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Le cas du cylindre de section carr´e joue un rˆole dominant dans de nombreuses applications industrielles et techniques telles que l’a´erodynamique des construc-tions. Ces ´ecoulements sont en effet g´en´eralement observ´es dans la branche de l’ing´enierie du vent : autour des immeubles de grandes hauteurs, des ponts, des monuments et des tours qui sont en permanence expos´es au vent. De mˆeme, ils sont rencontr´es autour des piliers de ponts et des jambes des plates-formes offshore qui sont en permanence soumis `a la charge produite par les courants maritimes ou fluviaux. Ce type d’´ecoulement a donc fait l’objet de nombreuses ´etudes exp´erimentales et num´eriques [75, 162, 161, 125].

Figure 1.23:Evolution du coefficient de traˆın´ee en fonction du nombre de Reynolds´ pour un ´ecoulement autour d’un cylindre circulaire lisse [166]

Figure 1.24: Ecoulement autour d’un cylindre carr´e pour des petits nombres de´ Reynolds

Dans ce type d’´ecoulement, le ph´enom`ene de d´etachement tourbillonaire est do-minant. Il est provoqu´e par l’interaction entre les deux couches de cisaillement qui donne naissance `a une all´ee tourbillonnaire lorsque les tourbillons deviennent assez importants pour ˆetre convect´es dans le sillage. Le d´ecollement de l’´ecou-lement s’effectue `a partir du coin amont du cylindre. Gerrard d´ecrit ce ph´eno-m`ene dans [40] : un tourbillon de type Kelvin-Helmholtz se cr´ee au dessus de l’obstacle, il s’alimente dans la couche cisaill´ee `a laquelle il est rattach´e jusqu’`a devenir suffisamment gros pour aspirer la couche de cisaillement inf´erieure qui est de vorticit´e transverse et situ´ee dans le sillage proche de l’obstacle. Lorsque la vorticit´e de signe oppos´e devient suffisamment importante pour interrompre le d´eveloppement du tourbillon, il se d´etache et se trouve par la suite transport´e

en aval de l’obstacle.

Pour des petits nombres de Reynolds, l’´ecoulement est r´egulier et rampant car les forces visqueuses sont dominantes. A partir de Re' 47 , les forces d’inerties deviennent plus importantes et une premi`ere bifurcation de Hopf a lieu [145], il s’agit d’une transition entre la bulle de recirculation et l’all´ee de vortex p´erio-dique de Von K´arm´an. Les effets tridimensionnels apparaissent dans le sillage `a partir de Re ' 150 − 200. Comme pour le cylindre circulaire, au cours de la transition vers la turbulence, deux modes A et B apparaissent. Luo et al. [84] ont permis, `a partir de mesures exp´erimentales, de mettre en avant ces deux modes et de d´eterminer un nombre de Reynolds critique de transition `a 160 pour le mode A et `a 200 pour le mode B `a partir duquel le sillage en aval devient com-pl`etement d´eform´e et les longueurs d’ondes diminuent.

Pour des nombres de Reynolds au del`a de 500 les instabilit´es de Kelvin-Helmotz se d´eveloppent dans les couches de cisaillement autour du cylindre. Pour des nombre de Reynolds encore plus grands, les couches cisaill´ees d´ecoll´ees deviennent de plus en plus fines et les instabilit´es qui s’y forment se d´eplacent en amont.

1.4 Quelques notions sur la turbulence

« Peut-on d´efinir la turbulence ? Travailler sur la turbulence, c’est tenter de pr´ e-voir l’impr´evisible. » Marcel Lesieur

