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Favoriser la mobilité

Dans le document RGPP et droit administratif (Page 57-60)

Section 2 : L‟optimisation des moyens de fonctionnement

A. Favoriser la mobilité

On s‟intéressera ici à certaines possibilités offertes par la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique134. Dans ses grandes

lignes, cette loi introduit des aménagements dans le droit de la fonction publique permettant de faciliter la mobilité entre les différents corps d‟une même fonction publique, entre les trois fonctions publiques elles-mêmes ainsi que les passages entre le secteur public et le secteur privé. Elle contribue également à développer la flexibilité de la fonction publique en organisant un régime de réorientation professionnelle des agents et en permettant le recours à l‟intérim. L‟ensemble de ces dispositions sont indissociables des transformations opérées par la RGPP dans l‟organisation et le fonctionnement de l‟administration (1) et elles tendent à développer une approche « GRH » au sein de la fonction publique (2).

1) Mobilité de la fonction publique et restructurations administratives

Les motifs qui justifient la loi dite « mobilité » sont multiples et ils ont partie liée avec d‟autres réformes réalisées dans le cadre de la RGPP ; leur dénominateur commun étant d‟augmenter l‟efficience et l‟efficacité de l‟action publique. Tout d‟abord, ce texte répond à l‟un des objectifs affichés dès le lancement de la RGPP, notamment dans le discours du Premier ministre du 10 juillet 2007, de non-remplacement d‟un fonctionnaire partant à la retraite sur deux. Cette mesure était alors présentée comme destinée à instaurer « un Etat

non pas minimal mais optimal »135. L‟idée sous-jacente au non-remplacement était qu‟il

était nécessaire, pour réaliser des économies, d‟alléger les effectifs de l‟Etat (depuis également de ses opérateurs)136 et que cela était possible en améliorant l‟efficacité des

agents. Or, la mise en place de cette mesure a entraîné des bouleversements dans la répartition et l‟affectation des effectifs puisque certains agents ont été amenés à exercer des tâches nouvelles ou ont été réorientés dans d‟autres emplois, et c‟est la raison pour laquelle il est apparu indispensable d‟assouplir les règles relatives à la mobilité. De même, les réorganisations effectuées par la RGPP (regroupements de services notamment au sein de l‟administration centrale, création des DDI à partir des nombreux services déconcentrés) ont engendré des problématiques similaires. Ainsi un principe général de mobilité entre les

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L. n° 2009-972, 3 août 2009 : Journal officiel du 6 août 2009.

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fonctions publiques par la voie du détachement a été instauré en élargissant la faculté de détachement à l‟ensemble des corps et cadres d‟emplois et en créant un « droit au départ » au nom duquel l‟administration-employeur ne pourrait s‟opposer à la demande de détachement, de mise en disponibilité ou en position hors-cadres137 et élargissant des

possibilités de cumul d‟activités (pour la création ou la reprise d‟une entreprise ou lorsque l‟emploi public représente seulement 70% d‟un temps plein138), dans le prolongement de la

loi n° 2007-148 du 2 février 2007 ouvrant les possibilités de mise à disposition139. Dans le

même mouvement, la loi a introduit un « droit à l’intégration »140 après cinq ans de

détachement pour garantir l‟ouverture de tous les corps à la mobilité. Enfin, elle a mis en place un dispositif de « réintégration professionnelle » permettant aux fonctionnaires ayant perdu leur emploi à la suite d‟une restructuration d‟être « reclassé »141.

De surcroît, la justification de la loi « mobilité » rejoint les motivations des restructurations structurelles que nous avons évoquées supra. En effet, c‟est une logique de décloisonnement qui prévaut, au bénéfice des agents premièrement d‟après la présentation qu‟en donnent les responsables politiques, en dépit des éventuelles résistances des personnes concernées. Le Président de la République énonce ainsi dans son discours de Nantes du 19 septembre 2007 que « l’administration ne doit plus pouvoir s’opposer à la

mobilité d’un agent qui souhaite aller vers un autre emploi, dans une autre administration ou dans le secteur privé », celle-ci apparaissant comme « un enrichissement humain et professionnel certain »142. Mais cette mobilité est tout aussi profitable à l‟administration et

à la qualité de l‟action publique d‟après les responsables de la RGPP qui pensent que « il

faut faire circuler les hommes, les idées, les compétences »143, ou encore que le

développement de la transversalité et de la mobilité des agents « va favoriser la

connaissance mutuelle des services », lesquels « pourront s’enrichir mutuellement par la proximité, par le dialogue, par l’échange »144, bien que ce projet se heurte parfois aux

