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Entre fiction critique et écriture du réel : la littérature française contemporaine

CHAPITRE 1. État des champs littéraires antillais, africain et français

3. Le champ littéraire français et la lutte des définitions du romanesque

3.2. Entre fiction critique et écriture du réel : la littérature française contemporaine

À partir des années 1980, la critique parle d‟un « retour des normes romanesques270 » dans les œuvres françaises, c‟est-à-dire du récit, de l‟intrigue, du personnage et, surtout, le roman n‟hésite plus à parler concrètement du monde. Aussi la littérature des dernières quatre décennies résiste-t-elle à nommer sa différence, contrairement aux courants précédents, connus sous les noms tels que nouveau romancier, avant-gardiste, surréaliste, réaliste, etc. : « Les écrivains eux-mêmes se défient désormais de toute étiquette, de toute formule comme si elles menaçaient leurs œuvres de carcan ou de caricature. C‟est sans doute l‟une des raisons de notre difficulté à nommer l‟esthétique contemporaine autrement que par sa simple désignation neutre de “contemporaine”271 ». Dans une perspective institutionnelle, le rejet d‟auto-désignation est en soi une stratégie de distinction, compte tenu de l‟importante tradition de nomination qui précède. Certains auteurs et critiques se sont débattus sur la postmodernité, le « seul concept

270 Wolfgang Asholt et Marc Dambre [dir.], Un Retour des normes romanesques dans la littérature

française contemporaine, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2010.

271 Dominique Viart, « Le moment critique de la littérature. Commet penser la littérature

contemporaine », dans Bruno Blanckeman, Jean-Christophe Millois et Dominique Viart [dir.]), Le roman

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nouveau avancé272 », dont La Condition postmoderne (1979) de Jean-François Lyotard constitue un texte fondamental. Or, comme le dit Dominique Viart, le concept, en général, « est relativement confus puisque les définitions que l‟on en donne ne s‟accordent pas entre elles ; il nomme la dispersion et le chaos, la confusion de valeurs, mais, évidemment, ne les organise guère273 ». Quoique certains théoriciens de la postmodernité viennent de la France, tel Lyotard, le concept acquiert plus d‟ampleur aux États-Unis, comme le remarque Antoine Compagnon. Celui-ci note qu‟en France, Butor, Simon, Robbe-Grillet, Kundera, Borges, Nabakov et Beckett sont normalement classés parmi les modernes, tandis qu‟ils sont « tous nettement postmodernes […] en Amérique274 ». Pour lui, le rejet de l‟historicisme du projet postmoderne rejoint, en effet, la modernité, où le « point crucial est le pli critique275 ». Compagnon présente donc le concept de la postmodernité en littérature comme redondante, en ce sens qu‟une modernité donne lieu à une autre modernité.

Viart identifie les traits récurrents des romans d‟aujourd‟hui : « effacement des frontières génériques, traque de l‟obscur, affrontement aux poncifs, risque de l‟illisible, vœu de transparence, écriture du réel276 ». D‟autres époques ont certes déjà vu ces traits, mais selon Viart, leur spécificité réside dans le fait « qu‟ils ne font jamais l‟économie du texte et celui-ci ne leur est jamais donné a priori. Écrire demeure un problème277 ». Ainsi, s‟il y a « retour des normes romanesques » ou sortie « du brouillard278 », il reste que l‟ère du soupçon a bel et bien laissé son empreinte. Il en est de même pour la réévaluation de la relation entre texte et réalité avancée par Barthes. Les œuvres « néo- réalistes les plus fécondes279 » ne tentent pas de totaliser le réel, mais plutôt d‟essayer de le comprendre. Les auteurs continuent également d‟approfondir la réflexion sur le type de savoir particulier que le roman contient.

272 Dominique Viart, « Le moment critique de la littérature. Commet penser la littérature

contemporaine », art cit., p. 16.

