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3 - EXPERTISE ET DÉMOCRATIE TECHNIQUE DANS L’URBANISME DURABLE

Dans le document RENOUVELER LA VILLE, REPRODUIRE LA NATURE (Page 147-157)

Parce qu’il y a simultanément un développement de la participation et un maintien – renouvellement de l’expertise au sein du projet analysé, cette thèse se doit d’aborder la question centrale de l’expertise, et ses implications sur la façon dont est intégrée la question de la nature en ville au sein du projet. Car c’est en grande partie au sein de ces rapports experts – profanes (dont il s’agira de nuancer l’opposition, souvent trop substantialiste), que se joue la définition de cette nature en ville. C’est toute la question de la démocratie technique, que nous allons à présent aborder.

3.1-DE LA MISE EN CAUSE DE LEXPERTISE

Nous ne pouvons faire l’impasse sur le recours à l’expertise dans la mesure où celle-ci s’avère omniprésente au sein du projet étudié et fait preuve d’une influence déterminante sur nos objets d’analyse. Par ailleurs, la France est le terrain d’une longue tradition technocratique, initiée depuis le XVIIIème siècle162 et la révolution française, avec la création des Grandes Écoles (Polytechnique par exemple) (Restier-Melleray, 1990), qui ne cessa de se renforcer depuis. Le recours toujours plus fréquent à l’expertise par les acteurs de l’action publique s’intègre dans un processus de rationalisation de cette dernière. L’expertise remplit alors un rôle d’objectivation, fondé sur le « mythe d’une décision rationnelle » (Cadiou, 2006, p.114). Elle assoie sa légitimité sur l’objectivité de ses méthodes, empruntées à la science académique. L’approche de Philippe Roqueplo éclaire particulièrement bien le positionnement de

162 Pierre Lascoumes nous propose une période antérieure et la date de 1682, avec les premiers ingénieurs des Ponts et Chaussées (2002).

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nombreuses recherches portant sur le sujet. Pour celui-ci, l’expert est à la fois aide à la décision et faire-valoir du politique (Roqueplo, 1997), placé dans une position, comme le titre de son ouvrage l’indique, entre savoir et décision.

Pourtant, la multiplication d’affaires sanitaires au cours des années 1980 et 1990, les plus médiatisées étant l’accident de Tchernobyl en 1986 (et d’autres moins délimitées temporellement : l’accroissement des pluies acides, l’affaire du sang contaminé, la crise de la vache folle,…) vont progressivement aboutir à la mise en cause des choix technico-scientifiques opérés par les politiques en relation avec les corps d’experts. Y revenir plus précisément nous écarterait trop du sujet de cette thèse. Par ailleurs, une littérature scientifique extrêmement prolifique, en particulier au sein de la sociologie revient sur ces évènements 163 . Progressivement, le modèle technocratique semble être mis en cause. L’opacité des décisions technico-politiques est fréquemment critiquée164.

Mais paradoxalement, cette série d’accidents renforce en réalité le recours à l’expertise. Les experts sont mandatés dans un objectif de réduction des risques, et afin de solutionner les problèmes initialement créés, alors que l’on aurait pu anticiper un phénomène inverse :

« […] les sciences et techniques sont mises en cause en tant que sources d’innovations ; cependant, elles apparaissent plus que jamais indispensables pour faire face à ces risques. L’expertise scientifique à destination politique consistant à solliciter, dans un processus de décision publique, les capacités de la science à diagnostiquer et à réguler les risques, apparaît donc comme un point clef de cette nouvelle configuration. » (Granjou, 2003, p. 175)

Des évolutions importantes doivent néanmoins être mentionnées. Le principe de légitimation de l’expertise, reposant sur la scientificité et l’indiscutabilité des résultats est battu

163Les références sont innombrables. Voir par exemple : GRANJOU C., BARBIER M., 2010, Métamorphoses de

l’expertise : précaution et maladies à prions, Paris; Versailles, Ed. de la Maison des sciences de l’homme ; Ed.

Quæ (Natures sociales), 304 p., ou également : ROQUEPLO P., 1988, Pluies acides: menaces pour l’Europe, Paris, Economica (Environnement), 357 p.

164 À ce sujet, se référer au Dictionnaire critique de l’expertise (Gilbert et al., 2015), et plus particulièrement à l’entrée « Transparence » qui offre un bon aperçu de la question.

