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Méthodologie de conception d’un système de monitoring de la moelle

4.1 Déviations pratiques du modèle théorique

4.1.4 Effets de la température

L’immersion d’un dispositif de mesure local dans l’environnement biologique en-traîne une élévation de la température des composants au-dessus des typiques 25 degrés Celsius utilisés pour les caractéristiques fonctionnelles données par les constructeurs. Parmi les multiples effets impliqués par la température, on choisit d’évoquer deux dé-pendances des composants, ayant un impact pouvant passer inaperçu à la conception, à savoir : la sensibilité spectrale du photodétecteur Rλ et la longueur d’onde d’intensité maximale des sources, λpic (cf. figure 4.8).

Tout comme les déviations de longueur d’onde nominale évoquées précédemment, la température influe également dans le décalage de la longueur d’onde réellement en usage au travers de la quantité δλ, décrite dans l’équation 4.15. Quantifié depuis des dizaines d’années [15, 157], un décalage pour des causes de température d’environnement de quelques nanomètres est suffisant pour impacter le calcul direct du SpO2. En effet, les régions typiques du spectre NIRS sont classiquement choisies aux longueurs d’onde où les pentes des coefficients d’extinction sont les plus grandes. Par conséquent, la moindre déviation des spectres lumineux, en émission tout comme en réception, a un impact notable sur le calcul final de la saturation en oxygène.

i Dépendance de la sensibilité spectrale

Pouvant être légèrement modifiée par la configuration électronique externe (ten-sion de polarisation, selon le montage), la sensibilité spectrale des photodétecteur est dépendante de la température, comme le montre la figure 4.10. En effet, les photodétec-teurs en silicium sont sensibles aux variations du matériau. En cela, les spécifications données par les constructeurs sont modifiées. Ainsi, dans le cas d’une température de 37 degrés Celsius, une photodiode en silicium voit sa sensibilité accrue vers les infra-rouges de par l’augmentation de sa profondeur d’absorption. Autrement dit, la courbe de Rλ présente un rendement plus important à partir de 700 nm, typiquement. Cette

dépendance, illustrée par la figure 4.10a peut aussi se traduire par le coefficient de température, parfois présenté dans les documentations techniques en ppm par degré Celsius (ppm/°C). En exemple, le constructeur AMS [156] fournit la figure 4.10b, où l’on peut lire une augmentation de 0.5 % de la sensibilité à environ 950 nm. Dans le spectre des NIRS (pour rappel [600 nm ; 1100 nm]), les variations avec la température sont les plus notables.

(a) Sensibilité spectrale normalisée du capteur optique TCS3200D à plusieurs températures

(b) Coefficient de température du TCS3200D suivant les longueurs d’onde

Figure 4.10 – Dépendance en température des caractéristiques d’une photodiode typique en silicium [156]

ii Dépendance du rayonnement maximal

Les sources lumineuses souffrent également de l’influence de la température. De même que les photodiodes, les sources lumineuses ont des caractéristiques dépendantes des bandes de valence et de conduction de leur matériau. Théoriquement, un électron d’énergie E = hc/λ (cf. équation 3.2) est généré en fonction du gap d’énergie dans le semi-conducteur. Les modifications de la température se retrouvent dans les variations de l’énergie acquise par le matériau. Ainsi, avec l’augmentation de la température de l’environnement des sources (le milieu biologique dans notre cas), la différence d’éner-gie des bandes du semi-conducteur diminue. Cette diminution entraîne également un décalage de la longueur d’onde d’émission des photons vers les longueurs d’onde plus grandes. Ainsi, le spectre d’émission est relié à la température et à l’énergie de son matériau dans la formule suivante [163] :

Iλ(E) ∝ exp  − E kT  pE − Eg (4.23) où Eg = Ev − Ec est la différence d’énergie qu’un électron doit perdre entre la bande de valence et la bande conduction pour générer un photon, k désigne la constante de Boltzmann et T la température.

L’énergie du spectre d’émission est maximale à la longueur d’onde pic, directement proportionnelle à la température sous la forme :

λpickT

Cette dépendance directe de λpic à la température est également appelée red shift, car elle traduit, dans le visible, un décalage du spectre vers le rouge, lorsque la tempéra-ture augmente. La figure 4.11 illustre ce phénomène sur une gamme de températempéra-tures typiques. Il est cependant possible d’anticiper ces effets sur le système en y ajoutant la mesure de la température environnante. Cependant, cette compensation en temps réel ajoute de la complexité au système globale et augmente sa consommation. L’usage des courbes de dépendance des composants à la température (qui concerne également le photocapteur) est une méthode simple et efficace qui permet de compenser ce biais dans le calcul du SpO2, car il peut être inclus dans les modèles théoriques [15, 164, 165]. De plus, dans notre cas, l’environnement du dispositif développé se trouve, en conditions normales, autour d’une température connue de 36.8 degrés Celsius.

