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Evolution du modèle de Baddeley et quelques autres modèles de MDT

Résumé : Le langage dans les représentations spatiales

Chapitre 3 : Mémoire de travail et représentations spatiales

1. Définition de la mémoire de travail

1.2. Evolution du modèle de Baddeley et quelques autres modèles de MDT

1.2.1. Le buffer épisodique :

En 2000, Baddeley ajoute à son modèle initial un système complémentaire : « le buffer épisodique ». C’est un système de stockage à capacité limitée, contrôlé par l’administrateur central, parfois considéré comme la « mémoire de l’administrateur central ». Ce système est fortement lié au concept de « fonctions exécutives ». Il permet d’intégrer temporairement les informations provenant de différentes sources (boucle phonologique, calepin visuo-spatial et mémoire à long terme) et donc de combiner ces informations (Baddeley, Allan & Hitch, 2011). Ce maintien épisodique multidimensionnel lie tous les types d’informations provenant de nos différents sens (visuelles, auditives, olfactives, gustatives ou kinesthésiques) et permet à ces informations de participer à un codage multidimensionnel. Le buffer épisodique sert de lien entre les différents systèmes de la mémoire de travail et les informations maintenues en mémoire à long terme épisodique. Il permet donc de mettre en place des stratégies de mémorisation d’éléments à court ou long terme en reliant les informations à apprendre avec les connaissances, c’est-à-dire qu’il permet de créer des « chunks » (unité de sens, Miller, 1956). Il est en effet plus facile de mémoriser CNRSINRA (impliquant deux acronymes connus, CNRS et INRA) que CRNASNIR (les mêmes lettres organisées différemment). Il est également possible de créer une phrase pour se souvenir d’éléments, par exemple« Mais Où Est Donc OrNiCar ? » pour se souvenir de toutes les conjonctions de coordination. Le buffer épisodique permet ainsi de consolider des informations (visuelles, auditives et autres) en mémoire à long terme. Ici encore, des protocoles de double tâche ont été proposés pour étudier le rôle de ce système esclave dans la réalisation de tâches complexes. Les tâches secondaires sont principalement des tâches de générations aléatoires de mots ou de chiffres ou de séquences spatiales. Sur le plan des aires cérébrales, le buffer épisodique implique les fonctions exécutives et donc le lobe frontal.

Figure 8 : Schéma du modèle de Baddeley (2000)

Le modèle de la mémoire de travail (voir le schéma du modèle de Baddeley, 2000 dans la Figure 8) comporte donc un système attentionnel (l’administrateur central) et trois systèmes complémentaires (la boucle phonologique pour les informations verbales, le calepin-visuo spatial pour les informations visuo-spatiales et le buffer épisodique pour les informations multiples assemblées entre elles). Chacun de ces systèmes « fluides » est relié au système « cristallisé » de maintien à long terme (mémoire à long terme sémantique, épisodique et visuelle).

En 2011, un modèle révisé a été proposé plaçant le buffer épisodique au centre des interactions (Baddeley, Allen & Hitch, 2011). Le buffer est alors considéré comme un système passif de stockage des informations multidimensionnelles (voir le schéma dans la Figure 9). Ce model prend en compte la variabilité des informations perceptives (visuelle, auditive, gustative, olfactive). Certains chercheurs (ex. Piccardi, Leonzi, D’Amico, Marano & Guariglia, 2014), proposent également de distinguer au sein du calepin visuo-spatial ou plus particulièrement au sein du scribe interne une composante spatial locale (« reaching working memory ») et une composante de navigation (« navigational working memory »).

Figure 9 : Schéma du modèle de Baddeley, Allen et Hitch (2011)

Outre le modèle dominant de Baddeley, le concept de mémoire de travail a été repris dans beaucoup de modèles (Baddeley et al., 2009), questionnant notamment le lien entre la mémoire de travail et la mémoire à long terme. L’un des modèles alternatifs le plus connu est le modèle de Cowan (1988, 2005, 2010b, 2012) qui propose une vision différente de la mémoire de travail, notamment une vision unitaire. Selon lui, la mémoire de travail correspond à une activation de la mémoire à long terme. Elle serait constituée d’informations provenant de l’extérieur et de toutes les informations actives en mémoire à long terme, c'est-à-dire d’informations dans le focus attentionnel dont le sujet a conscience et d’informations activées dont le sujet n’a pas conscience. Ce modèle a trois composants principaux : la mémoire à long terme, la mémoire à court terme et le registre sensoriel ainsi qu’un processus central dont le rôle est de diriger l’attention et de contrôler les traitements volontaires, c'est-à-dire de sélectionner les informations du focus attentionnel. Les informations comprises dans ce focus attentionnel sont les informations nouvellement perçues (processus involontaire) ou réactivées du fait de traitements en cours ou de récupération (processus volontaire). L’activation simultanée de plusieurs informations permet de créer des combinaisons d’informations et ainsi générer de nouvelles connaissances à long terme.

D’autres modèles considèrent que la mémoire de travail est une forme d’activation de la mémoire à long terme, comme celui d’Engle (2002). Selon lui la mémoire de travail est composée de représentations en mémoire à long terme activées au-delà d’un certain seuil. Elle est donc constituée de traces actives, de procédures ou d’habiletés nécessaires pour l’activation et le maintien de l’activation et d’attention contrôlée. Cette attention contrôlée aurait une

capacité limitée. Dans le modèle ACT-R d’Anderson (1983, 1993), la mémoire de travail serait une sous partie des connaissances déclaratives stockées dans la mémoire à long terme.

Une littérature importante est produite autour du concept de mémoire de travail et des différents modèles proposés. Cependant, même s’ils diffèrent sur les processus mis en jeu ou leur relation avec la mémoire à long terme, la plupart des modèles s’accordent pour considérer que la mémoire de travail a une capacité limitée, et qu’il est nécessaire de concevoir une distinction entre traitement des informations verbales et visuo-spatiales. Le concept de mémoire de travail a également été depuis longtemps considéré dans le développement, ses capacités limitées pouvant être considérées comme un des facteurs rendant compte de l’immaturité de certaines aptitudes des enfants.