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Le plus souvent, l’obésité n’a pas de cause unique et « organique ». C’est la rencontre d’un génotype prédisposant et d’un environnement favorable qui conduit à l’accumulation de tissu adipeux. Bien que quelques gènes soient fortement impliqués et prédisposent à l’obésité, leur recherche en routine n’est pas pratiquée.

En général, l’obésité provient d’une combinaison de facteurs environnementaux, comportementaux, psychosociaux et génétiques qui finissent par compromettre le bilan énergétique. Les facteurs les plus instrumentaux du bilan énergétique sont la nutrition (ou l’apport énergétique) et l’activité physique (ou la dépense énergétique). Selon toute probabilité, une interaction de ces facteurs a contribué à faire grimper l’obésité infantile et non l’influence de l’un ou l’autre facteur particulier (Vance & Hanning, 2004 ; Dériot, 2005).

Figure 10. Facteurs de risque de l’obésité (Duche, 2005) in (Taleb, 2011)

Contrairement à ce que pensent généralement le grand public et une partie de la communauté médicale et scientifique, il est manifeste que l’obésité n’est pas simplement le résultat d’une gourmandise excessive ou d’une absence d’activité physique (OMS, 2003). Nous résumons les facteurs de risque de l'obésité comme suit :

5.1. Facteurs génétiques

Les études menées sur les populations du monde entier laissent à penser que certaines personnes sont plus prédisposées que d’autres au surpoids et à l’obésité, et que ces sujets sensibles existent dans des pays présentant des modes de vie et des conditions environnementales très différents (OMS, 2003). Les facteurs génétiques jouent un rôle favorisant parfois déterminant. Certains obèses ont des récepteurs situés à la surface des cellules graisseuses incapables de fonctionner et ces cellules graisseuses stockent alors la graisse sans jamais pouvoir la libérer (Zermati et al., 2010). Ces récepteurs participent

normalement à la dégradation des réserves de graisses selon les besoins de l'organisme (CERIN, 1999).

5.2. Niveau socio-économique

Les données indiquant l’effet d’une situation socio-économique défavorisée sur la prédisposition des personnes à l’obésité sont constantes dans de nombreuses études transversales et longitudinales, et ont donc été classées comme cause « probable » d’un risque accru d’obésité (OMS, 2003). Dans une étude chez des enfants français âgés de 7 à 12 ans, on retrouvait 4 fois plus d’obèses chez les enfants d’ouvriers que chez les enfants de cadres (Jouret, 2002).

Le profil est plus précis pour le niveau de scolarité. Les jeunes vivant dans un ménage où aucun membre n’avait dépassé le niveau du diplôme d’études secondaires étaient plus susceptibles de faire du surpoids ou de l'obésité que ceux vivant dans un ménage où le plus haut niveau de scolarité était un diplôme d’études post-secondaires (Shields, 2005).

5.3. Habitation en milieu rural versus urbain

Selon CERIN (2000), l’obésité concerne les enfants de classes favorisées et vivant en zone urbaine, alors qu’elle est quasiment inexistante dans les zones rurales. Cette urbanisation conduit à une disponibilité alimentaire plus importante qu’elle ne l’est dans les zones rurales, à l’exercice de métiers davantage sédentaires, et à l’utilisation de transports en commun au détriment du déplacement à pied. Il apparaît que l’augmentation de la fréquence de l’obésité est quasiment indissociable de l’augmentation du niveau socio-économique.

5.4. Poids à la naissance

Le poids de naissance est positivement corrélé à l’IMC à l’âge adulte déclare Dubuis (2002). Dans une étude portant sur des enfants de 4-17 ans, la relation du poids de naissance avec l’indice de masse corporelle dans l’enfance et à l’âge adulte était très significative (p < 0,001). Mais l’étude rétrospective de Barthel (2001) n’a pas observé de relation entre un poids de naissance élevé (> 4 000 g) et l’obésité des enfants à l’âge de 10-12 ans (ANAES, 2004).

Il existe une corrélation très significative entre le gain de poids et de taille pendant les deux premières années et le poids, l’indice de masse corporelle, l’épaisseur du pli cutané sous-scapulaire et le périmètre abdominal à l’âge de 14 ans. Des études récentes chez des enfants nés à terme nourris avec une préparation à base de lait de vache ont montré que c’est l’intensité du gain pondéral pendant la première semaine de la vie qui est associée à une augmentation du risque de surpoids à l’âge adulte (Dubuis, 2002).

5.5. Précocité du rebond d’adiposité

L’âge du rebond d’adiposité est corrélé à l’adiposité à l’âge adulte : plus il est précoce, plus le risque de devenir obèse est élevé (Arnould et al., 2005). Selon Rolland-Cachera et al.