Figure 4.11 – Dépendance en température du spectre d’émission d’une LED [157]

L’environnement n’est pas l’unique responsable de l’élévation de la température. Dans le cas des sources lumineuses, une dissipation thermique accompagne typique-ment le rayonnetypique-ment optique. Ainsi, il appartient au concepteur de prévenir au mieux l’auto-échauffement des sources qui conduira aux mêmes effets cités précédemment mais aussi, à l’échauffement des tissus environnants. Comme on le voit par la suite, il existe différents modes d’alimentation de ces sources (par intermittence, par exemple) qui permettent de limiter la chaleur dégagée dans les tissus biologiques.

4.1.5 Bilan

Afin d’éviter les déviations du modèle typique dans le calcul de la saturation, de nombreux constructeurs d’oxymètres de pouls ont recourt à la calibration. Le besoin de calibration est en réalité soutenu par toutes les déviations du modèle théorique que l’on vient d’aborder. Bien qu’il paraisse possible de s’affranchir de certaines de ces considé-rations dans le développement d’un dispositif (telles que les déviations théoriques de calcul), il en est malheureusement d’autres auxquelles on ne peut échapper (telles que les dépendances à l’environnement).

Les déviations du modèle de calcul sont, comme on vient de le voir, inévitables et la calibration semble être une solution d’appoint avec ses limites. On ne propose ici pas de solution miracle permettant d’obtenir une saturation absolue sans biais.

Cependant, dans le cadre de développement d’un outils de monitoring de la ME, les étapes de conception nous ont menés à profiter de la disponibilité d’une grande variété des composants LED pour le prototypage de la preuve de concept. Ainsi, dans la suite de ce document, on se réfère aux sources lumineuses par l’appellation LED. Cette contrainte a été assumée dans l’optique de pourvoir, non pas un calcul de saturation absolu, mais plutôt de signaux PPG les plus précis pour un calcul ultérieur aisé. Par cela, la chaîne de traitement qui suit l’acquisition porte la responsabilité de préparer le signal pour le calcul. On évalue dans la partie suivante les considérations de cette chaîne à choix multiple.

4.2 Chaîne de traitement

On rappelle que la quantité nécessaire pour le calcul in fine du SpO2 repose sur la valeur du ratio de ratio, ROS. Pour cela, l’acquisition des PPG sur deux longueurs d’onde (au minimum) est primordiale. On récapitule dans la figure 4.12, et son tableau 4.5, les considérations du début de ce chapitre, qui se focalisait sur le front-end au-tour de l’acquisition des PPG. Le traitement du signal prend alors en considération la grandeur x dans cette illustration, dont l’expression peut être reliée à la commande des sources lumineuses à travers l’équation suivante :

x = iFSLED(λ)e−A(λ)HP D(λ)RF [V ] (4.25) Cette expression, considérée en régime instantané, représente un point du signal PPG. Ainsi, cette valeur obtenue à la sortie de la chaîne d’acquisition est amenée à varier dans le temps, avec les variations hémodynamiques visibles dans l’atténuation des tissus biologiques.

Figure 4.12 – Front-end de l’acquisition du PPG

On développe à présent les étapes de traitement des signaux qui, une fois acquis, doivent être mis en forme, avant leur conversion numérique pour les étapes de calcul de la saturation. Comme on le voit par la suite, les différentes contraintes du traitement du signal peuvent amener à revoir certains paramètres de l’acquisition présentée plus haut, pour une prise en compte de la chaîne complète.

Variable Description Unité iF Courant d’alimentation de la source A SLED(λ) Efficacité de conversion de la source (W.m−1)/A ILED(λ) Intensité lumineuse émise par la source W.m−1

A(λ) Absorbance des tissus – IP D(λ) Intensité lumineuse transmise au récepteur W.m−1 HP D(λ) Sensibilité spectrale de la photodiode A/(W.m−1)

iph Photocourant généré par le récepteur A RF Gain transimpédance Ω

x Signal obtenu V

Table 4.5 – Récapitulatif des grandeurs de l’acquisition