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Les habitats des espèces relativement rares ou peu communes sont les plus difficiles à caractériser en raison du fait que l'échantillonnage n'est souvent pas suffisant pour permettre d'établir des relations précises (Best et al. 1979). Ces especes peuvent nécessiter des inventaires beaiicnup p l ~ s é!ahcres que ce qui pz& &tie accûmpli

dans

le cadre d'une etube plus extensive comme la nôtre.

Néanmoins, nos travaux ont permis de déceler la présence de deux espèces dont le nom paraît sur la liste des espèces susceptibles d'être désignées menacées ou vulnérables au Québec, soit le troglodyte à bec court et la musaraigne pygmée (Sorex hoyr) (Beaulieu 1992).

Dans le cas du troglodyte à bec court, six territoires défendus par des mâles chanteurs ont été délimités à l'intérieur des parcelles inventoriées (île du Moine et baie Lavallière). Ce nombre était insuffisant pour inclure cette espece dans les calculs effectués pour déterminer l'indice de tolérance à des modifications de I'habitat. Cependant, dans le contexte ou des projets d'aménagements fauniques étaient prévus sur des sites susceptibles d'abriter cette espece (Maisonneuve et al. 1992)' des recherches ont aussi été effectuées en périphérie des parcelles d'inventaire afin de pouvoir identifier des sites fréquentés par cette espèce et d'en caractériser I'habitat. Au total, près d'une vingtaine de mâles chanteurs ont été localisés, de même qu'un adulte nourrissant un jeune en bordure de la Petite rivière Pot-au-Beurre à la baie Lavallière, confirmant la nidification de l'espèce sur ce site. Tous les sites fréquentés étaient localisés dans des prairies humides présentant un couvert herbacée haut et dense.

Ce type d'habitat est souvent mentionné comme étant privilégié par le troglodyte à bec court

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(Gibbs 1992; Maisonneuve et al. 1992; Fragnier et Robert 1995). Sur la base de ces observations, il est raisonnable d'ajouter cette espèce à la liste de celles que nous avons identifiées comme étant intolérantes à des modifications de leur habitat. La sensibilité de cette espèce aux modifications de son habitat peut d'ailleurs être démontrée à partir d'observations qui se sont déroulées sur la Réserve nationale de faune du lac Saint-François.

Une population importante de troglodytes à bec court fréquentait les prairies humides de ce territoire (Desrochers et Fragnier 1983) qui étaient maintenues par des brûlages effectués régulièrement par les autochtones (Jean et Bouchard 1991). Or après la création de la réserve, ces brûlages ont été interrompus et les prairies humides ont été progressivement envahies par la végétation arbustive (Jean et Bouchard 1991). Le territoire qui était initialement utilisé par le troglodyte à bec court a ainsi été délaissé par cette espèce (Fragnier et Robert 1995).

La rareté relative de la musaraigne pygmée, dont un seul spécimen a été capturé dans un marécage arboré dense de la baie Lavallière, est possiblement attribuable au comportement de cette espèce qui la rend difficile à capturer (Bryan 1991 ; Kirkland et Sheppard 1994). En effet, dans une étude récente réalisée sur une période de 14 mois dans les états américains du Kentucky et du Tennessee (Feldhamer et al. 1993), cette espèce était surtout présente dans les captures effectuées entre le mois de mars et le mois de mai, et elle était totalement absente pendant la période s'étendant du mois de juin au mois de septembre,. période où la majorité des travaux de piégeage de micromammifères sont généralement effectués. Les auteurs attribuent ce phénomène au fait que la musaraigne pygmée concentrerait ses activités sous terre pendant la période estivale. Ainsi, lorsque l'échantillonnage s'effectue sur une période relativement courte et non synchronisée par rapport à la période d'activité hors terre de cette espèce, l'abondance de celle-ci est susceptible d'être sous-évaluée. Malgré cette difficulté avec laquelle elle peut être capturée, la présence de la musaraigne pygmée est mentionnée dans une multitude d'habitats et elle est considérée comme une espèce généraliste (Long 1972; Wrigley et al. 1979; Kirkland 1991 ; Feldhamer et al. 1993). Nous ne considérons donc pas qu'elle fasse partie des espèces intolérantes à des modifications de l'habitat. II est cependant possible, comme le suggèrent Spencer et Pettus (1 966), que cette

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espèce ait besoin d'une mosaïque d'habitats mésiques et xériques pour compléter les étapes de son cycle vital.

64 6. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATlONS

Les résultats de nos travaux ont permis de mieux cerner l'importance des plaines inondables pour I'avifaune et les micromammifères. Les plaines inondables sont susceptibles de servir de réservoirs pour les populations de nombreuses espèces qui peuvent coloniser les habitats adjacents souvent très fragmentés et qui peuvent ne pas présenter les conditions nécessaires pour suffire au maintien de populations viables sans une telle immigration.

Certaines espèces fréquentent préférentiellement un ou deux des types d'habitats étudiés et sont considérées peu tolérantes à des modifications de leur habitat. A la lumière de ces résultats, il apparaît important d'assurer la conservation de superficies de chacun des différents types d'habitats étudiés pour assurer le maintien de la diversité au sein de ces deux groupes d'espèces. De plus, les milieux humides des plaines inondables servent souvent d'habitats de reproduction à d'autres groupes d'espèces (p. ex. amphibiens) qui complètent le reste de leur cycle vital sur les terres hautes adjacentes (Golet et al. 1993;

Dubé 1994). Toute stratégie de conservation de la biodiversité dans les plaines inondables du sud du Québec devrait donc prendre en considération l'ensemble des types d'habitats présents tant dans les plaines d'inondation que sur les terres hautes qui y sont immédiatement adjacentes.

