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Exclusion des fonctions cultuelles du champ d’interdiction des discriminations sexuelles sur le fondement de la liberté de religion

L’admission des distinctions sexuelles relatives à l’accès aux fonctions d’imam, de rabbin et de prêtre catholique au niveau juridique est liée au « principe d’autonomie » des groupements religieux. Comme l’explique Francis MESSNER, « Le principe d’autonomie, de liberté d’organisation, d’autodétermination des confessions ou des communautés religieuses (…) a une valeur constitutionnelle dans de nombreux États membres de l’Union européenne. Il relève de la loi dans nombre d’autres États. Il garantit l’auto-administration des cultes sur la base de leur autocompréhension et des dispositions de leurs droit, discipline ou règle internes. Il garantit la liberté des cultes ou des confessions religieuses notamment en ce qui concerne le statut de leurs institutions, de leurs entreprises et de leurs agents cultuels. Ainsi, dans la quasi-totalité des États membres de l’Union européenne, les ministres du culte ne sont pas soumis au droit commun du travail, du statut général de la fonction publique ou du statut des agents publics non titulaires. Au contraire, les textes fixant le statut des ecclésiastiques et autres cadres religieux ont été adaptés aux normes religieuses régissant ces personnels et ce système est le plus souvent caractérisé par l’absence d’un contrat de travail pour les ministres de la religion relevant du droit privé. » 1.

Ces « statuts » des ministres du culte déterminés dans les législations étatiques d’Europe sont respectés en droit communautaire ainsi que le souligne Mme DIAMANTOPOULOU (au nom de la Commission européenne) : « Le droit du travail communautaire s’applique en principe à tous les travailleurs. Cependant, le concept de travailleur lui-même n’est pas défini dans la législation européenne en matière d’emploi. Il n’existe donc, en droit du travail, aucune définition horizontale du travailleur s’appliquant de manière universelle à tous les États membres. Les directives européennes relatives au droit du travail ne s’appliquent par conséquent qu’aux personnes qui, dans les États membres, sont protégées en tant que travailleurs au titre du droit du travail national. Dans certains États

1 Francis MESSNER, « Le droit des religions en Europe », in Françoise CURTIT, Francis

MESSNER, Droit des religions en France et en Europe : recueil de textes, Bruylant, Bruxelles, 2008, p. 9.

membres, les ministres du culte ne sont pas considérés comme des travailleurs par le droit du travail national, et ne sont donc pas couverts par le droit du travail européen. Dans sa déclaration n° 11 relative au statut des églises et des associations ou communautés non confessionnelles, annexée à l’acte final du traité d’Amsterdam, l’Union souligne qu’elle respecte le statut conféré aux églises et aux associations ou communautés religieuses par le droit national dans les États membres et qu’elle n’y porte pas atteinte. Le statut de ministre du culte étant étroitement lié au statut et à l’organisation interne des églises et des communautés religieuses, l’attribution du statut de travailleur aux ministres du culte au titre du droit du travail national doit être décidée au niveau national. » 1.

Ainsi, actuellement, la liberté d’ « organisation interne des églises et des communautés religieuses »2 conditionne l’inapplicabilité du principe de non- discrimination sexuelle aux fonctions cultuelles réservées aux hommes, selon de nombreuses législations (A) et la jurisprudence (B).

A) Inapplicabilité du principe de non-discrimination sexuelle aux fonctions cultuelles selon de nombreuses législations de pays européens

Selon l’article 17 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), « 1. L’Union respecte et ne préjuge pas du statut dont bénéficient, en vertu du droit national, les églises et les associations ou communautés religieuses dans les États membres. (…) 3. Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l’Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces églises et organisations. ». Aussi, comme le note Françoise CURTIT, « Des actes communautaires réglementant divers domaines d’activité prennent (…) en compte le fait religieux dans sa dimension individuelle et institutionnelle. Certaines de ces dispositions sont consacrées à l’affirmation des principes de protection des convictions et de non-discrimination religieuse. D’autres reconnaissent la dimension institutionnelle des communautés religieuses et prévoient des

1 Réponse donnée par Mme DIAMANTOPOULOU au nom de la Commission à la question écrite

E-1342/01 posée par Glyn FORD (PSE) du 4 mai 2001, 16 juillet 2001, Journal officiel des

Communautés européennes, C 364 E du 20 décembre 2001, p. 87-88.

2 Réponse donnée par Mme DIAMANTOPOULOU au nom de la Commission à la question écrite

E-1342/01 posée par Glyn FORD (PSE) du 4 mai 2001, 16 juillet 2001, Journal officiel des

exceptions aux règles communes qui préservent les particularités de leurs activités et organisation, tout en s’appuyant sur les relations Églises/État telles qu’elles sont définies dans les États membres. »1.

Par exemple, selon l’article 17 § 1 de la Directive 2003/88/ CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, « 1. Dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, les États membres peuvent déroger aux articles 3 à 6 [périodes minimales de repos], 8 [durée du travail de nuit] et 16 [périodes de référence] lorsque la durée du temps de travail, en raison des caractéristiques particulières de l’activité exercée, n’est pas mesurée et/ou prédéterminée ou peut être déterminée par les travailleurs eux-mêmes, et notamment lorsqu’il s’agit: (…) c) de travailleurs dans le domaine liturgique des églises et des communautés religieuses. ».

En outre, la liberté des groupements religieux est prise en compte par les textes communautaires interdisant les discriminations. Selon la Directive 2004/113/CE du Conseil du 13 décembre 2004 mettant en oeuvre le principe de l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès à des biens et services et la fourniture de biens et services, « Tout en interdisant la discrimination, il est important de respecter d’autres libertés et droits fondamentaux, notamment la protection de la vie privée et familiale, ainsi que les transactions qui se déroulent dans ce cadre, et la liberté de religion. ».

De même, dans la Proposition de Directive du Conseil du 2 juillet 2008 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle, il est précisé dans le préambule que: « Tout en interdisant la discrimination, il est important de respecter les autres libertés et droits fondamentaux, notamment la protection de la vie privée et familiale ainsi que les transactions qui se déroulent dans ce cadre, la liberté de religion et la liberté

1 Françoise CURTIT, « Union européenne. Présentation », in Françoise CURTIT, Francis

MESSNER, Droit des religions en France et en Europe : recueil de textes, Bruylant, Bruxelles, 2008, p. 41.

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