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2.3 L’auto-inflammation dans un milieu homog`ene en composition

2.3.2 Etude exp´erimentale

2.3.2.1 Sur moteurs

Comme soulign´e dans l’introduction g´en´erale de ce manuscrit (c.f. chapitre 1), les premi`eres ´etudes exp´erimentales d´edi´ees aux moteurs CAI/HCCI remontent `a 1979. Onishi et al. [97] montrent notam-ment que l’auto-inflammation dans ce type de moteur consomme le gaz frais en masse, sans front de flamme d´eflagratif. L’acronyme HCCI est introduit plus tard par Thring [118] qui ´etudie l’auto-inflammation de l’essence. Il souligne l’importance toute particuli`ere de la temp´erature d’admission sur l’auto-inflammation en r´egime HCCI et conclut sur la n´ecessit´e de pr´echauffer les gaz d’admission `a des temp´eratures sup´erieures `a 640K. Il observe ´egalement que la combustion homog`ene par compression n’est pas exploitable `a faible charge et `a faible r´egime. L’id´ee d’un moteur autorisant alternativement la combustion par allumage command´e et par compression est alors propos´ee.

Une comparaison des rendements sur un mˆeme moteur monocylindre quatre temps fonctionnant soit en allumage command´e, soit en HCCI, est r´ealis´ee en 1997 par Christensen et al. [15] pour trois carburants diff´erents (iso-octane, ´ethanol et gaz naturel). L’absence de papillon sur la ligne d’admission en mode HCCI permet de diminuer les pertes par pompage et d’augmenter le rendement. Les quantit´es de NOx sont ´egalement r´eduites. N´eanmoins, les auteurs montrent que la combustion en mode HCCI est plus sensible aux ph´enom`enes d’extinction au voisinage de la paroi, ce qui induit des niveaux plus ´elev´es

Physique de l’auto-allumage 39 d’´emissions de HC imbrˆul´es. Sur le mˆeme moteur et pour les mˆemes carburants, Christensen et al. [14] ´etudient l’impact du rapport volum´etrique, de la pression `a l’admission et de la charge, sur le rendement et le niveau des ´emissions polluantes :

– le rendement de combustion augmente avec la pression d’admission, mˆeme si le rendement global du moteur reste inchang´e ;

– les ´emissions de HC diminuent avec l’augmentation de la pression `a l’admission et de la charge ; – les ´emissions de CO sont tr`es faibles, mˆeme pour un fonctionnement proche de la limite riche. Des recherches exp´erimentales ont ´egalement ´et´e d´edi´ees `a la compr´ehension de la cin´ema-tique de l’auto-inflamation dans les moteurs HCCI. Ainsi, Lavy et al. [68] montrent une visualisation directe de la combustion dans un moteur monocylindre deux temps HCCI (c.f. image 2.7) par diffu-sion de Mie. Plusieurs sites d’auto-inflammation peuvent ˆetre identifi´es ; ils sont distribu´es al´eatoirement dans le volume. Au maximum, cinq sites d’auto-inflammation sont visualis´es simultan´ement et la

struc-FIGURE2.7 – Visualisation directe des diff´erents sites d’auto-inflammation, Lavy et al. [68]

