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2.3.2- Etat de l’art sur l’analyse thermomécanique dynamique de systèmes

Chapitre IV. Compatibilisation du mélange ABS/PC par greffage d’anhydride maléique

IV. 2.3.2- Etat de l’art sur l’analyse thermomécanique dynamique de systèmes

intermédiaire et son origine.

Figure 122. Position et intensité du pic intermédiaires pour les différents échantillons CM

IV.2.3.2- Etat de l’art sur l’analyse thermomécanique dynamique de systèmes multicouches

Gregory et al. [237] sont les premiers à observer la présence d’un troisième pic sur les courbes tanδ obtenues par DMTA sur des mélanges PC/SAN. Les échantillons PC/SAN étudiés sont des films multicouches composés de 49 et 193 couches alternées de PC et de SAN, obtenus à l’aide du procédé multiplicateur de couches développé dans l’équipe du professeur Baer, et sont de compositions variables en PC et SAN. Les auteurs observent un troisième pic sur les courbes DMTA, situé à une température intermédiaire (128°C) à celle des pics du SAN (112°C) et du PC (145°C). Il est à préciser qu’aucune discontinuité n’apparait à cette température sur les thermogrammes obtenus pas DSC. Une série d’expériences a été menée afin de comprendre l’origine de ce pic.

Les auteurs ont montré que la position du pic intermédiaire dans ces films ne dépendait ni de la composition du film, ni du nombre de couches et de leurs épaisseurs. Par contre, l’intensité de ce pic diminue lorsque le nombre de couches passe de 49 à 193. Un film composé de 3 couches PC/SAN/PC est fabriqué par thermocompression et révèle également un pic intermédiaire (dont l’intensité n’est pas précisée).

L’effet de l’orientation des chaines due au procédé a été étudié en prélevant des échantillons dans différentes directions par rapport à la direction d’extrusion. Aucun effet n’est observé sur la position et l’intensité des pics. De même, différents traitements thermiques ont été appliqués aux films, pour éventuellement mettre en évidence un lien entre le pic intermédiaire et la présence dans le film de contraintes résiduelles. Là encore, quel que soit le traitement thermique imposé (recuits à différentes températures : 112, 130, 137°C pendant 24h ; cycles thermiques de chauffe-refroidissement), aucun effet sur les pics n’est observé.

Enfin, une expérience intéressante a consisté à casser la continuité des couches par agitation mécanique au-dessus de la Tg des 2 phases. Il apparait que le pic intermédiaire disparait sur la courbe de tanδ, suggérant que ce pic serait lié à une structure composite multicouche continue. L’expérience est reproduite sur deux autres systèmes : PC/PET et PC/ABS, avec des résultats similaires : l’absence de continuité des couches dans la structure multicouche s’accompagne de l’absence de ce 3ème pic intermédiaire.

En se fondant sur une analyse mécanique proposée par Nielsen [238], les auteurs défendent l’idée que l’origine du pic est liée purement à la dépendance en température différente des paramètres viscoélastique des 2 composants du système multicouche. Ainsi, le pic intermédiaire traduirait l’effet additif des 2 pics de relaxation (associés à Tg) des 2 polymères amorphes, et ne serait pas liée à une réelle transition physique du système. L’origine purement « mécanique » liée à la structure multicouche est particulièrement bien expliquée dans l’article, issu de la même équipe, de Nazarenko et al. [239]. La dépendance en température d’un polymère amorphe autour de Tg est donnée sur la Figure 123 (a) et d’une structure multicouche sur la Figure 123 (b). Les auteurs rappellent que tan δ = G’’/G’ =

ω.ηc’/Ec’. Entre A et B, la courbe traduit le comportement du premier polymère amorphe (l’ABS dans notre cas). Le comportement entre B et B’ le changement de ηc’ et Ec’ est surtout imposé par η1’ et E1’ qui changent beaucoup en fonction de la température alors que η2’ et E2’ n’évoluent pas beaucoup. E1’ décroit mais ne peut décroitre en dessous du module du

deuxième polymère amorphe (le PC dans notre cas), qui est à l’état vitreux. En d’autres termes, l’effet du PC vitreux se fait ressentir : tan δ passe par un maximum et alors que η1’ continue à décroitre, E’c ne décroit pas et est imposée par E’2 (région B’C’). Enfin, la région CD correspond à la température vitreuse du deuxième polymère. Cette analyse montre que ce genre de pic devrait apparaitre sur toutes les structures multicouches ou co-continues, où la chute de E’ associé au premier polymère est suffisamment importante lors du passage par la transition vitreuse.

