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Chapitre 2 Influence du mode de gestion et de la connectivité sur la dynamique de

B. Evaluation du potentiel de biodiversité à l’échelle du site

B.2. Potentiel de biodiversité des jardins privés : Le programme de science participative

B.2.1. Matériels & Méthodes

B.2.2.2. Faune du sol

Concernant la faune du sol échantillonnée au moyen des pièges Barber, une grande variabilité de l'abondance des communautés récoltées sur chaque jardin (Fig. 37) mais également de leur composition taxonomique (Fig. 38) a en effet pu être observée. On peut notammentévoquer la place particulière de Rbx 0 par rapport aux autres jardins, avec une abondance bien plus élevée (280 organismes en moyenne contre moins de 150 pour la majorité des autres jardins).

Figure 37 : Abondance moyenne des communautés prélevées sur les différents jardins situés sur les communes de Roubaix (Rbx) et de Tourcoing (Tcg) à l’aide des pièges Barber

Figure 38 : Abondance relative des principaux groupes taxonomiques récoltés dans les pièges Barber placés dans les jardins privés de Roubaix (Rbx) et de Tourcoing (Tcg)

Comme observé sur les friches et délaissés urbains proches de la friche de l'Union, les communautés des jardins sont essentiellement composées de cloportes et de collemboles (Fig. 38) qui peuvent représenter jusqu'à 95% et 50% des effectifs, respectivement.

Six espèces de cloportes ont été déterminées dont deux espèces communes dominantes (Porcellio scaber et Philoscia muscorum) et deux espèces relativement rares, notamment en milieu urbain (Eluma purpurascens et Porcellio spinicornis).

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% Rbx 0 Rbx 1 Rbx 2 Rbx 4 Rbx 5 Rbx 6 Rbx 7 Rbx 8 Tcg 0 Tcg 1 Tcg 2 Tcg 3 Tcg 4 Tcg 6 Tcg 7 Collembole Cloporte Limace Oligochète Pseudoscorpion Opilion Araignée Acarien Myriapode Dermaptère Orthoptère Neuroptère Lépidoptère Homoptère Hémiptère Hymnéoptère Coléoptère Diptère 0 100 200 300 400 500 600 Rbx 0 Rbx 1 Rbx 2 Rbx 4 Rbx 5 Rbx 6 Rbx 7 Rbx 8 Tcg 0 Tcg 1 Tcg 2 Tcg 3 Tcg 4 Tcg 6 Tcg 7 Abondance moyenne de la pédofaune par piège barber

Concernant les collemboles, 42 espèces ont été échantillonnées dont 32 rien que dans les pièges Barber qui permettent de capturer essentiellement les espèces épigées, soit les plus aptes à se déplacer sur de grandes distances. Ceci représente une richesse spécifique importante en milieu fortement anthropisé et donc une source de recolonisation potentielle des placettes expérimentales non négligeable. Trois espèces (ou groupe d’espèces) très abondantes dominent largement les communautés échantillonnées : Orchesella villosa, Tomocerus sp. et Desoria tigrina. Il s’agit d’espèces épiédaphiques, capables de se mouvoir aisément à la surface du sol. En ce qui concerne les autres taxons, la composition des communautés récoltées dans chaque jardin diffère également avec des jardins très pauvres (Tcg 6) et d’autres hébergeant un grand nombre de taxons sans large dominance d’un taxon en particulier (Rbx 0).

B.2.3. Discussion

Le principal point soulevé lors de la caractérisation des jardins privés a été leur très forte contamination en métaux lourds. Il est admis que les teneurs en métaux totaux des sols de jardins sont en moyenne deux fois supérieures à celles des sols agricoles ce qui s’explique par des pratiques de jardinage intensives (apports d’amendements, traitements phytosanitaires, enfouissement de déchets) auxquelles s’ajoutent le fond géochimique ainsi que d’autres sources de contamination comme la pollution atmosphérique (Schwartz, 2013). L’activité industrielle passée et/ou présente peut en effet fortement marquer la composition des sols de jardins même si l’origine de la contamination, dépôts atmosphériques ou apports par le jardinier de matériaux exogènes, reste souvent indéterminée (Douay et al., 2008). Etant donné le passé industriel de la zone de l’Union, la contamination des jardins privés situés en périphérie n’est donc pas étonnante.

Malgré ces teneurs en métaux lourds très élevées et des pratiques de gestion ne favorisant pas forcément toujours la biodiversité, le programme Œil de Lynx a mis en évidence la présence de communautés faunistiques développées dans les sols des jardins privés du secteur d’étude. Joimel (2015) a elle-aussi montré que les sols de jardins potagers, malgré leur contamination, présentaient une meilleure qualité biologique que celle des sols agricoles, proche de celle des sols forestiers.

Une grande hétérogénéité existe cependant entre les jardins qui est certainement à mettre en relation avec l’hétérogénéité des paramètres physico-chimiques des sols mais également de

la nature de la végétation en place et des diverses méthodes d'entretien. Une étude réalisée sur 61 jardins privés dans la ville de Sheffield en Angleterre a ainsi montré que la richesse spécifique en invertébrés dépendait fortement de la composition de la végétation du jardin et notamment du nombre d’arbres (Smith et al., 2006).

Concernant le jardin Rbx 0 (ou Ferme aux Loisirs, FL, déjà suivie avec les délaissés urbains), qui se détache nettement des autres jardins en termes d’abondance et de diversité des communautés faunistiques, ceci peut s’expliquer par la nature de cette station, un lieu plus préservé que les autres jardins et suivant des pratiques de gestion différenciée (Gaston et al., 2005; Goddard et al., 2009; Shwartz et al, 2013) induisant une végétation plus fournie. Ceci fait de cette station un endroit qui semble favoriser les communautés faunistiques. De plus, cette abondance élevée peut également s’expliquer par les efforts d’échantillonnage à cet endroit, où 9 pièges Barber ont été installés (contre 1 à 3 pièges dans les autres jardins).

Malgré des différences liées à la taille et aux usages présents et passés des jardins, les jardins privés renferment donc une richesse spécifique non négligeable en milieu fortement anthropisé et donc une source de recolonisation potentielle pour les placettes expérimentales.

Un autre point intéressant à noter est la complémentarité des échantillonnages réalisés dans les jardins privés et dans les délaissés urbains. En effet, les communautés y sont relativement distinctes. Si l’on prend l’exemple des collemboles, les jardins – certainement plus modelés par l’activité humaine au cours des dernières années – hébergent majoritairement des espèces épiédaphiques de grande taille, susceptibles de coloniser rapidement des sols néoformés, alors que les délaissés urbains abritent des communautés d’espèces plutôt hémiédaphiques, aux capacités de déplacement plus limitées et qui s’implanteront dans des sols néoformés plutôt dans un second temps, lorsqu’un couvert végétal plus stable et permanent se sera formé.

Les inventaires faunistiques réalisés sur le site de l'Union et ses alentours, au niveau des délaissés urbains mais également des jardins privés, ont montré la présence de communautés d'invertébrés hétérogènes aussi bien dans leur composition que dans leur densité. Cependant, dans un milieu urbain que l'on sait fortement perturbé et en mutation permanente, les résultats montrent que ces espaces peuvent représenter des "sources de biodiversité" et nous laissent ainsi envisager la possibilité d'une recolonisation des sols de l'Union à partir de ces espaces.