ture de front de flamme n’apparaˆıt pas sur la visualisation. Guibert et al. [49, 111] sugg`erent l’id´ee que la combustion se d´eveloppe par auto-inflammation s´equentielle et en masse de poches de gaz r´eactifs. Hultqvist et al. [53] utilisent la technique PLIF (Planar Laser Induced Fluorescence) combin´ee `a de l’imagerie instantan´ee par chimiluminescence sur un moteur monocylindre quatre temps. La concentra-tion du radical OH est alors accessible, ce qui permet aux auteurs de visualiser diff´erents sites d’auto-inflammation se dilatant en augmentant la temp´erature des gaz frais par compression, ce qui a pour effet d’acc´el´erer l’auto-inflammation de ces poches. Cette observation est consistante avec le m´ecanisme pro-pos´e dans [49, 111]. En outre, `a l’instant o`u une poche s’auto-inflamme, les auteurs estiment la vitesse de propagation du front `a 82 m/s ; elle est donc tr`es largement sup´erieure `a la vitesse de d´eflagration me-sur´ee dans un moteur `a allumage command´e. Les auteurs apportent ainsi une preuve exp´erimentale que dans la combustion HCCI, la consommation des gaz frais ne peut pas ˆetre expliqu´ee par la propagation d´eflagrative d’un front de flamme de pr´em´elange. Ils observent ´egalement que la vitesse de progression d’une poche auto-inflamm´ee est d’environ 15 m/s, ce qui peut ˆetre la signature d’une propagation pilot´ee par diffusion. Hultqvist et al. concluent que des r´egimes propagatifs de natures diff´erentes pourraient

40 Physique de l’auto-allumage contribuer simultan´ement `a la consommation de la charge homog`ene dans un moteur HCCI.

Pour aller plus loin dans l’analyse de la combustion dans un moteur CAI/HCCI, les dif-f´erents ph´enom`enes impliqu´es lors de la combustion par auto-inflammation en charge homog`ene doivent ˆetre dissoci´es pour faciliter leur compr´ehension et discerner leurs influences respectives. Les machines `a compression rapide (MCR) apparaissent comme des outils d’investigation particuli`erement adapt´es. Dans la section suivante, on exposera dans ses grandes lignes le principe des MCR et on pr´esentera plus particuli`erement celle conc¸ue `a l’Universit´e Pierre et Marie Curie (UPMC). En effet, elle sera l’objet, dans cette th`ese, de simulations num´eriques directes qui seront pr´esent´ees dans le chapitre 5.

2.3.2.2 Les machines `a compression rapide De l’utilit´e des MCR

Les machines `a compression rapide sont conc¸ues pour porter un m´elange `a une temp´erature et une pression permettant son auto-inflammation dans une chambre de combustion. Le m´elange est com-prim´e par un piston qui est arrˆet´e rapidement en fin de course et bloqu´e dans cette position pour ´eviter les ph´enom`enes de rebond. Ces machines sont g´en´eralement utilis´ees pour mesurer le d´elai d’auto-inflammation d’un m´elange. Le temps de compression doit donc ˆetre suffisamment court pour que les processus chimiques n’aient pas le temps de s’initier avant le point mort haut. En les associant `a des techniques de diagnostic permettant l’identification d’esp`eces chimiques, les MCR peuvent ´egalement contribuer `a l’obtention de donn´ees n´ecessaires `a l’´elaboration et `a la validation de sch´emas cin´etiques. Dans ce cas, afin de garantir la reproductibilit´e des mesures d’une MCR `a l’autre, on doit ˆetre sˆur que la contribution des ph´enom`enes de transport est n´egligeable devant la chimie. En d’autres termes, pour ces applications, il est n´ecessaire qu’une partie du volume fluide ne soit pas affect´ee par les pertes ther-miques aux parois. Cette zone de l’´ecoulement doit donc se comporter comme un r´eacteur homog`ene adiabatique et est appel´eecoeur adiabatique.

Dans [86], Minetti et al. ´etudient le comportement d’un m´elangen-heptane/air suite `a une compres-sion rapide. Les auteurs montrent notamment qu’en fonction des conditions thermochimiques, l’auto-inflammation peut avoir lieu en deux ´etapes (flamme froide et flamme principale) ou en une ´etape (flamme principale) si la temp´erature du m´elange au point mort haut est sup´erieure `a 800K. Ils montrent ´egalement que, de mani`ere contre-intuitive, les d´elais d’auto-inflammation augmentent entre 700 et 860K, quelle que soit la pression entre 3 et 40 Bar. Les auteurs peuvent ainsi valider un m´ecanisme cin´etique qui pr´edit correctement ces d´elais. Cependant, ils observent que l’´evolutions dun-heptane est mal repr´esent´ee avant l’auto-inflammation. Une autre ´etude sur MCR a ´egalement permis `a Tanaka et

