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Evaluation objective

I. GENERALITES ET MOYENS DE MESURE DE L’HALITOSE

5. Evaluation objective

L’évaluation objective de l’halitose repose sur deux grands principes : la mesure des gaz malodorants et l’analyse des bactéries responsables de la mauvaise haleine. Ces deux principes permettent de quantifier et/ou de qualifier précisément l’halitose.

A Analyse instrumentale

L’analyse instrumentale de l’halitose permet de mesurer les gaz nauséabonds émis par la cavité buccale. Elle repose sur l’utilisation de divers appareils tels que l’halitomètre, le chromatographe en phase gazeuse, les détecteurs chimiques semi-conducteurs, les détecteurs enzymatiques, les détecteurs à amines et les moniteurs à ammoniaque. D’autres moyens ont aussi été utilisés dans le passé comme le cryo-osmoscope, alors que les nez artificiels représentent l’avenir de l’évaluation objective de l’halitose.

a) Moniteurs de gaz sulfureux ou halitomètres

Champ d’application

Les moniteurs de composés gazeux sulfurés sont des dispositifs permettant de mesurer la concentration de composés sulfurés volatiles présents dans l’air [2, 9, 10, 14, 18, 50]. Ces CSV sont, comme nous l’avons expliqué précédemment, des produits de la dégradation d’acides aminés soufrés contenant des groupements thiols (S-H) [9]. Ces appareils permettent donc de détecter l’hydrogène sulfuré (à un seuil de 0,5ppb *partie par billion c'est-à-dire par milliard]), le méthyle mercaptan (à un seuil de 1,1ppb) et le sulfure de diméthyle (à un seuil de 1ppb) [9]. Mais ils ne détectent que ces composés. Or la mauvaise haleine est le résultat de l’interaction de nombreux composés qui ne sont donc pas détectés par ces appareils. Les moniteurs de composés sulfurés ne peuvent donc pas servir à définir précisément la mauvaise haleine mais peuvent en donner une indication assez proche puisque lesdits CSV y jouent un rôle majeur [19].

Principe physique

Ces moniteurs fonctionnent selon le principe chimique d’oxydoréduction [9]. En effet, ils comprennent une cellule électrochimique avec une anode (en général à base de métal noble comme le platine ou l’or), une cathode en plomb et une solution [9, 18]. Au contact de l’anode, le radical soufré est oxydé. En même temps, il se produit une réaction de réduction chimique complémentaire à la cathode. Ceci produit un courant électrique mesurable, directement proportionnel à la réaction d’oxydoréduction et donc à la concentration en radical soufré [9, 18]. C’est pourquoi le moniteur n’est pas spécifique à un CSV en particulier mais à une famille chimique contenant des groupements thiols. Le courant électrique est enregistré par le boîtier puis transmis à un ordinateur où il sera converti en ppm ou ppb [9].

Matériel

Le dispositif comprend :

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- Une pompe qui aspire l’air à un débit de 1500ml/min (facultatif) [51]

- Un boîtier électronique contenant la cellule électrochimique (voir Figure 9) [9] - Un ordinateur pour visualiser le tracé et stocker les données [9]

Figure 9. Halimeter® (D'après www.halimeter.com [52]) Mesures obtenues

La précision du dispositif est de l’ordre de 5ppb d’après les données du fabriquant [9]. Il est préalablement calibré grâce à des échantillons de concentration connue [9]. On l’allume environ 30 minutes avant toute mesure pour stabiliser la cellule électrochimique. La mise à zéro se fait dans l’air ambiant [18, 51].

On obtient un diagramme avec 3 pics correspondants aux 3 mesures successives (voir Figure

10). On prend la valeur la plus élevée pour chacun de ces pics et on fait la moyenne afin d’obtenir

une valeur en ppb [9, 48].

