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Ce succès peut être largement expliqué par un désir de revivifier l’architecture rurale qui rejoignait la pensée des physiocrates et l’action des sociétés d’agriculture Pourtant, Cointeraux ne parvint pas à po-

L’EXEMPLE DE LYON

Les constructions en terre reparaissent vers le milieu du XVIème

siècle avec l’urbanisation croissante de Lyon ; et elles pren- dront véritablement leur splendeur au XIXe siècle avec le phé-

nomène de l’exode rural. Effectivement, en se développant, Lyon attire des populations agricoles attirées par sa prospé- rité. Elles s’installent en arrivant aux portes de la ville, près des grands axes de circulation ; et elles apportent leur savoir- faire en construisant avec le matériau disponible sur place : la terre. Les constructions en pisé sont de ce fait situées surtout sur des zones frontières entre la campagne et la ville.

On retrouve ces constructions : au Nord de Lyon, dans les quartiers de la Croix-Rousse, de Caluire, sur l’axe de pénétra- tion des Dombes. A l’ouest, à Vaise, au carrefour de la route de Vienne et de la route de Paris, entre les territoires du Mor- van et Bourbonnais ; dans le 5ème arrondissement et Sainte-

Foy qui étaient autrefois encore des campagnes. À l’est, sur la rive gauche du Rhône, qui, par sa nature marécageuse, n’était habitée que par une population pauvre issue du monde paysan.

On trouve donc, derrière les façades de l’habitat bourgeois constitué de maisons hautes en maçonnerie de pierre, des entrepôts, usines, ateliers et petites maisons, dont le princi- pal matériau de construction est le pisé, auquel sont souvent adjoints, le bois, le mâchefer, la pierre et parfois la brique, matériaux de récupération, associés de façon anarchique pour des raisons pragmatiques, par une population pauvre. Pour cette population, le pisé est considéré comme un matériau à part entière, et jugeable comme, en particulier pour ses qua- lités ignifuges, contrairement au bois qui sera interdit cause des nombreux incendies qu’il favorise (Dorothée Alex, 2012).

À noter

pour approfondir l’histoire et l’évolution du ciment dans le département de l’Isère, voir les travaux de Cédric AVENIER, du Laboratoire Cultures Constructives de l’ENSAG : Ciments naturel, Glénat, Grenoble 2007 et

Ciments de l’Isère, deux siècles d’innovation, DL et

patrimoine en Isère, 2010.

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Recommandations :

A inclure dans l’histoire du bien :

• La description doit inclure un compte rendu des époques de construction des éléments constitutifs du bien.

• Dans le cas de paysages culturels, il faut traiter tous les as- pects de l’histoire de l’activité humaine et la relation avec l’environnement

• Toute l’histoire qui se réfère à l’évolution, culture, traditions, connaissances, culture constructive, fêtes, littérature, typolo- gies constructives, transmission de connaissances entre gé- nérations, etc.

• Tout ce qui concerne l’histoire et l’utilisation du pisé dans la région (Traditionnelle et contemporaine).

Critères + Authentique/intégrité + bien géré/bien protégé = VUE

Si l’on compare les valeurs du patrimoine bâti en pisé de la région Auvergne-Rhône- Alpes et les valeurs universelles exceptionnelles attribuées au patrimoine mondial, nous pouvons constater que ces constructions vernaculaires, sont des exemples re- marquables du patrimoine de l’humanité.

3.1.a

Brève synthèse

(i)

Partout dans le monde, la beauté des architectures de terre illustre l’ingéniosité de la construction humaine. En effet, depuis les temps les plus anciens, les peuples de tous les continents ont utilisé la terre comme principal matériau de construction. Au- jourd’hui plus de 160 sites du patrimoine mondial sont entièrement ou en partie bâtis en terre, et près d’un tiers de la population mondiale vit dans des maisons et des villes dons la construction fait appel au matériau terre pour améliorer ses conditions de vie. Ces lieux, ont une importance économique, écologique et culturelle pour leurs com- munautés. Leur construction comme leur conservation, contribuent positivement à l’amélioration de l’économie locale, la préservation de la diversité culturelle, la lutte contre la pauvreté et la protection de l’environnement et du patrimoine de l’humanité. L’architecture de terre, est devenue l’expression symbolique de la capacité humaine à créer un environnement construit en valorisant au mieux les ressources disponibles localement.