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en brèche. De manière croissante, les controverses scientifiques et sociotechniques sont mises en lumière, le principe de l’incertitude s’affiche (Lascoumes, 2002). Ce dernier donnera naissance à d’abondantes recherches en sciences sociales, sur les concepts de vulnérabilité sociale, d’acceptabilité du risque, et autres objets similaires. À ce titre, le célèbre ouvrage paru quelques années plus tard, Agir dans un monde incertain. Essai sur la démocratie technique (Callon, Lascoumes et Barthe, 2001), présente un titre évocateur.

Un phénomène de mise en lumière des arcanes de l’expertise et de ses relations avec le politique se produit progressivement, aussi bien dans les médias qu’au sein des sciences sociales. Bien qu’il soit épineux d’affirmer un lien direct, nous considérons probable que le tournant délibératif décrit au cours de la précédente section entretient une proximité avec la mise en cause de l’expertise. C’est l’ensemble d’un modèle démocratique décisionnel qui nous apparaît en mutation : critique du modèle de la représentation politique, qui aurait jusqu’alors était « court-circuitée », selon la formule de Latour, par une expertise scientifique non-négociable, et simultanément diffusion des concepts de gouvernance et de démocratie participative.

C’étaient donc les relations entre science et politique qui devaient muter, les modalités de cette transformation restant alors indéfinies. Or, des chercheurs en sciences sociales se sont fait l’écho de cette nécessité de changement, n’hésitant pas à adopter des postures relativement normatives. D’un côté, Philippe Roqueplo en appelle à un double renforcement : celui du rôle de l’État dans le contrôle de l’expertise et celui d’une réaffirmation de la frontière entre science et politique. D’un autre, les annonciateurs du forum hybride, partant du constat qu’il est illusoire de repréciser la frontière science – politique, proposent de confronter experts et profanes dans un processus dialogique, seul à même de produire des compromis et d’aboutir à une véritable

démocratie technique. Ce forum est défini selon plusieurs caractéristiques. En premier lieu, il

est considéré comme hybride, car il tient compte de l’hétérogénéité des acteurs en présence, puisqu’il associe des groupes que l’on a coutume de qualifier d’experts et de profanes. Ici, c’est la question de la source de légitimation qui est en jeu. En second lieu, il est qualifié de forum, car il est ouvert, et dans le prolongement de l’hybridité des acteurs, il permet a priori à quiconque de participer. Le rapprochement avec la question de la participation du public aux décisions politiques est alors très net. Puisque celles-ci perdurent à se constituer en grand partie grâce à une légitimation technique visant à rationaliser l’action publique, la théorie des forums hybrides conduit naturellement à questionner ses sources de légitimation, l’objet participation pouvant devenir l’une d’entre elles.

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En réaction aux critiques de l’expertise, son recul était prévisible. Mais dans les faits, c’est plutôt le fonctionnement de l’expertise qui a évolué, tendant désormais vers un modèle plus encadré, que l’on pourrait qualifier de procédural (Granjou, 2003). En se plaçant d’un point de vue plus politique, le maintien d’un important recours à une expertise amendée démontre que, plus que l’autorité des politiques, ce sont les « dispositifs de pouvoir » et avec eux d’expertise auxquels les élus font appel qui évoluent (Cadiou, 2001, p.103).

3.2-À SON RENOUVELLEMENT.L’EXEMPLE DE LURBANISME DURABLE : UN FAISCEAU DE FACTEURS FAVORABLES À LÉMERGENCE DUN « ÉCO-POUVOIR »

Cette contextualisation permet donc de démontrer que la mise en cause de l’expertise a paradoxalement abouti à son renouvellement, si ce n’est son renforcement. De plus, l’expertise joue un rôle majeur dans les thématiques de l’urbanisme et de l’environnement. L’aménagement urbain est l’un des secteurs d’intervention les plus touchés par les évolutions de l’action publique que nous avons décrites jusqu’ici. Et ces mutations affectent en retour le traitement de la thématique de l’environnement au sein du projet urbain. Mais c’est d’abord l’urbanisme qui représente un terrain propice au développement de l’expertise.

