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Trois façons d'engager le futur

Dans le document Le travail scientifique Interdisciplinaire (Page 123-132)

Chapitre 4 : Chemins plus ou moins frayés de la disciplinarité et l’interdisciplinarité

B. Trois façons d'engager le futur

L’ambition n’est pas ici de produire une typologie de chercheurs ou d’activités de recherche sur une base de marqueurs temporels. D’une part, la complexité de la langue nous empêche de réifier les liens entre les marqueurs temporels repérés et les futurs engagés. D’autre part, nos investigations conduisent à penser que ces trois présences du futur ne se distribuent pas de façon exhaustive chez des chercheurs, pas plus que dans des textes. Ce sont les pratiques sociales sous-tendues qui nous préoccupent et les articulations entre les futurs engagés et les contraintes de l’action apparaissent comme une heuristique. Ces trois figures engagent des relations variables avec le passé et surtout avec le présent, ce qui nous conduit à penser qu'elles peuvent servir d'appui pour décrire les façons de gérer la double contrainte de disciplinarité et d’interdisciplinarité. L’analyse mérite assurément d’être prolongée mais vise, pour l’instant, à identifier trois formes d'engagement du futur lorsque les chercheurs décrivent leurs activités.

Un futur comme horizon

Dans cette figure, l'interdisciplinarité apparaît comme un telos mais ne discute pas des moyens de l'atteindre, encore moins des temporalités pour cela. Tout au plus, on peut souligner l'existence de difficultés, d'obstacles ou de freins mais pour réactiver l'intérêt à terme d'y parvenir. Dans la recherche en sciences du sport, ce futur peut surgir de trois façons différentes sans pour autant que ces dernières soient incompatibles. La complexité de la langue et l’assemblage singulier de marqueurs temporels permet au contraire potentiellement de les lier.

On peut convoquer le futur sous une forme assez normative, tout particulièrement dans les premiers textes de la revue STAPS. Nous l’avons évoqué, la normativité semble assez facilement s’associer au mot d’ordre d’interdisciplinarité, que ce dernier se décline comme une invitation ou une nécessité. Engager l’interdisciplinarité comme horizon rend toutefois plus aisées les prises de position normatives car il n’engage finalement pas l’épreuve des faits. On peut simplement « afficher » cet objectif ou le présenter comme un futur décisif voire inéluctable tant, par exemple, il caractérise la spécificité d’un domaine de recherche récent et par là même un des fondements de son institutionnalisation. Qu’ils défendent la production de recherches disciplinaires ou interdisciplinaires, c’est cette dernière figure que l’on rencontre fréquemment au début des années 1980 chez les pionniers de la discipline STAPS œuvrant pour sa reconnaissance institutionnelle. C’est notamment le cas dans les propos suivants de J. Thibault, ancien enseignant d’EPS, enseignant chercheur en histoire qui sera le premier président du CNU STAPS lors de sa création en 1983 :

« Les APS (Activités Physiques et Sportives) constituent par leur diversité un carrefour pluridisciplinaire ou dans le meilleur des cas, interdisciplinaire, c'est-à-dire tenant compte des influences réciproques des diverses disciplines. Enseigner les STAPS, quelle que soit son origine, c'est donc obligatoirement avoir la préoccupation de ne pas réduire la relation éducative ou le fait éducatif pris dans un sens très large, à une seule composante : la sienne. »[AUTEUR : Thibault / date:01/04/1981]

Ces propos normatifs n’engagent pas de marqueurs du futur mais, portés le futur premier président de la 74ème section, dont le point de vue ne variera pas, ils engagent une conception majeure de

l’avenir de la discipline.

Plus récemment, l’interdisciplinarité est souvent justifiée par ses promoteurs par la complexité des phénomènes abordés. Dans le domaine de la didactique, elle est par exemple conçue comme une des solutions pour fournir des solutions aux enseignants d’EPS.

