tout en abandonnant la base dans un état électronique excité potentiellement dissociatif (voie 3 Figure 4.2). La capture résonante induit alors un dommage complexe à l’ADN en engageant plusieurs ruptures de liaison chimique localisées au sein du même nucléotide.

L’éventualité d’une altération supplémentaire de l’ADN considère l’interaction des espèces réactives issues de la dissociation avec les nucléotides environnants le site de capture initiale. Notamment, la survenue d’un dommage sur chaque brin d’ADN analogue et dont la proximité est inférieure à 10 paires de bases est définie comme une cassure double brins. En aparté, il est important de prendre en considération l’impact de l’environnement de la molécule d’ADN sur le processus de ADE. La transposition des résultats obtenus en phase gazeuse et condensée à des systèmes d’intérêts biologiques en milieux aqueux constate par exemple une modification significative des résonances dissociatives induites par la capture électronique pour des complexes d’ADN hydratés DNA-H2O (Ptasińska et Sanche, 2007).

4.1.1.2 Absorption et ionisation multi-photonique

Notre sujet d’étude se focalise autour des conséquences radiobiologiques médiées par la génération d’un plasma photo-induit. Les conditions selon lesquelles le système d’intérêt biologique présent en solution aqueuse est irradié présupposent un effet direct minime du champ laser sur le soluté dilué. De manière analogue à des effets thermiques négligeable, l’absence de perturbations dues à l’interaction significative avec la lumière proche infra-rouge intense de l’impulsion laser conditionne l’identification de la nature de la physico-chimie qui implique les réactions entre les produits issus des ionisations primaires au sein du plasma de basse densité. Notamment, nous nous sommes constamment préoccupés de la sensibilité particulièrement accrue qu’affiche l’ADN quant à l’absorption de la lumière ultra-violet. Ainsi, un maximum d’absorption des bases autour de 260 nm rend l’ADN particulièrement vulnérable au potentiel événement d’absorption multi-photonique (trois photons) lors de la filamentation de l’impulsion laser dans une solution aqueuse d’ADN. Suite à une AMP, la base libère l’énergie en excès par le déclenchement de réactions photo-chimiques. Cette voie de relaxation fragmente la base pour ensuite instaurer des liaisons covalentes entre bases adjacentes (Douki, 2013). La génération de dimères photo-induits concerne surtout les bases pyrimidiques T et/ou C et correspond principalement à la formation de

cyclo-butane pyrimidine (CPD) et de photo-produits pyrimidine (6-4) pyrimidine (64PP). Le bilan quantitatif d’une interaction direct d’une lumière à∼ 266 nm avec de l’ADN cellulaire extrait de noyaux cellulaires et dilué en solution aqueuse assoit la domination de la photo-production des composés T-T CPD, grossièrement deux fois plus nombreux que T-C CPD et T-C 64PP, cinq fois supérieur aux C-T CPD et plus d’un ordre de grandeur au dessus de T-T 64PP et C-C CPD. La quantité détectée de produits correspondants aux autres combinaisons (C-T et C-C 64PP) reste négligeable. Logiquement, cette photo-chimie intrinsèque à l’ADN affecte les Thymines de manière prépondérante.

Le champ laser intense a potentiellement la capacité d’arracher directement un électron d’une base, ce qui peut alors être assimilé à une oxydation à un électron de l’ADN (Cadet et al., 2014). La probabilité du détachement de l’électron est alors inversement proportionnel au potentiel d’ionisation de la base concernée, G < A < C < T (Gabelica et al., 2007). Ainsi, le rendement d’IMP augmente pour G. De plus, au sein d’une séquence d’ADN, le cation radicalaire formé est préférentiellement transféré le long de la molécule d’ADN vers les sites de piégeage que constituent les Guanine du fait de leur potentiel d’oxydation bas relativement aux autres bases (Giese,

2002; Cadet et al., 2014). En présence d’eau, le cation radicalaire de G s’hydrate rapidement pour former un radical 8-hydroxy-7,8-dihydroguanyl. Ce radical peut réagir avec l’oxygène environnant, pour former la 8-oxo-Guanine (8-oxo-7,8-dihydro- 2’-deoxyguanosine), et ainsi oxyder l’ADN (Cadet et al.,2014;Gomez-Mendoza et al.,

2016). Une détection excédentaire de ce dommage oxydatif, au cours de l’analyse des dommages induits à l’ADN, constitue un premier marqueur de l’effet direct du champ laser intense.

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