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B. ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE

IV. Analyse des procédés de gazéification de la biomasse

3. Epuration et valorisation des gaz

3.1. Techniques d’épuration des gaz

Le gaz en sortie de ces réacteurs est « pollué ». Il contient des goudrons, des particules, etc. Il faut donc l’épurer.

L’épuration des gaz issus de la gazéification de biomasses est le principal enjeu technologique pour les procédés. Les goudrons, produits de pyrolyse, sont les composés qui posent le plus de difficultés.

Nous donnons dans le tableau 9 un bilan sommaire des techniques disponibles pour épurer les gaz à haute ou à basse température, d’après Bicocchi (1998). Les techniques de conversion du CH4 seront revues plus en détails (paragraphe V.).

Tableau 9. Techniques possibles d’épuration des gaz (Bicocchi, 1998)

Techniques possibles

Composés à traiter Basse température (< 200°C) Haute température (> 400°C)

Particules

Filtre à manches, lavage humide, électrofiltre (ESP en anglais)

Cyclone, filtre céramique ou métallique

Goudrons

Lavage humide à l’eau ou avec des solvants, ESP humide, adsorption, filtre à manche

Craquage thermique et/ou

catalytique, à la vapeur avec des catalyseur de type Ni/Olivine par ex.

Composés alcalins Séparés en tant que particules solides ou par dissolution

Séparés en tant que particules solides

< 600°C

NH3 Lavage humide Transformation catalytique en N2

H2S, COS, R-SH Lavage, adsorption sur ZnO En développement

HCl Lavage En développement

L’épuration haute température entraîne un meilleur rendement énergétique si les gaz épurés alimentent des piles à combustibles (SOFC ou MCFC), une turbine à gaz ou un lit catalytique (synthèse Fischer-Tropsch, production d’hydrogène ou de gaz naturel de substitution), car ces procédés nécessitent une température d’entrée des gaz élevée. Cependant, l’épuration haute température est beaucoup moins mature que la basse température et présente de nombreuses incertitudes techniques.

3.2. Spécifications requises pour les différentes filières de valorisation des gaz

Les systèmes d’épuration doivent être dimensionnés en fonction de la valorisation des gaz envisagée. Le tableau 10 résume les spécifications des différentes filières de valorisation des gaz.

Tableau 10. Spécifications requises pour les principales voies de valorisation des gaz (Van de Steene, 2001)

Applications Goudrons (mg/Nm3) Particules (mg/Nm3) Composés alcalins (mg/Nm3) Ammoniac (mg/Nm3) Composés chlorés (mg/Nm3) Composés soufrés (mg/Nm3) Moteur gaz < 50 < 50 < 1 < 50 < 10 < 100 Turbine gaz < 5 < 30 ~ ppmv Synthèse Ficher-Tropsch, production d’hydrogène ou de gaz

naturel de substitution

~ ppmv

Les spécifications pour les filières de conversion catalytique des gaz de synthèse (synthèse Fischer-Tropsch, production d’hydrogène ou de gaz naturel de substitution) sont à notre connaissance encore mal définies.

3.3. Etude technico-économique de la valorisation des gaz pour la production d’électricité

La valorisation des gaz pour des applications électriques est présentée sur la figure 16, avec les rendements électriques (théoriques) escomptables (Babu, 2004).

Figure 16. Rendements électriques escomptables pour différents systèmes de production d’électricité

La figure 16 montre que l’utilisation des Piles à Combustible (PACo) serait l’une des clefs pour la production d’électricité à des puissances de l’ordre de 1-10 MWe et à haut rendement (les moteurs sont le plus souvent limités à

des puissances de l’ordre de 3MWe pour un rendement de l’ordre de 35-40%kWhélec/PCIgaz, Gaz de France). Le retour

d’expérience et la maturité de ces piles ne sont pas encore suffisants. Des essais de couplage « gazéification/PACo » (sans reformage) sont en cours à l’échelle pilote, avec des premiers résultats prometteurs (rendement électrique supérieur à 40%, Energy Center of Netherlands).

En ce qui concerne les turbines à gaz, le modèle Typhoon d’Alstom a été modifié pour gaz pauvres et testé sur l’installation de Värnamo (Foster Wheeler). Les turbines (voire les cycles combinés) pourraient atteindre un statut commercial vers 2015. Les microturbines sont en cours de développement. Elles nécessitent des tests de plus longues durées (Biomass Engineering). Les expérimentations effectuées sur les meilleurs produits alimentés au gaz naturel tendent à montrer qu’elles ont du mal à se placer commercialement à cause d’un coût d’investissement élevé et d’un rendement faible par rapport aux moteurs de même gamme de puissance (retour d’expériences Gaz de France).

