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5.5 Feschel - Feselalp

Cette zone, d'orientation SW-NE, s'étend entre la vallée du Rhône et les pentes méridionales du Niwen et comprend comme points limitrophes le cours du Feschiljü (ou Feschelbach), les environs de Feschel, Feselalp ("Underi Fasilalpu"), Jeizinen et Bratsch. Elle représente la partie orientale de la région fréquemment désignée sous le nom de "zone de Loèche". Les coordonnées des affleurements étudiés sont données en Annexe 4.4.

5.5.1 Généralités

Faisant suite aux observations très générales de von Pellenberg (1893), les premiers travaux stratigraphiques précis sont dûs à Lugeon (1910, 1914a). Ils ont servi de fil conducteur aux études postérieures de Baer (1959), Masson et al. (1980) et de Bugnon (1981, 1986), principalement attachées à la description de la tectonique et de la cinématique de cette zone.

Chez ce dernier auteur, les séries décrites sont comparées à celles du Doldenhorn (Schlappi, 1980) et de Raron (Schenker, 1946; Dolivo, 1982).

D'un point de vue structural, le "synclinal de Loèche-Ville" (Lugeon, 1914a) ou "zone de Loèche (Zone III)" (Baer, 1959) représente la couverture du massif de l'Aar interne (Masson et al., 1980). Elle se décompose en une série autochtone-parautochtone et une série en position Gellihorn, dont la racine doit être placée en position plus interne, dans la zone de Raron (Trümpy, 1963; Herb et al., 1978; Dolivo, 1982; Escher et al., 1988; Steck et al., 1989).

Bugnon (1981, 1986) a précisé les relations structurales de la zone de Loèche : on lui doit l'individualisation des écailles de Plammis et du Jagerchrüz (elles prennent la valeur de 'nappes' chez Steck, 1984). Bugnon démontre la superposition de trois unités tectoniques distinctes:

- série autochtone-parautochtone en liaison avec le flanc normal de la nappe du Doldenhorn;

elle repose sur les gneiss du massif de 1' Aar et se termine dans la synforme de Feselalp, réduite ici au Trias et au Lias;

- unité de Plammis : écaille essentiellement de Dogger et de Malm, chevauchant 1' autochtone;

- unité du Jagerchrüz : anticlinal isoclinal chevauchant 1 'unité précédente, avec terrains du Dogger à l'Oligocène.

L'analyse cinématique permet à Bugnon (1981, 1986) de conclure au raccordement de l'écaille de Plammis à la zone de Raron; le plan de chevauchement de Plammis est relayé par la faille de Rote-Kuh- Gampel (Dolivo, 1982) délimitant cette zone de Raron au nord. L'écaille de Plammis est ainsi raccordée au flanc normal de Raron et correspond en conséquence à une partie du soubassement jurassique de la nappe du Gellihorn (voir Escher et al., 1988; Steck et al., 1989). L'écaille du Jagerchrüz doit être encore plus interne; elle se relie à la série du Heidnischbiel (Gasser & Dolivo,1980; Dolivo, 1982). Il pourrait s'agir d'un équivalent oriental de la "nappe d'Ardon" (Masson et al., 1980).

Comme pour la zone des écailles du Lotschepass - Sattlegi (voir 5.4), l'attribution des termes lithologiques au Trias et au Lias est entièrement fondée sur les analogies de faciès et sur la position lithostratigraphique, le plus souvent entre des dolomies ou des marnes dolomitiques (Trias probable) et des schistes argileux (Aalénien probable). Par rapport au profil synthétique du Torrenthorn et des Rothorner, le Trias ne présente que quelques particularismes locaux. La série liasique est par contre très réduite, jusqu'à être manquante; les faciès sont généralement homogènes, plus gréseux et siliceux (voir aussi Lugeon, 1914a, p. 63, et son "Lias indéterminé" de la carte de 1910). Ce point nécessite la définition de nouvelles unités lithostratigraphiques informelles : les "Calcaires siliceux laminés" (région de Feschel), les

"Calcaires à entroques" et les "Grès calcaires à gravillons dolomitiques" (synforme de Feselalp). Les affleurements décrits ci-dessous ne sont pas ou peu décollés de leur substrat (gneiss du massif de l'Aar); ils se relient au flanc normal de la nappe du Doldenhorn.

