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Enzymopathies de la voie néoglucogénique:

Dans le document L’hyperlactatemie congenitale (Page 79-87)

CHAPITRE I: LES HYPERLACTATEMIES CONGENITALES ENZYMOPATHIQUES PRIMAIRES

I- ENZYMOPATHIES AFFECTANT LA GLUCONEOGENESE, LE CARREFOUR PYRUVATE ET LE CYCLE DE KREBS

1- Enzymopathies de la voie néoglucogénique:

Hyperlactatémie, hypoglycémie de jeune et hépatomégalie caractérisent ce groupe. l’hyperlactatémie traduit le défaut d’utilisation des substrats et l’hypoglycémie le défaut de formation du produit de la néoglucogénese [5].

1-1- Déficit en glucose -6-phosphatase (G6Pase):

Ce déficit correspond à la glycogénose de type Ia, qui représente environ 80 % des cas de glycogénose de type I, c’est la maladie de Von Gierke [65]. Ce déficit a été démontré par Cori, dès 1952 [66].

a- Aspects biochimiques:

La G6Pase permet l’excrétion du glucose intracellulaire issu de la glycogénolyse et de la néoglucogenèse dans la circulation sanguine.

Elle assure donc le maintien de la glycémie dans les périodes de jeûne. Elle est d’expression tissulaire majoritairement hépatique, rénale et pancréatique mais aussi intestinale [65].

b- Physiopathologie:

Au début de la phase de jeûne, la glycémie commence à chuter, le rapport insuline/glucagon diminue. L’AMPc intracellulaire augmente et par une cascade de réactions stimule la phosphorylase et donc la glycogénolyse. Or la G6P ase n’est pas fonctionnelle entraînant les conséquences suivantes:

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La première conséquence est la survenue d’hypoglycémie: le déficit en G6Pase entraîne un défaut de libération de glucose dans le sang [67].

L’hyperlactatémie est secondaire à l’accumulation de G6P dans l’hépatocyte qui va suivre la voie de la glycolyse alors que l’organisme est à jeun et que la PDH est réprimée par la baisse du rapport insuline/glucagon [68].

L’hyperlipidémie est elle aussi liée à la glycolyse très intense. Cette dernière fournit beaucoup d’acétylCOA et de glycérol: tous les substrats et cofacteurs sont réunis pour la synthèse de triglycérides [68].

L’hyperuricémie est liée à une augmentation de la production hépatique d’acide urique: la baisse des phosphates intracellulaires (captés par le G6P) lève l’inhibition de l’AMP désaminase et favorise le catabolisme des purines. Ce mécanisme s’observe essentiellement après plusieurs années d’évolution [68].

Il existe par ailleurs une baisse de la clairance rénale de l’acide urique, l’excrétion rénale de l’acide urique étant en compétition avec celle des lactates [69].

c- Clinique:

Les signes cardinaux sont représentés par l’hypoglycémie de jeûne court, l’hépatomégalie et l’hyperlactatémie.

L’hypoglycémie se manifeste habituellement dans les 3 à 4 heures après un repas. Les signes rencontrés peuvent comprendre une irritabilité, une pâleur, des sueurs, une sensation de malaise, des convulsions, un coma. Les manifestations peuvent cependant être discrètes, le cerveau pouvant utiliser les lactates comme carburant alternatif, permettant le développement d’un certain degré de tolérance à l’hypoglycémie [68].

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L’hépatomégalie est de consistance molle pendant les premières années. De part sa consistance, elle peut ne pas être perçue à la palpation bien qu’elle puisse être très volumineuse. Elle occasionne alors une distension abdominale importante [68].

d- Diagnostic:

Les éléments biologiques d’orientation sont représentés par:

- Une hypoglycémie à jeun de survenue rapide, classiquement sans cétose mais une hypercétonémie peut s’observer.

- Une hyperlactatémie sévère (> 3mmol/l soit > 270 mg/l pour une normale <220 mg/l)

- Une hyperlipidémie avec surtout une hypertriglycéridémie. - Une hyperuricémie fréquente au moment du diagnostic [65].

La suspicion diagnostique était auparavant étayée par des épreuves fonctionnelles :

- Test de charge au glucose, test de charge au galactose et le test au glucagon à jeun ou deux heures après le repas [65].

Ces épreuves fonctionnelles ne sont plus pratiquées aujourd’hui. On leur préfère la réalisation de cycles glycémie/lactate: mesures de la glycémie et de lactatémie avant et 1 heure après chaque repas sur un (le plus souvent) ou plusieurs jours. Ces cycles se révèlent généralement très informatifs [69].

Le diagnostic de certitude est maintenant recherché en première intention par la biologie moléculaire, évitant le recours à la biopsie hépatique dans plus de la moitié des cas. Si la recherche de mutations n’est pas contributive, une étude

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enzymatique sur biopsie hépatique permet une détection enzymatique fiable avec dosage de l’activité catalytique de la G6Pase et des translocases [68].

Tableau III: Anomalies biochimiques et diagnostic biologique du déficit en G6P ase [65].

Anomalies biochimiques Diagnostic biologique

Hépatomégalie: oui

- ADN - Biopsie de foie Hypoglycémie à jeun :++

Lactate à jeun:

Lactate après repas: diminution Cétonémie à jeun:

Triglycérides: Cholestérol: Acide urique:

e- Traitement:

Le but du traitement est de pallier les désordres métaboliques consécutifs au déficit enzymatique et d’éviter la survenue de complications aigües ou chroniques. La base du traitement est diététique.

Ce régime doit permettre des apports en glucides au plus proche des besoins physiologiques.

