• Aucun résultat trouvé

2.3 L’univers de Milne

2.3.4 Espace-temps plat et univers vide

Dans l’esprit de la communaut´e, l’Univers de Milne fait parfois r´ef´erence `a un univers vide sans gravit´e, et est de ce fait plus consid´er´e comme une curiosit´e historique que comme une ´eventuelle solution cosmologique. Il est vrai que, tel qu’il ´etait pr´esent´e par Milne, il n’avait gu`ere d’attrait compar´e aux diverses possibilit´es des univers Friedmann-Robertson-Walker, mais nous venons de voir qu’il fait en r´ealit´e partie de ces mod`eles et est `a ce titre tout aussi digne d’int´erˆet. Reste la question de son contenu. Par construction cet univers est vide (au moins `a grande distance). Les ´equations d’Einstein nous le confirment. De mani`ere na¨ıve, on pourrait dire que si l’espace-temps est plat, c’est qu’il n’est pas d´eform´e par de l’´energie et que donc il n’y a pas de mati`ere et qu’ainsi l’univers de Dirac-Milne est vide. Si l’on explicite les ´equations d’Einstein, cela est bien sˆur confirm´e. En effet, la composante temps-temps et les composantes espace-espace du tenseur d’Einstein sont :

G00 = 3˙a 2+ k a2 G i i = − k + 2¨aa + ˙a2 a2 , (2.36)

ce qui conduit `a l’´equivalence

Tµν = 0 ⇐⇒ a(t) = t et k = −1. (2.37)

Or, dans la th´eorie cosmologique habituelle, Tµν n’est pas nul, il prend la forme du tenseur

d’un fluide parfait muni d’une ´equation d’´etat p = ωρ. De plus on constate ais´ement que nous existons, qu’il y a des plan`etes, des ´etoiles et des galaxies et il semblerait que l’on puisse diffi- cilement pr´etendre que l’Univers est vide. Il est ainsi n´ecessaire de pr´eciser ce que l’on entend par univers vide.

La pr´esence de masses n´egatives agissant comme un terme gravitationnel r´epulsif dans les mˆemes quantit´es que des masses positives agissant comme un terme attractif fait qu’`a grande ´echelle cet univers apparaˆıt comme vide. Le mod`ele standard consid`ere habituellement trois prin- cipaux constituants dans l’univers : mati`ere, radiation et ´Energie Noire. Pour pouvoir consid´erer un univers vide et donc avoir une ´evolution lin´eaire du facteur d’´echelle, nous sommes amen´es `a faire certaines hypoth`eses que je vais d´etailler maintenant pour chaque composante.

Mati`ere non relativiste

Il s’agit l`a de la composante habituellement d´enomm´ee mati`ere, celle qui est consid´er´ee comme de la poussi`ere sans pression, caract´eris´ee par son param`etre d’´etat ω = 0. Ainsi, le tenseur ´energie-impulsion attribu´e `a cette composante s’´ecrit TµνMat = Diag(ρ, 0, 0, 0). Cette composante se divise dans la th´eorie standard en deux parties : la mati`ere baryonique, et la mati`ere non baryonique, quelle que soit sa nature exacte, dont nous avons parl´e au chapitre 1.

Dans l’univers de Dirac-Milne, les contraintes pos´ees par la fabrication de l’h´elium-4 lors de la nucl´eosynth`ese primordiale indiquent qu’il n’est pas n´ecessaire d’introduire une composante de mati`ere noire non baryonique (voir chapitre 4). La seule composante de mati`ere non relativiste est donc la mati`ere baryonique (et anti-baryonique). Nous allons voir dans la suite que l’on impose `a ces deux composantes d’ˆetre s´epar´ees dans des domaines, ce qui fait qu’`a des ´echelles largement plus grandes que ces domaines, la masse totale peut ˆetre prise comme nulle. Ainsi, globalement, `a grande ´echelle, cet univers apparaˆıt comme gravitationnellement vide. De ce fait, son expansion n’est pas d´ec´el´er´ee par un terme de mati`ere.

