matière d’atteintes à l’environnement
491. Le rôle du juge lors de la détermination de la
loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d’une pratique commerciale
déloyale ne devrait pas s’étendre à la prise en compte des intérêts de chacun des Etats en
présence, mais devrait se cantonner, lors de la détermination de la loi applicable, au
règlement des conflits entre les intérêts privés du consommateur et du professionnel.
163.- Contrairement aux règles de compétence juridictionnelle, les règles de
conflit de lois élaborées dans le Règlement Rome II et applicables en matière de
concurrence déloyale n’offrent aucune option de choix de loi
492à la personne lésée par
le comportement déloyal (professionnel ou consommateur) en dehors du domaine de
l’article 14 du Règlement Rome II
493. Cette solution est préférable, dans la mesure où
elle permet de conserver un équilibre entre les intérêts de l’auteur du comportement
déloyal et de la personne lésée. Les critères de rattachement retenus dans les règles de
conflit de lois applicables en matière de concurrence déloyale devraient garantir le
respect d’un équilibre raisonnable entre les intérêts en présence lorsque la règle de
conflit de lois générale ne le permet pas
494. Les règles de conflit de lois devraient
cependant être envisagées différemment selon qu’il existe ou non une réglementation
commune. La communautarisation du droit international privé renforce l’approche des
relations entre le droit matériel et la règle de conflit de lois au stade de l’élaboration de
cette dernière et du choix du ou des critère(s) de rattachement
495.
491 H. MUIR-WATT, op. cit.
492 Sur les options de lois, voir, notamment H. GAUDEMET-TALLON, « Le pluralisme en droit international privé : richesses et faiblesses (Le funambule et l’arc en ciel) », op. cit. p. 285 et suiv.
493 Sur la portée de l’article 14 du Règlement Rome II en matière de concurrence déloyale, infra, § 172 et suiv.
494 Considérant 19 du Règlement Rome II.
495 Sur les relations entre règle de conflit de lois et droit interne dans le cadre des Conventions de La Haye unifiant les règles de droit international privé, voir, notamment, Y. LOUSSOUARN, « L’évolution de la règle de conflit de lois », op. cit.., spéc. p.83.
164.- Conclusion de la Section 2 – Les fondements de la règle applicable - Le
rôle du juge dans la désignation de la loi applicable est conditionné par le choix des
finalités, effectué par les autorités communautaires au stade de l’élaboration et de
l’adoption du Règlement Rome II. Si la flexibilité des normes de droit matériel permet
parfois de les instrumentaliser afin de réguler de nouveaux types de comportements, il
n’en est pas de même de la règle de conflit de lois. Les règles de conflit de lois
applicables en matière de concurrence déloyale – les actes de concurrence déloyale et
les pratiques commerciales déloyales – restent fondées sur des considérations visant à
assurer la préservation d’intérêts privés, même lorsque les consommateurs sont les
personnes lésées. En présence d’une réglementation commune dans le domaine des
pratiques commerciales déloyales ou de la publicité, la règle de conflit de lois est
détachée des considérations du droit interne des Etats membres pour être imprégnée des
considérations des politiques législatives communautaires. Dans les domaines
concernés, l’élaboration de la règle de conflit de lois bilatérale résulte de la projection
du droit matériel harmonisé au plan communautaire et international. La règle de conflit
de lois n’est donc plus neutre et devrait poursuivre un objectif de protection de la partie
faible. En l’absence de réglementation commune dans le domaine des actes de
concurrence déloyale, l’élaboration de la règle de conflit de lois reste dépendante du
droit interne des Etats membres. La considération de la nature du rapport de droit pour
choisir le rattachement approprié ne fait pas perdre à la règle de conflit de lois son
caractère de neutralité. Les considérations matérielles sont prises en compte au stade de
l’élaboration de la règle de conflit de lois, mais la désignation de la loi applicable reste
neutre, en ce qu’elle est indifférente au contenu matériel des droits en conflit.
165.- Conclusion du Chapitre 1 – L’unité factice de la règle de conflit de lois
– La lecture des règles de conflit de lois contenues dans le Règlement Rome II pourrait
laisser penser que l’article 6 intitulé «concurrence déloyale et actes restreignant la
concurrence» permet seul de déterminer la loi applicable aux obligations non
contractuelles nées à la suite de comportements déloyaux. L’unité apparente de cette
règle de conflit de lois n’est pourtant pas conforme à l’institution juridique de la
concurrence déloyale, dont les règles qui la régissent ont vocation à préserver non
seulement les intérêts des professionnels, mais également ceux des consommateurs. Une
distinction est certes effectuée selon que l’acte de concurrence déloyale affecte les
relations de concurrence ou les intérêts collectifs des consommateurs (article 6, point 1
du Règlement Rome II) ou bien les intérêts d’un concurrent déterminé (article 6, point 2
du Règlement Rome II). La notion autonome de pratique commerciale déloyale entre
cependant dans le champ d’application de l’article 12 du Règlement Rome II intitulé
«culpa in contrahendo» dès lors qu’elle vise toute pratique commerciale d’un
professionnel qui présente un lien direct avec les tractations menées avec le
consommateur avant la conclusion d’un contrat. Il n’existe donc pas une règle de conflit
de lois applicable en matière de concurrence déloyale, mais trois (article 6, point 1,
article 6, point 2 et article 12 du Règlement Rome II) dont le champ d’application
dépend d’une qualification en cascade du rapport de droit. Celle-ci permet de préserver
une certaine cohérence entre les catégories de rattachement et les catégories prévues en
droit matériel interne – qu’elles soient de source communautaire ou de source nationale.
L’unité factice de la règle de conflit de lois applicable en matière de concurrence
déloyale se révèle également à travers l’examen de ses fondements. Ceux-ci diffèrent en
effet selon que l’on considère les actes de concurrence déloyale affectant les relations de
concurrence et les intérêts des consommateurs, les actes de concurrence déloyale
affectant les intérêts d’un concurrent déterminé ou les pratiques commerciales
déloyales. Dans le premier cas, le critère de rattachement contenu dans l’article 6, point
1 du Règlement Rome II est fondé sur la préservation de l’intérêt général sur le territoire
duquel l’acte de concurrence déloyale a été commis ; la règle de conflit de lois constitue
alors une véritable dérogation à la règle de conflit de lois générale et devrait être
interprétée strictement. Dans le second, le renvoi opéré dans l’article 6, point 2 à
l’article 4 du Règlement Rome II signifie que la règle de conflit de lois ne présente
aucune autonomie au regard de la règle générale, et est fondée, comme cette dernière,
Dans le document
La concurrence déloyale en droit international privé communautaire
(Page 150-153)