 L’origine technocratique de l’urbanisme français

L’histoire de l’urbanisme, en tant que discipline, permet de particulièrement bien éclairer la prégnance de l’expertise dans la planification urbaine. Stéphane Cadiou revient sur la constitution d’une expertise publique étatique à l’aube du XXe siècle (2001), désignée pour la mise en œuvre des lois de planification – loi Cornudet de 1919165 en particulier. Ensuite, au cours de la période de croissance de l’Après-Guerre et des Trente Glorieuses, un développement urbain sans précédent se produit, selon une organisation sociospatiale fordienne. Les villes doivent alors servir les objectifs de l’industrialisation, qui est intégrée sur le modèle du zoning, regroupant les fonctions urbaines au sein des mêmes espaces (Ascher, 1995). Cette organisation se rapproche d’une forme de division spatiale du travail, par l’entremise d’une géographie urbaine fonctionnaliste, à l’opposé de la diversification et de la mixité fonctionnelle qui prévaut aujourd’hui dans l’urbanisme. Rationnalisant la forme urbaine à l’extrême, le principe du

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zoning est fondé sur une réflexion scientifique portée par des technocrates qui concentrent alors les responsabilités administratives relatives à l’aménagement. Sur cette base se dessine progressivement une autonomisation de l’expertise urbaine vis-à-vis du politique mais également des universitaires et de leur savoir académique qui prévalait dans la première moitié du XXe siècle.

Ce phénomène d’autonomisation repose sur une autre caractéristique : le transfert progressif des compétences d’aménagement et d’urbanisme vers les intercommunalités et l’échelon local au cours de la décennie 1970, renforcé par le biais de la décentralisation administrative générale au cours des années 1980, déjà évoquée plus haut. Désormais, les régions et autres collectivités territoriales sont en charge de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, et participent au développement du recours à l’expertise pour la planification urbaine. L’urbanisme et l’aménagement du territoire sont donc des disciplines conçues sur le recours à l’expertise, dont l’importance se maintient encore actuellement. Qui plus est, l’apparition de la thématique de la durabilité et sa déclinaison au sein des politiques urbaines n’ont fait que renforcer cet état de fait.

 La mise en durabilité de l’urbanisme ou la démultiplication des objets

d’expertise dans la fabrique de la ville

La définition sommaire du développement durable, outre sa caractéristique temporelle centrale – tenir compte des générations futures – est fondée sur trois « piliers » : social, économique et environnemental, un principe largement diffusé. Ces trois dimensions doivent être pensées et mises en œuvre simultanément, ce qui tend à démultiplier et accentuer les enjeux des politiques publiques de tous types. De facto, et dans l’ensemble de ses déclinaisons

politiques, le développement durable démultiplie les thématiques à prendre en compte (l’environnement étant l’une d’elles), y compris dans l’urbanisme. Ce faisant, il le rend nécessairement plus complexe.

Or, cette complexification croissante et le nombre accru d’enjeux dont il est désormais nécessaire de tenir compte sont traités par la sollicitation de nouveaux savoirs spécifiques, qui doivent être coordonnés afin que le projet soit véritablement intégrateur du point de vue des acteurs en présence (c’est le principe de la transversalité que l’on décrivait plus tôt). Ce phénomène se traduit par le développement d’un « urbanisme d’études », qui démultiplie les

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études préalables et autres diagnostics, dont les contours, tant leur contenu est polysémique, est très peu défini (Benbouzid et Bentayou, 2010). Or, sur chaque type d’étude (d’impact, de prospective économique, de diagnostic écologique, et autres), il est fait recours à des bureaux d’étude spécialisés, qui relèvent de ce qu’il convient d’appeler une « expertise opérationnelle et technique», d’origine privée pour une large majorité de ces prestations.

En outre l’urbanisme durable, s’il n’a pas amorcé le phénomène, a tendu à renforcer et multiplier les dispositifs de participation du public à la conception des projets. Ce type d’urbanisme se situe donc dans la continuité du tournant délibératif pointé à plusieurs reprises. Nous évoquions plus haut le paradoxe apparent entre le développement de la participation de la société civile et le renforcement de l’expertise. En réalité, au sujet de l’urbanisme durable, l’expertise s’est renouvelée principalement par deux entrées.

La première est justement celle de la participation de la société civile. Le déficit de connaissances et de méthodologies adaptées à l’inclusion de nouveaux acteurs – les désignés profanes – a été comblé (du moins, tel était l’objectif), par le recours à de véritables « experts de la participation » et de sa méthodologie (Nonjon, 2005, 2006). C’est là le premier biais par lequel l’expertise s’est renforcée dans l’urbanisme durable.

