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2.2 Les champs d’origines dynamo

2.2.2 La dynamo dans les zones convectives

L’exemple de champ magnétique d’origine dynamo le plus évident est celui à l’œuvre dans la zone convective du Soleil. On s’intéresse donc ici en premier lieu à modéliser la cyclicité. Le scénario « α − Ω » est illustré en Fig. 2.5. Dans ce scénario, un champ initia- lement poloïdal est advecté par la rotation différentielle (l’équateur tourne plus vite que les pôles : cet effet sera discuté plus en détail ultérieurement) et crée un champ toroïdal (a et b sur la figure) : c’est l’effet Ω ; ensuite ce champ toroïdal émerge à la surface sous l’effet de l’instabilité de flottaison (c), puis la conjugaison de plusieurs phénomènes « twistent » (torsadent) les lignes de champ toroïdal pour créer des structures poloïdales (d) : c’est l’effet α. Enfin sous l’effet de la circulation méridienne, le champ poloïdal est transporté vers les couches intérieures pour régénérer un champ poloïdal à grande échelle (e et f).

Figure2.5 – Illustration de la dynamo solaire selon le scénario α−Ω. Crédit : M. Dikpati, P. Gilman & G. de Toma, HAO/UCAR.

Si l’effet Ω est aujourd’hui assez bien compris, l’effet α reste âprement discuté : les trois principaux modèles s’affrontant étant l’effet Babcock-Leighton, selon lequel l’instabilité de flottaison est responsable de l’émergence de tubes de flux qui se retrouvent ensuite twistés sous l’effet de la force de Coriolis ; l’effet α convectif qui donne lieu aux théories à champ moyen classiques et enfin des scénarios invoquant d’autres instabilités (magnéto-) hydrodynamiques dans la tachocline. L’origine du phénomène demeure elle aussi sujet à débats : les effets α et Ω sont-ils actifs dans la tachocline ou bien ont-ils leur source dans la zone convective ; enfin est-ce une combinaison de l’une ou l’autre de ces possibilités (théories de « dynamo distribuées ») ?

Je ne tenterai pas ici de fournir de réponse à ces questions. Néanmoins, le lecteur intéressé pourra consulter les ouvrages de référence tels que l’indispensable texte fondateur de H. K. Moffatt (1978) [35] et la revue de P. Charbonneau (2005) [10]. Voir aussi Brun (2004) [7] montrant à l’aide de simulations MHD tridimensionnelles la génération et la saturation de champs moyens à partir de champs turbulents en présence de rotation différentielle dans la zone convective solaire, ainsi qu’une sélection d’aspects de la dynamo solaire où il

y a eu de récents progrès par A. Brandenburg (2009) [6] ; enfin se reporter à la thèse de Laurène Jouve (2008) [29] et références associées pour un état de l’art récent de la discipline concernant le magnétisme solaire.

La dynamo dans les disques d’accrétion

En 1996, Hawley et al. [26] démontrent que l’instabilité magnéto-rotationnelle possède intrinsèquement un effet dynamo. Pour cela ils mènent une simulation tridimensionnelle dans une portion de disque dans laquelle le champ magnétique est initialement distribué de manière aléatoire (de moyenne nulle) et de faible intensité : typiquement, la vitesse d’Alfvén est très inférieure à la vitesse du son. L’instabilité magnéto-rotationnelle se dé- veloppe rapidement et génère de la turbulence. Celle-ci donne lieu à des contraintes de Maxwell (magnétiques) et de Reynolds (hydrodynamiques) qui vont transporter du mo- ment cinétique vers l’extérieur. Ils observent alors que l’énergie magnétique est amplifiée d’un facteur 20 et qu’elle est maintenue durant environ 200 périodes d’orbites, bien plus longtemps que le temps de décroissance caractéristique par dissipation en l’absence de mé- canisme d’amplification. Ainsi l’instabilité magnéto-rotationnelle possède intrinsèquement un effet dynamo : elle parvient à amplifier puis à maintenir un champ magnétique aléatoire.

Les dynamos expérimentales

Une approche intéressante pour considérer l’équation d’induction (2.27) consiste à cher- cher les flots hydrodynamiques (topologies possibles du champ de vitesses u) tels que le champ magnétique soit amplifié : c’est le problème de la « dynamo cinématique ». Au- jourd’hui, il n’existe toujours pas de méthode générique permettant de trouver un tel flot. Cependant quelques solutions particulières existent : en 1970 G. O. Roberts [43] propose un champ de vitesses où le mouvement du fluide correspond à un pavage périodique de cellules en mouvements hélicoïdaux alternés (les sens de rotation et de translation sont inversés d’une cellule à l’autre) ; en 1973, Ponomarenko [41] a prouvé que le mouvement hélicoïdal d’un cylindre infini dans une matrice infinie de même conductivité conduit à une dynamo cinématique.

Ces deux solutions ont conduit à la réalisation de deux dynamos expérimentales. La première est l’expérience de Riga, en 2000, qui reproduit la solution analytique proposée par Ponomarenko. La seconde est l’expérience de Karlsruhe, qui reproduit le pavage alter- natif de Roberts. Un enseignement important de ces expériences est que l’auto-entretien de la dynamo s’est produit pour des paramètres très proches du seuil calculé numériquement. Or, en raison de la très grande différence de diffusivité entre champ magnétique et champ de vitesse, l’écoulement du métal liquide est toujours très turbulent. Les simulations numé- riques ne peuvent pas atteindre ces régimes et ne mettent en jeu que l’écoulement moyen du fluide, comme s’il était laminaire. Il semble donc que la turbulence ait peu d’incidence sur le seuil de la bifurcation, au moins dans les expériences faites à Riga et Karlsruhe. Une autre conclusion est que le champ magnétique de saturation dépend, lui, du régime de turbulence.

Les expériences VKS, puis DTS et VKS2 à Grenoble et Cadarache ont ensuite exploité des flots de géométries moins contraintes, mais en conservant le rôle de l’hélicité du flot de vitesse et celui de la rotation différentielle comme ingrédients majeurs. Dans l’expérience

DTS, du sodium liquide circule dans une sphère en rotation, dans les expériences VKS et VKS2 [36], deux turbines contra-rotatives de part et d’autre d’un cylindre dirigent le flot de vitesses du sodium liquide. Dans la seconde expériences, les pales de la turbine sont constituées de fer doux, qui possède une rémanence magnétique.

Le 19 septembre 2006 [37], la première preuve de dynamo a été mise en évidence sur l’ex- périence VKS2. S’en sont suivis de nombreuses études et résultats. Plus particulièrement lorsque les deux turbines tournent en sens inverse à la même fréquence, l’effet dynamo observé (l’amplification du champ) ne peut pas être interprété en termes de champs de vitesses moyens comme c’était le cas pour les expérience de Riga et Karlsruhe. Lorsqu’une rotation globale est imprimée, des régimes intermittents (analogues à la dynamo terrestre) ou cycliques (analogues à la dynamo solaire) sont mis en évidence selon la fréquence relative de rotation des turbines.