• Aucun résultat trouvé

Les facteurs de choix de la situation de la limite

Forme de la limite

ALLIAGE-DENT IMPOSÉ :

4. LA SITUATION DES LIMITES CERVICALES

4.2. Les facteurs de choix de la situation de la limite

La facilité d’élaboration des éléments prothétiques et la réussite finale sont en rapport direct avec le niveau de la limite cervicale de la préparation. Si le polissage des bords est le plus fin possible et s’ils sont accessibles au contrôle de plaque, les meilleurs résultats sont espérés (Eissmann, 1971, 70). La ligne de finition doit être placée à l’endroit où le bord prothétique peut être fini par le praticien et nettoyé par le patient aussi souvent que possible. De plus, elle doit être reproduite sans tirage ni déformations dans l’empreinte.

Le choix de la situation de la limite cervicale est délicat et va dépendre essentiellement du but fixé : obtenir le meilleur résultat d’ensemble final. Ce choix dépend :

du respect de l’intégrité tissulaire et de la vitalité pulpaire, de la rétention,

du respect du parodonte,

de l’hygiène et du maintien du résultat dans le temps, de l’esthétique, et de l’aspect du visage du patient, de la facilité de réalisation.

79

4.2.1. La vitalité pulpaire et l’intégrité tissulaire

Lors de la préparation d’une dent vitale, le praticien doit s’efforcer de garder le maximum de tissu dentaire en limitant la réduction. La limite supra-gingivale est préférable pour une dent vivante, alors qu’une dent dévitalisée, le plus souvent porteuse d’une reconstruction corono-radiculaire, demande une préparation plus généreuse pour protéger les zones fragiles et les collets disgracieux. De même, une carie du collet dirige la préparation vers une limite plus apicale.

Il faut également distinguer les cas de prothèse sur parodonte réduit qui présentent un contexte mécanique, biologique et esthétique particulier. Étant donné la position plus apicale des marges de la préparation, de telles situations nécessitent une approche plus

conservatrice (Fig. I-80).

Un épaulement cervical trop délabrant sera remplacé par une trace voire par une simple mise de dépouille ; et l’épaulement externe au niveau de la chape sera créé à un niveau où l’épaisseur de la céramique sera suffisante (Ferran, 1983, (78)). Dans ce cas, la couronne céramo-métallique présente un large bandeau métallique cervical, mais celui-ci n’est pas forcément un handicap (esthétiquement parlant) dans la mesure où il reste peu apparent (ex : sourire non gingival).

4.2.2. La rétention de l’ancrage

La forme de rétention, c’est-à-dire le type même de l’ancrage choisi, influe sur la position de la limite cervicale. Le choix d’un niveau supra-gingival suppose que la hauteur coronaire de la dent support soit suffisante.

Donc, une dent courte demande de prévoir une limite placée au maximum des possibilités d’enfouissement intra-sulculaire, pour augmenter les surfaces de frottements. Mais, les moyens secondaires de rétention (comme des rainures ou des tenons dentinaires) permettent de placer la limite en situation supra-gingivale.

4.2.3. Le respect du parodonte

Avant toute réalisation prothétique, le parodonte doit être sain : c’est un impératif essentiel. Et la

manière la moins iatrogène de placer la limite cervicale est de la positionner en une situation supra-gingivale. De plus, la précision de l’ajustage des éléments prothétiques joue un rôle décisif dans le développement d’une inflammation parodontale dans un premier temps, et d’une parodontopathie marginale ensuite. D’ailleurs, il existe un conflit entre l’indication prothétique et la préservation du parodonte. C’est la raison pour laquelle une connaissance parfaite de l’anatomie du joint dento-prothétique et du parodonte est indispensable pour une bonne intégration biologique.

L’évaluation parodontale, préalable à toute thérapeutique prothétique, est incontournable. Elle doit

principalement insister sur la hauteur de gencive attachée, l’épaisseur tissulaire existante en face de la future restauration et la profondeur du sulcus (physiologiquement entre 0,5 et 2 mm) (Fig. I-81).