La région Auvergne-Rhône-Alpes, est composée d’un patrimoine architectural en terre tout à fait remarquable, si bien intégré et mimée avec son contexte qu’il apparait sou- vent bien commun aux yeux de ceux qui le voient tous les jours. Dans certaines com- munes que composent ce territoire, nous trouvons que jusqu’à 80 % des bâtiments anciens construits en pisé, incluant tout une diversité de typologies et de fonctions. Les constructions en pisé de la région, sont un héritage durable de communautés, légué aux générations qui les ont suivies. Elles ont été construites grâce à la transmis- sion des savoirs, au travail d’entraide de la communauté et à l’utilisation d’un matériel naturel disponible sous nos pieds. Elles ont été entretenues pour durer et, parfois, reconstruites, pour se maintenir face aux processus lents de dégradation naturelle et humaine, et aussi face aux crises qui ont affecté les hommes et les villes, engendrant ainsi, par leur résilience historique, un véritable patrimoine vivant et évolutif.

(ii)

En effet, le patrimoine bâti en pisé de la région est porteur de valeurs culturelles, aujourd’hui largement reconnues au niveau international (patrimoines issus des créations et des savoir-faire populaires et vernaculaires). Certaines de ces valeurs le rendent excep- tionnel à plusieurs titres :

- Il est un exemple remarquable de l’utilisation intelligente et rationnelle des maté- riaux disponibles localement ayant produit des réalisations parfaitement durables et adaptées au climat ;

- Il est le témoignage de changements importants intervenus après la Révolution fran- çaise, dès lors que le peuple, grâce à l’utilisation de la terre, largement disponible sur place et en rassemblant ses seules forces (famille, communauté) a pu améliorer de façon très sensible son cadre bâti et ses conditions de vie ;

- Il prouve qu’une culture constructive bien maîtrisée permet de s’adapter à de très multiples besoins. La construction en pisé a permis de répondre aux besoins les plus divers et à leurs évolutions : petits abris, habitations (ruraux ou urbains), châteaux, granges, moulins, écoles, mairies, églises, et nombre de bâtiments à vocation indus- trielle ;

- Il est enfin le patrimoine bâti en terre le plus important de toute l’Europe, tant par le territoire couvert que par le nombre de bâtiments toujours dans un bon état de conservation.

Le pisé est la manifestation d’un phénomène culturel unique et exemplaire. Il constitue l’archétype, toujours vivant et probablement l’un des plus aboutis au monde, du dévelop- pement territorial ne d’une culture constructive dans l’objectif d’en révéler et d’en sublimer les qualités de la terre et toutes ces capacités.

Il est indispensable de concentrer notre attention sur le processus de sauvegarde des va- leurs de l’architecture de terre et son rôle vital dans le développement durable « naturel » de nos sociétés.

Le Patrimoine bâti en pisé d’Auvergne-Rhône-Alpes est proposé à l’inscription sur la Liste du patrimoine mondial au titre d’ensemble, entendu comme « groupes de construc- tions isolées ou réunies, qui, en raison de leur architecture, de leur unité, ou de leur intégration dans le paysage, ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de l’histoire, de l’art ou de la science ».

3.1.b

Critères selon lesquels l’inscription est proposée

CRITÈRE I

« Représenter un chef-d’œuvre du génie créateur humain »

De par sa conception, son utilisation intelligente et rationnelle des matériaux disponibles localement et son emplacement harmonieux dans un paysage d’une grande beauté, l’en- semble du Patrimoine bâti en pisé d’Auvergne-Rhône-Alpes est un trésor exceptionnel de l’imagination et de la créativité du génie humain, tant par la qualité esthétique de son architecture vernaculaire et savante, que par sa représentation symbolique en temps qu’identité territoriale et remarquable expression culturelle régionale.

L’ensemble patrimoniale bâti en pisé offre, enfin, l’exemple le plus remarquable de l’archi- tecture en terre de toute l’Europe, tant par le territoire couvert, que par le nombre de bâtiments toujours en usage.

CRITÈRE II

«  Témoigner d’un échange d’influences considérable pendant une période

donnée, sur le développement de l’architecture ou de la technologie, des arts

monumentaux, de la planification des villes ou de la création de paysages »

L’ensemble des constructions bâties en pisé de la région Auvergne-Rhône-Alpes constitue un témoignage vivant, exceptionnel et puissamment original, de l’échange culturel sur plus de deux millénaires où des traditions culturelles en provenance de diverses régions de l’Afrique et de l’Europe ont fusionné pour donner naissance à un paysage homogène et résistant.