273 Id.

274Antoine Compagnon, Les cinq paradoxes de la modernité, Paris, Seuil, 1990, p. 159. 275 Ibid., p. 173.

276 Dominique Viart, « Le moment critique de la littérature. Commet penser la littérature

contemporaine », art cit., p. 21.

277 Ibid., p. 21.

278 Lakis Proguidis, De l’autre cote du brouillard. Essai sur le roman français contemporain, op cit. 279 Dominique Viart, « Le moment critique de la littérature. Commet penser la littérature

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Le réinvestissement de l‟histoire et du réel suggère que les romanciers français assument l‟héritage des écrivains d‟avant le nouveau roman. De nombreuses pratiques étaient souvent écartées par ce dernier (l‟intrigue, le personnage, la polyphonie). Toutefois, l‟écriture du réel est renouvelée par son commerce avec le doute jeté sur la vision du monde et la conscience critique de l‟œuvre qui est approfondie par les nouveaux romanciers. Wolfgang Asholt et Marc Dambre résument avec justesse les mutations du roman à partir des années 1980 :

« Notre temps est celui du récit », écrivait Danièle Sallenave, et le retour au récit est omniprésent, ce qui n‟exclut nullement que ce retour tienne compte des discussions (théoriques) précédentes et de la concurrence et des diverses transformations médiatiques, de la photo au cinéma en passant par l‟hypertexte280.

En effet, une forte tendance critique marque les textes. Ainsi, Pierre Michon et Pierre Bergounioux privilégient une poétique fondée sur l‟enquête, l‟interrogation et la recherche.

Ces fictions critiques, dans leur extrême variété […], ont en commun de défaire les codes malmenés du roman pour y introduire un dialogue constant et complexe avec les élaborations des sciences humaines […] Elles sont aussi dans un rapport majeur avec la littérature passée, fortement sollicitée non comme modèle mais comme interlocutrice et partenaire281.

Et Viart de poursuivre :

Parce que c‟est une littérature critique, elle a prise sur les objets qu‟elle rencontre, dont elle traite, auxquels elle se confronte Ŕ et qui la sortent ipso facto de tout solipsisme. Elle est une littérature transitive. Parce qu‟elle traite de ces objets non dans un pur travail de spéculations imaginaires ou abstraites mais en cherchant en elle et autour d‟elle les éléments concrets qui lui serviront de traces, de documents, de signes à interpréter, elle est une littérature matérielle, qui articule ces éléments matériels avec lesquels et à propos desquels écrire, objets et outils de l‟œuvre, et la qualité matérielle de l‟écriture, sa confrontation au matériau du langage, à la part de signifiants et de structures non plus simplement considérés comme vecteurs transparents d‟un contenu mais comme matérialité du sens. Elle est enfin, dans son dialogue permanent avec l‟héritage littéraire et avec les considérations des Sciences humaines, une littérature dialogique. Aussi les « fictions » ne sont-elles plus de simples productions de l‟imaginaire, mais bien des élaborations interrogeantes Ŕ et parfois élucidantes Ŕ aux confins de l‟imagination et de la réflexion282.

280 Wolfgang Asholt et Marc Dambre, Un Retour des normes romanesques dans la littérature française

contemporaine, op cit., p. 11.

281 Dominique Viart, « Le moment critique de la littérature. Commet penser la littérature

contemporaine », art cit., p. 29.

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Ou bien, comme l‟affirme Bruno Blanckmann, l‟aspect critique peut tendre vers le commentaire de la situation de l‟écriture :

Joueuses, enfin, certaines fictions mettent en jeu leur rapport de production littéraire au champ culturel. Autant que leur substance (la matière-écriture) et leur mode d‟agencement (la manière-récit), elles réfléchissent leur pouvoir d‟articulation linguistique, leur capacité de médiation scientifique, leur puissance de représentation symbolique. Elles interrogent leur aptitude à édifier la langue et bousculer la rhétorique, à relayer une érudition vivante et diffuser des savoirs efficaces, à élaborer une culture-cible et constituer des savoirs symboliques283.

