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La fission se fait `a partir d’une forme d’´equilibre et demande donc de franchir une barri`ere d’´energie. L’amplitude de cette barri`ere est donn´ee par l’´ecart entre l’´energie de la forme d’´equilibre (minimum d’´energie) et celle d’un ´etat de transition (maximum d’´ener- gie). L’´etat de transition devrait donc ˆetre solution des ´equations d’Euler-Lagrange (III.5). Nous ayons essay´e analytiquement et num´eriquement de trouver une solution diff´erente de la forme d’´equilibre rendant l’´energie extr`emale mais nous n’en avons pas trouv´e. L’ab- sence d’autre solution `a nos ´equations de formes ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas d’´etat interm´ediaire, mais que cet ´etat n’est pas d´ecrit par notre mod`ele.

La forme du tube calcul´ee avec des param`etres r´ealistes (voir figure III.13) est fortement pinc´ee pr`es de l’interface. Ceci sugg`ere un m´ecanisme de fission : la rupture se fait en passant par un ´etat de transition compl`etement pinc´e. Ce m´ecanisme suppose de rendre le rayon au pincement de l’ordre de l’´epaisseur de la bicouche. L’´energie d’Helfrich n’est alors plus adapt´ee, des termes de courbure d’ordres sup´erieurs devant ˆetre rajout´es. De mˆeme,

III.3. Fission d’un tube `a deux domaines 63

Figure III.14: Exemple de r´earrangement mol´eculaire n´ecessaire pour la rupture par pincement d’un tube de bicouche. Image extraite de [116]

la rupture n´ecessite forc´ement un r´earrangement des lipides de la bicouche [115, 116] (voir figure III.14), ce qui est hors de notre mod`ele macroscopique. De tels raffinements dans la description du tube n’´etant pas envisageables pour l’instant, nous avons approxim´e l’´etat interm´ediaire par une forme que nous esp´erons proche, pour obtenir un ordre de grandeur de la barri`ere d’´energie.

Le m´ecanisme de fission n’est possible que si l’´energie du tube ne diverge pas quand le rayon du pincement tend vers 0. Cette divergence est li´ee aux effets ´elastiques : la courbure moyenne comporte un terme en 1/r au niveau du pincement, qui diverge quand le rayon r0 au pincement tend vers 0. Nous consid´erons le cas d’un tube bi-phasique uniquement

soumis `a la tension de ligne : ˜κ = 1, ∆˜κG = 0. La figure III.15 montre l’´energie du tube,

la contribution de la tension de ligne ainsi que l’´ecart entre les deux, en fonction du rayon r0, calcul´e en utilisant l’algorithme de Cornelis Storm. Pour r0 → 0, l’´energie tend vers

une valeur finie et la contribution de la tension de ligne devient nulle : l’´energie due `a la courbure devient ´egale `a l’´energie totale. Ceci justifie le choix d’un tel interm´ediaire pour approximer l’´etat de transition, bien que l’´energie de l’´etat de transition soit sˆurement sous-´evalu´ee ainsi.

L’´energie reste finie car, lorsque le rayon tend vers 0, le terme ´elastique devient domi- nant sur tous les autres. Minimiser l’´energie revient alors `a minimiser d’abord la compo- sante ´elastique et donc `a annuler la courbure moyenne : au niveau de l’interface, pour des tubes tr`es pinc´es, les deux rayons de courbure se compensent exactement : r(0) dans la direction perpendiculaire `a l’axe z et −r(0) dans la direction de l’axe de sym´etrie.

La m´ethode consistant `a faire tendre le rayon de l’interface vers 0 est d´elicate : il s’agit d’un point divergent. Cette ´energie peut ˆetre trouv´ee en consid´erant le tube juste apr`es la rupture. Nous avons alors deux tubes s´epar´es mais pas encore r´etract´es. En supposant qu’une force s’exerce sur ces tubes pour les maintenir `a l’´equilibre m´ecanique, nous pouvons calculer leur forme. Cette force joue un rˆole identique `a celui de l’interface de rayon tendant vers 0 : elle assure l’´equilibre m´ecanique tout en s’exer¸cant sur l’axe. Num´eriquement, il est facile de calculer l’´energie d’une des extr´emit´es puis d’en d´eduire l’´energie des deux.

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 Rayon adimensionné de l’interface r0/Rα

0 5 10 15 20 Energie adimensionnée (F/ κ α ) Energie totale F/κ α Contribution τ

Différence entre les deux

Figure III.15: Energies adimensionn´ees d’un tube bi-phasique en fonction du rayon adi- mensionn´e de l’interface r0/Rα. La courbe continue est l’´energie totale du tube F/κα, la

courbe pointill´ee est la contribution de la tension de ligne et la courbure en tirets l’´ecart entre les deux. Les deux domaines sont ´equivalents (δ˜κ = 0 et ∆˜κG= 0) et soumis `a une

tension de ligne ˜τ . La valeur de ˜τ augmente lorsque le rayon r0/Rα diminue. Les formes

de diff´erentes solutions sont repr´esent´ees dans la figure 3b de l’article III.6. Les valeurs num´eriques ont ´et´e calcul´ees par Cornelis Storm.

Le principe de la r´esolution est le mˆeme que celui utilis´e pour le tube connect´e : on part des deux extr´emit´es du tube o`u la forme de la membrane est approxim´ee par des fonctions analytiques ; on ajuste les constantes inconnues de ces fonctions pour que la forme du tube soit continue en un point interm´ediaire. La forme obtenue est pr´esent´ee sur la figure III.16. L’´energie de flambage associ´ee `a une des extr´emit´es est 8, 12κ. Notons que l’´energie du tube rompu, mˆeme `a l’´equilibre, doit prendre en compte en plus la contribution de Gauss due au changement de topologie : −4πκG.

Nous pouvons donc ´evaluer la barri`ere d’´energie pour n’importe quelle valeur des pa- ram`etres physiques. Ainsi, pour la forme ’r´ealiste’, nous trouvons une barri`ere de 7, 8kBT

soit 3, 2 10−20J . Notons qu’il s’agit d’un processus associ´e `a un effet dynamique. La stabi- lit´e thermodynamique est obtenue en comparant plutˆot l’´etat connect´e `a l’´etat rompu. En supposant que la force puisse s’exercer pratiquement en tout point (ce qui est le cas pour une membrane ancr´ee par des moteurs mol´eculaires), ceci conduit `a une valeur limite du module de Gauss pour la stabilit´e du tube homog`ene : κG= −1, 29κ.

III.3. Fission d’un tube `a deux domaines 65 (a) 0-10 -8 -6 z -4 -2 0 0,5 1 1,5 r (b)

Figure III.16: Forme d’une extr´emit´e de tube. (a) Rayon en fonction de la position sur l’axe de sym´etrie (z). La forme du tube a ´et´e calcul´ee avec R = 1 `a l’infini et κ = 1. Les autres param`etres sont d´eduits par les conditions d’´equilibre III.3. (b) Repr´esentation en volume du profil calcul´e.