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a Extraction des indices optiques des monocouches par ellipsométrie

V.6 Échantillons multicouches très concentrés

VI.1.3. a Extraction des indices optiques des monocouches par ellipsométrie

Comme expliqué dans la section précédente, l’extraction des propriétés optiques par une inversion point-par-point des mesures ellipsométriques nécessite la connaissance de l’épaisseur du film. Du point de vue physique, dans le cas de monocouches de nanoparticules, il est difficile de définir une épaisseur

FIGUREVI.4 – Mesures ellipsométriques de l’échantillon S08P02 exprimées en termes de ρ comparées aux valeurs tabulées de ρ sur silicium (wafer sans silice). Les variations des propriétés optiques du silicium aux longueurs d’onde λ1, λ2 et λ3se retrouvent dans celle de l’échantillon mesuré.

univoque, puisque les particules dépassent du film : doit-on prendre le sommet des particules ? La hauteur de polymère entre les particules ? La hauteur issue de la moyenne massique de l’échantillon ?

Nous pouvons en revanche tenter de déterminer une épaisseur ayant une signification optique, en ajustant un modèle de dispersion comme nous l’avons fait pour les films tridimensionnels. Dans cette idée, l’épaisseur D est déterminée par les deux méthodes : ajustement par un modèle "new amorphous" (NA) dans la partie infrarouge du spectre, et ajustement d’un modèle de Maxwell-Garnett (MG) dans la partie UV spectre. Contrairement ce que nous avons observé pour les films 3D, les deux méthodes ne sont pas toujours équivalentes. Sur la figure VI.5 sont tracées les épaisseurs déterminées avec la fonction de dispersion NA (DNewAm) en fonction de celles déterminées par MG (DMG). Les χ2 des ajustements sont tous bons, mais on observe deux régimes de résultats : un où les deux solutions sont équivalentes et un autre où elles sont nettement différenes. Alors que MG trouve des valeurs DMGcomprises entre 5nm et 10nm, les valeurs DNAsont dans certains cas largement plus grandes. Les épaisseurs DMG semblent donc plus réalistes que celles DNA.

Se pose néanmoins la question de la validité d’appliquer ce modèle MG, a priori valable seulement pour des milieux 3D. Nous essayons ainsi une autre approche pour déterminer cette épaisseur.

Pour chaque échantillon, on réalise plusieurs inversions point-par-point des données brutes ellipso-métriques en supposant différentes valeurs de l’épaisseur D dans une certaine gamme autour du diamètre des particules, ici entre 10 et 30 nm. Un ensemble de résultats est montré pour l’échantillon S05P06 sur la figure VI.6. Les n et k obtenus sont différents suivant la valeur de D choisie lors de l’inversion, mais on remarque en revanche qu’en ce qui concerne les χ2(λ), ils sont tous strictement équivalents. Ainsi, l’inversion ne permet absolument pas de discriminer les épaisseurs, et il n’y pas du point de vue ellip-sométrique, d’épaisseur plus "juste" que les autres au sein de la gamme choisie. Nous notons qu’une telle indétermination ne se produit jamais pour les films tridimensionnels, car la qualité de l’inversion se dégrade très vite quand on s’éloigne de l’épaisseur réelle.

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FIGUREVI.5 – Comparaison des épaisseurs déduites des ajustements dans l’infrarouge par une fonction de dispersion NewAmorphous DNewAmet dans l’UV par un modèle de Maxwell-Garnett DMG. La droite noire correspond au cas où les deux approches sont équivalentes. Dans le cas des monocouches étudiées, ce n’est pas toujours le cas.

FIGUREVI.6 – Résultats des inversions point-par-point de l’échantillon S5P06 sur substrat de verre et comportant une densité en particule de 21 µm2pour différentes valeurs considérées pour l’épaisseur du film D. Les n et k sont différents pour chaque D choisi lors de l’inversion, mais les χ2sont identiques.

FIGUREVI.7 – a. D × k et D × n en fonction de la longueur d’onde λ pour l’échantillon S05P06 de densité en particules de 21 µm2. b. (D × n) + b n fonction de la longueur d’onde λ pour l’échantillon S05P06 de densité en particules de 21 µm2.

qu’on calcule le produit D × k, toutes les courbes se superposent remarquablement bien, ce qui si-gnifie qu’il existe une relation entre le D choisi lors de l’inversion et la valeur de k qui en découle : D × k = constante (cette "constante" étant elle-même dépendante de la longueur d’onde). Pour n, en revanche, il n’est pas possible de retrouver cette relation ni même une autre relation linéaire de la forme (D × n) + constante (figure VI.7.b). La superposition des courbes D × k se produit pour tous les échan-tillons de monocouches que nous avons testés, quelle que soit la nature du substrat sous-jacent (voir l’exemple de la figure VI.8 pour l’échantillon S08P02 sur substrat de silicium).