« Dans le domaine de l'éducation physique en particulier, l'analyse des stratégies d'apprentissage en contexte scolaire authentique suppose une approche pluridisciplinaire s'attelant à la complexité. » [STAPS06201e.txt / AUTEUR : Wei Chang / date:01/02/2006]

Dans les deux cas évoqués, le caractère normatif du propos se joue du temps mais sous des formes différentes. L’emploi du verbe « suppose » ouvre un peu plus sur un futur, sous la forme du « il faudra ». L’usage du « obligatoirement » dans le premier propos fonctionne davantage comme un critère, on a cette préoccupation ou on ne l’a pas. Mais dans les deux situations, on ne précise guerre l’horizon du futur envisagé ni même les modalités concrètes pour l’atteindre. Il s’agit principalement de rappeler le mot d’ordre et d’argumenter autour de l’importance de développer un travail interdisciplinaire.

Mais ce futur comme horizon peut aussi se préciser. Sans fixer de calendrier précis, l’objectif d’interdisciplinarité peut être renvoyé à plus tard et la réactivation du mot d’ordre disciplinaire peut s’appuyer sur les opportunités offertes par un délai :

« Les progrès viendront d'échanges interdisciplinaires qui seuls permettront d'échapper aux illusions liées aux centrations uniques, de relativiser certaines positions, d'unifier les savoirs "régionaux" pour aboutir à une vision globale, sinon totale, nécessairement transdisciplinaire, des phénomènes agressifs. En attendant, des instruments existent; nous nous proposons d'en considérer un certain nombre et de tâcher d'estimer leur adéquation avec les questions que les spécialistes des A.P.S. ont et auront à élucider »68 (Pfister, 1980).

Tout en considérant son intérêt ou sa nécessité, on peut également souligner la difficile atteinte de l’interdisciplinarité sans toutefois préciser la nature des difficultés. Les enseignants-chercheurs interrogés voient souvent l’interdisciplinarité comme un projet séduisant. Ainsi cette chercheuse en psychologie nous a fait part de son intérêt pour la sociologie et d’une possibilité de travailler avec ses collègues sociologues sur des objets de recherche partagés. Cette perspective lui semble intéressante mais elle reste très hypothétique et reportée à un futur non identifié : « je ne sais pas. Je n’ai jamais

réussi encore… Mais c’est intéressant. » (Ent. 13).

Enfin, ce futur comme horizon peut également se donner à voir sous son caractère inéluctable. Sans qu’on sache vraiment sous quelles formes concrètes, le futur est en marche ; les postures les plus radicales le présentant comme irréversible. Certains enseignants-chercheurs soulignent ainsi que l’objectif interdisciplinaire se dessine au fil de leur engagement, que des changements progressifs s’opèrent malgré des résistances :

«Oui cela freine, il y a des tensions. (…) Je pense, je crois, j’espère que la vision l’emporte sur les corporatismes et toutes sortes de freins, de carrières, d’égo et que l’avenir est là. Nous, on est parti dans cette direction-là, on y va avec la certitude du naïf mais en espérant que finalement on arrive à des résultats. (…)… et justement je crois que c’est grâce à notre expérience des STAPS et à notre vécu de la multidisciplinarité que cela est possible. Ce n’est pas possible partout et ce n’est pas possible dans tous les secteurs mais en tout cas dans le petit domaine que je connais un peu dans le domaine de la santé il est à peu près évident que les choses changent » (Ent.16).

Ces propos, assez différents partagent le fait que le futur de l'interdisciplinarité n'est associé à aucun engagement précis du locuteur tant en termes de temporalités que de modes d’opérationnalisation. Les expressions comme « dans l'avenir », « le progrès », « à long terme »... font partie des marqueurs temporels pertinents pour les identifier. Ici l’histoire a un sens ; le locuteur pointe des « freins » mais aussi des signes de changement (qui ne sont pas développés).

