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2. LE CONTEXTE DES APPRENTISSAGES DES PRÉPOSÉS D’AIDE À

2.1 Les apprentissages préalables au recrutement

2.1.3 L'expérience domestique personnelle

Les apprentissages développés dans la sphère personnelle et familiale sont considérés sous deux angles, tant au Québec qu’en France : soit ils représentent une relation positive avec la sphère professionnelle, soit ils sont à l’origine d’une certaine réserve voire d’un rapport négatif envers l'usage des apprentissages domestiques dans le cadre du travail ménager réalisé pour le compte d'un client ou d'un employeur.

2.1.3.1 Du point de vue des salariés. Au Québec, les salariées font fréquemment

référence à leur propre expérience de mère de famille et à leurs pratiques développées au sein de leur propre foyer ainsi qu'auprès de leurs proches : « J’fais ça chez moi.

Bah quand j'arrive chez un membre, on s'en va pareil que si je travaillais à la maison. » (PE2) explique une préposée. Elles considèrent que ces expériences sont à

l'origine de capacités qu'il peut être nécessaire de compléter. Cet environnement est plutôt évoqué pour justifier des capacités d'attention aux personnes et leur expérience de la maladie mises à profit dans leur travail de préposées : « J'ai un enfant autiste.

Donc, moi tout ce côté-là (s’occuper des gens), je l'ai appris par la force des choses. » (PE3), « Moi, j'le fait (observer les gens) parce que je suis mère de famille. J'ai trois enfants. Fait que je vais être plus à l'écoute. Mes oreilles sont peut-être plus développées parce que j'ai eu des enfants(Rire) » (PP10, employée en chèque emploi

services). « J'en ai eu soin un petit peu. Ça m'a aidé : j'avais l'expérience de ma

mère. » explique avec émotion une autre préposée (PE2) qui s'est occupée de sa mère

durant sa maladie.

Derrière ces expériences se dessinent également des capacités techniques : c'est aussi au sein du foyer qu'une préposée a appris à repasser : « J'ai toujours

repassé et j'ai appris au fil du temps parce qu'à un moment donné j'avais toutes des blouses en coton et des jupes en coton. Donc, j'ai repassé beaucoup. » (PE9). Elle

remarque que les progrès technologiques permettent d’alléger cette tâche que les jeunes ne savent plus effectuer : « Maintenant on met ça dans la sécheuse puis ça a

pas besoin de repassage. Le tissu, bien souvent, ça prend pas de repassage. Alors elles n'ont jamais touché à ça. » explique-t-elle. Une ancienne employée dans les

services bancaires, reconnaît qu'elle a commencé à travailler en qualité de préposée, il y a sept ans, à l'appui de son expérience personnelle et note la nécessité de compléter cette expérience pour s'adapter au contexte du métier : « C'est sûr qu'on fait avec

c'qu'on connait, comme on le connait, comme à la maison. C'était la base au départ, mais c'était fatiguant. » (PE8).

De leur côté, les employés français affirment leurs apprentissages au sein de la famille comme cette employée qui a interrompu son activité professionnelle pour éduquer ses enfants : « au bout de douze ans de ménage (rire)… on est un peu

rodé. » (SX8). Ces apprentissages seront mis au service de la sphère professionnelle.

Une personne salariée de particuliers explique : « Moi aussi j'ai mes connaissances.

Je peux dire, tient, ça fait bien chez moi, ça marche bien, bon. Bah, elle (l’employeuse) me dit : "essayez…" » (SP4).

2.3.1.2 Du point de vue des employeurs. La directrice d'une EESAD aimerait avoir la

possibilité d'embaucher des préposées d'une quarantaine d'années parce qu' « elles ont

appris différentes choses avec la vie, elles ont plus de vécu aussi. » (EE3). Au

contraire, l'entreprise d'entretien ménager ne souhaite pas prendre en compte cette expérience personnelle comme l'explique le responsable de la franchise : « les

personnes qui me disent " j'en fais du ménage chez moi ", ça n'a pas de poids. Ça, c'est pas un critère que je calcule.» (FET11). Il préfère proposer des apprentissages

spécifiques aux services réalisés par l'entreprise.

En France, les dirigeants d'entreprises considèrent les expériences personnelles comme une source de développement de qualités et «d'acquis », le plus souvent non validés mais permettant de réaliser des tâches ménagères dans un cadre professionnel et qui pourront être complétées par une formation au sein de l'entreprise : « Ce sont des personnes qui ont gardé leurs parents, qui ont gardé des

enfants mais c'était à titre personnel. Mais qui ont déjà des qualités. On se rend compte que c'est des personnes qui ont des compétences, qui peuvent bien faire. »

(EEN9), « vous savez, y'a pas de gens qui n'ont pas des compétences parce que dans

leur vie de tous les jours, elles font des tâches ménagères chez elles. Elles les connaissent déjà très très bien et elles ont très très peu de choses à acquérir. »

Les employeurs particuliers considèrent cette source d'apprentissage comme une normalité dont l'activité professionnelle d'entretien ménager est la continuité. Ils se réfèrent à leur propre expérience et leurs propres apprentissages ménagers pour imaginer les compétences acquises dans la sphère domestique personnelle par leurs employés : « Comme le ménage fait partie normalement du quotidien de tout le

monde, je me dis que chacun doit savoir faire au moins un minimum. » (EP2). Une

employeuse recrute uniquement des personnes qui ont une expérience personnelle et évite les jeunes « qui n'ont jamais tenu une maison. »(EP4). Elle souhaite que son employée fasse «ce que ferait une bonne maitresse de maison […] comme le ferait

une personne qui aime faire ça, en restant chez elle. » (EP4).

Toutefois les dirigeants et salariés d'association restent plus réservés par rapport à cette expérience : « On ne s'improvise pas comme ça aide à domicile ou

femme de ménage avec les murs. » note la dirigeante d'une association (EA5). Un avis

partagé par une employée d’association : « Si vous dites, on sait faire le ménage, on

sait faire le ménage chez nous. Oui, on a l'habitude de faire notre ménage chez nous mais... » (SA1).