Évoquons l‟œuvre de Pascal Quignard, décrit comme « un mixte indissociable de fictions et de spéculations théoriques284 ». Puis le roman d‟Andreï Makine, La femme

qui attendait, où l‟enjeu est l‟interrogation des manières possibles d‟imaginer et d‟écrire

l‟attente d‟une femme, dont son mari n‟est jamais retourné de la guerre.

La critique littéraire situe Marie NDiaye normalement parmi les auteurs contemporains des Éditions de Minuit : Jean Echenoz, Jean-Philippe Toussaint, Jean Rouaud, Éric Laurrent, Éric Chevillard, Christian Gailly, Laurent Mauvignier, etc. Comme à l‟époque du nouveau roman, les auteurs publiant chez Minuit sont très diversifiés. Pierre Lepape suggère que ces auteurs ont un « air de famille285 », de même pour Christine Jérusalem qui soutient que le lien entretenu entre les auteurs et l‟éditeur Jérome Lindon, décédé en 2001, était de l‟ordre « affectif » et « filial286 ».

Pourtant, concernant la diversité des auteurs et de leurs textes, reste « l‟impression d‟une nébuleuse d‟écrivains de générations et de sensibilités différentes, rassemblés de manière fragile287 ». Sur le plan de l‟écriture, Jérusalem remarque ceci : l‟« écriture en spirale d‟Éric Chevillard, l‟écriture en lignes brisées d‟Echenoz, l‟écriture en lignes de vie de Laurent Mauvignier, l‟écriture en lignes obliques de Marie NDiaye, dérèglent la boussole de la plaisante rose des vents agitée par Jérome Lindon288 ». Pierre Bourdieu

283 Bruno Blanckeman, Les fictions singulières. Études sur le roman français contemporain, Paris,

Prétexte éditeur, 2002, p. 9.

284 Dominique Rabaté, Le roman et le sens de la vie, op cit., p. 46.

285 Christine Jérusalem, « La Rose des vents. Cartographie des écritures de Minuit », dans Bruno

Blanckeman, Jean-Christophe Millois et Dominique Viart [dir.], Le roman français aujourd’hui.

Transformations, perceptions, mythologies, Paris, Prétexte, 2004, p. 54.

286 Ibid., p. 59. 287287 Ibid., p. 54 288 Ibid., p. 57-58.

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suggère qu‟il y a un « lieu naturel289 » de production qui correspond à chaque œuvre : « les producteurs ou les produits qui ne sont pas à leur juste place Ŕ qui sont, comme on dit, “déplacés” Ŕ sont plus ou moins condamnés à l‟échec290 ». L‟affiliation de l‟écrivaine à Minuit s‟étend de 1985 à 2004 et marque donc une majeure partie de sa carrière. Or, NDiaye ne publie pas exclusivement chez Minuit. Ses textes paraissent également chez P.O.L., Flohic, Mercure de France et, depuis 2007, ses romans semblent trouver un autre « lieu naturel » chez Gallimard.

Marie NDiaye participe à la tendance du retour dans le roman de l‟histoire, du personnage et de l‟humain, après leur apparente disparition au cours des années 1950, 1960 et 1970. Notons, cependant, que l‟attitude de l‟auteur envers la notion du récit et du personnage n‟est pas à généraliser. Dans Quant au riche avenir, les relations d‟un adolescent ne sont présentées au lecteur que par le point de vue de celui-ci. La voix de l‟autre est donc absente. Dans une optique comparable, le recours fréquent au monologue intérieur place NDiaye dans une lignée d‟auteurs qui interrogent la perception, la subjectivité et l‟idée que l‟homme fait de lui-même et de son environnement, à l‟instar de Proust, de Faulkner, de Joyce, de Woolf, de Kafka et de Sarraute. La fonction du détail, de la clarté et de l‟opacité dans les œuvres la rapproche des auteurs comme Jean Echenoz et Éric Chevillard en ce qu‟ils « remettent aussi en question la notion de vraisemblance. Il y a, dit Jérusalem, chez ces auteurs une forme d‟outrance qui s‟accommode mal du terme de minimalisme291 ». Selon nous, cette « hyperfictionnalisation du récit292 » constitue un lieu de réflexion sur le romanesque au sein du texte. Cependant, NDiaye se met également à distance des tendances explicitement critiques ou théoriques de la littérature contemporaine par son refus d‟élaborer une quelconque théorie sur sa pratique littéraire.

