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CHAPITRE II. Un effecteur de type III de R solanacearum dirige la synthèse

1.4 Les enzymes du métabolisme du tréhalose

1.4.1 Une pléthore d'enzymes du métabolisme du tréhalose chez les plantes

Chez les bactéries comme Escherichia coli, la TPS et la TPP sont respectivement appelées OtsA et OtsB (pour osmoregulatory trehalose synthesis)

et sont codées par le même opéron (Figure 36A) (Giaever et al., 1988). R.

solanacearum possède cet opéron dans son génome : les gènes otsA (RSp1105) et otsB (RSp1104) sont localisés sur le mégaplasmide. Chez la levure, la TPS dite ScTPS1 et la TPP dite ScTPS2 font partie d'un complexe avec deux autres

protéines n'ayant pas d'activité catalytique : TSL1 et TPS3 (Figure 36A) (Bell et al., 1998). Ces dernières auraient un rôle de stabilisation du complexe et de régulation ((Bell et al., 1998) ; pour revue : (Gancedo and Flores, 2004)). Toutes les protéines du complexe possèdent des régions présentant des similarités avec TPS1. Bien que de très faibles quantités de tréhalose soient présentes chez Arabidopsis, les gènes

du métabolisme du tréhalose y sont particulièrement nombreux (Leyman et al.,

2001; Lunn, 2007; Vogel et al., 2001).

Les TPS végétales

Neufs protéines sont homologues à des TPS chez le riz et onze chez Arabidopsis. En comparaison avec ScTPS1 et OtsA, les TPS d'Arabidopsis possèdent une extension C-terminale d'environ 400 acides aminés (figure 36). Elles peuvent être classées en 2 groupes selon qu'elles présentent plus de similarité avec TPS1 ou TPS2 de S. cerevisiae (figure 36A et 36B). Le premier groupe comprend

4 enzymes : AtTPS1-4 qui présentent de fortes homologies entre elles et avec ScTPS1. Les autres plantes à fleurs analysées à ce jour ne possèdent qu'un seul

gène TPS de la classe I (Lunn, 2007). Les protéines du second groupe, AtTPS5-

11, contiennent à la fois un domaine TPS et un domaine TPP. Ce domaine TPP

est situé dans l'extension C-terminale. Il est souvent considéré que les TPS de classe II ont un rôle de régulation. A l'heure actuelle, l'activité catalytique TPS n'a été démontrée que pour AtTPS1 et AtTPS6 (Blazquez et al., 1998; Chary et al., 2008) ; d'autres sont incapables de complémenter un mutant tps de levure (Vogel et al., 2001).

AtTPS1 est considérée comme la TPS majeure ; en effet, elle est exprimée

dans tous les tissus d'A. thaliana (Schmid et al., 2005). Dans les cellules de garde, son expression est activée par l'acide abscissique (Leonhardt et al., 2004). Bien que catalytiquement active, elle possède un domaine N-terminal autoinhibiteur qui restreint l'activité in vivo (Van Dijck et al., 2002). L'expression d'AtTPS1 chez le tabac montre que cette protéine est localisée dans le cytoplasme (Geelen et al., 2007). Cependant, d'autres auteurs la trouvent principalement localisée dans la vacuole et la paroi, et, dans une moindre mesure, dans le cytosol ; elle est parfois détectée dans les chloroplastes et le noyau mais jamais dans les mitochondries (Almeida et

al., 2007b). La présence de gènes TPS1 a été trouvée dans de nombreuses plantes

non tolérantes aux stress (Goddijn and van Dun, 1999).

AtTPS2-4 ne possèdent pas ce domaine N-terminal ; leur fonction est distincte de celle de AtTPS1 étant donné qu'elles ne compensent pas la mutation de Attps1 (Eastmond et al., 2002). Elles ont probablement des fonctions particulières dans les graines et les siliques où elles sont spécifiquement induites.

Les TPS de classe II, AtTPS5 à 11, sont exprimées dans toute la plante. Elles

sont phosphorylées par les kinases dépendantes du calcium et par la kinase SnRK1 (pour sucrose nonfermenting 1-related protein kinase) qui est le senseur majeur du stress et de la disponibilité en énergie (Baena-Gonzalez et al., 2007; Glinski and Weckwerth, 2005; Harthill et al., 2006). AtTPS5-7 interagissent avec les protéines 14-3-3 lorsqu'elles sont phosphorylées (Harthill et al., 2006). La phosphorylation en des sites multiples des TPS pourrait permettre l'activation et l'inactivation de ces enzymes en réponse à différent signaux internes et externes. En accord avec le lien entre T6P et métabolisme, l'expression des TPS de classe II est régulée par des altérations métaboliques et la disponibilité en sucres (Ramon et al., 2009). L'expression d'AtTPS5 est induite par les sucres et réprimée par la carence alors que l'inverse est vrai pour AtTPS8-10 (Osuna et al., 2007; Schluepmann et al., 2004). AtTPS8 et AtTPS9 sont également induite par les cytokinines (Brenner et al., 2005; Ramon et al., 2009). AtTPS6, dont les activités TPS et TPP ont été démontrées chez la levure, contrôle la morphologie cellulaire, et la ramification des trichomes et des tiges (Chary et al., 2008) (Tableau 5). Les tentatives de démonstration expérimentale

A.

B.

Figure 36. Les enzymes du métabolisme du tréhalose

A. Distribution des domaines TPS et TPP dans les différentes protéines du métabolisme du tréhalose d’E. coli, de S. cerevisiae (S.c.), de

Selaginella lepidophylla (S.l.) et d’A. thaliana (A.t.).