Les moteurs à gaz ont atteint un début de maturité commerciale (Herdin, 2004) mais toujours avec des problèmes inhérents aux goudrons. Les goudrons se condensent à divers points du moteur : membrane de régulation de débit de gaz, palles du turbo, etc., (Herdin, 2004).

0 10 20 30 40 50 60 0,001 0,01 0,1 1 10 100 1000 Puissance en MWe R en d em en t él ec tr iq ue e n %

Piles à combustible haute température (SOFC/MCFC)

Moteur Stirling Moteur à gaz Microturbine Turbine à gaz Cycle Combiné

Gaz de synthèse « propre »

Reformage

(optionnel) Shift Hydrogène « pur » Vapeur (optionnelle) Vapeur Condensation Liquide PSA Membrane ou Gaz de purge Rétentat Chaleur Chaleur « PCI » « PCI »

Il est difficile de donner un coût du kWh électrique car il dépend fortement : - du contexte (disponibilité et coût des combustibles),

- de la taille de l’installation, - du procédé de gazéification, etc.

Pour autant, certains constructeurs nous ont transmis des coûts d’exploitation. Par exemple, pour l’installation de démonstration de Güssing/Repotec (Autriche, lit fluidisé indirect), le coût d’investissement a été d’environ 10 M€ pour Güssing (pour 2MWe et 4,5MWth). Les coûts d’exploitation sont environ de 2 M€ sur la base de 7000 h de fonctionnement dont :

- 50 % est imputable à l’achat du combustible bois (soit entre 0,7 et 1,6 c€/kWh), - 10 % aux consommables (catalyseur, eau/solvant, etc.),

- 15 % à l’électricité achetée, - 10 % au personnel,

- 15% au coût de maintenance.

Le prix de rachat de la chaleur est de 2c€/kWh et celui de l’électricité en Autriche était en 2004 de 16c€/kWhe contre environ 6 c€/kWhe en France.

En France, le prix de rachat « réglementaire » de l’électricité est beaucoup trop bas. C’est pourquoi aucun projet de gazéification n’est viable mis à part lors de réponses aux appels d’offres de la Programmation Pluriannuelle des Investissements. 6 installations de gazéification ont été retenues lors du PPI de Janvier 2005 mais elles ne sont toujours pas en cours de construction au 10/2007. Le prix de rachat de l’électricité prévu pour le prochain PPI de 2008 est de l’ordre de 15c€/kWhe et devrait donc permettre de lancer la filière. Globalement, pour 1kWhe, on consomme 4kWh PCI bois (rendement électrique de 25%). Il faudra donc rajouter environ 6 à 8c€/kWhe (coût d’1kWh PCI bois compris entre 1,5 et 2c€) au coût du kWhe hors combustible. On voit bien ici l’importance de l’augmentation des rendements électriques et de l’optimisation du coût du combustible.

3.4. Etude technico-économique de la valorisation des gaz pour la production d’hydrogène

La figure 17 décrit sommairement la chaîne d’épuration des gaz de synthèse afin d’obtenir de l’hydrogène « pur ».

Compte tenu qu’aucune installation de gazéification de biomasses n’a été couplée avec une production d’hydrogène pur, il est très difficile d’estimer le coût d’un tel procédé. Les estimations économiques disponibles sont le fruit de modélisations.

La gazéification de biomasses resterait plus coûteuse pour produire de l’hydrogène que la gazéification du charbon ou que le reformage du gaz naturel.

Le coût du combustible « biomasses » (environ 10 €/MWh PCI) représenterait 30% du coût de production de l’hydrogène. Dans le cas du reformage de gaz naturel, le combustible représente plus de 60% du coût de l’hydrogène. Par ailleurs, pour une taxe aux émissions de carbone fossile de 100 €/t, la production d’hydrogène par gazéification de biomasses deviendrait moins coûteuse que la gazéification du charbon ou le reformage du gaz naturel (Larson, 1992).

Une unité de gazéification indirecte ou par lit fluidisé sous pression (oxygène/vapeur) de 400 MWth pourrait produire de l’hydrogène à un coût de l’ordre de 8 $US 2001/GJ, soit environ 38 €/MWh PCI (Hamelinck, 2002).