Figure 10. Diagramme d’un patient ayant une haleine normale (D'après www.halimeter.com [52])

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Différents auteurs ont tenté de définir une « échelle » de la mauvaise haleine :

- Davarpanah et al. [9] distinguent 3 types d’halitose selon leur intensité : o Halitose légère entre 200 et 300ppb

o Halitose modérée entre 300 et 500ppb o Halitose sévère au-delà de 500ppb

- Baharvand et al. [48] utilisent la même échelle en 3 paliers mais avec des valeurs différentes : o Haleine normale entre 80 et 160ppb

o Halitose légère entre 160 et 250ppb o Halitose forte au-delà de 250ppb

- Babad [50] quant à lui indique que l’haleine n’est pas décelable en dessous de 100ppb, et qu’elle devient forte vers 300-400ppb.

Protocole clinique

Tout comme la mesure organoleptique, la mesure avec un moniteur de gaz sulfureux impose certaines restrictions au patient : il ne doit ni manger (surtout des aliments forts tels que ail, oignon, alcool), ni boire, ni fumer, ni réaliser de soins d’hygiène bucco-dentaire (surtout les bains de bouche), ni mettre de cosmétique odorant au moins 4 heures avant la mesure [9, 51].

Ensuite, on peut mesurer la concentration en CSV dans la cavité buccale, les fosses nasales, ou les poumons. Toutes les mesures sont réalisées trois fois, pour une meilleure fiabilité. Seul le protocole change selon la provenance des CSV à analyser :

- Pour la cavité buccale [2, 9, 18, 48, 51] : on demande au patient de fermer la bouche et de

respirer par le nez pendant 3 minutes, puis on insère la paille en plastique (6,5mm de diamètre) de 4cm à l’intérieur de la bouche du patient sans toucher les joues ou la langue (voir Figure 11). Enfin, soit on demande au patient de retenir sa respiration pendant 10-15 secondes et on prend la mesure à ce moment là [9], soit on lui demande de respirer uniquement par le nez [18, 51].

Figure 11. Prise d’échantillon d’air buccal (D'après www.halimeter.com [52])

- Pour les fosses nasales [9] : on demande au patient de se boucher le nez et de respirer

uniquement par la bouche pendant 2 minutes, puis on insère la paille dans une narine. On demande au patient de retenir sa respiration pendant quelques secondes durant lesquelles on prend la mesure.

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- Pour les poumons [9] : on demande au patient de respirer normalement par la bouche puis

de bloquer sa respiration à la fin d’une expiration. On lui demande ensuite d’expirer ce qui reste d’air dans ses poumons et on prend la mesure à ce moment là.

Avantages et inconvénients de la technique

Avantages : cette méthode de mesure est, par rapport au test organoleptique, beaucoup

plus objective car elle repose sur une mesure instrumentale. Elle est également plus reproductible et plus sensible [51]. La mesure par halitomètre est pratique car l’appareil est relativement compact et portatif, peu chère (environ 2700€ l’appareil), non invasive, rapide, simple d’utilisation et ne nécessite donc pas un personnel qualifié [2, 6, 10, 16, 45, 48, 51]. Le temps de latence entre plusieurs mesures est très court ce qui permet des études sur une grande population [45, 51].

Inconvénients : les résultats du test organoleptique et les résultats de l’halitomètre ne sont

pas nécessairement corrélés. En effet, l’haleine contient des centaines de composés différents que le nez humain peut détecter ou non. Le moniteur de gaz sulfureux ne mesure que les composés sulfurés et ne dépiste pas toutes les odeurs responsables de l’halitose [14, 18, 19, 21]. D’ailleurs, une étude a démontré que dans 25% des cas, l’halitomètre donne un faux diagnostic [48]. De plus, contrairement à la chromatographie, ces dispositifs ne sont pas très spécifiques car ils ne permettent pas de distinguer les CSV les uns des autres [6, 10, 18, 51]. La sensibilité de détection varie en fonction du composé (ces dispositifs sont très sensibles à l’hydrogène sulfuré mais très peu au méthyle mercaptan [16]). Cet appareil nécessite également d’être recalibré fréquemment car sa sensibilité de détection diminue avec le temps [51].

Intérêt

L’intérêt majeur de ce dispositif réside donc dans :

- le dépistage rapide et la différenciation entre un patient souffrant d’halitose vraie et un patient souffrant de pseudo-halitose ou d’halitophobie [3, 48, 51]

- le suivi du traitement des patients halitosiques [19, 50, 53]

- leur soutien psychologique car des mesures précises prouvant l’amélioration de l’haleine permettent de mieux convaincre le patient et de maintenir leur motivation pour le traitement [19].