Le second tient à l’inclusion de la question environnementale dans l’urbanisme. Ce phénomène, en accentuant l’essor des études urbaines, appelle encore un nouveau type d’expertise. Ce processus est particulièrement important au vu de la problématique de cette thèse. Car le recours à l’expertise sur cette question tend précisément à redéfinir ce qui est entendu par environnement et nature en ville dans l’urbanisme durable. Plus généralement, l’intégration des considérations relatives à la durabilité au sein de l’urbanisme donne corps à une expertise particulière. Pour Ewald, qui s’inspire de l’analyse foucaldienne du pénal, l’expertise en matière d’environnement n’est pas extérieure à son objet, elle en est au contraire une partie. En cela, il ne s'agit pas de considérer la problématique environnementale comme l'idéaltype de l'expertise, mais comme constitutive d’une manifestation spécifique de cette dernière. C’est alors « […] l’environnement qui institue l’expert […] » (Ewald, 1992, p. 207), et non l’inverse.

Désormais, on voit à quel point ces différentes questions – environnement, expertise, modèle démocratique – sont intriquées. Il serait cavalier d’affirmer que la première a impulsé les évolutions des deux autres, mais on peut sans nul doute parler de genèse et d’évolution parallèles. Le développement de l’expertise repose fortement sur la conceptualisation

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progressive d’une crise environnementale et inversement. Cette dernière est partiellement attribuée au modèle politique technocratique, ce qui aboutit paradoxalement à la mise en cause de l’expertise – et donc aux mutations de notre modèle démocratique vers un principe plus délibératif – et à son renouvellement. Cette relation entre expertise et modèle démocratique redéfinit à son tour la problématique environnementale, les experts n’étant plus les seuls légitimes à la caractériser. Ce triptyque tient donc par un phénomène de tension permanente, raison qui nous oblige à aborder simultanément ces thèmes. Et dans ce contexte, l’urbanisme durable représente un archétype opérationnel de l’ajustement perpétuel entre ces trois termes.

Les précédents constats relatifs au renouvellement - renforcement de l’expertise nous conduisent à nous inscrire dans la continuité des théories de Lascoumes, qui soutient l’émergence d’un « éco-pouvoir ». Inspiré par le concept de « bio-pouvoir » de Foucault, l’éco-pouvoir représente une sorte d’extension de l’analyse foucaldienne, la souveraineté s’exerçant désormais sur l’ensemble des populations vivantes, et plus uniquement humaines. Au-delà de pointer un nouveau régime de gouvernementalité, l’éco-pouvoir entend également qualifier ce paradoxe que nous avons longuement décrit : le fait que la mise en cause de l’expertise ait abouti à son renouvellement. À ce sujet, Lascoumes évoque « une nouvelle ruse de la

technique » (Lascoumes, 1994, p. 33).

3.3 - DE QUELLE EXPERTISE PARLE-T-ON ? PRIVILÉGIER UNE APPROCHE PAR LES

« SITUATIONS DEXPERTISE »

Reste à aborder un dernier élément : il ne s’agit pas de réifier l’expertise. En effet, dans le cadre de cette thèse, nous traiterons d’un type particulier de recours aux experts. Par ailleurs, les évolutions précédentes ont abouti à une diversification des « situations d’expertise », qui nous conduisent à adopter une analyse nuancée en raison de leur diversité.

 Une expertise technique et opérationnelle

Nous nous attarderons en particulier sur ce qu’il convient d’appeler une expertise

technique opérationnelle. Celle-ci partage les éléments fondateurs des rapports

qu’entretiennent expertise scientifique et décision politique : l’objectivation des décisions politiques par un recours à des méthodes présentées comme rigoureuses et impartiales. De