3.5. Etude technico-économique de la valorisation des gaz pour la production de gaz naturel

de substitution

Contrairement à la production d’hydrogène pur, la production de méthane (Substitute Natural Gas, SNG) a déjà été expérimentée à l’échelle pilote. Les autrichiens « Repotec » devraient mettre en place une unité de démonstration à Oberwart produisant 200Nm3/h de « méthane », injecté sur le réseau de gaz naturel (début de construction de la première phase en 2005).

ECN (Energy Center of Netherlands) envisage même des opérations commerciales à partir de 2008 (Mozaffarian, 2003). Gasunie et Gastec sont très actifs dans ce domaine.

Dans ce sens, la production de SNG est plus « mature » que la production d’hydrogène pur. Elle pourrait être réalisée « tout de suite, sans modification » du schéma actuel de transport du gaz naturel.

La production de « GAZ VERT » (ou de « SNG ») pourrait être l’un des principaux enjeux pour Gaz de France pour le court terme (2010), dans le domaine de la gazéification.

Nous ne détaillons pas les différentes technologies de méthanation et les différentes réactions mises en jeu. Globalement, la réaction de méthanation est la suivante :

CO + 3 H2 CH4 + H2O

Cette réaction a lieu entre 300 et 750°C sur des catalyseurs à base de nickel ou de ruthenium, à 30Bar. Elle est exothermique. Des unités de méthanation ont été modélisées afin d’estimer leur coût (Mozaffarian, 2003).

L’hydrogazéification (gazéification sous atmosphère d’hydrogène) serait la voie la plus favorable en terme de coût (20 €/MWh PCI) et de rendement énergétique (80%) mais c’est une solution qui a beaucoup moins d’intérêt si l’hydrogène est d’origine fossile (gaz naturel). Elle a donc beaucoup moins de potentiel vis à vis de la réduction des émissions de CO2.

Le tableau 11 résume les coûts escomptés pour la production du SNG par gazéification « indirecte/vapeur » et sous pression à l’oxygène.

Tableau 11. Coûts escomptés pour la production de SNG par gazéification (Mozaffarian, 2003)

Coût en €/MWh PCI du SNG Minimum Moyen Maximum

Gazéification à l’oxygène sous pression 18,4 30,6 41,7

Gazéification indirecte vapeur 16,2 28,1 40,0

Le coût moyen de la gazéification indirecte serait plus faible que pour la gazéification à l’oxygène sous pression. Cela est notamment dû à la différence des coûts d’investissement des unités : la gazéification à l’oxygène est plus chère du fait du coût de la production d’oxygène. Des installations de 100 MWth PCI input

ont été considérées avec un coût de la biomasse de 8,3 €/MWh PCI (ce qui est très faible, on aurait plutôt du considérer 15-20 €/MWh PCI). Leur rendement énergétique est sensiblement égal : de l’ordre de 67 % sur PCI. Les coûts d’investissement moyen sont de 480 €/kWth pour la gazéification à l’oxygène et de 450 €/kWth pour la gazéification indirecte. En revanche, la gazéification indirecte (du type Batelle) serait plutôt réservée à des unités de production décentralisée inférieures à 100 MWth alors que la gazéification à l’oxygène laisse espérer une réduction des coûts du fait d’une augmentation de l’échelle (> 100 MWth) (Mozaffarian, 2003).

Une technologie intéressante à développer, d’après l’analyse effectuée dans ce rapport, serait une gazéification indirecte avec un gazéifieur sous pression, afin d’éviter les surcoûts engendrés par l’unité de production d’oxygène et de compression des gaz en amont de la méthanation, mais une telle technologie semble très difficile à mettre en œuvre.

Le coût du combustible est le paramètre qui a la plus grande influence sur le coût du SNG. D’où l’intérêt d’optimiser le coût de la biomasse. A ces niveaux de puissance (> 100 MWth), il sera très difficile de trouver un seul gisement en déchets de biomasses. Il faudra sans doute aussi envisager une alimentation du procédé en plaquettes forestières.

Les coûts de réduction des émissions de CO2 seraient compris entre 83 €/t de CO2 évité (gazéification indirecte) et 95 €/t (gazéification oxygène sous pression), par rapport au coût et aux émissions du Gaz Naturel, ce qui est inférieur à une taxe de 100 €/t. Si elle se met en place, les filières SNG pourraient rapidement devenir économiquement viables, à l’horizon 2010 (Mozaffarian, 2003).