Certains auteurs ne conseillent toutefois pas son utilisation en recherche fondamentale du fait de ces limitations et de son manque de précision quant aux CSV détectés [50].

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b) Chromatographie conventionnelle

Champ d’application

La chromatographie en phase gazeuse (voir Figure 12) est une méthode de mesure qualitative et quantitative de composés gazeux [6, 9, 39]. Elle est utilisée dans le domaine de l’halitose depuis les années 1960 [9]. C’est une technique qui permet de séparer, d’identifier et de doser les composants d’un mélange gazeux comme par exemple l’air expiré [9, 14, 27, 28, 39, 54]. Cette technique ne se limite donc pas aux CSV contrairement aux moniteurs de gaz sulfureux.

Principe physique

La technique repose sur la séparation de molécules d’un mélange gazeux [9]. Le mélange gazeux (air expiré par le patient) à analyser est injecté à l’entrée d’une colonne recouverte d’une phase dite fixe ou stationnaire, puis est transporté à travers celle-ci à l’aide d’un gaz vecteur ou porteur appelé phase mobile (en général de l’hélium ultra-pur, de l’argon, de l’azote, ou de l’hydrogène [27, 39-41, 55, 56]) [2, 9, 14, 27, 55].

Les molécules du mélange gazeux vont se séparer à des vitesses variables en fonction de leur affinité avec la phase stationnaire qui recouvre la colonne [2, 9]. Ainsi, plus le composé a d’affinité avec la phase stationnaire, plus il mettra de temps à sortir de la colonne. Il s’agit donc d’une mesure du temps de rétention [9, 31, 39].

Un système de détection, permettant de mesurer le signal émis par les différentes molécules et de les identifier, est couplé à un enregistreur qui produit un tracé spécifique d’une molécule gazeuse (nature et quantité) s’échappant de la colonne. Ce tracé s’appelle un chromatogramme et chaque pic de ce tracé correspond à un gaz. On obtient donc au final un profil du mélange gazeux [9, 39].

39 Matériel

Le système de chromatographie se compose de :

- Un échantillonneur : selon certaines études, on peut utiliser un échantillonneur spécial qui

peut être soit une colonne capillaire, soit une membrane d’extraction type PDMS (polydiméthylsiloxane), soit une seringue imprégnée d’un produit qui capture préférentiellement les composés que l’on veut étudier [58].

- Un système d’injection ou d’aspiration des échantillons : il est constitué soit d’une pompe

couplée à une valve d’injection avec un circuit dans lequel on place l’échantillon [40], soit d’un système automatisé (pour diminuer les variations inter-opérateurs et donc augmenter la reproductibilité) [9, 18, 31, 39, 59].

- Une colonne : C’est un tube de faible section (0,5 à 0,06mm) enroulé sur lui-même, de faible

débit pour permettre une bonne séparation des composants [9, 27, 31, 39-41, 55, 56, 58, 59]. La colonne peut être en polypropylène, en polystyrène ou en verre.

- Un four thermostaté : La colonne est placée dans le four car il faut la chauffer (entre 70 et

80°C selon les études [39]) pour volatiliser les substances solides [9, 27, 28, 39, 41, 56, 58]. - Un détecteur : il est choisi en fonction des phases à analyser [9]. On peut décrire plusieurs

détecteurs couramment utilisés :

o La photométrie de flamme [2, 9, 16, 18, 31, 39, 56, 58] : c’est un détecteur très sensible, spécifique aux composés sulfurés [16, 31, 58]. Lorsque le gaz sort de la colonne, il passe dans une flamme dite réductrice. La flamme obtenue présente une couleur particulière (ou chimiluminescence) qui, grâce à un photomultiplicateur, est reconnue. Elle signe donc de manière caractéristique le composé.

o Le spectromètre de masse [2, 18, 27, 28, 41, 55, 58] : c’est un détecteur qui provoque l’ionisation des molécules qu’on veut étudier. Puis le spectromètre mesure qualitativement et quantitativement ces ions grâce au rapport masse moléculaire sur charge électrique. On ne mesure donc pas les gaz en eux-mêmes mais les ions qui en résultent. On peut ainsi étudier des échantillons gazeux comme des échantillons liquides ou solides tels que la salive ou l’enduit présent sur le dos de la langue [18]. o Un détecteur UV ou spectrophotomètre [40, 58] : il permet de mesurer l’absorbance

d’une substance en solution limpide à une longueur d’onde donnée. L’absorbance est proportionnelle à la concentration des substances en solution.