En somme, la définition du romanesque est au cœur des débats du champ littéraire français depuis le milieu du XXe siècle. Les nombreux essais écrits et théories élaborées par les romanciers sur la littérature témoignent d‟un effort d‟imposer des définitions du champ, de l‟auteur, du genre romanesque, de ce qui, dans leurs yeux, est une littérature de valeur. Selon Bourdieu, les luttes à l‟intérieur du champ « prennent inévitablement la

289 Pierre Bourdieu, Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, op cit., p. 276. 290 Id.

291 Christine Jérusalem, « La Rose des vents. Cartographie des écritures de Minuit », art cit., p. 68. 292 Id.

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forme de conflits de définition, au sens propre du terme : chacun vise à imposer les

limites du champ les plus favorables à ses intérêts ou, ce qui revient au même, la

définition des conditions de l‟appartenance véritable au champ293 ». Certes, la tentative de définir le romanesque est aussi un effort de la part de l‟agent littéraire de justifier et d‟affirmer la valeur de sa propre littérature. Bourdieu offre l‟exemple des définitions de « l‟art pur » vis-à-vis de l‟art « bourgeois294 ».

Dans le cadre de ce survol des influences sur le champ littéraire français contemporain, soulignons plutôt le rejet d‟un réalisme pur, qui, au court du XXe siècle, n‟est plus considéré comme une entreprise valable. De nouvelles définitions de ce que devrait être la littérature s‟imposent, passant de la vision du temps et du détail de Proust, à l‟engagement sartrien, à l‟aventure du « je » chez Sarraute et à la découverte d‟une « portion jusqu‟alors inconnue de l‟existence295 » chez Kundera. Le champ est donc un lieu de concurrence entre visions de la littérature, dont les acteurs dominants arrivent à « définir les frontières, les défendre, contrôler les entrées […], défendre l‟ordre établi dans le champ296 ». Bourdieu poursuit : « En conséquence si le champ littéraire […] est universellement le lieu d‟une lutte pour la définition de l‟écrivain […], il reste qu‟il n‟est pas de définition universelle de l‟écrivain et que l‟analyse ne rencontre jamais que des définitions correspondant à un état de la lutte pour l‟imposition de la définition légitime de l‟écrivain297 ».

Si la question d‟autonomie du champ littéraire se pose en France, c‟est aujourd‟hui en termes de problématiques précises concernant l‟état de la lutte de définitions à l‟intérieur du champ. En effet, les instances qui constituent l‟autonomie sont déjà en place. En l‟occurrence, l‟institution littéraire est bien établie. Il y existe de grandes maisons d‟édition : Calmann-Lévy est fondé en 1836, le Groupe Flammarion est créé en 1875, Albin Michel ouvre ses portes en 1900, Grasset en 1907, Gallimard en 1919, Seuil est fondé en 1935 et les Éditions de Minuit en 1941. L‟Harmattan émerge en 1975. Il y a également de petits éditeurs artisanaux et des maisons se spécialisant dans des sujets et genres particuliers : Honoré Champion s‟occupe des sciences humaines

293 Pierre Bourdieu, Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, op cit., p. 365. 294 Id.

295 Milan Kundera, L’Art du roman, Paris, Gallimard, 1986, p. 16.

296 Pierre Bourdieu, Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, op cit., p. 369. 297 Ibid., p. 367.

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depuis 1874, Hachette, fondé en 1826, publie surtout des textes scolaires, Delcourt, créé en 1986, et L‟Association, fondée en 1990, publient des bandes dessinées. Des universités, revues et salons servent comme lieux de débats et d‟échanges sur la littérature et assurent l‟existence d‟une critique pour appuyer la création. Les prix prestigieux incluent le Goncourt, le Renaudot et le Prix Femina.