136

Depuis la circulaire du Premier ministre n° 5454/SG du 26 mars 2010 et le 4e CMPP du 4 avril 2010

137

Art. 14 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, créé par la loi 2009-972 du 3 août 2009 art. 4

138

Art. 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, modifié par la loi 2009-972 du 3 août 2009 art. 33

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Le régime de cette position statutaire étant d‟ailleurs quelque peu modifié par la mise en place d‟une convention de mise à disposition et d‟une obligation de remboursement entre les employeurs publics, laquelle peut apparaître comme une incitation financière à la mise à disposition ; dans ce sens : JEAN-PIERRE Didier, « La loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique » La Semaine juridique des administrations et des collectivités territoriales, n° 40, 28, Septembre 2009, 2232.

140

Art. 13 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, modifié par la loi 2009-972 du 3 août 2009 art. 1

141

Art. 44 bis et s. de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, crées par la loi 2009-972 du 3 août 2009 art. 7

142

Discours du Premier ministre, « La réforme de l‟administration territoriale : l‟Etat en mouvement »,

préc., p. 8

143

Discours du Président de la République du 19 septembre 2007 à Nantes, p. 6

144

exigences contraires de certains services.

Par ces instruments et les motivations sur lesquelles ils reposent, c‟est toute « la tradition

administrative » qui est remise en cause, avec « son organisation verticale, sa gestion par corps, ses cloisonnements statutaires »145, ce qui se traduit notamment par l‟emprunt de

techniques à la gestion des ressources humaines pour développer la mobilité de la fonction publique.

2) Mobilité et GRH

Les innovations introduites par la loi du 3 août 2009 tendent à introduire plus de flexibilité dans le régime des agents de l‟administration et tranchent avec la rigidité et la fermeture caractéristiques de ce dernier, à tout le moins du point de vue des modernisateurs. En effet, le droit à intégration reconnu aux agents après cinq ans de détachement ou le droit à l‟intégration directe dans tous les corps et cadres d‟emplois apparaît comme un affaiblissement du principe de la carrière, propre à la fonction publique (laquelle devait être accomplie jusque-là au sein d‟un même corps), sur le modèle du secteur privé, lequel valorise la capacité d‟adaptation et par conséquent la mobilité. A cet égard, la « réorientation professionnelle » créée par l‟article 7 de la loi constitue le pendant de cet impératif puisqu‟elle instaure en quelque sorte une mobilité forcée aux agents dont l‟emploi aurait été supprimé, à l‟image de l‟obligation de reclassement existant dans les entreprises ayant engagé un licenciement pour motif économique. Ce dispositif est d‟ailleurs accompagné, dans l‟administration territoriale, par des procédés calqués de la gestion des ressources humaines. Il en est ainsi de la mise en place d‟un « conseiller

mobilité-carrière » destiné à « aider les agents dans leurs démarches de mobilité » et dont

les missions consistent à « analyser les compétences et les potentialités des agents,

appréhender les besoins des services et faciliter la mise en adéquation de l’offre et de la demande »146. En outre, le développement de l‟offre de formation continue des agents

envisagé par la RGPP rejoint les préceptes gestionnaires valorisant l‟apprentissage individuel et collectif et apparaît comme une condition nécessaire de l‟adaptabilité.

Autre source de flexibilité directement inspirée des méthodes de gestion des ressources humaines : le recours à l‟intérim autorisé par les dispositions issues de l‟article 21 de la loi du 3 août 2009. Cette faculté participe à la banalisation du régime des agents employés

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Discours du Président de la République, préc.

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dans l‟administration et remet en cause le principe de permanence de l‟emploi public. Celui-ci avait déjà été fragilisé par le développement du recours aux agents contractuels, initialement permis à titre exceptionnel, principalement pour l‟exercice d‟activités temporaires (emplois saisonniers, remplacements, etc.) ou à titre discrétionnaire pour des fonctions ayant une dimension politique147. Or, la possibilité de recourir à l‟intérim, certes

encadrée par des conditions restrictives148, semble en quelque sorte consacrer la situation

contractuelle comme mode d‟exercice normal d‟un emploi public en se substituant à celle- ci, et participe ainsi à l‟infléchissement du système statutaire, jugé insuffisamment flexible. Dans un même objectif d‟efficacité et selon une perspective de « gestion des ressources humaines », la loi du 3 août 2009 met en place des instruments destinés spécifiquement à augmenter la performance des agents.

Dans le document RGPP et droit administratif (Page 57-60)