• Aucun résultat trouvé

Mon objectif était de comprendre la pharmacodynamie de la mambaquarétine-1 (MQ-1) chez des rats sains Sprague-Dawley. En tant qu’antagoniste du récepteur de type 2 à la vasopressine (V2R), il était attendu un effet aquarétique in vivo, ce qui correspond à une augmentation du volume urinaire sans perte d’osmoles. Pour cela, j’ai réalisé une étude de la relation dose-activité de MQ-1 et observé l’effet d’une administration répétée sur cinq jours.

Si l’activité aquarétique in vivo de MQ-1 a déjà été décrite chez la souris (Ciolek et al. 2017), l’administration de MQ-1 chez le rat a permis de vérifier qu’il en était de même dans une autre espèce de rongeur. L’injection unique par voie intrapéritonéale (IP) d’une gamme de six doses différentes (de 0,001 à 0,3 µmol/kg) a démontré qu’il existait une relation entre la dose d’une part et l’augmentation du débit urinaire couplée à la diminution de l’osmolalité urinaire d’autre part. Cependant, le protocole expérimental présentait des écueils ne permettant pas de vérifier strictement l’absence de modification de l’excrétion urinaire. Cette expérience a démontré que les doses égales ou inférieures à 0,001 µmol/kg de MQ-1 n’entrainaient plus d’effet in vivo mesurable après une injection unique, mettant en évidence une efficacité de MQ-1 à des doses faibles provoquant une augmentation modérée du volume urinaire (facteur 3 pour la plus faible dose efficace testée). Ce critère est particulièrement important pour le développement pharmaceutique de la toxine dans le cadre d’un traitement chronique aussi bien en ce qui concerne le coût de production de la molécule que pour l’acceptation du médicament par le patient.

Quelle que soit la dose utilisée, l’effet aquarétique atteint un maximum 2 heures après injection puis est suivi d’une rapide diminution avec un temps de demi-vie biologique variant de 1 à 4 heures en fonction de la dose. Pour la plus forte dose testée (0,3 µmol/kg), une seconde phase d’élimination plus lente peut être modélisée, estimant un temps de demi-vie biologique de 43 heures. Les modèles utilisés ne permettaient pas de discriminer la cinétique à une phase de celle à deux phases d’élimination à cause du faible nombre de relevés.

L’injection IP de 0,1 et 0,3 µmol/kg de MQ-1 pourra être renouvelée en réalisant un plus grand nombre de relevés au-delà de six heures après l’injection. Pour ce faire, il conviendra de redéfinir le protocole expérimental afin d’éviter les biais liés à l’utilisation des cages métaboliques d’une part, et les fluctuations naturelles du débit urinaire liées au cycle métabolique du rat d’autre part. Par ailleurs, un suivi mieux contrôlé de la prise alimentaire et de boisson permettra d’établir un bilan entrées-sorties des osmoles primordial pour pouvoir conclure avec plus de certitudes sur l’effet aquarétique de MQ-1.

L’administration répétée de MQ-1 à 0,003 µmol/kg pendant cinq jours a montré un effet aquarétique cumulatif se stabilisant au bout de trois jours et maintenant un débit urinaire augmenté d’un facteur 3. Cependant, les données obtenues le dernier jour de traitement montraient une importante hétérogénéité interindividuelle. L’administration répétée sur une plus longue période permettra de déterminer s’il existe bien un plateau.

Les données de pharmacocinétique sont indispensables pour le développement pharmaceutique d’une molécule. Elles évaluent la biodisponibilité, la biodistribution, le métabolisme, le temps de demi-vie plasmatique et la voie d’élimination d’une molécule. Aucune de ces informations n’est pour l’instant connue à propos de MQ-1. Pour réaliser un dosage plasmatique de la toxine, des rats cathétérisés ont reçu une injection unique de toxine à 0,3 µmol/kg et des prélèvements sanguins ont été effectués aux temps 0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 10, 12, 16, 24, 48, 72 et 96 h post-injection. Le dosage par spectrométrie de masse est en cours de mise au point par nos collègues de Liège (Docteur Loïc Quinton, Laboratoire de Spectrométrie de masse, Université de Liège, Belgique). Une MQ-1 marquée au carbone 13 et à l’azote 15, générée soit par synthèse chimique soit par expression recombinante, servira d’étalon interne. Il sera intéressant de comparer les concentrations circulantes de MQ-1 avec son activité pharmacologique.

L’effet cumulatif par injections répétées ainsi que la cinétique d’action biphasique à forte dose soulèvent des interrogations concernant la biodistribution de MQ-1. L’administration d’une toxine marquée serait un moyen de répondre à ces questions. À cette fin, le marquage de MQ-1 par des groupements chélateurs du zirconium 89 ou du technétium 99m a été réalisé. Grâce à cet outil, il sera possible d’observer, par des techniques d’imagerie de type tomographie par émission de positons ou tomographie par émission monophotonique, la distribution de MQ-1 dans les différents compartiments de l’organisme de souris vivantes et de savoir si elle s’accumule dans un tissu. Il permettra également de rechercher des traces de la toxine dans les urines et fèces afin de connaître sa voie d’élimination.

Nos collaborateurs de Montpellier (IGF, Montpellier) ont mené un essai thérapeutique sur des rats PCK, qui est un modèle orthologue de polykystose rénale autosomique dominante associée à des kystes hépatiques (Lager et al. 2001). Les rats ont reçu une injection IP quotidienne de MQ-1 à la dose 0,015 µmol/kg pendant 140 jours. En parallèle, un groupe d’animaux a reçu une injection de solution saline. Les résultats sont actuellement en cours d’analyse. Ils permettront de déterminer si MQ-1 a un effet protecteur sur les reins dans ce modèle murin. L’analyse des échantillons biologiques et des organes apportera des réponses quant à une éventuelle toxicité de la toxine.

II. Initiation du développement thérapeutique de la