al.[115] d’´etendre `a toutes les temp´eratures un m´ecanisme cin´etique d´edi´e aux carburants de r´ef´erence propos´e par Hu et Keck [52] qui n’incluait que la description pr´ecise des r´eactions `a basses temp´eratures. He et al. [51] proposent une corr´elation permettant de relier le d´elai d’auto-inflammation de l’iso-octane `a la richesse, `a la pression, `a la temp´erature et `a la proportion molaire du dioxyg`ene, grˆace `a des mesures effectu´ees sur MCR.

La MCR de l’Institut Jean Le Rond d’Alembert de l’UPMC

Les MCR peuvent ´egalement ˆetre vues comme des configurations permettant de simuler une seule compression d’un moteur `a combustion interne. Elles peuvent ainsi ˆetre utilis´ees pour ´etudier les

m´ecanis-Physique de l’auto-allumage 41

mes `a l’oeuvre dans l’auto-inflammation en r´egime HCCI dans des conditions se prˆetant plus facile-ment aux techniques de diagnostic. Les MCR s’av`erent ˆetre des outils particuli`erefacile-ment adapt´es `a l’´etude de sensibilit´e de la cin´etique chimique aux diff´erents param`etres influents dans ce mode de combus-tion. En effet, la maˆıtrise des conditions thermodynamiques est bien plus ais´ee que dans un moteur r´eel grˆace `a des choix de conception qui ne sont pas contraints par des limites d’encombrement. Dans ce cas, plutˆot que d’´eviter les ph´enom`enes de transport dans la chambre de combustion, on peut proposer des moyens de contrˆoler la turbulence afin d’´etudier son impact sur l’initiation et le d´eveloppement de l’auto-inflammation en mode CAI/HCCI. C’est la strat´egie adopt´ee par Guibert et al. [47, 48].

Une grille plac´ee `a l’entr´ee de la chambre de combustion permet de contrˆoler les propri´et´es statis-tiques de la turbulence inject´ee et d’´etudier les m´ecanismes de couplage entre l’a´erodynamique et la thermochimie. Une coupe longitudinale de cette MCR est pr´esent´ee sur la figure 2.8. Elle est extraite du manuscrit de th`ese de Keromnes [61].

FIGURE2.8 – Coupe longitudinale de la MCR du l’UPMC, rapport de th`ese de Keromnes [61]

Sans entrer dans les d´etails, cette MCR est principalement compos´ee d’une chambre de compression dans laquelle se d´eplace un piston qui est mis en mouvement par un v´erin hydraulique et qui comprime le m´elange, et d’une chambre de combustion. De nombreuses pr´ecautions dans la conception ont ´et´e prises de mani`ere `a assurer la reproductibilit´e de cette machine pour pouvoir mener des ´etudes param´etriques (c.f. [61]). Trois grilles de 5 mm d’´epaisseur sont disponibles et permettent d’´etudier la sensibilit´e du milieu r´eactionnel aux param`etres turbulents. La grille 1 comporte 69 trous de 3.5 mm de diam`etre, la grille 2, 25 trous de 9.5 mm et la 3, 6 trous de 12.5 mm.

Des mesures temporelles de pression sont disponibles. Cependant, l’´etude de la combustion CAI/-HCCI et des d´etails fins des interactions turbulence/thermochimie ne peut pas ˆetre men´ee uniquement par l’interm´ediaire d’un simple signal de pression moyenn´ee dans toute la chambre de combustion. Un acc`es optique `a la chambre de combustion ´equipe donc la MCR de l’Universit´e Pierre et Marie Curie et

42 Physique de l’auto-allumage permet un champ d’observation de 40×40 mm2. Deux techniques de diagnostic optique peuvent ainsi ˆetre mise en oeuvre, la PIV (Particle image velocimetry) permettant l’´etude de l’a´erodynamique interne, et la chimiluminescence permettant une visualisation directe des zones de r´eaction.