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manière générale, l’expertise se définit principalement dans sa relation à l’action (Lascoumes, 2002), en l’occurrence politique, mais ce constat est également valable dans d’autres contextes, puisqu’elle représente une aide à la décision, cette dernière étant alors entendue comme un préalable à l’action166. Et ce constat vaut aussi bien pour l’expertise scientifique traditionnelle que pour ce que nous qualifions d’expertise opérationnelle et technique. Céline Granjou, définit l’expertise scientifique à destination politique comme « un

processus de décision publique, [consistant à solliciter] les capacités de la science à diagnostiquer et à réguler les risques » (Granjou, 2003, p. 175). La notion de « capacités de la

science » est déterminante, en ce qu’elle déporte la source de légitimation de l’individu – l’expert – aux compétences qu’on lui attribue – la maîtrise de dispositifs scientifiques et techniques. Il ne s’agit alors plus uniquement de solliciter immédiatement des scientifiques tirant leur légitimité de leur statut académique ou universitaire, mais de recourir aux savoirs dont ils sont censés être les dépositaires167. Or, puisque l’activité des bureaux d’études techniques et autres techniciens que nous analyserons ici s’appuie sur une légitimation scientifique qui passe par l’usage d’une méthode empiriste issue de la science168, nous les considérons comme producteurs d’une expertise spécifique. Bien que le contexte d’application des méthodologies – opérationnel et non-universitaire – ainsi que la finalité diffèrent, notre définition de l’expertise s’appuie donc bien sur les caractéristiques de la précédente définition. Ainsi, le travail des bureaux d’études techniques et autres assistant à maîtrise d’ouvrage169 peut être qualifié d’expertise pour deux raisons : il permet de légitimer les décisions politiques à propos du programme de réhabilitation ; leur méthodologie est du même ordre que celle de l’expertise scientifique.

Il subsiste néanmoins une différence notable entre les deux types d’expertise. A

contrario de l’expertise traditionnelle menée par des scientifiques universitaires mandatés

166 Nous reviendrons au cours de la prochaine sous-section (4.1) sur le problème posé par le fait d’établir un lien de cause à effet entre décision et action, notamment pour les analyses ciblant le champ politique. Ce fût là un des écueils de la sociologie des organisations.

167 Évidemment, la seconde condition n’exclut pas la première. Le statut de l’expert ou par exemple son appartenance à une institution reconnue ne pourront que renforcer sa légitimité.

168 En particulier concernant les méthodes d’inventaire de la biodiversité pour la thématique nature en ville, ainsi que pour les diagnostics de pollution réalisés.

169 Le rôle des assistants à maîtrise d’ouvrage (AMO) ne cesse de se renforcer dans le contexte de l’urbanisme d’études précédemment évoqué, en particulier sur les opérations complexes. Ce statut définit le rôle d’une structure dans le programme de réaménagement. La majorité des bureaux d’études techniques occupe cette position. Ils sont alors les prestataires directs du maître d’ouvrage, parallèlement aux maîtres d’œuvre (urbanistes, architectes, paysagistes,…), et interviennent avec un rôle de conseil technique sur certaines thématiques. En ce sens, le principe même d’assistance à maîtrise d’ouvrage représente une institutionnalisation de l’expertise au sein des projets urbains.

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ponctuellement, le type d’expertise qui nous occupe est le fait d’individus exerçant une activité de conseil strictement tournée vers l’opérationnel et à temps plein. Leur activité s’inscrit exclusivement dans la préconisation de solutions techniques.

 L’hypothèse d’une différenciation entre expertise interne et externe

À titre d’hypothèse, nous établissons une distinction entre expertise interne et expertise externe170 au sein de l’expertise technique et opérationnelle précédemment définie. La seconde concerne majoritairement des bureaux d’étude privés mandatés sur une thématique spécifique, quand la première désigne l’activité d’experts directement intégrés aux institutions décisionnaires du projet (municipalités, intercommunalités et collectivités territoriales en règle générale). Cette distinction réclame une clarification. Nous avons précisé en quoi l’activité de bureaux d’études techniques, l’expertise externe, rentre dans la définition de l’expertise. En revanche, il peut subsister des réserves à propos de l’expertise interne. Par cette notion, nous entendons tenir compte de l’activité d’individus qu’il est en réalité plus juste de qualifier de

techniciens des collectivités territoriales, que d’experts à proprement parler. Ce sont donc les

personnels qualifiés des collectivités territoriales, mais non-élus. Or, leur rôle consiste fréquemment en celui de tampon entre experts externes et décisionnaires politiques. Eu égard à leurs compétences, ils analysent les rapports produits, n’hésitent pas à contester les experts externes, et jouent ainsi un rôle de filtre. Ces compétences, souvent plus généralistes et moins

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