Nous l’avons vu, les formes langagières considérées intègrent parfois des considérations normatives à l’objectif d’interdisciplinarité. Son atteinte peut être différée en raison d’un délai ou de freins. Mais ce futur est à rechercher, apparaissant parfois comme inéluctable. Pour certains, il est « en marche » ce qui implique de considérer diverses étapes ou différents degrés d’intégration de ce telos mais sans les préciser. L'intérêt de déployer ce type de futur nous semble double. Tout d’abord, on n'exprime pas un refus de l'injonction, ce qui dans une période marquée par le développement d’un mode de gouvernance visant à renforcer les dispositifs d’évaluation des chercheurs (Vinck, 2007) apparaît comme une marque de prudence. On peut même aller jusqu'à la répétition du mot d'ordre, et ce tant parce qu’il correspond à un engagement épistémique effectif évident et non problématique (cas de certaines « interdisciplines » qui mobilisent par ailleurs très souvent la troisième figure du futur que nous développerons plus loin) ou comme stratégie de simple affichage. A un second niveau, cette présence du futur dispense les chercheurs de s'engager dans des activités coûteuses qui consisteraient à préciser l’atteinte de l’objectif. Cela permet potentiellement de mieux répondre à l'injonction disciplinaire qui jouxte celle d’interdisciplinarité. En d'autres termes, en engageant ce type de futur, on ne s'engage pas. Le présent s’avère peu contraint.

On peut également éprouver cette figure par l’étude des modalités de l’écriture scientifique elles- mêmes. Nos premières investigations montrent qu’elle peut par exemple s’exprimer par un affichage interdisciplinaire par une contextualisation de l’objet de la recherche. Cette opération peu coûteuse, comporte assurément beaucoup d’avantages et présente parallèlement peu de risque. On a identifié plusieurs textes de la revue STAPS dans lesquels l’interdisciplinarité s’exprime de façon minimaliste. Les auteurs réussissent ainsi à défendre leur propre discipline puisque le propos est principalement inscrit dans une seule discipline. Seule une introduction ou une conclusion fait état de l’interdisciplinarité qui est souvent célébrée mais non mise en œuvre. C’est par exemple le cas de

l’article de Pfister (1980) dont nous citions plus haut un extrait. Tout en envisageant un futur à atteindre, le texte assume une discussion sur des méthodologies en psychologie et reste ancré dans une seule discipline. L’auteur fait montre d’un désir interdisciplinaire en contribuant à sa seule discipline. Ainsi, l'interdisciplinarité apparaît-elle comme un horizon, un but à atteindre mais faute de pouvoir la mettre en œuvre aujourd'hui, il s’agit de s'adapter et de recenser des outils en convoquant un futur proche. On peut considérer tout à la fois qu'il s'agit là d'une étape pour la construction interdisciplinaire ou d'une proposition « en attendant » ; il reste que le modèle d'action à mener pour atteindre cet horizon n'est pas décrit.

Un futur programmatique : une mise en ordre

Dans cette figure, on engage le futur en développant un programme pour l'interdisciplinarité. La question de l'objectif interdisciplinaire n'est pas directement discutée mais on insiste sur les étapes nécessaires. Le futur convoqué passe par une activité de définition d'étapes plus ou moins clairement exprimées. La recherche de déontiques faibles, c'est-à-dire qui utilisent plus le « il faudrait » que le « il faudra », est un des moyens pour repérer cette présence du futur. Le retour au texte lui-même est fondamental car ces marqueurs langagiers correspondent aussi aux formes de prudence caractéristiques des genres d'écriture académique. Mais si on associe la recherche de ces déontiques faibles à des marqueurs temporels pointant un futur proche (« à court terme », « au bout de quelques mois »,...), on peut repérer l'expression d'une nécessité de suivre un plan permettant d'aboutir au but recherché. Nous avons repéré deux façons principales d’engager ce futur : présenter les « jalons » d’un programme ou pointer une série de contraintes à dépasser pour atteindre l’objectif. Dans ce second cas, le futur commence à engager les contingences du présent et du passé mais à un degré moindre.