Figure I-80 : Un parodonte réduit exige des limites conservatrices. (D’après (78))

80

Si l’état parodontal est pathologique alors un traitement parodontal pré-prothétique est impératif.

Si le parodonte est sain alors la restauration peut être envisagée. Il reste tout de même à évaluer si la quantité de gencive attachée est suffisante. Maynard et Wilson (1981, (274)) recommandent 5mm de gencive kératinisée (4mm de gencive attachée + 1mm de gencive libre) en regard de la dent à couronner.

Si l’environnement parodontal remplit toutes les conditions alors la restauration peut être envisagée sereinement.

Si le parodonte est trop fin, alors le comportement gingival à l’égard de la restauration est difficile à prévoir. Réaliser un élément prothétique dans ces conditions représente un risque de perte d’attache et peut engendrer un résultat esthétique très peu satisfaisant. Dans ce cas, une correction muco-gingivale est préconisée de façon à épaissir les tissus pour compenser l’inflammation d’origine prothétique et à diminuer les phénomènes de transparence.

La ligne de finition doit suivre une courbe harmonieuse, avec un feston proximal peu profond (Strating

et al., 1981, (251) ; Stein, 1987, (250)). Les contraintes fonctionnelles les plus fortes se manifestent

dans l’espace inter-proximal, par conséquent, il ne faut pas sous-estimer le risque de couper les fibres transeptales, car les préparations interproximales profondes sont les causes les plus fréquentes de la persistance d’une inflammation de la papille interdentaire et du « syndrome de la gencive bleue ».

Évaluation parodontale Parodonte sain Parodonte trop fin Parodonte épais Traitement prothétique Traitement parodontal pré-prothétique Chirurgie muco-gingivale

Figure I-81 : Une évaluation parodontale doit précéder tout traitement prothétique, de façon à s’assurer de la santé du parodonte avant le début des phases prothétiques.

I-81

Parodonte pathologique

81

4.2.4. L’hygiène et la maintenance du résultat

Dès 1940, Robert E. Blackwell (24) remettait en question le concept de Black (pour des raisons parodontales) qui préconisait l’extension des limites cervicales des préparations dans le fond du sillon gingival pour prévenir les éventuelles récidives de caries. En effet, la plaque bactérienne supra-gingivale qui se dépose sur les surfaces dentaires juxta-supra-gingivales et celle du sillon gingival sont de nature différente, et la plaque bactérienne intra-sulculaire est considérée comme plus pathogène. De nos jours, ce rôle préventif n’est plus justifié. De plus, il n’est plus possible de raisonner uniquement en termes de prophylaxie carieuse, la prophylaxie parodontale doit elle-aussi être prise en compte sachant que les maladies parodontales constituent l’un des principaux facteurs de la perte de l’organe dentaire. En effet, l’extension des limites peut entraîner des désordres parodontaux, tant dans le cas de restaurations partielles que de préparations coronaires périphériques. D’ailleurs, Loe (1968, (154)) écrit à ce sujet : « Le concept d’extension-prévention est dépassé. Il faut s’efforcer de dégager

une nouvelle base théorique pour un traitement prophylactique combiné de la carie dentaire et de l’affection parodontale. ».

Ainsi, en dehors des critères impératifs d’esthétique, ou de critères mécaniques, le praticien doit veiller à situer la limite cervicale périphérique d’une restauration :

idéalement dans les zones soumises à un nettoyage mécanique naturel résultant du mouvement de la musculature périphérique.

dans des zones accessibles à un contrôle de plaque minutieux. L’enseignement à l’hygiène des patients est primordial avant la réalisation et la pose de restaurations prothétiques.

dans les zones qui permettent une réalisation aisée, et un contrôle de l’adaptation marginale dento-prothétique, afin d’éliminer un éventuel surplomb, bord coupant, ou jonction ouverte, qui sont autant de facteurs de rétention de plaque.

