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4.3 Photosensibilisation d’un CNTFET par un film de PSI

4.3.3 Effet optoélectronique du film de PSI

Nous avons ensuite regardé l’influence de la lumière sur le bio-hybride décrit précé- demment. Pour cela, nous focalisons le faisceau lumineux provenant d’une source 1.5 AM à l’aide d’une lentille. De plus, un filtre passe-haut a été utilisé pour ne laisser passer que les photons de longueur d’onde supérieure à 630 nm.

Figure 4.23

Effet d’une excitation lumineuse sur les caractéristiques ID(VGS) d’un CNTFET en présence ou non de

PSI. La figure de gauche représente les caractéristiques électriques d’un CNTFET. La figure de droite montre

les mesures réalisées sur le même CNTFET après dépôt d’un film de PSI dans les conditions exposées précédemment. Les mesures sont faites à VDS= -400 mV et avec une puissance optique de 110 mW/cm2 en lumière blanche et de 70 mW/cm2avec le filtre optique.

La figure 4.23 montre les caractéristiques électriques de CNTFET et de biohybrides avant et après photoexcitation à l’aide d’une lumière blanche ou d’une lumière rouge (λ> 630 nm). Ces courbes sont représentatives des effets observés sur plusieurs dispositifs.

Dans le cas du CNTFET seul (Fig 4.23 gauche), nous observons un décalage de la tension de seuil provoqué par le piégeage de charges photo-induit dans l’oxyde de silicium [183]. Par contre, nous voyons que l’utilisation d’un filtre optique permet d’éviter cet effet parasite. Par la suite l’utilisation de ce filtre nous permettra de différencier l’effet du piégeage de charges et de celui induit par la protéine.

Dans le cas du bio-hybride (Fig 4.23 droite), nous remarquons que la lumière blanche et la lumière rouge induisent la même modification des caractéristiques électriques du CNTFET/film de PSI. En effet, sous éclairement, il y a une diminution du courant d’élec- trons et de trous. Dans le cas de la conduction des électrons (VGS positif), nous remar- quons que la diminution du courant ne s’accompagne pas d’un décalage de la tension de seuil contrairement au cas de la conduction des trous. Or, nous avons vu précédemment que le simple dépôt d’un film de PSI provoque un dopage des NT et une modification de la barrière de Schottky. Il semble donc que la diminution du courant des trous et des

électrons soit due respectivement à un dopage plus important du NT provoqué par la créa- tion photo-induite du moment dipolaire de PSI et à l’augmentation du travail de sortie de l’électrode sous l’effet du moment dipolaire.

La modification du travail de sortie d’un métal par un moment dipolaire est depuis longtemps étudié. Stiller et al. [184] ont montré l’augmentation du travail de sortie d’une électrode d’or couverte par une couche de thiols auto-assemblés. Par ailleurs, ils ont éga- lement montré la possibilité de photo-induire ce changement en utilisant une molécule d’azobenzène dont la photo-isomérisation provoque une modification de son moment di- polaire. Par la suite, d’autres groupes se sont intéressés à l’effet de l’orientation du moment dipolaire sur le travail de sortie de l’électrode. En particulier, Alloway et al. [185] ont montré que la modification du travail de sortie est inversée si le dipôle est inversé mais avec un effet moindre. Or dans notre cas, nous ne connaissons pas l’orientation de la protéine, il faudrait donc contrôler l’orientation de la protéine pour pouvoir améliorer les effets opto- électroniques observés. Par la suite, nous verrons les stratégies envisagées pour orienter le PSI.

En ce qui concerne le dopage, Bradley et al. [186] ont montré que même avec une orientation aléatoire de dipôles, il y avait un décalage de la tension de seuil certes moins important que dans le cas d’une orientation contrôlée.

Figure 4.24

Dynamique de l’effet optoélectronique observé sur le CNTFET et le bio-hybride. La courbe noire

montre l’évolution du courant de drain d’un CNTFET en présence ou l’absence de lumière. La courbe verte montre la même évolution mais pour un bio-hybride CNTFET/film de PSI. Les mesures sont faites à VDS = -400 mV, VGS = -5 V et avec une lumière blanche de puissance optique égale 110 mW/cm2. Les tri- angles vides et pleins indiquent respectivement le dé- but d’une période d’éclairement et d’obscurité.