Ce futur peut tout d’abord prendre la forme d'un programme de recherche donnant à voir des réponses à la double injonction qui marquent un T zéro et une série d'étapes. Les propos de certains chercheurs insistent sur un mouvement vers l’interdisciplinarité présenté comme la seule manière de répondre aux questions qu’ils se posent. De façon plus ou moins précise, ils évoquent les moyens pour atteindre l’objectif interdisciplinaire. Prenons le cas de ce chercheur impliqué dans un projet de recherche interdisciplinaire :

« Les identités et le corporatisme sont très marqués chez nous. L’UFR, c’est une entité cloisonnée alors que nous on n’est en train de casser les cloisons tous les jours. (…). Depuis le 1er septembre, la médecine générale est devenue universitaire donc ils vont recruter des PU et des MCF. On ne leur propose que des laboratoires de génétique ou de biologie musculaire. Le médecin généraliste a peut-être des regards plus qualitatifs ou plus psychologiques qui nous intéressent et on veut absolument que quelqu’un vienne dans notre laboratoire. Donc effectivement ces regards croisés de différents spécialistes luttent contre les vieux a priori, les vieux corporatismes et déclassements ; du style, la chirurgie c’est la priorité. En STAPS, la physiologie c’est fondamental alors que les sciences humaines ne comptent pas. Finalement, on se rend compte que l’on a besoin de tous et de toutes.» (Ent.16).

Les étapes correspondent ici à des conditions de réalisation de l’interdisciplinarité (dans ce cas de la transdisciplinarité) ; elle passe ici par des collaborations avec d’autres chercheurs ; ces dernières étant susceptibles d’être annoncées dans un projet et/ou effectivement mises en œuvre dans un futur assez proche (janvier 2011 soit un an après notre entretien). Fixer des contraintes pour parvenir à l’objectif constitue assurément un pas supplémentaire par rapport à la première figure du futur ; mais on ne note aucune marque indiquant les façons de les surmonter. Dans cet entretien, le chercheur n’évoque pas les façons d’intéresser les épidémiologistes et les philosophes à son objet. Il décrit ici les conditions de réussite de l’entreprise.

C’est bien souvent en pointant des séries de contraintes que l’on définit en creux des étapes à franchir en soulignant par la même les conditions et les difficultés engagées par l’interdisciplinarité. Celles-ci peuvent d’ailleurs parfois être lues sous l'angle de la critique. Dans l’extrait qui suit et qui émane du même entretien, ce qui nous permet de pointer la cohabitation des futurs repérés, l’interdisciplinarité apparaît comme un futur proche et planifié (janvier 2011 pour le futur laboratoire) vers lequel il faut tendre et que le chercheur appelle de ses souhaits en même temps qu’il relève les difficultés rencontrées. Dans ce cas précis, c’est l’objet « prévention » et la volonté de trouver des solutions pratiques qui poussent les acteurs d’horizons disciplinaires et même de corps de métiers différents à travailler ensemble. Il s’agit d’une collaboration étroite qualifiée de transdisciplinaire par le chercheur qui insiste par là même sur les échanges autour du projet commun mais devant s’articuler avec un déjà-là qui peut poser problèmes. La temporalité, au sens de la mise en forme du projet interdisciplinaire futur, est soumise à un certain nombre de contraintes entravant sa mise en œuvre. Plusieurs problèmes semblent, en effet, se poser. Des tensions surgissent : guerres de frontières, de conquête et hégémonie :

« [je m'intéresse à] la psychosomatique et aux interfaces corps et psyché et en quoi et comment ces interactions peuvent conduire à des bénéfices de santé primaire, secondaire ou tertiaire. En matière d’application, on est véritablement sur des logiques de prévention primaire, secondaire et tertiaire. Ce qui intéresse le laboratoire en particulier ce sont les préventions tertiaires où on essaie d’éviter à des patients d’avoir d’autres pathologies. Pour remplir cet objectif, j’ai besoin d’une collaboration avec les épidémiologistes, des philosophes, des sociologues, avec tous les gens qui travaillent dans le domaine de la santé. C’est la raison pour laquelle le futur laboratoire à partir de janvier 2011, si cela se passe bien sera transdisciplinaire » (Ent.16).