4.2.5. L’esthétique et aspect du visage du patient

L’esthétique est un facteur décisif en ce qui concerne la conception d’un élément prothétique, elle conditionne certains choix et notamment la situation de la limite cervicale de la future restauration. La plupart du temps, le meilleur rendu esthétique requiert une limite cervicale située dans le sillon gingivo-dentaire, c’est-à-dire une limite intra-sulculaire. Très longtemps, cette limite a fait l’objet de diverses interprétations qui conduisaient le plus souvent à la situer trop apicalement, et à provoquer ainsi une agression de l’attache conjonctive, transformant cette limite intra-sulculaire en une limite sous-gingivale.

Mais cette tendance tend à s’inverser avec l’avènement du tout céramique. En effet, la nature du joint marginal évolue en fonction de la situation de la limite.

Par exemple : une couronne céramo-métallique (CCM) adaptée sur une préparation angulaire (chanfrein ou biseau) dispose d’un bandeau métallique disgracieux qu’il conviendra de masquer en l’enfouissant le plus profondément possible dans le sulcus (technique de Stein).

Ceci est en opposition avec les CCM avec une finition en lame de couteau qui s’adaptent sur une limite cervicale franche et ne présentent qu’un fin liseré métallique à peine visible (technique de P.

Weiss), il n’est donc pas nécessaire de recourir à une limite enfouie dans le sillon gingival. Il faut

simplement savoir adapter le type de limite cervicale à la situation clinique, et aux attentes esthétiques du patient.

82

Enfin, les couronnes tout céramique ou celles présentant un joint marginal céramique-dent ont une esthétique excellente et peuvent donc s’adapter sur une préparation supra-gingivale. Cependant, il est tout à fait possible de placer une telle limite en intra-sulculaire (notamment en cas de dyschromie dentaire) car la céramique possède d’excellentes propriétés d’intégration biologique vis-à-vis du parodonte marginal. D’ailleurs, le cas particulier consistant à élargir une dent (ex : transformation d’une dent riziforme, ou fermeture de diastème à l’aide d’une facette) nécessite lui-aussi de placer la limite cervicale la plus profondément possible pour obtenir un meilleur profil d’émergence (Fig. I-82).

Par ailleurs, la situation du bord, supra-gingivale, para-gingivale ou intra-sulculaire, est déterminée non seulement par le résultat esthétique souhaité mais aussi par la ligne de la lèvre du patient. Si cette dernière est basse, il est préférable d’envisager une limite supra- ou para-gingivale. Par contre si le sourire est gingival, il est nécessaire d’envisager une limite intra-sulculaire qui permet d’assurer le résultat esthétique attendu ; mais les souhaits du patient doivent aussi être pris en compte.

Figure I-82 : L’enfouissement intra-sulculaire d’une limite cervicale permet un profil d’émergence plus naturel dans le cas de l’élargissement d’une dent. (D’après (98))

83

4.2.6. La commodité de réalisation

D’un point de vue pratique, les commodités de réalisation de la prothèse au cours des différentes étapes prothétiques sont toutes en faveur de la limite supra-gingivale.

Lors de la préparation, la vision est meilleure, il n’y a aucun saignement, ni traumatismes du parodonte environnant. Les risques d’atteinte pulpaire sont moindres et la préparation est plus conservatrice.

Les empreintes sont simplifiées quant à l’absence de saignement et de sérosités, et la déflexion gingivale n’est pas obligatoire.

Pour les divers essayages, la vision des bords et l’évaluation de la qualité des joints est nette.

Le scellement et le nettoyage sont simplifiés, ainsi que la vérification du bon enfoncement des éléments prothétiques. De même l’élimination du ciment superflu est facilitée grâce à l’accessibilité des zones concernées.

Une restauration prothétique est soumise à des impératifs qu’il faut bien cerner avant de réaliser les préparations qui la précèdent. Ces impératifs induisent la position optimale de la limite cervicale qui est souvent un compromis dépendant des critères les plus prépondérants.

Bien souvent une préparation présente une zone où la limite cervicale est intra-sulculaire (la face vestibulaire où l’esthétique est primordiale), une zone où la limite est supra-gingivale (au niveau de la face palatine ce qui simplifie la réalisation), et une zone intermédiaire où la limite est juxta-gingivale (sur les faces proximales).