Variations latérales 81

5.5.2 Le Trias : particularités

A part quelques faits nouveaux, les faciès attribués au Trias se retrouvent dans les grandes lignes :

- les arkoses sont toujours présentes et uniformément développées : sur un premier niveau très grossier rougeâtre, se superposent des arkoses mieux triées blanchâtres; relevons au passage la superbe discordance entre les gneiss chloriteux et amphibolites altérés et les premiers sédiments, visible le long de la route qui mène de Feschel à Erschmatt (voir aussi Lugeon, 1914a, p. 65; Baer, 1959, p. 102; coord. 618'960/130'800/1290);

les comieules, parfois avec lits gypseux, sont absentes vers le SE au-delà de Feschel; elles réapparaissent fréquemment au sein des dolomies;

les dolomies peuvent être saccharoïdes dans la synforme de Feselalp; les variations d'épaisseurs sont importantes et rapides : de 1 rn (à Wildi) à plus de 50 mètres (dans Allmeiwald) sur une distance horizontale de quelque 300 rn (sans présager des relations palinspastiques originales); autres faits particuliers :

- lentilles de marbre rose (20-30 cm x 0-3 cm) dans les dolomies (Fig. 5.5);

- bréchification au sommet des dolomies : les fragments millimétriques à centimétriques peuvent être assemblés pour reconstituer la roche (figures de collapse ?); la matrice est une dolomicrite claire avec grands rhomboèdres de dolomie (visible à la loupe);

- à Fasilwald (sur la route de Underi Hisilalpu à Stafel) : lentilles décimétriques à métriques de dolomie bréchique beige dans un marbre gris bleuté, probablement comme zone de mélange tectonique entre les calcaires sus-jacents elles dolomies sous-jacemes;

les marnes dolomitiques sont peu épaisses (quelques décimètres à 2 mètres), quand elles sont présentes, et peuvent passer graduellement à des schistes argileux noirs ("Schistes noirs, calcaires lumachelliques et quartzites" ?; Fig. 5.5);

les "Schistes noirs, calcaires lumachelliques et quartzites", rarement observés, ne se retrouvent que sous deux des faciès décrits (voir 4.2.4), avec des épaisseurs ne dépassant pas 4 m. ll s'agit du calcaire lumachellique et des schistes noirs à lentilles de quartzite fin; le premier est bien visible à Chalberfàrich (voir 5.5.5.1), le second dans Allmeiwald (4 rn entre les dolomies et les "Calcaires à entroques");

l'épaisseur totale de la série varie entre quelques décimètres et la cinquantaine de mètres. Les redoublements tectoniques peuvent surépaissir la série au-delà de 100 m.

5.5.3 Les environs de Feschel

Les affleurements de la partie méridionale du massif du Torrenthorn (région de Galm et de Bachalp) disparaissent vers le sud sous la couverture quaternaire pour ne réapparaître que sporadiquement entre Oberu et Spiuwald. Ce sont quelques mètres de grès et calcaire gréseux en paquets décimétriques séparés par des schistes gréseux; ils sont coincés entre les dolomies et les "schistes aaléniens".

La région de Feschel offre par contre une situation plus avantageuse : entre les dolomies et les "schistes aaléniens", des niveaux schisteux plurimétriques devenant gréseux à leur sommet, sont surmontés par 20 à 30 mètres de calcaire siliceux plaqueté, plus massif vers le haut mais toujours très laminé, de patine généralement grise à beige ("Calcaires siliceux laminés").

Plus précisément, on observe du bas vers le haut (voir coupe "Cheruwald", Annexe 5.1):

- schistes calcaires siliceux plaque!.és, avec bancs calcaires siliceux centimétriques intercalés, parfois finement spathiques et pyriteux; sous le microscope, ce sont des Mudstones (à Wackestones) avec des plages sparitiques (< 15 %, débris échinodermiques ?) dans une microsparite calcaire équigranulaire très orientée, le tout sous forme d'alternance millimétrique de lits peu silicifiés (10 % de la matrice) et de lits très silicifiés (50 % de la matrice); le quartz authigène fin atteint 5 %, avec pyrite et oxydes de fer abondants, et quelques micas blancs.