Les lignes qui suivent regroupent les principales recommandations qui peuvent être faites concernant les techniques utilisées pour la présente étude, de même que pour l'élaboration d'une stratégie de conservation des habitats des plaines inondables.

6.1 Méthodes et techniques utilisées

De façon à assurer la couverture du plus grand nombre d'espèces possible, une panoplie de techniques et dispositifs de capture doivent être utilisés et plusieurs périodes d'inventaire correspondant avec les périodes d'activité des espèces visées doivent être couvertes.

Les méthodes pour procéder aux inventaires d'avifaune ont été mises au point depuis un certain temps déjà et ont été éprouvées depuis. Cependant, des variations annuelles dans

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la richesse et I'abondance des espèces d'oiseaux rencontrées dans un milieu peuvent varier annuellement (Anderson et al. 1981). 11 est donc possible que le fait d'avoir couvert l'ensemble de nos parcelles sur une période de quatre années différentes puisse introduire un biais dans nos analyses et notre interprétation. Néanmoins, la comparaison de I'avifaune des cinq types d'habitats entre eux implique, pour chacun de ceux-ci, un regroupement de données provenant de parcelles couvertes au cours d'années différentes. Le "bruitde fond"

occasionné par des variations annuelles d'abondance chez certaines especes est ainsi susceptible d'être sensiblement le même d'un type d'habitat à l'autre. Ces variations annuelles pourraient avoir une plus grande incidence au niveau des comparaisons individuelles effectuées entre paires de sites. Mais ces comparaisons ont aussi révélé les mêmes tendances générales que celles qui ont pu être soulignées en comparant les types d'habitats (voir page 38). Nous croyons donc que les principales tendances observées au niveau de I'abondance et de la diversité de I'avifaune sont assez représentatives des conditions qui prévalent dans les milieux étudiés.

La méthode utilisée pour I'avifaune ne permet pas nécessairement de déceler un nombre suffisant d'individus appartenant à des especes rares pour permettre d'établir les caractéristiques d'habitats recherchées par ces espèces. II est donc recommandé, lorsque les besoins spécifiques d'une espèce rare doivent être identifiés, de procéder à des recherches spécifiques pour cette espèce. Le nombre de troglodytes à bec court décelés dans nos parcelles d'inventaire était insuffisant pour inclure cette espèce parmi celles pour lesquelles nous avons pu établir un indice de tolérance aux modifications d'habitat. Par contre, les recherches effectuées en périphérie des sites étudiés ont permis d'en détecter un nombre additionnel, permettant ainsi de mieux cerner les besoins de l'espèce. Le même genre d'exercice pourrait facilement être effectué pour d'autres espèces peu abondantes.

Entre autres, les recherches systématiques effectuées depuis quelque temps par le MEF (provocation au moyen d'enregistrements) sur les sites identifiés pour des projets d'aménagements fauniques dans le cadre du PCHE sont susceptibles d'apporter des éléments d'information pour plusieurs espèces.

II est reconnu que les populations de micromammiferes peuvent fluctuer beaucoup annuellement (Stickel et Warbach 1960; Buckner 1966; Grant 1976). Le biais associé à ces variations annuelles est donc susceptible d'être beaucoup plus important pour ce groupe d'espèces que pour I'avifaune. La comparaison entre eux des résultats obtenus pour chacune des parcelles aurait donc été un exercice futile. Par contre, le regroupement des données par type d'habitats, impliquant des données récoltées au cours d'années différentes, est encore ici susceptible de réduire ce biais au niveau des comparaisons. ,Nous considérons cependant que le faible nombre de captures effectuées représente un facteur limitant beaucoup plus important au niveau de la fiabilité des ' analyses. Les périodes d'échantillonnage prévues pour la capture de micromammifères au moyen de lignes de piégeage auraient intérêt à être prolongées lorsque les conditions météorologiques font en sorte que de nombreux pièges assommoirs sont déclenchés par la pluie. Cette prolongation permettrait d'obtenir un nombre supérieur de captures, et permettrait possiblement la détection d'espèces additionnelles. Cela permettrait ainsi l'obtention d'indices de diversité et d'équité plus fiables, et permettrait de procéder à des comparaisons adéquates de ces indices.

Pour assurer une bonne couverture au niveau des espèces d'amphibiens, des clôtures de déviation devraient être installées tôt au printemps et la période de capture devrait être échelonnée sur quelques semaines. Les travaux de Dubé (1 994) l'ont démontré clairement.

L'expérience acquise dans le cadre d'un autre projet au lac Mégantic (Maisonneuve et al, en préparation) a aussi permis de conclure que l'installation de clôtures de déviation et leur inspection peuvent facilement être effectuées par une équipe qui assure en même temps la réalisation des inventaires d'oiseaux. Une installation printanière des clôtures de déviation permettrait aussi du même coup d'échantillonner au moment où certaines espèces de micromammifères, telle la musaraigne pygmée, sont probablement plus actives à la surface.

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