• Aucun résultat trouvé

Les études dites de « docking » mettent en jeu une optimisation de géométrie via des calculs théoriques de l’énergie du système protéine + complexe suivant une approche de mécanique moléculaire : différentes positions du complexe sont échantillonnées permettant ainsi de converger vers la position de plus faible énergie du complexe dans la protéine. Pour cela nous avons fixé l’enveloppe protéique et nous avons donné des degrés de liberté aux acides aminés situés à moins de 5 Å du cobalt. Une cobaloxime avec aucun ligand axial a d’abord été positionnée dans l’enveloppe protéique avec une contrainte de distance (distance d’équilibre initiale fixée à 1.9 Å) entre le cobalt et l’azote de l’histidine (pour la myoglobine des calculs d’optimisations sont faits en parallèle avec une contrainte sur l’histidine 64 et sur l’histidine 93). Enfin, après cette première phase d’optimisation, une molécule d’eau a été ajoutée comme deuxième ligand axial du cobalt. Pour finir un calcul de type QM/MM traitant en mécanique quantique la cobaloxime, l’histidine et l’eau ont permis d’affiner la modélisation. Le tableau 7

regroupe pour chaque hybride les distances clé comme par exemple la distance entre le cobalt et l’azote de l’histidine proximale.

Hybrides Distances Co-N(Hisp) Co-O(H2O) Co-Neq(ligand) (min/max) HO1-[Co(dmgBF2)2(H2O)] 1,95 2,23 1,89/1,9 HO1-[Co{(DO)(DOH)pn}H2O] 1,86 2,44 1,92/1,96 HO1-[Co(dmgH)2(H2O)] 1,98 2,22 1,93/2 Mb-[Co(dmgBF2)2(H2O)] 1,97 2,19 1,87/1,9 Mb-[Co{(DO)(DOH)pn}H2O] 1,87 2,46 1,92/1,94 Mb-[Co(dmgH)2(H2O)] 1,93 2,23 1,93/1,95

Tableau 7. Distances et énergie des différents hybrides. Hisp: histidine proximale (His25 pour HO1 et His93 pour Mb), N(ligand) : les 4 azotes du plan diimine dioxime (pour [Co{(DO)(DOH)pn}Cl2]) et cobaloxime (pour [Co(dmgH)2(H2O)2] et [Co(dmgBF2)2(H2O)2]), H2O : deuxième ligand axial du cobalt avec l’azote de l’histidine.

Pour la myoglobine ces calculs nous ont permis de confirmer que la position la plus stable des trois complexes dans la protéine correspond à la coordination de l’azote de l’histidine 93 en axial du cobalt et dans aucun des cas à l’histidine 64. De plus pour les hybrides Mb-[Co{(DO)(DOH)pn}(H2O)] et Mb-[Co(dmgH)2(H2O)] on observe la formation d’une

liaison hydrogène entre un atome d’hydrogène de la molécule d’eau et un atome d’azote de l’histidine 64 (histidine distale). Dans le cas de l’hème oxygénase 1 de rat, les complexes sont bien coordinés à l’histidine 25. Les calculs effectués n’ont pas mis en évidence l’existence de deux positions d’énergie comparable comme cela a été observé en RPE dans le cas de l’hybride HO1-[Co(dmgBF2)2(H2O)2], ce qui peut indiquer que les formes HO1 /1 et HO1 /2

correspondent à des repliements de la protéine significativement différents.

Les trois hybrides basés sur la myoglobine ont des structures se superposant quasiment parfaitement à l’exception de légères fluctuations au niveau de l’histidine 64.

Figure 134. Structure des hybrides Mb-[Co(dmgBF2)2(H2O)2] en bleu, Mb-[Co(dmgH)2(H2O)2] en rose et Mb-[Co{(DO)(DOH)pn}Cl2] en vert.

On note pour les hybrides basés sur l’hème oxygénase une plus grande fluctuation au niveau de la structure des hybrides. Ainsi, en comparant les trois hybrides basés sur l’hème oxygénase comme protéine hôte on peut constater qu’une partie de la poche hydrophobe se referme autour du complexe particulièrement dans le cas de l’hybride HO1-[Co{(DO)(DOH)pn}Cl2] et

seulement légèrement dans le cas de l’hybride HO1-[Co(dmgH)2(H2O)2]. Nous avons pu

identifier que cette modification provient d’une orientation différente de la lysine 18 qui se rapproche de l’hélice distale. Ainsi la distance entre la sérine 142 de l’hélice distale avec la lysine 18 de l’hélice proximale passe de 4.7 Å dans l’hybride HO1-[Co{(DO)(DOH)pn}Cl2] à

Figure 135. Structure des hybrides HO1-[Co(dmgBF2)2(H2O)2] en bleu, HO1-[Co(dmgH)2(H2O)2] en rose et HO1-[Co{(DO)(DOH)pn}Cl2] en vert. La molécule d’eau coordinée au cobalt n’a pas été représentée.