Ce faciès, présent à la base de la série, est en partie considéré comme Rhétien par Lugeon (1914a);

- niveaux ·gréseux décimétriques, à patine brune; sous le microscope: environ 50% de quartz (onduleux, poly-et monocristallin) mal trié (250 Jl - 1 mm), sub-anguleux, sont dispersés dans une matrice microsparitique à sparitique calcaire, silicifiée 10 %); la pyrite et l'hématite sont très abondantes; quelques micas blancs;

82 Chapitre 5 - "Calcaires siliceux laminés", localement gréso-spathiques, toujours plus massifs vers le haut; sous le microscope (faciès gréso-spathique) : 20 % de quartz sub-anguleux (200-300 f.l), jusqu'à 40 % de débris échinodenniques avec ciment syntaxial et quelques fragments de bivalves à coquille prismatique nagent dans une microsparite calcaire silicifiée pour moitié.

Les répétitions d'ordre tectonique sont fréquentes et l'attribution au Lias ne repose ici que sur la position lithostratigraphique. Il est surprenant de constater l'absence de quartz détritique.

5.5.4 La synforme de Feselalp

Contrairement à la région de Feschel, les affleurements5.5) de Feselalp ont un côté familier; il est néanmoins nécessaire de définir deux nouvelles unités lithostratigraphiques : les

"Calcaires à entroques" et les "Grès calcaires à gravillons dolomitiques" (Fig. 5.5).

5.5.4.1 Calcaires à entroques

C'est un niveau très constant de 3 rn d'épaisseur de calcaires à entroques très recristallisés, à patine gris beige et passées millimétriques gréseuses très grossières. Cette barre massive repose soit sur des schistes noirs ou jaunâtres, soit directement sur les dolomies ou marnes dolomitiques, soit sur l'un des faciès mentionnés ci-dessus par l'intermédiaire d'un niveau conglomératique grossier sans structure de 0 à 60 cm d'épaisseur (Fig. 5.5; voir aussi Bugnon, 1986). Les galets arrondis (jusqu'à 6 x 3 cm) sont des dolomies, calcaires dolomitiques, dragées de quartz, quartzites et gneiss, dans une matrice de dolomie saccharoïde.

Microfaciès des calcaires à entroques: environ 30% d'entroques dans une microsparite calcaire équigranulaire, avec 1-2% de quartz authigène; le quartz détritique est cantonné aux seuls lits gréseux.

Microfaciès du conglomérat : les lithoclastes (jusqu'à 80 %) sont constitués de gneiss, dolomicrite, dolomie gréseuse, microsparite dolomitique, calcaire lumachellique de type "Schistes noirs, calcaires lumachelliques et quartzites", feldspaths altérés (potassique et plagioclase), quartz poly- et monocristallin. La matrice est sériciteuse, dolomitique (équigranulaire fine avec grands rhomboèdres) et siliceuse microcristalline.

5.5.4.2 Grès calcaires à gravillons dolomitiques (Fig. 5.5)

C'est une série assez homogène et massive de grès moyens à grossiers, à ciment calcaire et patine grise à ocre, et de calcaires gréseux localement spathiques. L'épaisseur varie fortement et est liée au contexte structural : une quinzaine de mètres à Wildi (avec des chevauchements internes) et jusqu'à 60 rn dans Allmeiwald (zone très replissée). Dans le ravin de Jungholz ("Enggerschwasser" de Lugeon, 1914a), la série comporte une vingtaine de mètres d'un faciès moins gréseux dans une situation tectonique d'écailles et de plis très complexe. Les gravillons dolomitiques jaunâtres (millimétriques, exceptionnellement 10 x 4 cm5.6)) sont fréquents. Ils peuvent être disséminés dans la masse ou concentrés en lits centimétriques à décimétriques; la coupe de Wildi (Fig. 5.5) n'en comporte que quelques uns. Des bélemnites, parfois abondantes, sont fréquemment associées à ces lits microconglomératiques; quelques entroques et lamellibranches silicifiés sont également présents. Les bancs décimétriques à plurimétriques sont séparés par un joint schisteux continu.

