A. Mallock ‘The action of cutting tools’ 1881‐82
I.3. FLUIDES DE COUPE VUS PAR LA TRIBOCHIMIE I.3.1 I NTRODUCTION GENERALE
I.3.4. A DDITIFS SOUFRES , LEURS PROPRIETES ET NOTION DU SOUFRE ACTIF
Les additifs soufrés sont des composés polyvalents possédant des propriétés extrême‐ pression, des propriétés anti‐usure et anti‐oxydantes (surtout les dithiocarbamates). Toutefois, leur caractère anti‐usure est beaucoup moins prononcé que celui des additifs plus polaires (additifs phosphorés), il est généralement admis de leur associer essentiellement des propriétés extrême‐ pression. La qualité des propriétés EP, AU et anti‐oxydantes, apportées par un additif soufré donné sera liée notamment à sa structure chimique.
Les additifs soufrés sont formés généralement par réaction du soufre sur les insaturations des chaînes moléculaires provoquant la polymérisation par le soufre et/ou une saturation des chaînes carbonées. Ces chaînes jouent le rôle de "vecteurs" du soufre en permettant la compatibilisation de l’additif aux bases lubrifiantes tout en conservant une viscosité contrôlée.
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Parmi les additifs soufrés utilisés actuellement dans les formulations, on trouve principalement [HIL_81, PAP_98, NAJ_03] : les oléfines soufrées (très bons additifs EP), deux types : 1) les oléfines aux courtes chaînes (par exemple l’isobutylène (SIB) – environ 45% wt. de soufre), 2) les oléfines aux longues chaînes (par exemple les sulfures d’alkyles ou les sulfures d’aryles contenant environ 10‐20% de soufre) ; la structure générale est la suivante : R‐Sx‐R avec x = 3 ou 5 (optimum), les corps gras soufrés et esters d’acides gras soufrés – ils contiennent en général environ 10‐ 12% wt. de soufre et ils sont de très bons additifs AU et EP, les dithiocarbamates – ils se caractérisent par de bonnes propriétés AU, EP et anti‐oxydantes (par exemple le dithiocarbamate de zinc), les thiocarbonates (par exemple le dithiole 1,2‐thione3), les terpènes soufrés (par exemple le dipentène soufré), les xanthates (peu utilisés à cause de leur odeur).
Les propriétés AU et EP des additifs soufrés dépendent de leur structure chimique, en particulier de la fixation de l’atome de soufre. L’activité de l’additif est donc liée aux liaisons S‐S, R‐S et aux groupes organiques renfermés dans la molécule. La nature chimique de la surface (structure électronique) ainsi que les conditions tribologiques jouent également un rôle décisif dans la réactivité de ces additifs.
En tant qu’additifs AU (conditions tribologiques moyennement sévères), ils sont supposés agir sous forme de films adsorbés de mercaptates métalliques (R‐S‐M). Les propriétés AU des additifs soufrés dépendront de la nature des groupes organiques attachés à l’atome de soufre (la polarité).
Hiley et al. suggèrent que les performances AU augmentent avec la longueur de chaîne soufrée pour
une série de polysulfures donnée [HIL_81]. Born et al. remarquent la même tendance ; ils soulignent néanmoins l’apparition d’une usure corrosive pour les polysulfures de plus haut rang (S3) [BOR_87].
Quant à la structure chimique des chaînes organiques, les dérivés aromatiques sont plus efficaces que les dérivés cyclaniques et les composés à longue chaîne donnent des films plus résistants que les composés à courte chaîne [FOR_70, AYE_01].
En tant qu’additifs EP, les composés soufrés réagissent par décomposition chimique (rupture de la liaison R‐S) avec la surface en formant un film inorganique de sulfure de fer. Cette décomposition se produit suite à l’augmentation de la température de surface due au frottement (collisions entre les aspérités et enlèvement de l’oxyde). Plus la liaison R‐S est faible, plus le soufre sera libéré facilement et réagira avec la surface en formant un film protecteur, ce qui implique aussi l’importance des groupes organiques R. Pour les sulfures d’alkyles, les structures organiques les plus ramifiées et les plus courtes donnent les meilleures performances [AYE_01]. Les propriétés EP des additifs soufrés augmentent avec la longueur de la chaîne de soufre [MOU_72, HIL_81, PAP_98]. La liaison S‐S est plus facile à rompre que la liaison R‐S ; ainsi donc, le disulfure sera plus actif que le monosulfure, le trisulfure plus actif que le disulfure, et ainsi de suite [FOR_70]. Néanmoins, de la même manière que pour les propriétés AU, la grande labilité du soufre dans les polysulfures contenant plus de trois atomes de soufre dans la chaîne soufrée peut conduire à de l’usure corrosive (cf. Figure I‐14).
En parlant des propriétés AU et EP des additifs soufrés, on souligne l’importance de la notion de "soufre actif" : c’est‐à‐dire que les additifs contenant du soufre "actif" sont ceux qui cèdent facilement tout ou partie du soufre qu’ils contiennent. Les additifs soufrés renfermant du soufre dit "soufre combiné" ou "soufre inactif" ne libèrent leur soufre que très difficilement. La norme ASTM D‐ 1662 définit le taux de soufre actif d’un additif à température donnée comme une différence exprimée en pourcentage pondéral de teneur en soufre avant et après réaction d’un échantillon de cet additif avec une quantité donnée de cuivre pendant un temps fixe. Ce type de test permet d’évaluer la disponibilité de la quantité du soufre "libre" en fonction de la température et par conséquent de mieux comprendre le comportement thermique de l’additif et son activité chimique dans une application réelle. L’atome de soufre est attaché dans la molécule différemment suivant la
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nature et le degré de polymérisation de sa structure organique (oléfine, ester, polysulfure, thiocarbamate) ; sa manière de libérer le soufre varie donc d’un cas à l’autre. Il est pourtant vrai que la quantité de soufre actif augmente avec le nombre d’atomes de soufre contenu dans une molécule soufrée car la probabilité d’y avoir plus de liaisons S‐S faciles à rompre est plus grande. Toutefois, le risque d’usure corrosive s’accroît également. Hiley et al. avancent une loi semi‐empirique pour prédire les performances EP des additifs soufrés selon laquelle l’activité de la molécule soufrée peut être représentée comme somme des activités des atomes de soufre qu’elle contient [HIL_81]. Le soufre élémentaire S8 (facilement libéré, même à basse température) est par définition le plus actif
mais aussi le plus corrosif. La corrosion vis‐à‐vis du Cu et du Fe augmente avec la longueur de la chaîne soufrée. Par conséquent la recherche de l’équilibre, tout en gardant la performance maximale, entre l’usure corrosive et l’usure adhésive des surfaces est un défi pour la formulation des lubrifiants contenant les additifs soufrés (cf. Figure I‐14). Figure I‐14 : Equilibre entre la réactivité chimique de l’additif et le type d’usure [Source : cours Tribologie Denis Mazuyer, LTDS – Ecole Centrale de Lyon] Les additifs soufrés (surtout les dithiocarbamates) ont également un caractère anti‐oxydant. Le soufre décompose les hydroperoxydes en composés plus stables protégeant ainsi contre la formation de radicaux libres et donc empêchant l’oxydation de la base lubrifiante [AYE_01].