La pleine autonomie, selon Bourdieu, implique « la libre concurrence entre des créateurs-prophètes affirmant librement le nomos extra-ordinaire et singulier, sans précédent ni équivalent, qui les définit en propre298 ». Une telle concurrence entre agents littéraires nous paraît dynamiser le champ littéraire français. Toutefois, une analyse suggère que le domaine littéraire en France, malgré la longévité de l‟institution, affronte des défis qui menacent son pouvoir. Proguidis, en réfléchissant sur le sens du romanesque aujourd‟hui, évoque l‟œuvre de Philippe Murray et « l‟angoisse de l‟illusionniste qui, au beau milieu de sa représentation, découvre subitement que la salle est presque vide Ŕ au fond, il aperçoit le dos des derniers spectateurs se dirigeant vers la sortie299 ». Antoine Compagnon commente, quant à lui, un manque de renouveau théorique et critique : « La théorie en France fut un feu de paille, et le souhait que formulait Roland Barthes en 1969 : “La nouvelle critique doit devenir très rapidement un nouveau fumier, pour faire encore autre chose après”, ne semble pas s‟être accompli300 ». Claude Prévost et Jean-Claude Lebrun estiment qu‟il a eu des tendances conservatrices au niveau de l‟enseignement de la littérature, qui limitent l‟ouverture à des œuvres contemporaines :

Ceux qui devraient être, au sens noble, professionnel, du terme, les conservateurs de la continuité créatrice et ses médiateurs envers les jeunes générations, des éveilleurs à la compréhension de soi et du monde, semblent avoir intériorisé les jugements sans appel dont, jusqu‟à une période récente, regorgeaient les médias que tout enseignant « dans le coup » se doit de suivre301.

Se pose encore la question des définitions qui régissent la valeur des œuvres littéraires à divers moments, et du droit à l‟inclusion au corpus considéré comme suffisamment légitime pour enseigner dans les programmes scolaires.

298 Pierre Bourdieu, Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, op cit., p. 96.

299 Lakis Proguidis, De l’autre cote du brouillard. Essai sur le roman français contemporain, op cit., p.

18.

300 Antoine Compagnon, Le Démon de la théorie. Littérature et sens commun, Paris, Seuil, 1998, p. 12. 301 Claude Prévost et Jean-Claude Lebrun, Nouveaux territoires romanesques, op cit., p. 12.

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Quel est donc le statut de la littérature dans la société et notamment par rapport à d‟autres champs de pouvoir, tels les médias, l‟économie et la politique ? Par rapport à d‟autres littératures du monde ? Quelles influences exercent les définitions imposées par la critique et l‟institution scolaire sur les dynamiques du champ ? Ces quelques questions et commentaires peuvent servir à mesurer l‟état du champ, en suggérant, d‟un côté, la fragilité de certains aspects qui ont jadis contribué à son pouvoir : les universités prestigieuses, une tradition critique vibrante et l‟important statut de la littérature à l‟égard de la société. Puis, de l‟autre côté, ces questions nourrissent les débats actuels au sein du champ, en suggérant que la lutte pour imposer des définitions d‟un romanesque valable se poursuive avec vigueur. La question du sens, du rôle et de la légitimité du romanesque est aujourd‟hui, comme à l‟époque de Sartre et de Blanchot, une préoccupation majeure, car, dans les mots de Bakhtine, « L‟autonomie de l‟art est fondée et garantie par sa participation à l‟unité de la culture, où elle occupe une place non seulement originale, mais nécessaire et irremplaçable. S‟il n‟en était pas ainsi, cette autonomie ne serait que de l‟arbitraire302 ».

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