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et plus particulièrement celle du contrôle inhibiteur. Nous allons vous présenter deux types de facteurs neuro-développementaux : les marqueurs qualitatifs et quantitatifs.

Les marqueurs qualitatifs représentent les traits neuro-développementaux qui se forment pendant la vie prénatale et restent stables tout au long de la vie (Cachia et al., 2016). En d’autres termes, ce facteur n’est pas influencé par le développement cérébral, notamment par la maturation, ou encore par l’expérience postnatale (i.e. les apprentissages, métiers, etc.) (Sun et al., 2012). On peut donc catégoriser ce facteur comme étant un marqueur du développement cérébral prénatal, et donc très précoce. Cet élément qualitatif correspond aux plissements corticaux, appelés également sillons (Mangin et al., 2010; Zilles et al., 2013). Il existe un large panel dans la forme, l’étendue ou encore dans le type de motifs sulcaux (Ono et al., 1990 ; Thompson et al., 1996). Dans une étude, Fornito et al. (2004) ont étudié le motif sulcal du cortex cingualire antérieur de 30 adultes ‘sains’. Ils ont catégorisé deux types de motifs : (a) un motif asymétrique, qui comporte un sillon supplémentaire : le sillon paracingulaire dans l’hémisphère gauche uniquement (cf. Figure 6), et (b) un motif symétrique qui comporte également le sillon supplémentaire mais dans les deux hémisphères cérébraux. Les résultats démontrent que les participants présentant un motif sulcal asymétrique gauche au niveau du cortex cingulaire antérieur ont de meilleures performances aux tâches exécutives impliquant les régions frontales en comparaison aux participants avec un motif sulcal symétrique. Les auteurs en concluent que la présence du sillon supplémentaire serait associée à une connexion fonctionnelle plus efficace au niveau du réseau cingulo-frontal, et serait le reflet de meilleures capacités exécutives au niveau

25 comportemental (Fornito et al., 2004). Ce lien entre de meilleures performances cognitives et le motif sulcal asymétrique a été retrouvé dans une autre étude (Cachia et al., 2014). Dans celle-ci, les enfants de 5 ans avec un motif sulcal asymétrique au niveau du cortex cingulaire antérieur ont de meilleures résultats à une tâche de Stroop, adaptée aux jeunes enfants ne sachant pas lire (i.e. Stroop animal), comparé aux enfants avec un motif sulcal symétrique. La présence de ce motif sulcal asymétrique est un prédicteur des capacités exécutives. En effet, ces mêmes enfants de 5 ans avec un motif asymétrique du cortex cingulaire antérieur gardent de meilleures performances à la tâche du Stroop à l’âge de 9 ans comparé aux mêmes enfants avec un motif symétrique du cortex cingulaire antérieur (Borst et al., 2014). Une autre étude encore démontre que le motif du sillon frontal inférieur jouerait un rôle primordial dans l’efficacité du contrôle inhibiteur (cf. Figure 7) (Tissier et al., 2018). En effet, aussi bien chez les enfants que chez les adultes, les personnes avec un motif sulcal asymétrique au niveau du cortex cingulaire antérieur ou du sillon frontal inférieur ont de meilleurs scores d’interférence au Stroop comparé à ceux qui ont un motif sulcal symétrique. Ce sillon asymétrique est donc un marqueur cérébral anatomique de la cognition (Borst et al., 2016; Cachia et al., 2016), et il permet d’expliquer une partie des différences interindividuelles dans les capacités cognitives (i.e. les performances) (Shenkin et al., 2004; Raznahan et al., 2012).

Figure 6 : motifs sulcaux du cortex cingulaire antérieur, (A) cerveau avec un sillon cingulaire : motif symétrique (bleu clair), (B) cerveau avec sillon cingulaire et un sillon para-cingulaire : motif asymétrique (bleu foncé).

26 À l’opposé des marqueurs qualitatifs, on retrouve les marqueurs neuro- développementaux quantitatifs. Ces derniers évoluent avec l’âge. Ils représentent par exemple l’épaisseur corticale ou le volume de matière grise (Westlye et al., 2011; Takeuchi et al., 2012; Fjell et al, 2012). Contrairement aux marqueurs qualitatifs, ils sont très sensibles et influencés par l’expérience. Ils sont clairement associés à la plasticité cérébrale. Cette dernière représente la capacité à s’adapter et à tirer les avantages des expériences vécues (Souders et al., 2017). On peut la distinguer en deux types de plasticité différentes : la plasticité neuronale ou cognitive (Souders et al., 2017). La première représente les changements de structure cérébrale au niveau neuronal (i.e. cellulaire) stimulés par l’expérience. La deuxième correspond aux changements dans la stratégie cognitive utilisée.

Sans prendre en compte l’expérience, plusieurs études en imagerie anatomique ont mis en lien la structure anatomique du cerveau, comme l’épaisseur corticale (Westlye et al., 2011) ou le volume de matière grise (Takeuchi et al., 2012), avec les performances cognitives. Plus précisément dans l’étude de Takeuchi et al. (2012), les résultats montrent une relation entre les performances à la tâche de Stroop et le volume de matière grise au niveau du cortex cingulaire antérieur, du gyrus frontal inférieur droit et du cervelet. Cela signifie que, plus le score d’interférence est faible (i.e. reflet de bonnes capacités d’inhibition), plus le volume de matière grise de ces régions est important. Ceci confirme l’implication de ces régions pendant une tâche d’inhibition, puisque le débat persistait malgré les premiers résultats en IRMf (MacLeod & MacDonald, 2000), et appuie le fait que l’anatomie cérébrale peut-être un marqueur de l’efficacité des fonctions exécutives. Il en est de même pour les enfants, avec par exemple l’étude de Fjell et al. (2012) qui démontre que le score à une tâche cognitive est directement relié à la surface corticale au niveau du cortex cingulaire antérieur droit, avec une relation plus forte avec la surface de matière grise qu’avec celle de la matière blanche. Une des conclusions de cette étude est qu’il est nécessaire de prendre en compte différents aspects de la maturation cérébrale, notamment ceux de la matière grise et blanche, pour comprendre les fondements du développement cognitif. Ce marqueur quantitatif neuro-développemental permet donc de ‘contrer’ l’impact des marqueurs qualitatifs. En d’autres termes, la génétique ainsi que le développement précoce in

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utéro n’ont pas le dernier mot, et ils peuvent être compensés par un entraînement ou par

l’expérience.