(1990), Une obésité transitoire avec un rebond tardif pourrait être associée à une hypertrophie des adipocytes, une obésité persistante avec un rebond précoce pourrait être due à une multiplication précoce des adipocytes. La période comprise entre 5 et 7 ans (période du " rebond d'adiposité ") est une période à risque d'apparition d'obésité (OMS, 2003

5.6. Antécédents familiaux

D'après beaucoup d'études, les enfants obèses ayant fréquemment des parents obèses, même s’ils ne vivent pas avec eux (Klish, 1998). C'est pour cela qu'il y a d'avantage de cas d'obésité dans les familles d'obèses que dans la population générale (Iron, 2006).

Picoche-Gothié (2005) a pu montrer que, par rapport à un enfant dont aucun des deux parents n’est obèse, le risque d’obésité est multiplié par 3 si un parent est obèse, par 5 si les 2 parents le sont. Le risque relatif lié au statut pondéral des parents est augmenté dans la petite enfance, alors qu’à l’adolescence, c’est le statut pondéral de l’enfant qui augmente le risque relatif d’obésité à l’âge adulte.

Le diabète maternel, l’obésité et la sous-nutrition, sont donc associés à un risque d’obésité chez les enfants de ces mères (Noreen, 2005) et plus particulièrement chez les individus génétiquement prédisposés (Junien, 2002). Aux Pays-Bas, une étude a permis de mettre en évidence deux fois plus d'obésité à l'âge adulte chez les enfants nés de mères sous alimentées lors d'une grande famine à la fin de la 2ème guerre mondiale (Basdevant, 1999).

5.7. Origine ethnique

Une étude initiale a démontré que les sujets blancs présentaient une masse corporelle plus élevée par rapport à un IMC donné que les sujets noirs (SCP, 2004). Selon l’OMS (2003), il apparaît qu’un certain nombre de groupes ethniques sont d'avantage prédisposés au risque d’obésité lorsqu’ils sont exposés au mode de vie habituel des pays industrialisés. Une étude réalisée en France chez des enfants d’origine maghrébine d’âge préscolaire rapporte une prévalence plus élevée d’obèses dans cette population (8 % de garçons et 18 % de filles à 4 ans) que chez les enfants en majorité d’origine française (2 % de garçons et 2 % de filles au même âge) (Jouret, 2002).

5.8. Alimentation

L’apport alimentaire est un des déterminants fondamentaux de l’obésité. Quelle que soit la susceptibilité génétique, la prise de poids ne peut survenir que s’il existe au préalable et de façon prolongée un déséquilibre du bilan énergétique et donc un excès des apports alimentaires par rapport aux dépenses. Un déséquilibre mineur de la balance énergétique de l’ordre de 100 kcal/j conduit à une prise de poids annuelle de 5 kg et peut donc engendrer au fil du temps une obésité (INSERM, 2005). Une surconsommation expose systématiquement au risque d'obésité même en l'absence de gènes prédisposant (CERIN, 1999). Selon le rapport

OMS/FAO (2003) nous consommons de plus en plus d’aliments pauvres en micro nutriments, trop riches en calories, en sucre et en graisses saturées.

Des données des États-Unis indiquent qu’au moins 40% de l’augmentation de la prévalence de l’obésité au cours des 25 dernières années peuvent être expliqués par la diminution du prix unitaire des aliments, en particulier celui des snacks sucrés, salés et gras (OMS, 2003). Récemment, il a été mis en évidence le rôle de la nature des acides gras dans le développement du tissu adipeux. Les acides gras de la série n-6 sont des puissants promoteurs de l’adipogenèse in vitro et du développement du tissu adipeux in vivo. Les acides gras de la série n-3 comme l’EPA, le DHA ainsi que les acides linoléiques conjugués (CLA) diminuent la prolifération des pré-adipocytes et l’adiposité. Ces facteurs apparaissent donc comme des déterminants importants du développement de l’obésité. Cependant, la nature des acides gras du lait maternel dépend de l’alimentation de la mère et la composition en acides gras des laits artificiels a évolué avec le temps. Il est ainsi difficile de connaître l’influence de ces changements, mais ce sont probablement des paramètres dont il faudra tenir compte à l’avenir (INSERM, 2005).

La consommation de glucides à saveur sucrée ne semble pas constituer un facteur de prise de poids. Les grandes enquêtes de consommation alimentaire ont même mis en évidence une relation négative chez les enfants ou chez les adultes entre la consommation de saccharose et la prévalence de l’obésité. Il a été observé que la consommation de sucres simples diminue quand celle de lipides augmente. Par contre, les aliments à la fois riche en graisses et en sucres qui associent les qualités de palatabilité des premiers à la satisfaction du goût sucré des seconds ont une densité énergétique importante, et par conséquent un effet satiétogène faible. Leur rôle favorisant vis-à-vis de l’obésité paraît vraisemblable.