- Un système informatisé pour enregistrer les données et analyser le chromatogramme (voir Figure 13) [9, 39, 56]. L’ordinateur compare le tracé obtenu avec une base de données afin

d’identifier le composé gazeux analysé [9].

Mesures obtenues

Le dosage des composés est exprimé en ppb (partie par billion) [9, 59]. La chromatographie en phase gazeuse permet de détecter un large spectre de substances (plus de 700 composés selon Van den Velde et al. [54]) à des concentrations inférieures à 1ppb [9].

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Figure 13. Chromatogrammes typiques d’air alvéolaire (A) et d’air buccal (B) chez un patient sain (D'après Van den Velde et al. 2007 [27])

On peut distinguer des composés comme l’acétone (1), le sulfure de diméthyle (2), le diméthyle sélénide (3), le 1-propanol (4), le 2-butanone (5), le 2-pentanone (6), l’indole (7) et le disulfure de diméthyle (8).

Elle permet entre autres de mesurer (voir Figure 13) [2, 6, 9, 10, 14, 16, 27, 28, 31, 39, 41, 54, 58-60]:

- L’indole, le skatole

- Les polyamines (cadavérine, putrescine)

- Les dérivés azotés (diphénylamine, méthylamine, urée, ammoniaque) - Les acides gras à chaîne courte (acide butyrique, acide valérique) - Les alcools (dodécanol, tétradécanol)

- Les CSV (méthyle mercaptan, hydrogène sulfuré, sulfure de diméthyle) - Les composés organiques volatiles

41 Protocole clinique

Préparation du patient et du matériel

Tout comme la mesure organoleptique ou la mesure par halitomètre, la chromatographie nécessite une préparation. Le patient ne doit pas boire ou manger des aliments très odorants (tels que ail, oignon, épices, alcool, café) et éviter d’utiliser des cosmétiques parfumés au moins 24 heures avant la mesure [27, 31, 40, 55]. Deux heures avant l’examen, il doit également éviter de boire, manger, fumer et de réaliser des soins d’hygiène bucco-dentaire (tels que le brossage de dents ou le rinçage de bouche) [9, 27, 31, 40, 59].

Le chromatographe est préalablement calibré grâce à des gaz de concentration connue, puis le zéro est réglé dans l’air ambiant [31, 59].

Prélèvement des échantillons

Selon les études on peut étudier des échantillons d’air buccal, d’air nasal, d’air alvéolaire (on ne collecte pour cela que l’air en fin d’expiration), de salive ou d’enduit lingual (pour la chromatographie liquide) et d’air environnemental qui sert de témoin [9, 18, 27, 31, 39-41, 55, 59]. Le prélèvement des échantillons dépend du type d’échantillonneur utilisé :

- Sac en plastique [9, 41] : le patient souffle simplement dedans pour récolter l’air buccal. Puis

l’échantillon est injecté dans le système de chromatographie (voir Figure 25).

- Le dispositif spécial Bio-VOC® [27, 55] : ce dispositif permet de ne capturer que l’air

alvéolaire. En effet, on demande au patient d’expirer et le dispositif va capturer la dernière portion de l’air expiré (environ 150ml) correspondant à l’air présent dans les poumons uniquement (voir Figure 14).

Figure 14. Echantillonneur d’air Bio-VOC® (D'après http://shop.markes.com [61])

- Une seringue à piston [31, 39, 59] : on insère un tube dans la bouche du patient. Puis,

pendant qu’il retient sa respiration, on aspire l’air buccal avec la seringue. Cela permettrait d’augmenter la reproductibilité de la mesure selon certaines études [39].

