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DEUXIÈME CHAPITRE RECENSION DES ÉCRITS

4. FACTEURS D’INFLUENCE DES HABITUDES ALIMENTAIRES CHEZ LES JEUNES

Plusieurs déterminants individuels et collectifs modulent, consciemment et inconsciemment, l’alimentation et peuvent ainsi influencer l’équilibre du régime, le poids et les habitudes alimentaires des jeunes (Raine, 2005). Certains facteurs inspirent l’adolescent positivement en développant chez lui des habitudes alimentaires saines. D’autres sont associés à une mauvaise alimentation prédisposant le jeune à des carences nutritives ou à l’obésité. En plus, ces déterminants interagissent entre eux, complexifiant le développement ainsi que la compréhension des habitudes alimentaires chez les jeunes (Bronfenbrenner, 1977).

Dans la littérature, les déterminants individuels des choix alimentaires comprennent les facteurs génétiques, biologiques et psychologiques, les préférences alimentaires, le style de vie ainsi que le savoir, les attitudes et les perceptions en matière de nutrition et de santé (Etiévant, Bellisle, Dallongeville, Etilé, Guichard, Padilla et Romon-Rousseaux, 2010; Raine, 2005; Story Neumark-Sztainer et French, 2002; Taylor et al., 2005). Bien que l’ensemble de ces facteurs coexiste, certains semblent avoir des répercussions plus importantes sur les habitudes alimentaires des adolescents. On note les préférences gustatives ainsi que le manque de temps, le pouvoir d’achat et la satisfaction quant à l’image corporelle (Contento, Williams, Michela et Franklin, 2006; Etiévant et al., 2010; Neumark-Sztainer, Story, Perry et Casey, 1999; Taylor et al., 2005). Plusieurs études montrent que ces facteurs individuels font varier les habitudes alimentaires des adolescents au profit des aliments moins nutritifs (Chapman et MacLean, 1993, cité dans Story et al., 2002; Croll, Neumark-Sztainer et Story, 2001; Neumark-Sztainer et al., 1999; Polivy et Herman, 2005; Story et al., 2002; Taylor et al., 2005). Par exemple, la malbouffe est perçue par plusieurs jeunes comme savoureuse, pratique, rapide et facile à trouver (Hovington, 2010; Hovington et al., 2012).

Les déterminants collectifs (aussi appelés déterminants environnementaux) qui modulent le contexte alimentaire sont regroupés dans la littérature sous quatre environnements, soit socioculturel, économique, politique et physique (Etiévant et al., 2010; Ministère de la Santé et des Services Sociaux du Québec [MSSS], 2012; Raine, 2005; Story et al., 2002; Taylor et al., 2005). Dans les déterminants les plus significatifs chez les adolescents, on note l’influence des pairs, de la famille et des médias, l’insécurité alimentaire, ainsi que la disponibilité et la commodité de l’offre alimentaire. Tout comme les déterminants individuels, l’environnement influence les habitudes alimentaires des jeunes, favorisant souvent un gain de poids (OMS, 2015).

Environnement socioculturel. Tout au long de l’enfance et de l’adolescence, l’influence familiale diminue pour laisser une place importante à l’environnement social extérieur à la maison (Baril et al., 2011; Patrick et Nicklas, 2005). Les pairs, mais aussi l’école, les médias ainsi que les normes sociales et culturelles modulent ainsi les adolescents (Ibid.). La relation d’un jeune avec ses pairs peut être un soutien à l’adoption d’habitudes alimentaires saines, lorsque ceux-ci font des choix sains ou sont préoccupés par leur santé (Hargreaves, McVey, Nairn et Viner, 2013). L’inverse est aussi vrai (Dorey et McCool, 2009). Les adolescents respectent la norme sociale perçue, en ce qui concerne la qualité et la quantité alimentaires, de peur d’être « impopulaires, ignorés, désapprouvés, boycottés, rejetés, etc. (Hovington et Ledoux, 2010) ». Ils perçoivent les habitudes alimentaires comme des conditions d’inclusion ou d’exclusion dans un groupe d’amis (Baril et al., 2011; Croll et al., 2001). Cette influence importante du réseau social sur les habitudes alimentaires (Ouimet, 2011) semble toucher les garçons plus que les filles (Denney-Wilson, Crawford, Dobbins, Hardy et Okely, 2009).