Les apports protéiques ont un rôle propre sur le développement de l’adiposité au cours des premières années de la vie. Une consommation accrue de protéines durant la petite enfance peut accroître précocement le niveau de IGF-1 « Insulin Growth Factor » (lequel est bas jusqu’à l’âge de 8 ans) et déclencher la multiplication des adipocytes, qui normalement commence à l’âge de 8 ans mais plutôt chez les obèses (Turck, 2005).

Une faible quantité de calcium est associée à une plus grande adiposité. Des différentes études sont en faveur d’une relation inverse entre apport en calcium et développement de la masse adipeuse (Laville et al., 2004). Selon Minaker et al. (2002) une légère carence en zinc pendant l’enfance se manifeste par un affaiblissement de l’état immunitaire et par un développement insuffisant des tissus maigres; elle peut même entraîner l’obésité.

L'étude Fleurbaix-Laventie montre que chez l'enfant, un petit déjeuner inexistant est surcompensé durant le reste de la journée. La prise alimentaire globale de la journée est alors augmentée et plus riche en sucreries. Les enfants qui prennent un bon petit déjeuner sont en général plus minces que ceux qui n'en prennent pas. Le fait de sauter le petit déjeuner et/ou un repas du soir trop copieux sont associés à un risque accru d'obésité infantile (Basdevant, 1999). L’augmentation de la consommation de boissons sucrées est une modification importante du comportement alimentaire actuel. La consommation des boissons est soumise principalement à une régulation hydrique plus qu’énergétique. La rapidité d’ingestion, l’absence de mastication sont des facteurs qui ne favorisent pas le rassasiement. Dans ce contexte, l’augmentation actuelle de la consommation de boissons sucrées paraît inquiétante dans le contexte de développement de l’obésité chez les enfants (INSERM, 2005).

5.10. Allaitement maternel

Une réduction ou l’absence d’allaitement maternel est un facteur de risque d’obésité pour l’enfant comme pour la mère, déclarent Avignon et al. (2001). L’allaitement au sein en tant que facteur protecteur contre la prise de poids a été examiné dans au moins 20 études auxquelles 40 000 sujets ont participé. Cinq études (y compris les deux plus grandes) ont constaté un effet protecteur, deux ont conclu que l’allaitement au sein était un facteur prédicteur de l’obésité, et les autres n’ont trouvé aucune relation. Ces études comportent sans doute de multiples effets de confusion, mais la réduction du risque d’obésité observée dans les deux plus grandes études était importante (20 à 30 %). L’allaitement maternel offre de nombreux avantages, la prévention de l’obésité chez l’enfant en est probablement un (OMS/ FAO, 2003). En revanche, une étude cas-témoins de Locard (1992) a estimé l’odds ratio d’obésité des enfants de 5 à 6 ans selon l’existence antérieure d’un allaitement maternel quelle qu’en soit la durée. L’odds ratio n’était pas significatif (ANAES, 2004). La durée de l’allaitement maternel pourrait donc être un facteur protecteur du développement de l’obésité de l’enfant (Dubuis, 2002).

5.11. Activité physique/Sédentarité

La plupart des études réalisées sur le sujet montrent une association significative entre le temps passé à regarder la télévision et la corpulence des enfants (Castetbon et al., 2004). Parallèlement, le nombre de programmes destinés aux enfants et le nombre d'heures qu'ils passent devant la télévision ont aussi augmenté. Il est très fréquent que les enfants regardent la télévision plus de quatre heures par jour (Moreno et al., 2004 ; Hancox et al., 2004).

Les enfants d’aujourd’hui sont moins actifs que ceux des générations qui les ont précédés et qu’ils consacrent une bien plus grande partie de leurs temps libres à des activités

sédentaires (Brett et al., 2004). Le temps passé à regarder la télévision ou à jouer à des jeux vidéo constitue une période pendant laquelle l’enfant reste assis et a donc une dépense énergétique relativement faible. En outre, ces activités facilitent le grignotage et donc l’augmentation de l’apport énergétique (De Lauzon & Charles, 2004).

Certaines études ont démontré que l’activité physique protège contre l’obésité durant l’enfance (Shields, 2005). L’activité physique contribue à diminuer le bilan énergétique et joue un rôle important dans la régulation physiologique du poids (OMS/FAO, 2003). De plus, elle a un rôle favorable sur la composition corporelle, les capacités fonctionnelles et le développement des enfants (Cazorla, 2006).