(D’après Leyman et al., 2001)

B. Les 22 gènes d’A. thaliana codant pour les enzymes du métabolisme du tréhalose. Les TPS de classe I sont plus similaires à la TPS de la levure alors que celles de classe II sont plus similaires à la TPP. Arabidopsis possède aussi une classe de protéines plus petites partageant des similarités restreintes avec la partie C-terminale de ScTPS2 mais possédant les motifs phosphatase conservés.

d'activité enzymatique ont échoué pour les autres TPS de classe II ce qui suggère plutôt un rôle de régulation (Ramon et al., 2009).

Les TPP végétales

Le riz possède neuf protéines homologues à des TPP et Arabidopsis en possède dix (AtTTPA à AtTPPJ) dont deux (AtTPPA et AtTPPB) ayant une activité enzymatique démontrée (figure 36A et 36B) (Vogel et al., 1998). Un fort contenu en T6P est corrélé avec une forte expression des gènes codant pour les TPP chez Arabidopsis (Schluepmann et al., 2004). Certaines TPP ont un peptide d’adressage aux organelles ce qui suggère qu'elles pourraient être chloroplastiques bien que d'autres sont probablement cytosoliques (Pramanik and Imai, 2005; Shima et al., 2007).

La tréhalase végétale

Contrairement aux TPS et aux TPP, la tréhalase est codée par un seul gène chez Arabidopsis (figure 36B). Elle doit être nécessaire pour métaboliser le tréhalose produit dans certaines conditions. C'est une enzyme liée à la membrane plasmique dont le domaine catalytique est dirigé vers la paroi et dont l'activité est extracellulaire. La régulation des niveaux de tréhalose endogène semble donc nécessiter le transport du tréhalose en dehors de la cellule végétale (Frison et al., 2007).

Il y a donc eu chez les plantes une prolifération des TPS et des TPP ce qui souligne l'importance du métabolisme du tréhalose chez les végétaux et suggère l'existence de fonctions nouvelles et régulatrices attribuables à ce métabolisme. Cela est conforté par le fait que l'expression des gènes codant pour les TPS et les TPP sont régulés par différentes stress et carences comme un faible approvisionnement en sucres ainsi que par d'autres signaux comme les cytokinines, les nitrates et l'acide abscissique (Figure 34). D'autre part, les niveaux de T6P semblent eux-mêmes réguler l'expression des TPS et des TPP chez Arabidopsis ce qui suggère l'existence d'un rétrocontrôle qui ajuste l'expression des gènes du métabolisme du tréhalose aux niveaux de T6P (Schluepmann et al., 2004). La régulation des quantités de T6P semble donc être primordiale chez les végétaux.

Résultats. Chapitre 2

1.4.2 Structure tridimensionnelle des TPS

Les TPS font partie de la famille des glycosyltransférases dont les membres catalysent la synthèse ou la dégradation de liaisons glycosidiques. Les TPS réalisent le transfert du groupement glucose de l'UDP-glucose (donneur) vers l'anomère α du glucose-6-phosphate (accepteur) pour former de l'α,α-1,1 T6P et de l'UDP. Elles agissent par un mécanisme de rétention ; en effet, elles maintiennent la configuration anomérique du donneur (UDP-glucose) qui possède une liaison α entre l'UDP et le glucose.

La structure tridimensionnelle d'OtsA d'E. coli a été déterminée en complexe avec ses deux susbstrats (Figure 37) (Gibson et al., 2002; Gibson et al., 2004). Comme d'autres glycosyltransférases dépendantes d'un sucre activé, le repliement d'OtsA présente deux domaines relativement indépendants et disposés de manière opposée (Figure 37) (Gibson et al., 2002). Le domaine N-terminal (acides aminés 1 à 225) est composé de 9 feuillets β et de 6 hélices α associées ; le domaine C-terminal (acides aminés 226 à 456) a une topologie similaire avec un feuillet β parallèle à 6 brins et 7 hélices α. Le centre catalytique est situé à l'interface de ces deux domaines ; les acides aminés interagissant avec l'UDP-glucose et le glucose-6-phosphate ont été identifiés (Figure 37). L'UDP-glucose interagit majoritairement avec des résidus du domaine C-terminal alors que le glucose-6-phosphate se lie surtout sur des acides aminés du domaine N-terminal.

Durant la dernière décennie, l'importance du métabolisme du tréhalose chez les plantes a été révélée avec notamment la mise en évidence d'un rôle clé du T6P en tant que molécule signal. A l'heure actuelle, la communauté scientifique s'accorde à dire que le T6P joue un rôle central dans la coordination du métabolisme avec le développement (Paul, 2007; Paul et al., 2008). Dans ce contexte, il fut particulièrement intéressant de découvrir parmi les effecteurs de type III de R.

solanacearum une protéine homologue à des TPS.

Mes travaux de thèse se sont articulés autour de deux axes principaux : (i) la démonstration expérimentale de l'activité tréhalose-6-phosphate synthase de cet effecteur et (ii) l'étude de sa contribution au pouvoir pathogène de R. solanacearum ainsi que ses effets sur la physiologie végétale.

Figure 37. Structure tridimensionnelle d’OtsA d’E. coli

Les domaines N- et C- terminaux sont respectivement en vert et jaune. (D’après Eastmond and Graham, 2003)

Résultats. Chapitre 2

2 Résultats

2.1 R. solanacearum injecte dans les cellules végétales un effecteur de