´

Energie Noire

Une des motivations principales de ce travail est justement de se d´epartir de l’hypoth`ese d’une ´Energie Noire. Ainsi il n’y a pas lieu de consid´erer de terme faisant intervenir une pression n´egative comme une ´energie du vide ou d’autres mod`eles plus sophistiqu´es.

Rayonnement

La question de la contribution de la composante radiative est plus probl´ematique. Dans le mod`ele standard, pour des temp´eratures suffisamment ´elev´ees, la contribution de la composante radiative qui ´evolue en T4 domine la composante de mati`ere qui ´evolue en T3. La transition

entre les deux r´egimes se fait `a ce que l’on d´efinit comme l’´egalit´e mati`ere-rayonnement. Dans ce cadre de l’univers de Dirac-Milne, si la contribution de la mati`ere est nulle, alors la contribution du rayonnement a priori non nulle, devrait dominer, et l’on devrait se trouver dans un r´egime d’´evolution en a(t) = t1/2.

Afin de garder une ´evolution du facteur d’´echelle en a(t) ∝ t, il est n´ecessaire de trouver un m´ecanisme qui annule la contribution du rayonnement. En effet, l’int´erˆet du mod`ele de Dirac- Milne r´eside pr´ecis´ement dans cette ´evolution lin´eaire du facteur d’expansion.

Le fait de consid´erer des particules d’antimati`ere de masse n´egative peut fournir un d´ebut de justification sur ce point important. Le Mod`ele Standard attribue aux photons une densit´e d’´energie ´egale `a celle d’une distribution de Bose-Einstein `a une temp´erature T , avec un potentiel chimique nul. Le formalisme d´evelopp´e par Hoyle & Narlikar [Hoyle & Narlikar 1995, Narlikar 2003] `a partir de l’action de Fokker permet d’exprimer la th´eorie de la Relativit´e G´en´erale non plus en terme de champs, mais en terme de porteurs de masse. Cette th´eorie est le pendant gravitationnel de la th´eorie de Wheeler & Feynman [Wheeler & Feynman 1945, Wheeler & Feynman 1949] qui d´ecrit l’´electromagn´etisme sans champ mais uniquement en terme de porteurs de charge.

Dans ce formalisme, l’´energie que l’on attribue au rayonnement pourrait ˆetre nulle si la somme des ´energies des porteurs est nulle, ce qui est le cas dans l’univers de Dirac-Milne qui consid`ere autant de masses positives que de masses n´egatives. Le fait que la th´eorie de la gravitation en terme d’action `a distance2 d’Hoyle & Narlikar soit ´equivalente `a la Relativit´e G´en´erale `a ´et´e remarqu´e par Hawking [Hawking 1965], `a la condition d’inclure en quantit´e ´egale des masses n´egatives. Dans cette optique, on peut consid´erer que la contribution du rayonnement globale est nulle. Pour autant, la densit´e d’´energie des photons au sein d’un mˆeme domaine n’est pas nulle et garde sa valeur classique en T4.

L`a encore, la justification pr´ecise du fait que la contribution globale du rayonnement ne joue pas sur la dynamique de l’expansion reste `a faire. N´eanmoins, avoir a(t) ∝ t est une condi- tion n´ecessaire pour que l’univers de Dirac-Milne apporte quelque chose de fondamentalement diff´erent par rapport au mod`ele standard. En effet, mˆeme si l’on consid`ere que pendant la phase dite domin´ee par la mati`ere dans le mod`ele standard, l’univers de Dirac-Milne a bien une ´evolution lin´eaire, mais qu’il retrouve l’´evolution a(t) ∝ t1/2pendant la phase dite radiative, cela r´eintroduit les probl`emes connus du mod`ele standard, `a savoir le probl`eme de l’horizon. Dans la suite de ce travail, on supposera donc que l’´evolution du facteur d’expansion reste lin´eaire en

2.4 Un univers sym´etrique 65

fonction du temps, et ce quelle que soit l’´epoque consid´er´ee.