Les adolescents sont visés par les publicités et le marketing étant donné leur grand pouvoir d’achat direct et indirect, actuel et futur (Coalition québécoise sur la problématique du poids, 2012; Story et al., 2002). L’ensemble du monde médiatique inspire les jeunes en ce qui a trait à leurs préférences, leurs demandes d’achats, leurs

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achats, leurs connaissances et leurs attitudes alimentaires (Kinard et Webster, 2012; Taylor et al., 2005). Malheureusement, les aliments proposés dans les publicités sont souvent très caloriques (riches en gras et en sucre) et de faible valeur nutritive (Laperrière et Martel, 2010).

Parallèlement, les adolescents n’échappent pas à la culture moderne associée à un mode de vie rapide et frénétique. Le temps disponible ainsi que celui que les adolescents souhaitent passer à préparer les aliments et à manger influencent leurs choix. Ainsi, ils vont préférer dormir plus longtemps, manger dans les restaurants avec un service succinct et choisir de la nourriture rapide à préparer plutôt que d’attendre dans une file à la cafétéria (Neumark-Sztainer et al., 1999). Cette culture de rapidité est également associée à la quête d’aliments commodes donc faciles à préparer, à trouver et à transporter (Lavallée, 2004).

Environnement économique. Sur le plan de l’environnement économique, le faible revenu familial, corrélé au niveau d’instruction et au statut d’emploi, est relié à l’insécurité alimentaire. Il s’agit du principal obstacle des familles à la saine alimentation (Blanchet et Rochette, 2011). Au Québec, l’insécurité alimentaire familiale est associée, chez les adolescents, à une consommation quotidienne moindre de légumes, de fruits, de yogourt ainsi que de pains à grains entiers (Ibid.).

Environnement politique. L’offre alimentaire dans les milieux de vie des jeunes est également influencée par des déterminants politiques. En effet, des politiques scolaires permettent d’encadrer et d’améliorer l’offre dans les services alimentaires et dans les machines distributrices des écoles (Baril, 2008). Au Québec, une Politique-cadre pour une saine alimentation en milieu scolaire encadre l’offre alimentaire tout en favorisant la création d’un contexte social permettant aux jeunes de faire de bons choix (MSSS, 2008).

Toutefois, les politiques alimentaires scolaires sont perçues par certains adolescents comme contraignantes et limitant la liberté de choix (Baril et al., 2011). Elles les poussent ainsi à sortir de l’école pour acheter leur repas (Ibid.). Après l’implantation de la Politique-cadre dans les écoles québécoises, certains gestionnaires de services alimentaires scolaires ont, en effet, signalé une diminution des ventes (Duhamel, 2011, dans Veille action pour de saines habitudes de vie, 2012). Cette réduction d’achalandage est potentiellement due à la désertion des jeunes vers les commerces alimentaires avoisinant les écoles. Ainsi, la présence de commerces alimentaires à l’extérieur de l’école (environnement physique) semble être un obstacle à l’obtention de résultats efficients suite à l’implantation de la Politique- cadre alimentaire.

Environnement physique. L’environnement physique comprend les éléments naturels (p. ex. le climat), les éléments bâtis par l’homme (p ex. les édifices) ainsi que les éléments issus de la technologie (p. ex. les véhicules) autour d’un individu (Mongeau, 2011). Selon Story et al. (2002), l’environnement physique influence la disponibilité et l’accessibilité alimentaire dans une communauté et, ainsi, les habitudes alimentaires des résidents. Les choix alimentaires d’un adolescent sont fortement modulés par la facilité de disponibilité des aliments dans son environnement selon des études transversales et prospectives (Baril et al., 2011; Cutler, Flood, Hannan et Neumark-Sztainer, 2011).

L’environnement physique autour des jeunes inclut tous les commerces dans le voisinage de leur quartier résidentiel, de leur école ainsi qu’autour de leur lieu de travail. Par exemple, la présence de restauration rapide ainsi que d’une offre d’aliments prêts-à-manger dans l’environnement communautaire pourrait favoriser les choix moins nutritifs et limiter les choix sains (Bergeron et Reyburn, 2010; Raine, 2005; Robitaille, Bergeron et Lasnier, 2009). L’environnement alimentaire scolaire pourrait influencer considérablement les habitudes des jeunes (Patrick et Nicklas,

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2005) qui dégustent jusqu’à la moitié de leurs prises alimentaires dans cette zone géographique (Gleason et Suitor, 2001).