On perçoit dans les extraits de l’entretien 16 les problèmes de coordination entre acteurs hétérogènes dans un univers concurrentiel et en mutation du fait de réorganisations internes. Les disciplines sont, selon l’auteur, organisées selon une hiérarchie, fruit de leur histoire dans l’espace académique. Se clivent alors des groupes aux intérêts divergents : « les vieux » opposés implicitement aux plus jeunes, les médecins généralistes face aux chirurgiens, les sciences sociales face aux sciences de la vie. Dès lors, l’asymétrie ainsi produite entre les groupes rend difficile les collaborations pensées en terme d’échanges équilibrés et produit des tensions qui sont autant de freins au travail collaboratif qui reste de l’ordre du projet, une promesse de productivité et d’originalité scientifiques. Néanmoins on insiste sur un futur qui se décline comme un projet de

laboratoire, explicitement interdisciplinaire, qui contraint les chercheurs à composer avec les obstacles.

D’un point de vue individuel, l’avenir se décline sous la thématique des carrières ou d’évaluations et les engagements disciplinaire et interdisciplinaire se conjuguent en termes de coûts :

« C’est dur de renoncer à ses propres méthodes et disciplines pour avancer sur un objet de recherche. Ça prend du temps et du coup, on ne publie pas et on se dit que l’on va être évalué par l’AERES de manière pas très bonne donc c’est plus facile de tendre à revenir à l’unidisciplinarité » (ent.1).

« C’est un peu frustrant pour les gens qui font la promotion de l’interdisciplinarité car ils sont aussi bloqués par leur carrière » (ent.2).

Pour répondre à une injonction précise d’interdisciplinarité (réponse à un appel d’offre, demande de l’Agence d’évaluation,…), les chercheurs peuvent lister les étapes sous une contrainte de faisabilité. Une piste consiste à afficher son engagement, en tenant compte de la réalité, mais sur le mode de la promesse. Elle peut être ancrée dans l’expérience du ou des chercheurs ; cette figure relève alors plus de celle décrite plus bas. Mais on peut choisir de soigner l’affichage en montrant que l’on souhaite résolument s’engager dans l’interdisciplinarité et que l’on peut surmonter toutes les difficultés en les recensant.

Dans le corpus de publication, on repère des contextualisations de l’objet de la recherche qui convoquent plusieurs disciplines en introduction qui ouvrent vers des perspectives interdisciplinaires en conclusion. L’interdisciplinarité doit toutefois être davantage éprouvée car il s’agit de la programmer. Elle peut ainsi donner lieu à des ouvertures plus concrètes dont les écrits scientifiques sont susceptibles de se faire l’écho. Nous développerons davantage ces aspects dans la troisième figure du futur tant, par certains de ses aspects, elle donne à voir l’intégration d’un gradient plus avancé des contraintes du travail interdisciplinaire. Les étapes ne sont plus seulement programmées mais franchies pas un dépassement plus ou moins laborieux des obstacles rencontrés ce qui s’actualise dans les textes scientifiques mêmes.

Un futur inscrit dans les contingences du passé et du présent

On peut identifier une nouvelle figure du futur, dès lors que les chercheurs précisent comment, concrètement, ils entendent surmonter les difficultés pour mettre en place un travail interdisciplinaire. Cette description suppose de prendre en compte les contingences du présent et du passé, notamment les relations entre les chercheurs. Il peut s’agir de montrer comment on peut franchir les étapes alors que, dans la figure précédente, on se contentait de les repérer. La « réalité » de l’interdisciplinarité est ici éprouvée selon un gradient supplémentaire. Toutefois, l’inscription dans les contingences du passé et du présent peut s’avérer moins contraignante lorsque l’on considère les collectifs organisés d’ « interdisciplines » ou de « disciplines interdisciplinaires » telles que la didactique ou les recherches en management du sport par exemple.

On doit tout d’abord signaler que les contraintes de mise en ordre n’émanent pas que de la volonté des chercheurs eux-mêmes. La structuration des collectifs de recherche est également contrainte par l’institution et les processus d’évaluation de la recherche tendent à imposer une mise en forme d’un programme interdisciplinaire, quitte à ce que celui-ci relève plus de l’affichage que d’un engagement dans le dépassement des contraintes inhérentes au travail interdisciplinaire :

« Il y avait deux laboratoires. Il n’y a jamais eu ici de laboratoire reconnu, ce n’était que

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