Buts poursuivis
II.1. ANALYSES DES SURFACES (XPS, AES) APPLIQUEES A L’USINAGE
II.3.2. E FFET DU LUBRIFIANT EN FRAISAGE SUR L ’ ENERGIE SPECIFIQUE DE COUPE (W C )
La phase d’étalonnage des outils est d’une importance majeure surtout pour le bon déroulement des essais en fraisage où les efforts de coupe peuvent être davantage concernés par les instabilités et les vibrations. De plus, la préparation des arêtes de coupe des fraises étant un procédé extrêmement délicat, elle n’est souvent pas parfaitement maîtrisée. Tout défaut (écaillages des arêtes de coupe ou écarts entre les longueurs des dents) peut avoir un effet très significatif sur l’énergie spécifique de coupe (Wc) et la durée de vie de l’outil (T) obtenues.
La procédure d’étalonnage commence donc par la vérification de l’affûtage des fraises en observant les arêtes de coupe sous la loupe binoculaire. Le moindre défaut oblige à éliminer l’outil examiné. Trois mesures à sec avec chacune des nouvelles fraises sont réalisées dans les conditions de coupe suivantes : Vc = 100 m/min, fz = 0.11 mm/tr/dent, ae = 2 mm et ap = 2 mm. Suite à l’étalonnage,
seuls les outils pour lesquels les dispersions entre les valeurs moyennes (issues de trois mesures réalisées à sec) de l’effort spécifique de coupe sont faibles (maximum 5%) et dont l’observation sous la loupe binoculaire n’a pas montré de traces d’usure, sont retenus. Un coefficient de correction est appliqué afin d’atténuer les différences qui peuvent exister d’un outil par rapport à l’autre. Cette correction permet ainsi d’admettre que toutes les fraises utilisées "travailleront" de la même façon dans ces conditions particulières.
En ce qui concerne les conditions de coupe, les mesures sont effectuées selon une simple matrice qui permet d’étudier à la fois l’effet de la vitesse de coupe et de l’avance par dent sur l’énergie spécifique de coupe (cf. Tableau II‐8). Trois vitesses de coupe et trois avances par dent sont choisies de telle manière que la plage entière de conditions de coupe applicables à l’outil utilisé (depuis des valeurs Vc et fz faibles jusqu’à des valeurs très élevées) soit balayée. Pour diminuer
encore le risque d’influence de l’outil sur les mesures des efforts de coupe, un seul outil pour deux séries de mesures est utilisé de la même manière qu’en tournage. Une série de neuf mesures à sec suivie d’une série de neuf mesures avec l’un des lubrifiants testés (HB Yu4 ou HB Yu4+ADDS1) est donc effectuée. En appliquant cette démarche, le gain relatif en fraisage avec l’un des lubrifiants testés par rapport au fraisage à sec est obtenu. Cette démarche nécessite néanmoins de poser l’hypothèse que l’influence de l’usure, que l’outil subit pendant les neuf premières mesures, sur la deuxième série de mesures avec l’un des lubrifiants testés (HB Yu4 ou HB Yu4+ADDS1) est négligeable. L’engagement radial (ae) et la profondeur de passe (ap) de la fraise sont fixés à 2 mm. La
longueur usinée est égale à 30 mm. 2 x 3 x 3 = 18 mesures réalisées au total pour une fraise donnée (9 à sec + 9 avec le lubrifiant testé) Tableau II‐8 : Niveaux des facteurs du plan d’expérience La Figure II‐10 montre l’effet de la vitesse de coupe sur l’effort spécifique de coupe avec l’huile de base inerte (HB Yu4) et avec la même huile de base contenant l’additif soufré (HB Yu4+ADDS1) par rapport au fraisage à sec, pour l’avance de l’outil fixe fz = 0.2 mm/tr/dent. De la même façon qu’en tournage (cf. Figure II‐1), l’énergie spécifique de coupe diminue avec l’augmentation de la vitesse de coupe que ça soit une opération réalisée à sec ou avec l’un des lubrifiants testés (HB Yu4, HB Yu4+ADDS1). Les explications de ce phénomène ont été données antérieurement. La Figure II‐ 10 (1) montre qu’il n’y a aucun gain relatif en terme d’énergie spécifique de coupe entre le fraisage avec l’huile de base (HB Yu4) et à sec pour trois vitesses testées. Au contraire, l’effet de l’huile de base (HB Yu4) paraît être même défavorable. On suppose que c’est l’action simultanée de deux
Facteurs Nb. de niveaux N.1 N.2 N.3
Sec/Lubrification 2 Sec Lubrification
Vc (m/min) 3 60 120 180
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phénomènes, de nature différente, qui est à l’origine de cette détérioration. La formation de l’oxyde sur la surface de l’outil peut être une première barrière naturelle de protection contre le grippage à condition qu’il n’y ait pas d’autre élément chimiquement plus actif agissant à la place d’oxygène. Sachant que la concentration de l’oxygène dans la base lubrifiante est moins importante que celle dans l’air, la formation des oxydes peut avoir lieu plus facilement et, probablement dans une quantité plus importante, dans le cas de fraisage à sec. Autrement dit, l’outil serait mieux protégé pendant l’opération réalisée à sec. Le deuxième phénomène impliquerait plutôt les phénomènes thermiques qui accompagnent la lubrification. Le refroidissement apporté uniquement par l’huile de base chimiquement inerte (HB Yu4) lors de l’opération d’usinage aurait un impact sur le comportement thermique du matériau usiné et il en résulterait une augmentation de sa contrainte de cisaillement par rapport à celle du matériau coupé à sec. De plus, il peut être supposé que les chocs thermiques locaux, par exemple à chaque entrée de l’arête de coupe dans la matière usinée, peuvent contribuer à la rupture prématurée des outils utilisés avec la base lubrifiante en question (HB Yu4).