5.5) Les meilleurs affleurements sont situés le long de la route de Wildi (pt. 1709) à Üflange, sur le sentier de Widli à Underi Fasilalpu, le long de la route menant à Underi Fasilalpu (région de Allmeiwald), et dans la zone entre Fasilwald et l'arête séparant la région de Feselalp du LOtschental; quelques affleurements à Jungholz sont encore à signaler (coordonnées en Annexe 4.4).

6) Ce faciès grossier conglomératique est visible vers 1800 rn, sur le sentier reliant Wildi à Underi Fasilalpu. Il a été attribué au Dogger par Lugeon (1914a, "brèche échinodermique à cailloux dolomitiques ... "), mais Baer (1959) le considère comme liasique, faisant remarquer à juste titre que le Dogger de la zone de Loèche est différent de celui du Balmhom, très riche en gravillons dolomitiques (p.ex. von Tavel, 1937).

Variations latérales

L'intérieur des bancs se présente comme une alternance millimétrique à centimétrique de lits plus quartzeux et grossiers (jusqu'à 80% de quartz moyen à très grossier) et de lits plus calcaires et fins (en moyenne 20% de quartz moyen à grossier). Les lamines gréseuses montrent parfois une obliquité de quelques degrés avec biseaux latéraux correspondant à un litage de rides décimétriques à crête sinueuse. Le faciès plus calcaire est aussi disposé en lentilles dans le grès. Des lits quartzeux micro-conglomératiques de 5 à 15 cm d'épaisseur et très continus, sans gravillons dolomitiques, rythment la série (diamètre des clastes atteignant 1 cm). Le contact avec les "schistes aaléniens" est franc, plan et sans niveau particulier.

Trois faciès principaux sont ainsi attri-buées au Trias et Lias (Wildi, 622' 120/131 '260/1710). potassiques et plagioclases plus ou moins altérés sont pris dans une matrice microsparitique calcaire très orientée et silicifiée (la proportion calcite/silice varie fortement selon les lits [mm à cm] tantôt calcaires, tantôt siliceux);

quelques rhomboèdres de dolomie et micas blancs sont présents. Pyrite et oxydes de fer imprègnent fortement la roche. On observe parfois une alternance de lamines plus gréseuses fines (70 % de quartz, de 250-750 J.l) et de lamines moins gréseuses grossières (60 % de quartz, de 300 J.l -3 mm).

Microfaciès des lits quartzeux microcongloméraliques: le quartz(> 25 %, onduleux, poly- et monocristallin), les feldspaths potassiques très altérés(< 10 %), les plagioclases peu altérés(< 5 %) et les galets de gneiss(< 5%) représentent 40 à 60 % de la roche; ces éléments sont mal triés (250 J.l - 1 cm) et sub-arrondis. La matrice est une silice microcristalline avec des plages microsparitiques calcaires ou sériciteuses, avec de nombreux microstylolites et lits chloriteux. La composition modale moyenne permet d'attribuer le terme de "arkosic wacke" à ce faciès, avec une tendance vers les grauwackes feldspathiques, voire lithiques.

Microfaciès des microconglomérats dolomiliques : ce microfaciès est comparable au précédent; toutefois, les gravillons dolomitiques, arrondis, peuvent constituer jusqu'à 60 %des éléments remaniés. La matrice est plus calcaire; on y observe jusqu'à 30% d'entroques.

84 Chapitre 5

5.5.5 Les séries réduites

Les séries de Chalberfarich et de Bratsch, situées respectivement sur les bordures NW et SE de la synforme de Feselalp, illustrent cette réduction.

5.5.5.1 Chalberfarich (Fig. 5.6)

Cette coupe a déjà été signalée par Bugnon (1986). Par analogie de faciès, des schistes aaléniens probables reposent directement sur des calcaires lumachelliques et quelques pélites noires (termes des "Schistes noirs, calcaires lumachelliques et quartzites"), surmontant eux-mêmes des dolomies massives. Au-dessus des "schistes aaléniens", on observe successivement des schistes gréso-calcaires, des calcaires siliceux plaquetés devenant spathiques (jusqu'à 80 % d'entroques), puis des calcaires micritiques plaquetés; ces termes seraient d'âge Bajocien-Oxfordien (Bugnon, 1986, sur la base des faciès et de la cartographie). ll n'y aurait donc pas de sédiments liasiques.