Il est donc possible que les deux formes observées en RPE soient dues à une certaine flexibilité de la poche hydrophobe. Ainsi, lorsqu’elle est plutôt ouverte le complexe est en contact avec le milieu extérieur entrainant l’observation de l’espèce HO1 /1 en RPE alors que, lorsque la poche est plutôt fermée, on obtient l’espèce HO1 /2 caractérisée par un milieu plutôt hydrophobe autour du complexe semblable à celui apporté par la myoglobine. D’après la structure il y a globalement plus de dérivés hydrophiles autour des complexes de cobalt dans la poche de l’hème oxygénase que dans celle de la myoglobine.

Nous obtenons également par cette méthode des informations sur les différentes distances dans les hybrides. Ainsi, on observe une distance entre le cobalt et l’azote de l’histidine proximale entre 1.86 Å et 1.98 Å, semblable à la distance entre le cobalt et les 4 azotes du plan équatorial appartenant au ligand bis-dioximato ou diimine dioximato qui se situe autour de 1.87 Å et 2 Å pour tous les hybrides. On peut noter que les mêmes distances sont obtenues dans le cas du complexe de cobalt (III) [Co(dmgH)2pyCl] puisqu’on a pu mesurer à partir de données

cristallographique obtenues dans notre équipe que les cinq azotes coordinés se trouvent à une distance comprise entre 1.88 Å et 1.98 Å du cobalt. La valeur de distance comprise Co- O(H2O) entre 2.2 Å et 2.46 Å est en accord avec les résultats EXAFS obtenus pour l’hybride

bleu figure 136) pour lequel la transformée de Fourier du spectre EXAFS est similaire à celle de l’hybride Mb-[Co(dmgBF2)2(H2O)2].

Figure 136. Transformée de Fourier du spectre XAFS de la cobaloxime [Co(dmgBF2)2(H2O)2] seule (noir) , dans la myoglobine (rouge) et de la cobaloxime [Co(dmgH)2(H2O)2] dans la myoglobine (bleu)

On peut donc, sur la base des simulations par mécanique moléculaire, interpréter les spectres EXAFS de la manière suivante : Dans le cas des hybrides le pic majoritaire de la transformée de Fourier du signal EXAFS correspond à la présence des quatre ligands azotés du plan équatorial ainsi que de l’histidine coordinée en équatorial. On a donc bien une augmentation du nombre de ligands les plus proches par rapport au complexe libre. Le second pic vers 2 Å, d’intensité plus faible, correspond à la coordination d’une molécule de solvant (eau ou acétonitrile) dans le cas de la cobaloxime en solution et d’une molécule d’eau dans le cas des hybrides.

L’étude de la structure globale des hybrides confirme cependant que les complexes insérés dans l’hème oxygénase (à droite figure 137) sont plus exposés au milieu extérieur que ceux insérés dans la myoglobine (à gauche figure 137). En effet la cavité de l’hème oxygénase est plus ouverte que celle de la myoglobine comme on peut le voir sur la figure 137 via une représentation de la surface des protéines, permettant de mettre en avant la poche dans laquelle le complexe est inséré. Nous avons choisi de présenter les hybrides avec la cobaloxime [Co(dmgBF2)2(H2O)2] mais cette différence est également valable pour les deux autres types

Figure 137. Représentation graphique obtenue par docking de la surface des protéines (la myoglobine de cachalot à gauche et l’hème oxygénase 1 de Rat à droite) dans laquelle est insérée la cobaloxime [Co(dmgBF2)2(H2O)2].

Le point majeur de cette étude est l’identification de l’histidine coordinée au cobalt pour les hybrides basés sur la myoglobine de cachalot comme enveloppe protéique. Cette étude vient donc appuyer clairement le fait que les complexes de cobalt se positionnent au même endroit que l’hème dans la protéine.

Nous avons présenté dans ce chapitre les résultats ayant apporté des informations sur les hybrides entre la myoglobine ou l’hème oxygénase et des complexes de cobalt. Deux méthodes souvent utilisées pour caractériser des systèmes hybrides protéine-complexe inorganique ont également été testées mais sans donner pour l’instant de résultats concluants.