Avant toute mesure, le patient ne doit ni parler, ni respirer par la bouche pendant 3 minutes [31, 39, 59]. Pendant la mesure, soit il doit bloquer sa respiration pendant 15 secondes, soit il doit respirer normalement par le nez selon les différentes techniques employées [27, 31, 39].

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Pour certains procédés, on utilise également des réactifs chargés de capturer les composés qu’on veut mesurer. Par exemple, le dispositif Bio-VOC® permet de capturer préférentiellement les composés organiques volatiles [27, 55], alors que le gel de silice capture préférentiellement les CSV [58]. En chromatographie liquide on utilise le O-phtaldialdéhyde comme réactif sur les échantillons de salive [40]. Et la caséine déclencherait la détection de 9 nouveaux CSV en spectrométrie de masse [28]. Dans tous les cas, l’échantillon n’a pas besoin d’avoir un volume important. En moyenne, 2 à 3µL suffisent [9].

Avantages et inconvénients de la technique

Avantages : la chromatographie est un outil puissant dans l’analyse qualitative et

quantitative de l’halitose car elle est extrêmement sensible (puisqu’elle peut détecter des composants à des concentrations très faibles de l’ordre du nanogramme), discriminative, reproductible et non invasive [2, 3, 6, 9, 17, 18, 27, 28, 39, 45, 60]. C’est une technique très précise, objective et fiable qui permet de détecter un large spectre de composés retrouvés dans l’air expiré [6, 14, 17, 18, 41, 54, 60]. Elle permet également de faire un diagnostic différentiel grâce au profil de substances détectées [14, 60]. En effet, des composés retrouvés sont typiquement associés à certaines pathologies, comme par exemple l’acétone qui est caractéristique du diabète [2, 14, 27]. Donc une présence importante de ce gaz signerait une halitose de cause extra-orale. De plus, la chromatographie permet également de calculer des ratios qui sont intéressants sur le plan diagnostique [2, 14, 27] : le ratio hydrogène sulfuré sur méthyle mercaptan permet ainsi de distinguer une halitose de cause essentiellement parodontale (tartre, parodontite, gingivite…) si ce ratio est inférieur à 1. Si par contre, ce ratio est supérieur à 1, il s’agit alors d’une autre cause.

Inconvénients : la chromatographie conventionnelle est très chère (entre 30 000 et 60 000€

selon Shimadzu®[57]), encombrante (l’appareil pèse une cinquantaine de kilogrammes), très longue (l’analyse dure plusieurs heures) et sa complexité nécessite l’intervention d’un opérateur hautement qualifié [2, 3, 6, 9, 10, 14, 16, 18, 19, 28, 60]. Ces nombreux inconvénients rendent son implantation en cabinet dentaire difficile et en font plutôt un outil de recherche scientifique [6, 10, 14, 16, 19, 21, 28, 60]. De plus, Van den Velde et al. ont prouvé qu’elle était notablement influencée par les composés environnementaux [27].

Pour toutes ces raisons, la chromatographie en phase gazeuse est considérée comme la technique de référence pour la mesure objective de l’halitose [2, 10, 16, 17, 19]. Mais elle est plus appropriée en laboratoire qu’en cabinet dentaire.

c) Chromatographie en phase gazeuse portative

Champ d’application

Suite aux problèmes d’encombrement rencontrés avec la chromatographie en phase gazeuse conventionnelle, de nouveaux appareils portatifs ont été inventés. C’est ainsi que Abimedical Corporation [62] (Osaka, Japon) a développé Oral Chroma®, un système de chromatographie portable (voir Figure 15) [62]. D’autres études comme celle de Hanada et al. [63] ont également permis la création de détecteurs chimiques spécifiques aux composés sulfurés volatiles.

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Figure 15. Oral ChromaTM par Abilit, Osaka, Japon (D'après www.abilit-medical-and-environmental.jp [62]) En effet, ces appareils permettent une mesure qualitative et quantitative des CSV tout comme la chromatographie conventionnelle [9, 62, 63]. Mais la grande différence réside dans le fait que ces appareils portatifs se limitent à la détection et au dosage des trois CSV principaux [9, 62-64] : l’hydrogène sulfuré (H2S), le méthyle mercaptan (CH3SH) et le sulfure de diméthyle ([CH3]2S).