Nous déduisons des résultats ci-dessus, qu’autant du point optique que physique, il n’est pas possible de définir une épaisseur univoque des systèmes de monocouches de particules [73, 120]. De plus, le fait que les valeurs extraites pour n et k dépendent intrinsèquement de l’épaisseur choisie signifie que ces quantités sont également indéfinies pour une monocouche. Ainsi, contrairement aux systèmes tridimen-sionnels, ce ne sont plus des paramètres optiques invariants du système et ils perdent leur sens dans les systèmes bidimensionnels. Nous en déduisons par conséquent que la notion de milieu effectif de réponse optique équivalente ne peut pas s’appliquer ici.

En revanche, le produit D × k semble être un nouveau paramètre invariant. Nous pouvons propo-ser une interprétation de cette invariance en invoquant simplement la relation de Beer-Lambert (équa-tion (III.3)), déjà men(équa-tionnée dans la sec(équa-tion IV.2. Dans le cas d’un milieu tridimensionnel absorbant d’épaisseur D, contenant des objets de section efficace d’extinction σext en densité volumique NV, la décroissance de l’intensité s’écrit : I = I0exp(−σextNVD), où I0 est l’intensité entrante et I l’inten-sité sortante. Pour un milieu bidimensionnel, la denl’inten-sité surfacique est reliée à la denl’inten-sité volumique par NS = NVD, et on obtient ainsi finalement :

I = I0e−σextNS (VI.1)

Pour relier cette absorbance à l’indice d’extinction k du matériau, on considère qu’il est éclairé par une onde plane, dont l’amplitude en fonction de la distance z parcourue dans le milieu s’écrit E(z, t) = E0exp(iκ0nz − iωt) exp(−κ0kz) (cf. équation (II.7)), et dont l’intensité vaut par conséquent après

VI.1. Monocouches obtenues par spin-coating 129

FIGUREVI.8 – D × k pour échantillon S08P02 sur substrat de silicium.

traversée de l’échantillon d’épaisseur D :

I = EE? = I0e−2κ0kD (VI.2)

avec I0 = E0E?0 et κ0 = 2π/λ. En comparant les deux expressions obtenues de l’intensité (VI.1) et (VI.2), on trouve la relation

D · k = λ

σext· NS (VI.3)

Cette dernière équation montre D × k est un paramètre optique invariant directement relié aux quantités fondamentales décrivant le système : σext décrit les propriétés optiques des nanoparticules et NS décrit l’aspect structural du système (sa densité en nanoparticules).

Le sens de l’invariance de D × k est finalement simple : en supposant que l’absorption de la mono-couche est dominée par les nanoparticules d’or (plutôt que le polymère), l’absorbance de la monomono-couche est fixée par le nombre de particules à la surface et leur section efficace d’extinction. Si l’on décide de re-présenter cette monocouche par un milieu effectif d’épaisseur D et d’indice d’absorption k, l’absorbance totale de la couche doit rester constante quand D est arbitrairement changée : toute augmentation de D doit être compensée par une diminution inversement proportionnelle de k.

Le même type relation simple existe pour l’indice réel. En tenant compte du fait que lorsque l’épaisseur supposée du film est changée, on ajoute ou on retranche du vide, d’indice 1, l’invariant correspondant attendu s’écrit D × (n − 1). Sur la figure VI.8, on voit que toutes les courbes obtenues à différentes épais-seurs se rapprochent mais sans se superposer. Nous attribuons cela à la présence également de polymère d’indice différent de 1 dans le film. Nous verrons plus loin que la superposition est parfaite pour une monocouche sans polymère (section VI.2.3), ce qui prouve que D × (n − 1) sera dans ce cas également invariant.

FIGURE VI.9 – a. Sections efficaces d’extinction expérimentales pour les monocouches de particules sans espaceur, comparées à la section efficace d’extinction théorique (ligne noire). b. Sections efficaces d’extinction expérimentales pour les monocouches de particules avec espaceur d’épaisseur D, comparées à la section efficace d’extinction théorique (ligne noire).