Microfaciès des calcaires lumachelligyes : environ 20% d'éléments figurés: lamellibranches avec enveloppe micritique et ooïdes avec plusieurs cortex très bien reconnaissables (ces deux éléments dans des proportions identiques). La matrice est une microsparite calcaire équigranulaire orientée, localement silicifiée, avec 1 % de quartz authigène moyen. Un ciment isopaque équigranulaire relique est bien visible autour des éléments figurés : il s'agit probablement d'un Grainstone fortement recristallisé. Cette diagnose cadre bien avec les calcaires lumachelliques des "Schistes noirs, calcaires lumachelliques et quartzites" (voir 4.2.4.1).

Si la présence du "Rhétien"

semble ainsi assez sûre, il n'en va pas de même pour la partie sus-jacente (Aalénien-Oxfordien de Bugnon, 1986). On y reconnaît en effet des caractères décrits tant à Feschel qu'à Feselalp (base de la série). De même, les "schistes aaléniens" peuvent correspondre aux schistes noirs à lentilles quartzitiques des "Schistes noirs, calcaires lumachelliques et quartzites" (p. ex. comme à Allmeiwald). Par contre, le calcaire micritique très pur du sommet est un faciès nouveau. Il est vrai d'autre part que la proportion d'entroques relevée paraît anormale pour le Lias de cette région.

Malgré ces incertitudes, les arguments surtout cartographiques de Bugnon (1986), considérant que le Lias est manquant à Chalberfarich, sont repris ici.

5.5.5.2 Bratsch

A Herbstumatte, on peut observer 1 ,5 rn de calcaire gréseux laminé entre des arkoses et des schistes argileux noirs luisants. Le microfaciès correspond à celui décrit dans la région de

Variations latérales 85 Feschel. L'attribution au Lias, à nouveau sur des bases tant cartographiques que de faciès, est plausible (Lugeon, 1914a; Bugnon, 1986).

5.5.6 Interprétation et discussion

5.5.6.1 Milieu de dépôt

L'interprétation des milieux de dépôt est fortement compromise par la déformation; on peut esquisser les tendances suivantes :

- les sédiments du Trias ne présentent aucun fait nouveau, à part la disparition des comieules vers le SE; elle peut signifier une limite des dépôts évaporitiques originaux, absents au SE d'une ligne Feschel- Feselalp;

les "Calcaires siliceux laminés" de Fesch el peuvent correspondre à des dépôts de plate-forme, sans influence continentale majeure;

les "Calcaires à entroques" de Feselalp témoignent d'un caractère nettement transgressif par rapport aux schistes argileux sous-jacents, souligné par le niveau conglomératique présent à sa base; il peut s'agir de barres "sableuses" de "shoreface" ou d'un milieu de plate-forme;

les "Grès calcaires à gravillons dolomitiques" (Feselalp) sont très fortement soumis aux influences continentales (galets de gneiss, feldspaths, ... ); un milieu de "shoreface", peut-être d"'offshore" supérieur, est attesté par les quelques figures sédimentaires. L'interprétation des niveaux microconglomératiques, avec ou sans bélemnites, est identique à celle du Torrenthorn (voir 4.2.8.4 et 4.2.9.4 : décharges de tempêtes, bedload, niveaux de condensation-remaniement);

des mouvements tectoniques synsédimentaires différentiels de faible amplitude ont dû se produire pour expliquer la nature variable du contact entre les "Calcaires à entroques" et les unités sous-jacentes.

