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Chapitre I : Le Promontoire Baléares dans le contexte méditerranéen occidental :

I.1. La Méditerranée occidentale et son évolution :

I.1.2. Evolution géodynamique du bassin Méditerranéen occidental :

L’histoire de la Méditerranée est liée à celle de l’océan Téthys et de l’évolution tectonique des plaques Afrique et Eurasie. Cet océan se met en place à la fin du Paléozoïque lors de la dislocation de la Pangée (Frizon de Lamotte et al., 2011). La dislocation de la Pangée va provoquer la formation d’une mosaïque de blocs séparés par des domaines océaniques étroits formant les différents domaines de la Téthys (Fig. I.8). L’ ensemble de blocs situé au niveau de la marge ibérique est appelé AlKaPeCa (Alboran, Kabylies, Peloritain et Calabre, Bouillin et al., 1986). Le Crétacé Supérieur voit le début de l’ouverture du domaine Atlantique Sud et

Rosenbaum et al., 2002a). La plaque Afrique va alors commencer sa migration vers la plaque Eurasie, la convergence initiant la subduction de la croûte téthysienne vers le nord-ouest sous la plaque Eurasie. (Fig. I.8)

Figure I. 8: Schéma de la Méditerranée à la transition Eo-Oligocène (Jolivet et al. 2006) L’unique front de subduction va évoluer et se fragmenter en partie à cause de l’étroitesse des domaines océaniques et la présence des nombreux blocs continentaux individualisés. La zone de convergence présente différents stades d’avancement avec des zones en subduction océan- continent, des zones en collision continentale et enfin des zones en extension post-orogénique.

La zone ouest méditerranéenne est complexe de par l’antagonisme de ses structures. En effet, les bassins s’ouvrent alors que le contexte général est celui du rapprochement de l’Afrique et de l’Eurasie qui tend à réduire l’espace disponible. De plus, la géométrie des bassins et des chaînes périphériques impose de nombreuses contraintes aux modèles géodynamiques proposés. Depuis les années 1970, de nombreux modèles ont vu le jour et l’évolution des méthodes d’investigations scientifiques a affiné ces modèles. L’ensemble des modèles appliqués à ces bassins repose sur un socle commun que je vais présenter ci-après, néanmoins de nombreuses questions restent sujettes à discussion.

Figure I. 9: Schéma structural de la Méditerranée occidentale à la fin de l’Oligocène (Tapponnier, 1977)

Contexte : Durant l’Oligocène un ralentissement de la convergence AF-EU se produit (Jolivet et Facenna, 2004) ce qui va provoquer de l’extension dans le domaine méditerranéen occidental. Les reconstructions tenant compte de l’extension s’accordent pour reconstituer une unique zone de subduction vers le nord au sud du bloc Alkapeca s’étendant entre le futur détroit de Gibraltar et le futur bassin Liguro-Provençal (Fig. I.9, Le Pichon et al., 1971). Le prolongement de cette zone de subduction et son raccord avec la section apenninique restent sujet à débat. De même, la limite nord de ce segment orogénique est souvent interprété comme un autre front de subduction vers le nord, parfois relié aux chevauchements bétiques à l’ouest ou aux fronts alpins à l’est. Cette interprétation individualise un massif orogénique central, décrit par Bouillin et al. (1986). Les phénomènes d’extension post-orogénique vont provoquer une phase de rifting qui va morceler de massif en une mosaïque de micro-blocs dont Alboran, les Kabylies, les massifs péloritain et calabrais (AlKaPeCa) ainsi que le bloc Corso-Sarde et les Baléares (Bouillin et al., 1986).

Figure I. 10: La Méditerranée occidentale au Miocène inférieur. (Rosenbaum et al., 2002) Rifting : Le rifting en Méditerranée Occidentale s’initie vers 30Ma au nord du massif dans ce qui sera les futurs golfes du Lion et de Valence et la mer Ligure (Fig. I.10). Cette phase de rifting est enregistrée par les sédiments syn-rift retrouvés dans les zones précitées. Gorini, (1993) et Séranne et al., (1999) décrivent des sédiments marins syn-rift datés à 29Ma dans le Golfe du Lion ainsi que Cravatte et al. (1974) qui les observe sur le forage Autan-1 en off- shore. D’autres sédiments syn-rift sont datés par Cherchi et Montadert (1982) à 30Ma sur la marge ouest-Sarde et à 28Ma dans le golfe de Valence (Maillard et al., 1992). Une phase de rifting est aussi décrite en Mer d’Alboran vers 26Ma (Lonergan et White, 1997; Platt et Whitehouse, 1999). La déformation extensive qui ouvre la Méditerranée occidentale est partitionnée. En surface, de grands grabens typiques de blocs basculés se mettent en place (Golfe du Lion, Golfe de Valence nord-est et Sud-Sardaigne) en certains lieux alors qu’à d’autres, des détachements à faible pendage sont décrits (Corse, Jolivet et al., 1990 ; Brunet et al., 2000 ou en Calabre, Rosseti et al., 2001).

