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La carbonatation entraîne une réduction de la porosité totale du matériau. En effet, le volume des carbonates de calcium excède celui des hydrates à partir desquels ils sont formés.

91 Par exemple, le volume molaire du Ca(OH)2 est de 33,1 cm3/mol contre 36,9 cm3/mol pour le

CaCO3. Toutefois, les avis semblent être partagés sur la redistribution de taille des pores après

carbonatation. Ceci n’est a priori pas surprenant puisque les résultats d’essais de carbonatation dépendent notablement des conditions exprérimentales (cf.I.B.2.3.2.2) qui diffèrent d’un auteur à l’autre. Pihlajavaara [Pihlajavaara, 1968]observe sur pâtes de ciment à base de CEMI à différents rapports E/C (0,3, 0,4 et 0,5) carbonatées avec un taux de CO2 atmosphérique

pendant 32 mois, que la carbonatation affecte plus les pores larges que les petits pores. Sur la pâte de rapport E/C=0,3, l’auteur relève également une réduction de la surface spécifique de l’ordre de 40% ainsi qu’une diminution du même ordre de grandeur de la teneur en eau non évaporable à cause de la décomposition des hydrates. Dewaele et al [Dewaele et al., 1992] en carbonatant des éprouvettes de mortiers à base de CEMI via des essais de percolation avec une solution chargée en CO2, constatent eux aussi que la précipitation de calcite se produit

préférentiellement dans les gros pores. Ceci implique une augmentation du volume des pores fins (2-10nm). Toutefois, ils mesurent une surface spécifique plus grande sur matériaux carbonatés que sur matériaux sains contrairement à Pihlajavaara. Ngala et Page [Ngala et Page, 1997] notent après carbonatation à 5% de CO2 de pâtes de ciment, avec et sans ajouts

(cendres volantes et laitier de haut fourneau) et à différents E/C (variant de 0,4 à 0,7) une augmentation de la proportion des pores larges de rayon supérieur à 30nm. Cette augmentation serait la conséquence de la formation de gel de silice due à la décomposition du gel de C-S-H suite à une longue exposition au CO2. La présence d’ajouts dans la pâte

accentue cette formation de gel de silice à cause de la réaction pouzzolanique. Ceci est confirmé par [Anstice et al., 2005]. Johannesson et Utgennant [Johannesson et Utgennant, 2001] trouvent à partir des résultats d’isothermes de désorption d’eau que le volume des pores de rayon compris 2 et 7nm augmente considérablement sur leurs échantillons de mortier (E/C=0,55) carbonatés avec un taux de CO2 n’excédant pas 1%. Ils constatent cependant une

diminution de la surface spécifique. Thiery [Thiery, 2005] observe après carbonatation de ses échantillons de pâtes de ciment à différents E/C (0,25 à 0,60), à 50% de CO2, une réduction de

la famille de pores de taille comprise entre 10nm et 20 nm pour les matériaux à E/C > 0,35 et comprise entre 6nm et 10nm pour les matériaux à E/C=0,25 (Figure I-31). Cette fraction de pores affectée par la carbonatation représente pour l’auteur la porosité interhydrates en reprenant la classification proposée par Baroghel Bouny [Baroghel Bouny, 1994]. Comme Ngala et Page, Thiery constate la création d’une macroporosité autour de 80 à 100nm. Pour expliquer l’apparition de cette macroporosité, il évoque entre autres la formation de gel de silice de structure très poreuse après la carbonatation des C-S-H ou la fissuration de la gangue

92 de CaCO3 entourant les cristaux de portlandite. Cette fissuration serait la conséquence d’un

retrait provoqué par l’eau libérée par la carbonatation pouvant difficilement transférer à travers la couche de carbonates et générant un gradient hydrique à l’interface Ca(OH)2-CaCO3

et le pore. Sur bétons carbonatés, Thiery relève que la distribution poreuse au cours de la carbonatation présente les mêmes particularités que celles observées sur les pâtes de ciment. L’auteur émet cependant quelques réserves sur la distribution de taille des pores des bétons carbonatés à cause de la plus ou moins grande présence d’interface pâte-granulat au niveau de laquelle les cristaux de portlandite sont nombreux et propices à la microfissuration de la couche de carbonates les entourant. La diminution de la surface spécifique est également notée par l’auteur sur les pâtes de ciment quel que soit le rapport E/C.

Figure I-31 : Evolution de la distribution de taille des pores après carbonatation [Thiery, 2005] Tous ces résultats semblent une fois de plus confirmer ce qui a été évoqué dans le Paragraphe I.B.2.3.2.2.3 concernant l’effet du taux de CO2 sur la carbonatation. La formation

d’une macroporosité associée au gel de silice due à la décomposition des C-S-H, a lieu pour des concentrations élevées en CO2 (respectivement 5% pour [Anstice et al., 2005] et 50%

pour [Thiery, 2005]). Ceci est d’autant plus marqué que le ciment contient des ajouts à cause de la réaction pouzzolanique. Pour des taux de CO2 faibles, l’effet de la carbonatation sur la

93 déplacement des modes poreux vers les petits pores. Concernant la diminution de la surface spécifique après carbonatation, les résultats doivent être traités avec vigilance car ceux ci peuvent provenir de différents facteurs inhérents aux méthodes de mesures : réduction d’accessibilité du réseau poreux, bouchage local par les carbonates formés ou par l’eau libérée non évacuée.

I.B.2.3.4 Effets de la carbonatation sur les propriétés de transfert

Il s’agit de résultats ou de tendance dont la portée doit être relativisée en raison notamment du peu d’études réalisées concernant le sujet.

I.B.2.3.4.1 Effet sur la perméabilité au gaz

Des mesures de perméabilité au gaz ont été effectuées par Thiery [Thiery, 2005] sur bétons carbonatés. Néanmoins, il semble difficile d’après ses résultats d’établir un lien évident entre l’évolution de la perméabilité au gaz et l’évolution de la structure poreuse. Sur un béton de faible résistance pour lequel une macroporosité s’est développée après carbonatation, la perméabilité au gaz a augmenté. Sur un autre béton de résistance moyenne, la perméabilité est réduite. L’auteur justifie ceci par une diminution de la porosité existante sans qu’il y ait formation de macropores. Enfin sur un béton de résistance élevée, la perméabilité au gaz reste inchangée malgré le déplacement de la distribution poreuse vers les gros pores.