Ce patrimoine bâti en pisé s’adapte à la topographie de chaque département de la région et exerce une influence durable sur le développement de l’architecture et des arts monu- mentaux. Les caractéristiques architecturales, la terre comme matériel et le pisé comme technique de construction, prouvent qu’une culture constructive bien maîtrisée permet de s’adapter à de multiples besoins : petits abris, habitations, châteaux, granges, moulins, écoles, mairies, églises, et aussi de nombreux bâtiments à vocation industrielle.

On voit le rôle fondamental que l’architecture de terre a joué dans l’évolution particulière de la région Auvergne-Rhône-Alpes, créant une culture à la fois fidèle à ses origines et ori- ginale. Sa conception, l’interaction de diverses influences, ses techniques de construction, l’utilisation des matériaux disponibles ainsi que son adaptation au climat ont eu un impact significatif au niveau du développement durable en France et en Europe.

Le pisé, en temps que technique constructive, témoigne enfin du développement et de la profonde évolution des pratiques contemporaines de construction. Les bâtisseurs ont toujours voulu assurer la pérennité de leurs édifices et l’invention du ciment moderne a joué un rôle crucial dans la réalisation de ce souhait. Le tout premier béton de ciment a été mis en œuvre avec les outils utilisés pour le pisé, en particulier les banches, et il a été compacté avant d’être coulé. Le béton de ciment n’est qu’une évolution moderne du pisé !

« Offrir un exemple éminent d’un type de construction ou d’ensemble archi-

tectural de paysage illustrant une ou des périodes significative(s) de l’histoire

humaine »

Le patrimoine bâti en Auvergne-Rhône-Alpes illustre une période significative de l’histoire humaine. Il représente un exemple exceptionnel des progrès et de l’évolution de la concep- tion architecturale au fil des siècles reposant sur le pisé, une technique plus sophistiquée et complexe que les autres principales techniques de construction traditionnelles de terre.

De par la manière particulière dont elle s’est développée dans l’espace, l’ensemble du Patri- moine bâti en pisé d’Auvergne-Rhône-Alpes illustre de manière exceptionnelle les change- ments intervenus après la révolution française, dès lors que le peuple eut accès à la terre (sous forme de terrain et d’un matériau de construction) et eut le droit de rassembler ses forces (famille, communauté) et fut en mesure d’améliorer de façon très sensible son cadre bâti et donc ses conditions de vie.

L’ensemble patrimonial bâti en pisé témoigne d’une méthode de construction bien adaptée qui tire le meilleur parti possible du matériau et des savoirs traditionnels, tout en conser- vant son environnement exceptionnel.

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CRITÈRE IV

CRITÈRE V

«  Un exemple éminent d’établissement humain traditionnel, de l’utilisation

traditionnelle du territoire qui soit représentatif d’une culture ou de l’interac-

tion humaine avec l’environnement »

Bien que la valeur architecturale exceptionnelle que nous trouvons dans le Patrimoine Bâti en Pisé d’Auvergne-Rhône-Alpes, pourrait le rendre éligible au critère V, nous ne sommes pas certains qu’il remplit pleinement les principes de ce critère.

Voici, quelques arguments défendant la possible postulation nomination à ce critère, trou- vés sur l’inventaire des biens construits en terre inscrits sur la Liste de patrimoine mondial :

Iran : MEIDAN EMAM, ISPAHAN : La place royale

d’Ispahan est une réalisation urbaine exception- nelle en Iran, où les villes sont habituellement construites sur un plan très serré et sans grand espace ouvert à l’exception des cours intérieures des caravansérails (auberges situées le long des routes). Il s’agit là d’un exemple d’une forme d’architecture urbaine qui est, par essence, vul- nérable.

Mali :FALAISES DE BANDIAGARA (PAYS DO-

GON) : Le pays Dogon est la manifestation exceptionnelle d’un système de pensée lié à la religion traditionnelle qui a su intégrer harmo- nieusement un patrimoine architectural tout à fait remarquable dans un paysage naturel fait d’éboulis et de formations géologiques impres- sionnantes.

Chine : VIEILLE VILLE DE LIJIANG : La vieille

ville de Lijiang a associé les montagnes, les fleuves, les arbres et l’architecture pour créer un habitat humain illustrant l’unité entre l’homme et la nature.

Ethiopie : HARAR JUGOL, LA VILLE HISTORIQUE

FORTIFIEE : Avec son paysage environnant, Harar Jugol présente un exemple exceptionnel d’un peuplement humain traditionnel en interac- tion culturelle avec son environnement. La rela- tion culturelle et matérielle avec le territoire a été préservée jusqu’à aujourd’hui, même si elle est également fragilisée sous l’effet des change- ments irréversibles qu’induit la mondialisation.