Au Burdigalien, le rifting s’intensifie dans le bassin Liguro-Provençal ce qui provoque la migration vers le Sud-Est du bloc Corso-Sarde (Rehault et al. 1984; Speranza et al., 2002; Gattaccecca et al., 2007). Dans le même temps, l’extension se prolonge vers l’est dans le golfe de Valence, toujours selon une direction NW-SE et provoquant la migration du promontoire Baléares vers le Sud (Maillard et al., 1993). Plus au sud du bourrelet orogénique, la phase de rifting va désolidariser le bloc AlKaPeCa du promontoire Baléares et du bloc Corso-Sarde (Bouillin et al., 1986; Rosenbaum et al., 2004).

Figure I. 11: La méditerranée occidental au Miocène moyen. (Rosenbaum et al., 2002)

Accrétion : L’océanisation du bassin Liguro-Provençal est synchrone de la rotation du bloc Corso-Sarde (Rehault et al., 1984; Van der Voo et al., 1990; Chamot-Rooke et al., 1997; Speranza et al., 2002; Gattaccecca et al., 2007). Les études paléomagnétiques ont montré que le bloc subit une rotation antihoraire de 50° vers le sud-est qui s’initie vers 20.5Ma et est complète à 15Ma (Pasquale et al., 1996 ; Gattaccecca et al. 2007, Fig. I.11). A 15Ma, la fin de l’océanisation dans le bassin Liguro-Provençal est relayée par le début de l’extension en Sardaigne et dans le domaine Est-Algérien (Fig. I.11, Doglioni et al., 1999; Jolivet et al., 2008). Il n’y a pas d’accrétion océanique dans le Golfe de Valence qui est découplé du bassin Liguro- Provençal par un accident situé à l’est de Minorque, la zone de transfert Nord-Baléares (Fig. I.11, NBFZ, Rehault et al., 1984 ; Mauffret et al., 1995) : l’extension essentiellement marquée sur la marge catalane diminue des 18Ma (Maillard et al., 1992; Mauffret et al., 2004). La marge sud de Valence et le promontoire Baléares est alors une zone en compression marquée par les chevauchements bétiques (Gelabert et al. 1997, 2004, Sabat et al. 2011).

L’âge de l’océanisation ainsi que la direction d’accrétion pour le bassin algérien sont très discutés et restent hypothétique. Un âge de l’océanisation (16Ma -8Ma) est proposé à partir de données de sismique réflexion par corrélation de réflecteurs sismiques du golfe du Lion jusque dans le bassin Algérien (Mauffret et al. 2004). La mer d’Alboran ayant son origine dans le bloc AlKaPeCa situé plus à l’est implique un mouvement vers l’ouest. Cependant la relation cinématique entre le mouvement vers l’ouest d’Alboran (Mauffret et al., 2004; Platt et al., 2005; Frizzon de Lamotte et al., 2011; Medhaouri et al., 2014) et l’évolution du bassin Algérien

Figure I. 12: Schéma de la Méditerranée au Miocène supérieur (Rosenbaum et al., 2002) La dernière phase d’extension connue dans le bassin s’initie au Tortonien (Mauffret et al. 2004, Rosenbaum et al. 2004, Carminati et al. 2012) et se localise dans la mer Tyrrhénienne. Deux bassins de nature océanique se mettent ensuite en place au sud-ouest de Naples (bassin de Vavilov) et directement au nord de la Sicile (bassin de Marsili) durant le Pliocène.

De nombreux indices de compression sont actuellement observés sur certains segments de la marge Algérienne (Fig. I.13, Auzende et al 1973, El Robrini 1986, Argus et al, 1989, Megrhaoui 1996, Strzerzynski et al. 2010, Leprêtre et al. 2012) et la marge Ligure (Sage, travaux en cours) tendant à inverser les marges passives. Des indices de réactivation sont aussi observés dans les Baléares (Maillard et Mauffret, 2013) et sur la marge est-Sarde (Gaullier et al. 2014).

Figure I. 13: Schéma de la Méditerranée à la limite Pliocène-Pléistocène (Rosenbaum et al., 2002).