5.5.6.2 Age

Une autre question porte sur l'âge des séries décrites. Si un âge Lias sensu lato est probable dans la plupart des cas, quel découpage proposer à 1 'intérieur de cette série ? La seule clef de lecture est à nouveau l'analogie de faciès. Elle fait dire à Baer (1959) que l'Hettangien et le Sinémurien sont absents; ils n'ont probablement pas été déposés étant donné qu'ils ne sont jamais remaniés (Baer utilise les noms d'étage comme noms de formation). La série est ainsi datée du Pliensbachien-Domérien, par comparaison avec la zone de Raron où Schenker (1946) a relevé l'homogénéisation des faciès supra-Lotharingien (ce dernier n'est pas reconnaissable comme tel dans la zone de Loèche). Baer considère ainsi une transgression du Pliensbachien sur le Rhétien ou le Trias moyen. Ce type d'arguments l'a amené à proposer un modèle en blocs basculés (voir 1.2 et Fig. 1.3), où l'enregistrement sédimentaire est entièrement conditionné par des accidents de socle. Relevons que Bugnon (1986) ne confirme pas un tel mécanisme, sans pour autant l'exclure catégoriquement.

Après avoir émis de sérieux doutes quant aux âges proposés par Baer, Bugnon (1986) retient finalement cette attribution (Pliensbachien-Domérien). Lugeon (1914a), fort prudent, s'était contenté d'un "Lias indéterminé". Soulignons simplement qu'il existe indiscutablement une analogie de faciès entre le Lias de Feselalp et 1 'ensemble "Calcaires gréso-spathiques et siliceux" - "Grès massifs" du Torrenthorn; cette analogie ne suppose pas pour autant une équivalence chronostratigraphique.

5.5.6.3 Considérations paléogéographiques

Selon les vues des auteurs antérieurs à Bugnon (1986), la zone décrite ici représente la bordure méridionale du golfe du Torrenthorn (Frank, 1930; Trümpy, 1949, 1952, 1971;

86 Chapitre 5 SchUippi, 1980). Bugnon a légèrement affiné ce schéma: la série de Feschel représenterait le littoral sud du golfe du Torrenthorn, séparé du "golfe de Feselalp" par un "cap du Chalberfarich"; les séries réduites de l'axe Bratsch-Jeizinen auraient limité vers le SE ce "golfe de Feselalp" par rapport à la presqu'île du Wiwannihorn (ce terme est introduit par Steck, 1984, p. 68 et Fig. 9; il paraît souhaitable d'en rester à la nomenclature originale, à savoir "presqu'île du Bietschhorn"). Ce découpage en cap et golfe suit les grandes lignes du contact actuel cristallin/couverture; il se fonde néanmoins sur une série de choix a priori par rapport aux différentes alternatives ouvertes. Plus particulièrement, les points suivant restent en suspens :

- nous n'avons aucun indice sérieux permettant de trancher, à Chalberfarich, entre la solution

"non-dépôt" ou la solution "dépôt puis érosion anté-aalénienne de la série liasique". Il reste néanmoins acquis que la zone de Chalberfarich a dû montrer un comportement particulier à un moment situé entre le Rhétien et l' Aalénien. Il n'y a d'ailleurs pas de certitude quant à l'âge véritable des schistes et calcaires supra-Rhétien probable;

- la série de Feschel, bien que réduite, n'a pas un caractère littoral systématique. Il paraît difficile d'en faire la véritable bordure du golfe du Torrenthorn. La même remarque vaut pour la bordure SE du golfe de Feselalp (série de Bratsch-Jeizinen);

- la réduction des épaisseurs n'est pas uniquement d'origine stratigraphique: il paraît clair que les chevauchements et écaillages ont décollé des parties de la couverture liasique; c'est par exemple le cas au nord de Feschel (sous Oberu) où le plan de chevauchement de l'écaille de Plammis est en contact avec les dolomies autochtones (Bugnon, 1986).

En dépit de ces quelques restrictions, il demeure que la zone de Loèche, du moins dans sa partie étudiée, a joué un rôle particulier dans la paléogéographie liasique, déjà esquissée au Trias selon Bugnon (1986). Plutôt que de faire un découpage paléogéographique très détaillé, et peut-être infondé, il paraît préférable de considérer les grès et microconglomérats de Feselalp, avec leur caractère très proximal, comme le véritable faciès bordier méridional du golfe du Torrenthorn. Du point de vue des faciès, cette série se rapproche de celle de Schwarzdolden.