Comme peuvent le traduire les propos de Marcel Lesieur, la turbulence est un myst`ere de la m´ecanique des fluides, elle nous ´echappe de part son caract`ere for-tement impr´evisible. Cependant, nombreux sont ceux qui cherche `a th´eoriser ce ph´enom`ene physique ou du moins `a atteindre une compr´ehension suffisante pour la mod´eliser avec le plus de r´ealisme possible. Bien que d’apparence complexe, chacun peut en donner une description plus ou moins pr´ecise en s’appuyant sur ses diverses manifestations dans le mouvement des fluides naturels : citons les mouvements de fluides biologiques (le sang dans les vaisseaux), les mouvements de g´eofluides (le vent atmosph´erique, les courants marins) ou encore les mouve-ments de fluides stellaires (les circulations gazeuses autour des plan`etes, les jets de plasmas d’´etoiles). Elle intervient ´egalement dans le milieux industriel ou en laboratoire, dans les secteurs de l’hydraulique, de l’a´eronautique ou de l’´ener-gie, par exemple. Malgr´e la diversit´e de ses manifestations, certaines propri´et´es communes apparaissent et permettent de caract´eriser la turbulence. En effet, les ´ecoulements de turbulence forte, c’est-`a-dire les ´ecoulements `a faible nombre de Mach mais `a grand nombre de Reynolds, se comportent de mani`ere totalement irr´eguli`ere, al´eatoire, tridimensionnelle et tourbillonnante. Par ailleurs, la turbu-lence demande un certain temps pour apparaˆıtre et une certaine distance pour se d´evelopper d’o`u l’existence d’un r´egime transitoire entre le r´egime laminaire et le r´egime turbulent.

1.4.1 Caract`ere al´eatoire

Le caract`ere al´eatoire de la turbulence se manifeste `a travers les fonctions du champ de l’´ecoulement (vitesse, masse volumique, pression, temp´erature) qui varient de fa¸con al´eatoire et chaotique en espace et en temps. L’´evolution de ces grandeurs, en espace et en temps, est d´etermin´e par un ensemble d’´equations, les ´equations de Navier-Stokes. Contrairement `a l’´ecoulement laminaire, la notion de pr´edictibilit´e est perdue. L’´ecoulement est de plus tr`es sensible aux conditions initiales et aux perturbations mˆeme faibles qui ont tendance `a s’amplifier au cours du temps en raison de la faible viscosit´e. En effet, deux conditions initiales tr`es proches l’une de l’autre (par exemple deux champs de vitesse) divergent assez rapidement au cours du temps.

Pour mod´eliser ces ´ecoulements, l’utilisation d’une approche statistique est ainsi apparue tr`es tˆot et reste `a ce jour la m´ethode la plus utilis´ee pour appr´ehender ces variations et obtenir des propri´et´es physiques moyennes de l’´ecoulement. Elle a permis d’acc´eder `a une compr´ehension globale de la turbulence. Bien que l’aspect al´eatoire des fluctuations d’un ´ecoulement turbulent rende naturelle cette repr´esentation statistique, une ´etude plus d´etaill´ee des structures qu’il contient laisse apparaˆıtre l’existence de structures coh´erentes qui ont des mouvements assez organis´es se r´ep´etant plus ou moins r´eguli`erement au fil du temps. Cela justifie l’int´erˆet d’employer d’autres approches telle que la simulation des grandes ´echelles permettant de traiter les ´ecoulements diff´erement selon les ´echelles des structures `a partir de propri´et´es physiques locales. Les grandes ´echelles sont en principe r´esolues et les petites ´echelles au comportement plus universel sont mod´elis´ees `a l’aide d’un mod`ele de turbulence.

1.4.2 Caract`ere diffusif

Le math´ematicien Kolmogorov a contribu´e fortement `a la compr´ehension de la turbulence `a travers la th´eorie qu’il a d´evelopp´ee et publi´ee en 1941 et dans laquelle il ´enonce l’existence d’une cascade d’´energie cin´etique au sein d’un ´ecou-lement turbulent contenant des tourbillons dans toute une gamme d’´echelles spatiales. Les grandes structures instables d’´echelle de grandeur L impos´ee par la g´eom´etrie de l’´ecoulement contiennent la majorit´e de l’´energie initiale. Par des m´ecanismes d’interactions non lin´eaires, une partie de l’´energie cin´etique fluctuante contenue dans les plus grands tourbillons est transf´er´ee vers les pe-tits tourbillons qui vont `a leur tour se diviser. Lorsque la taille des tourbillons est suffisamment petite, c’est-`a-dire lorsque la viscosit´e devient dominante dans l’´ecoulement, l’´energie cin´etique transf´er´ee se dissipe. La viscosit´e d´etermine la plus petite ´echelle de l’´ecoulement qui est l’´echelle de dissipation visqueuse ap-pel´ee ´echelle de Kolmogorov et de grandeur d’espace η.

structures s’´ecrit ainsi :

L = k

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o`u k est l’´energie turbulente des grandes structures et  repr´esente le taux de dissipation de l’´energie cin´etique turbulente. Et l’´echelle de Kolmogorov η est d´efinie par :

η = (ν )