Afin de maintenir la normoglycémie, les patients doivent bénéficier : - de repas fréquents (toutes les 3 heures pour les enfants),

- d’apports de sucres d’absorption lente libérant progressivement du glucose et permettant de limiter le pic réactionnel d’insuline favorisant la survenue d’hypoglycémie,

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- d’une nutrition entérale à débit continu nocturne (NEDC).

La NEDC est une mesure thérapeutique majeure. Elle va permettre un apport continu de glucose, va corriger le rapport insuline/glucagon et inhiber glycogénolyse et néoglucogenèse. Enfin, elle permet une accélération de la croissance.

En ce qui concerne l’apport protéique, il est normal, adapté aux besoins selon l’âge. L’apport lipidique est quant à lui limité du fait de la proportion importante des glucides lents dans l’alimentation.

Le régime alimentaire est donc hyperglucidique, normoprotéique et hypolipidique.

Il se répartit ainsi:

Figure 6: Répartition des différentes classes de nutriments au cours du régime du déficit en G6Pase [65].

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1-2- Déficit en fructose-1,6 diphosphatase:

C’est une anomalie rare dont une centaine de cas ont été rapportés chez l’enfant [70].

a- Physiopathologie:

La fructose-1,6- diphosphatase est une enzyme clé de la néoglucogenèse. Son déficit empêche la formation endogène de glucose à partir de ses précurseurs (lactate, glycérol, acides aminés glucoformateurs tels que l’alanine).

L’hypoglycémie survient au jeûne prolongé lorsque le maintien glycémique est assuré par la néoglucogenèse. Le nouveau-né est particulièrement exposé du fait de son alimentation limitée et de ses faibles réserves de glycogène[70].

L’hypoglycémie est parallèle à une chute du phosphore et des bicarbonates et à une élévation du lactate, d’où une acidose métabolique. Les substrats néoglucoformateurs tels que pyruvate, corps cétoniques, glycérol et alanine s’accumulent également [70].

b- Clinique:

Le déficit en fructose-1,6 diphosphatase est un trouble sévère de la néoglucogenèse à l’origine d’accès hypoglycémiques aigus survenant au jeûne et mettant en jeu le pronostic vital chez des nouveau-nés et nourrissons. La symptomatologie débute, soit dès la période néonatale, soit plus tardivement mais en général avant l’âge de 2 ans [71].

Chez le nouveau-né, malaise hypoglycémique et accès d’acidose métabolique sont les symptômes révélateurs les plus habituels. Les accès d’hypoglycémie se caractérisent par :

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• l’absence de cétose ou une cétonurie modérée,

• l’existence d’une hépatomégalie modérée, en règle associée à des signes modérés d’insuffisance hépatocellulaire,

• la correction rapide de l’hypoglycémie et de l’acidose sous perfusion continue de glucose [71].

c- Diagnostic:

Le déficit en fructose-1,6-diphosphatase doit être suspecté chez tout enfant présentant une hypoglycémie à gros foie déclenchée par un jeûne prolongé ou une infection fébrile. Le diagnostic sera confirmé par les explorations fonctionnelles. Lors d’une épreuve de jeûne, effectuée sous surveillance rigoureuse, la chute de la glycémie est associée à une élévation progressive de la lactatémie.

Le glucagon est inactif en situation d’hypoglycémie, alors que son action reste normale en période postprandiale.

Une charge intraveineuse en fructose (0,3 g/kg) ne peut être effectuée qu’après avoir formellement exclu une intolérance héréditaire au fructose.

Si elle est faite, elle entraîne une hypoglycémie avec hyperlactatémie.

Le diagnostic de certitude est établi par la démonstration du déficit enzymatique dans les leucocytes périphériques ou sur biopsie de foie [72].

d- Traitement:

Le traitement des accès aigus consiste en la correction des hypoglycémies (et de l’acidose) par perfusion intraveineuse de glucose qui est rapidement

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efficace. Par la suite, la contre-indication du jeûne évite d’autres épisodes. La tolérance au jeûne semble augmenter avec l’âge.

Le Fructose et le saccharose doivent être limités mais n’ont pas besoin d’être totalement éliminés de l’alimentation [70].

1-3- Déficit en phosphoénolpyruvate carboxykinase (PEPC) :

La PEPC est une enzyme unidirectionnelle de la gluconéogénese, située en amont de la fructose diphosphatase, elle transforme l’OAA en PEP [25].

a- Aspects clinique et biologique:

Le tableau clinique est assez hétérogène, le début est précoce dès les premiers jours de vie à quelques mois, les principaux symptomes sont des comas hypoglycémiques et/ou des convulsions déclenchées par le jeûne .

Il s’agit d’enfants hypotoniques, présentant des troubles digestifs: anorexie, vomissements, avec un développement psychomoteur lent.

A l’examen, hépatomégalie et subictére . un déficit en PEPC serait à l’origine de morts subites du nourisson [73].

Au plan biologique, les anomalies biochimiques simples qui doivent faire rechercher cette maladie sont l’hypoglycémie avec acidose métabolique, une hyperlactatémie avec un rapport L/P élevé, une hyperalaninémie et une hyperlipidémie [74].

b- Diagnostic:

Le diagnostic peut être orienté grâce à des épreuves de charge ainsi, le galactose et le fructose sont transformés en glucose mais non l’alanine qui entraine une hyperlactatémie .

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Le déficit peut être confirmé sur biopsie hépatique [74].

c- Traitement:

Le traitement des épisodes aigus avec acidose et hypoglycémie repose sur la perfusion de glucose (4-8mg/kg/min) et de bicarbonate [74].

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