Figure 123. Représentation de l’évolution en fonction de la température de tanδ pour un polymère amorphe (a) et pour un système multicouche constitué de deux polymères amorphes (b) (Nazarenko et al. [239])

Une étude poussée de McLaughlin [240] sur des échantillons de PC/SAN obtenus soit par compression à chaud, soit par injection, tente de relier ce pic à la morphologie de mélanges obtenue. Les échantillons obtenus par compression à chaud présentent une morphologie attendue, isotrope et homogène dans l’épaisseur de l’échantillon : co-continue quand les fractions volumiques sont proches (PC/SAN : 50/50 et 60/40), présence d’une phase dispersée sous formes nodulaires dans une matrice quand une fraction devient minoritaire devant l’autre. La morphologie des éprouvettes injectées devient plus complexe, présentant un gradient dans l’épaisseur, du fait de l’effet conjugué d’un fort cisaillement avec un gradient de refroidissement. On peut néanmoins conclure qu’il existe une structure co-continue constituée de couches alternées (cf. Figure 124), pour les compositions comprises entre 50/50 et 80/20.

Figure 124. Morphologies de mélanges obtenues dans les éprouvettes injectées (composition PC/SAN 60-40) dans la direction transverse (X, Y) et dans la direction d’injection (Z, X) (d’après McLaughlin [240])

Les courbes tanδ associées à ces différentes structures montrent qu’un 3ème pic intermédiaire n’est présent que lorsque la morphologie est co-continue et proche d’une structure de couches alternées, comme le montrent les courbes de la

Figure 125. Ce 3ème pic apparait donc, dans les morphologies complexes, comme la signature d’une structure

Figure 125. Évolution de tanδ en fonction de la température pour des mélanges PC/SAN de différentes composition : échantillons obtenus par compression (___) et par injection (- - - -) (Mclaughlin [240])

Une étude de Shen et al.[241] sur l’origine de ce pic intermédiaire tente d’étudier l’effet de la compatibilité du couple, qui demeurait jusqu’à présent non étudiée (d’après ces auteurs, aucune compatibilité n’existe entre le PC et le SAN étudiés précédemment). L’étude s’intéresse à des films multicouches de iPP et POE (copolymère d’éthylène et d’octène-1), composés de 2, 8, 64 couches. La

Figure 126, montre clairement que l’intensité du pic est plus forte quand le nombre de couches augmente. La courbe en pointillé, issue du modèle en parallèle de Takayanagi, ne montre aucun pic intermédiaire, ce qui, d’après les auteurs, suffit à montrer que le pic intermédiaire n’est pas dû à l’effet additif des relaxations des deux composants.

Figure 126. Évolution du pic intermédiaire avec le nombre de couches (Shen et al. [241])

Le pic ne peut être attribué non plus à une interphase (pourtant existante dans le système iPP/POE comme montré précédemment par les auteurs), car l’apparition du 3ème pic affecterait dès lors les 2 autres pics, ce qui n’est pas le cas (seul le pic du iPP est affecté). D’après les auteurs, le 3ème pic viendrait d’un état de contrainte à l’interface, venant du fait que les deux matériaux réagissent différemment aux sollicitations de traction ainsi qu’aux variations dimensionnelles liées à la température. Le maximum de cette contrainte interfaciale telle que calculée par les auteurs, se trouve être localisé exactement à la température du pic. Cette contrainte interfaciale viendrait modifier la mobilité des chaines des polymères proches de l’interface et donc modifier leur transition vitreuse.

Il ressort de cette étude bibliographique que l’origine de ce troisième pic, observé pour la première fois en 1987 par Gregory et al. [237] sur des systèmes multicouches, fait encore l’objet de discussion : simple « effet de structure » pour les uns, lié à l’interface pour les autres. Dans tous les cas, l’effet de l’ajout de compatibilisant sur ce 3ème pic dans les joncs multicouches apparait comme une étude intéressante permettant d’apporter éventuellement un nouvel éclairage à ce débat.