Comme l’illustre la Figure II‐10 (2), le fait d’enrichir l’huile de base (HB Yu4) avec l’additif soufré permet d’augmenter efficacement le pouvoir lubrifiant du mélange (HB Yu4+ADDS1) et d’apporter un gain par rapport au fraisage à sec. Ce gain diminue cependant avec l’augmentation de la vitesse de coupe (environ 15% à 60 m/min, contre environ 9% à 120 m/min). Autrement dit, la baisse des efforts de coupe en fraisage avec lubrifiant testé (HB Yu4+ADDS1) par rapport au fraisage à sec est plus importante aux basses vitesses de coupe et diminue ou disparaît quasiment aux hautes vitesses de coupe. Ce constat peut être logiquement expliqué par l’accès réduit du lubrifiant à l’interface entre l’outil et la matière usinée ou le copeau – impliquant un temps d’action du lubrifiant raccourci – car la vitesse relative de surfaces en contact est trop importante. Quelle que soit la configuration testée : sec / HB Yu4 ou sec / HB Yu4+ADDS1, les mêmes conclusions ont été obtenues pour les deux autres avances testées. Figure II‐10 : Effet de la vitesse de coupe sur l’énergie spécifique de coupe corrigée en fraisage avec (1) l’huile de base (HB Yu4) et (2) avec le lubrifiant contenant l’additif soufré (HB Yu4+ADDS1) par rapport au fraisage à sec pour l’avance fz = 0.2 mm/tr/dent Quant à la Figure II‐11, elle illustre l’effet de l’avance de l’outil sur l’effort spécifique de coupe avec l’huile de base inerte (HB Yu4) et avec la même huile de base contenant l’additif soufré (HB Yu4+ADDS1) par rapport au fraisage à sec, pour la vitesse de coupe fixe Vc = 60 m/min. En
augmentant l’avance de l’outil, l’énergie spécifique de coupe à réaliser l’opération de fraisage diminue dans les trois cas : à sec, avec l’huile de base inerte (HB Yu4) et avec le lubrifiant (HB Yu4+ADDS1). L’effet global de l’avance de l’outil sur les efforts de coupe a été discuté auparavant (cf. II.2.2. Effet du lubrifiant en tournage 3D sur l’effort spécifique de coupe (Kc)). Un effet bénéfique
du lubrifiant par rapport au fraisage à sec est constaté uniquement avec le mélange contenant l’additif soufré (HB Yu4+ADDS1). De plus, le gain enregistré avec le lubrifiant semble être plus important pour les avances de l’outil plus importantes. La meilleure efficacité du lubrifiant aux avances plus importantes peut être expliquée par les mêmes facteurs qui mènent à la baisse de
(1) (2)
15%
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l’énergie spécifique de coupe. La géométrie de l’outil (coupe localement négative pour les avances faibles) ou la distribution des contraintes (plus forte accumulation des contraintes dans la zone de coupe pour les avances plus faibles) peuvent influencer les sollicitations aux interfaces de la coupe et donc faciliter ou contrer l’action du lubrifiant. Cependant, dans cette configuration expérimentale, les avances les plus importantes (fz = 0.3 mm/tr/dent) engendrent le maximum de vibrations. La
dernière mesure avec l’huile de base (HB Yu4) à Vc = 60 m/min et à fz = 0.3 mm/tr/dent n’a pas pu
être réalisée à cause d’un endommagement apparu sur l’une des arêtes de la fraise. Figure II‐11 : Effet de l’avance sur l’énergie spécifique de coupe corrigée en fraisage avec (1) l’huile de base (HB Yu4) et (2) avec le lubrifiant contenant l’additif soufré (HB Yu4+ADDS1) par rapport au fraisage à sec pour la vitesse de coupe Vc = 60 m/min
Les mêmes tendances sont observées pour les deux autres vitesses de coupe testées indépendamment de la configuration testée : sec / HB Yu4 ou sec / HB Yu4+ADDS1. Les graphes rassemblant les mesures de l’énergie spécifique de coupe en fonction de trois différentes vitesses de coupe pour trois différentes avances et dans les deux configurations testées (HB Yu4, HB Yu4+ADDS1) par rapport aux mesures correspondantes réalisées à sec sont présentés dans la partie Annexes (cf. Annexe II § II.8).