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a. Adaptation des entraînements

L’une des critiques principales de nos études, est que les tâches proposées pour l’entraînement du groupe CI ne semblent pas adaptées aux capacités inhibitrices des enfants. Effectivement, pour la tâche de Stroop entraînée les enfants atteignent très facilement le niveau

140 maximum. Alors qu’à l’inverse, pour la tâche de stop-signal entraînée le niveau des enfants stagne. Par conséquent, l’une des tâches est trop facile et l’autre trop difficile pour eux. En effet, la difficulté croissante est indispensable pour empêcher l’automatisation des processus cognitifs, mais également pour empêcher la mise en place de stratégies (Green & Bavelier, 2008; Klingberg, 2010; Enriquez-Geppert et al., 2013). De plus, pour que l’entraînement soit efficace, les capacités cognitives doivent être challengées tout au long de la durée de l’apprentissage (Diamond & Lee, 2011; Diamond & Ling, 2016). Ces points fondamentaux sont donc confirmés par nos résultats, puisque qu’on ne trouve que des effets très faibles de transfert proche à la suite de l’entraînement.

b. Motivation et effets placebo

Les résultats de l’étude n°2 démontrent une baisse significative du degré de motivation pour les deux groupes d’enfants entre le début et la fin de l’entraînement. Cette perte de motivation a sans nul doute influencé négativement les effets de l’entraînement. En effet, il n’est plus à prouver que le niveau de motivation a un impact sur la réceptivité à l’entraînement (Eysenck & Calvo, 1992; Verbruggen & Houwer, 2007; Locke & Braver, 2008; Pessoa et al., 2009). Par conséquent motiver les participants aux études est primordial. Ainsi, certains chercheurs mettent l’accent sur le fait de ‘booster’ l’implication des volontaires, comme par exemple mettre en place une rémunération en échange de leur participation. Néanmoins, cette solution peut induire des effets négatifs sur l’engagement des volontaires, parce qu’ils seraient plus motivés par le gain que par l’entraînement en tant que tel (Foroughi et al., 2016). À l’opposé, de ces effets négatifs sur la motivation, il y a les effets placebo. Par exemple, lorsqu’il était explicitement dit aux participants que l’entraînement qu’ils allaient suivre allait forcément induire une amélioration de leurs performances cognitives. Après une heure d’entraînement à la mémoire de travail, ces participants présentaient de meilleures performances d’intelligence fluide en comparaison aux participants a qui les chercheurs n’avaient pas du tout explicité cette amélioration (Foroughi et al., 2016). Ainsi, ce résultat met en lumière le fait qu’il est possible que les effets placebo se confondent avec les effets d’un entraînement (Boot et al., 2013). De ce fait, nous pouvons émettre

141 l’hypothèse que les effets de transfert lointain (aux tâches de problèmes arithmétiques) pour le groupe contrôle actif sont peut-être le résultat des effets placebo.

c.

Le futur des entraînements cognitifs : les jeux vidéo

Une des explications de la baisse de motivation est également reliée à la forme des entraînements. Effectivement, les tâches ont été programmées par les membres du laboratoire. Elles sont donc très épurées. Par conséquent, les enfants trouvent les entraînements monotones et ils sont très rapidement lassés. Il faudrait donc améliorent les visuels des entraînements, en les rendant plus attractifs et plus dynamique. L’une des pistes les plus prometteuses est les jeux vidéo. De nombreuses études ont mis en évidence le fait qu’il était tout à fait possible d’utiliser les jeux vidéo sous forme d’entraînement cognitif.

Par exemple, des chercheurs ont utilisé le jeu vidéo Tétris® comme entraînement cognitif chez des adolescents (Haier et al., 2009). Les résultats de cette étude démontrent une augmentation de l’épaisseur corticale après 3 mois d’entraînement (en moyenne 1,5 heures par semaine). Dans une autre étude, les auteurs ont eu recours au jeu vidéo Fruit Ninja® pour évaluer les effets de l'entraînement de l’inhibition à la réponse et les effets de transfert chez les jeunes enfants (entre 4 et 5 ans) (Liu et al., 2015). Ils ont choisi ce jeu vidéo pour ces traits de ressemblance avec une tâche de go/no-go. Les enfants ont été réparti en deux groupes : dans le groupe suivant un entraînement de 15 minutes par jour, 4 jours par semaine et pendant 3 semaines ; ou dans le groupe contrôle actif. Les résultats démontrent que les performances au jeu Fruit Ninja® augmentent significativement entre les deux temps de l’étude, Cette progression est associée à un effet de transfert, c’est-à-dire une amélioration des performances aux matrices de RAVEN entre les deux temps de l’étude pour le groupe d’entraînement. Et enfin, des chercheurs ont créé eux même un jeu vidéo permettant d’entraîner les capacités de flexibilité cognitive, appelé The Alien Game (Homer et al., 2017). Des lycéens américains (entre 14 et 18 ans) ont suivi un entraînement à ce jeu pendant 5 minutes par jour, pendant 6 semaines. Les résultats mettent en évidence une amélioration significative des capacités cognitive à la tâche de Flanker et la DCCS

142 (Dimensional Change Card Sort) pour le groupe ayant joué au jeu The Alien Game entre le pré et le posttest. De ce fait, le jeu The Alien Game permet d’améliorer les fonctions exécutives. Ainsi, cette étude montre que les jeux vidéo peuvent être des outils efficaces pour développer les compétences cognitives lorsqu’ils sont explicitement conçus à cette fin.

Cependant, il est vrai que dans l’opinion générale les jeux vidéo renvoient une image négative, très souvent associée à l’agressivité ou à des comportements addictifs (Strasburger et al., 2010). Pourtant, une étude a montré que des étudiants jouant 5 heures par semaine aux jeux vidéo sont plus rapides à une tâche d’attention soutenue qu’un groupe d’étudiant qui n’y jouent pas (Dye et al., 2009). De ce fait, les jeux vidéo peuvent fournir une alternative idéale à, dans notre cas, à la baisse de motivation. Effectivement, les entraînements pourraient avec les mêmes caractéristiques qu’un jeu vidéo, c’est-à-dire l’aspect visuel, interactif, attractif, etc., tout en entraînant les fonctions exécutives améliorer les capacités cognitives. En d’autres termes, il faudrait utiliser les aspects positifs des jeux vidéo en les combinant à des tâches évaluant et permettant d’entraîner les fonctions exécutives. Ceci n’est pas totalement novateur, puisque ce type de jeux vidéo existent déjà (serious games ou serious gaming en anglais). Cependant ces jeux doivent être encore largement développés grâce à un travail commun regroupant l’industrie des jeux vidéo et la discipline des neurosciences.