Principe physique et matériel

Le développement de ces appareils résulte de la simplification et de la miniaturisation d’un système de chromatographie en phase gazeuse conventionnelle [9]. Le système comprend donc (voir

Figure 16) [9, 62, 63] :

- Un échantillonneur : il s’agit d’une seringue à piston en plastique, de faible volume (1ml), sur laquelle on peut fixer une aiguille.

- Un système d’injection des échantillons.

- La phase mobile n’est plus un gaz porteur hautement pressurisé mais simplement l’air ambiant purifié par des filtres [6, 62, 63]. On utilise donc une pompe qui aspire cet air et un filtre constitué de charbon actif et d’un gel de silice.

- La technique classique de colonne de chromatographie est remplacée par une colonne beaucoup plus courte [63].

- Le four thermostaté est remplacé par un simple système de chauffage qui entoure la colonne [63].

- Le détecteur utilisé est un détecteur chimique semi-conducteur à base d’oxyde métallique (comme par exemple l’oxyde d’indium In2O3 recouvert d’une fine couche d’or Au) [9, 63]. - Un contrôleur.

- Un système informatique permettant la visualisation des résultats et le stockage des données du patient.

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Figure 16. Schéma du détecteur (D'après Hanada et al. 2003 [63]) Protocole clinique

Avant toute mesure, le patient doit respecter les mêmes instructions que pour la mesure organoleptique, la mesure instrumentale par halitomètre ou par chromatographie conventionnelle. Il doit également maintenir la bouche fermée pendant 30 secondes [63]. Le protocole clinique se déroule en trois étapes [9, 62, 63] :

1. On insère la seringue plastique dans la bouche du patient qui referme ses lèvres dessus (voir

Figure 17). Il faut faire attention que la seringue ne touche ni les joues, ni la langue du

patient. Puis pendant une minute, on homogénéise l’air buccal par allers-retours du piston avant d’effectuer le prélèvement d’air.

Figure 17. Insertion de la seringue dans la cavité buccale (D'après www.abilit-medical-and-environmental.jp[62])

2. On retire la seringue de la bouche du patient. Si l’embout est mouillé, il faut le sécher avec un chiffon sec. Puis on fixe l’aiguille sur la seringue et on la vide partiellement jusqu’à ce qu’il ne reste que 0,5cm3 d’air buccal à l’intérieur (voir Figure 18).

Figure 18. Obtention d’un échantillon de 0,5cm3 d’air buccal (D'après www.abilit-medical-and-environmental.jp [62])

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3. On injecte les 0,5cm3 d’air buccal dans l’appareil Oral Chroma® (voir Figure 19).

Figure 19. Injection de l’échantillon d’air buccal dans l’appareil (D'après www.abilit-medical-and-environmental.jp [62])

L’analyse de l’échantillon démarre instantanément. On obtient un spectre correspondant aux concentrations des trois composés sulfurés volatiles détectés dans le prélèvement (voir Figure 20) [9, 62]. Le profil obtenu ressemble à celui de la chromatographie conventionnelle, mais ne prend en compte que trois composés.

Figure 20. Diagramme obtenu par Oral Chroma ® (D'après www.abilit-medical-and-environmental.jp [62])

Les 3 pics visibles correspondent aux 3 composés sulfurés volatiles étudiés : hydrogène sulfuré, méthyle mercaptan et sulfure de diméthyle

Avantages et inconvénients du dispositif

Avantages : les systèmes de chromatographie portatifs présentent les mêmes qualités

indéniables que la chromatographie conventionnelle, à savoir une très grande sensibilité et une discrimination des trois composés étudiés [6, 9, 62-64]. Oral Chroma® a aussi l’avantage d’être léger (5,5kg) [9, 62, 63], compact (40 x 28 x 13cm) [9, 62, 63], peu cher [6, 9, 62, 63], stable dans le temps [62, 63], simple d’utilisation et donc ne nécessite pas d’opérateur

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