Pour confirmer que l’effet observé est bien dû au PSI et non à l’oxyde de silicium, nous avons comparé la dynamique de l’effet optoélectronique d’un CNTFET et d’un CNT- FET/film de PSI (Fig 4.24). Nous remarquons que, dans le cas du CNTFET, la diminution de courant induite par le piégeage de charge est un phénomène lent et irréversible dans la gamme de temps étudiée contrairement au cas du bio-hybride, où la diminution du courant est plus rapide et surtout réversible.

La figure 4.25 montre la dynamique de la diminution photo-induite du courant à diffé- rentes tensions de grille. La vitesse de diminution du courant ne dépend pas de la tension de grille. Ce phénomène s’explique par le fait que la diminution du courant causée par la création du moment dipolaire est limitée par la quantité de photons incidents. En effet, à

Figure 4.25

Effet de la tension de grille sur la dynamique de l’effet optoélectronique. Les mesures sont faites à

VDS= -400 mV et avec une lumière blanche de puis- sance optique égale 110 mW/cm2.

la puissance optique utilisée, il y a environ 5 photons/2 ms qui arrive sur le photosystème I mais dans le cas du film de PSI il y a 6 protéines les unes sur les autres ce qui fait que les protéines les plus proches des NT ne sont pas saturées en photons.

Figure 4.26

Effet de la puissance optique de la lumière in- cidente sur la dynamique de l’effet optoélectro-

nique. Les mesures sont faites à VDS= -400 mV et

à VGS= -20 V

Nous avons donc regardé l’effet de la puissance optique sur la dynamique de l’effet optoélectronique. La figure 4.26 montre que la vitesse de diminution du courant dépend fortement de la quantité de photons incidents, cela confirme bien l’hypothèse faite précé- demment. En effet, la rapidité de réponse de notre bio-hybride dépend de la lumière inci- dente. Par ailleurs, cette expérience a été réalisée avec un CNTFET constitué de bandes de NT et nous voyons que la diminution du courant y est plus importante que dans le cas du réseau de NT. Le CNTFET fait par bandes de NT ayant une meilleure modulation semble plus sensible au moment dipolaire créé par la protéine.

Nous avons également regardé la robustesse de l’effet optoélectronique de notre dis- positif en effectuant plusieurs cycles lumière/obscurité. Nous voyons que, malgré la dérive du courant, il est toujours possible de discriminer les deux niveaux de courant sous éclai- rement et dans l’obscurité. Nous pouvons dire que le bio-hybride est un dispositif robuste et ce malgré l’apparente fragilité de la protéine. Il serait intéressant de tester le dispositif

Figure 4.27

Illustration de la robustesse de l’effet optoélectro- nique du bio-hybride. La courbe verte représente

l’évolution du courant de drain en fonction du temps. La courbe noire représente la commande électrique permettant d’éclairer ou non le dispositif. Les mesures sont faites à VDS= -400 mV, à VGS= -20 V et d’une lu- mière blanche de puissance optique de 117 mW/cm2.

après quelques jours pour connaître la durée de vie du PSI dans des conditions aussi drastiques.

En conclusion, nous avons démontré qu’il est possible de réaliser un dispositif nano- électronique CNTFET/photosystème I où les protéines conservent leurs propriétés origi- nelles et où il y a une forte intéraction entre les deux composants : le nanotube et le photosystème I. Nous avons observé que le simple dépôt d’un film de PSI change consi- dérablement les propriétés du CNTFET. En effet, il y a apparition d’un courant de conduc- tion d’électrons et une diminution du courant de trous principalement provoqué par le do- page des NT par la protéine mais également à cause d’une modification de la barrière de Schottky. Ensuite nous avons montré les propriétés optoélectroniques de notre dispositif. Sous éclairement, il y a diminution du courant d’électrons et de trous provoquée par la création du moment dipolaire dans la protéine et due au piégeage de charge dans l’oxyde. De plus, nous avons vu que cet effet était limité par la quantité de photons incidents et non par les performances de notre dispositif. Nous avons également montré la robustesse du bio-hybride au cycle lumière/obscurité. Toutes ces observations nous permettent d’affir- mer que l’intégration du photosystème I dans un dispositif électrique est réalisable malgré l’apparente fragilité d’une protéine.

Néanmoins, il semble nécessaire de contrôler l’orientation de la protéine sur les NT et/ou à l’interface métal/NT pour pouvoir augmenter l’effet de la création photo-induite du moment dipolaire sur le courant du CNTFET et pour essayer de mieux comprendre l’importance des différents mécanismes d’intéraction. La fin de ce chapitre sera consacrée aux différentes stratégies envisagées pour orienter la protéine.