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Durée expérimentale du plateau de solidification

5.2 Durée de solidification mesurée par thermocouple

5.2.3 Durée expérimentale du plateau de solidification

Afin de nous comparer à ces équations théoriques, nous avons réalisé plusieurs expériences, séparées en quatre gammes de températures de cristallisation, donc de surfusion. Celles-ci ont été choisies comme suit : une première gamme proche de la température ambiante (20-25 °C), deux gammes de températures intermédiaires (31-37 °C et 39-45 °C) et enfin un dernier intervalle de température (48-52 °C) proche de la température de liquidus du matériau. Au moins 10 essais sont réalisés pour chacun de ces quatre intervalles afin d’évaluer la répétabilité des résultats.

Pour chaque gamme, nous avons d’abord observé le processus de solidification à l’aide d’une caméra (25 images par seconde), qui offre une vue d’ensemble des différents comportements optiques. Nous avons ensuite cherché à quantifier les écarts entre un comportement idéal et un cas réel. Pour cela, les données expéri-mentales mesurées par thermocouple ont été comparées avec les valeurs théoriques. Puis, nous avons testé la mesure d’opacification par laser comme solution poten-tielle à l’étude de la solidification d’un matériau surfondu sans contact direct. Les vitesses d’acquisitions des mesures laser et thermocouple étaient identiques (100 ms). L’utilisation d’un capteur non intrusif (récepteur laser) limiterait alors la probabilité de solidification hétérogène, comme nous l’avons déjà précisé, ce qui peut être souhaité pour mieux comprendre les essais de déclenchement de la solidification. Les durées de solidification estimées à partir de la mesure par laser et par thermocouple ont donc été comparées.

La figure 5.5 illustre différents comportements qui apparaissent pendant la solidifi-cation d’un matériau après qu’il ait atteint des degrés de surfusion entre 8 et 37 °C. Ces photos correspondent à l’instantt=0 s où une augmentation de température a été détectée par le thermocouple. Ce temps correspond aussi au début de l’opacification locale du matériau. En effet, le laser est éloigné de moins de 10 mm du thermocouple. Avec une vitesse d’environ 6 mm.s-1pour cette concentration d’acétate de sodium, le front de solidification coupe le faisceau laser moins de 2 secondes après être arrivé au niveau du thermocouple. Dans ces images, on peut voir (de bas en haut) la progres-sion du matériau solide dans le liquide surfondu, l’excédent d’eau, l’huile de silicone et l’air.

Section 5.2 Durée de solidification mesurée par thermocouple

Figure 5.5 – Apparition de la solidification pour différentes surfusions : (a) T = 37 °C ; (b)∆T = 24 °C ; (c)∆T = 15 °C ; (d) :∆T = 8 °C. Les images ont été prises à l’instant où une augmentation de la température (recalescence) a été détectée par le thermocouple pour le tube de volume intermédiaire (12,9 g de matériau).

Pour un grand degré de surfusion (∆T = 37 °C, voir figure 5.5 (a)), l’opacification du matériau semble être importante et rapide avec un front de solidification homogène. Ce comportement est proche de celui observé pour un matériau solidifié après une surfusion de 24 °C. Ce processus évolue lorsque la température de solidification dépasse 38 °C (∆T = 20 °C), comme présenté dans la figure 5.5 (c) et (d). Dans le cas de la figure 5.5 (d), la cristallisation est partie des parois (nucléation hétérogène), et environ 10 secondes sont nécessaires avant que la libération de chaleur latente ne soit détectée par le thermocouple (temps = 0 s), comme nous l’avions montré dans une précédente étude [216].

De plus, le laser et la caméra ne pouvaient pas être utilisés simultanément (aveu-glement du récepteur laser par la lumière arrière). Ces images correspondent à 4 essais réalisés après les 45 essais de mesure laser. La ségrégation ne semble pas présente au fond du tube, ce qui nous permet de faire l’hypothèse de l’absence de vieillissement de l’AST et d’une conservation des propriétés sur l’ensemble des essais (un lien entre ségrégation et baisse de chaleur latente était présenté dans les figures 2.32 et 2.34).

Au cours de la solidification, l’évolution de la puissance laser qui traverse le matériau et la variation de température correspondante ont été enregistrées pour l’ensemble des essais. Nous en avons sélectionné quatre, dont les températures de cristallisation sont représentatives des quatre intervalles étudiés. Leurs évolutions au cours du temps (température et opacification) sont présentées dans la figure 5.6.

Figure 5.6 –Température et puissance laser reçue au cours du temps pour différentes sur-fusions : (a)∆T = 37 °C ; (b)∆T = 24 °C ; (c)∆T = 15 °C ; (d) :∆T = 8 °C. L’instant initial (Temps = 0 secondes) correspond au moment où la recalescence a été détectée par le thermo-couple.

Concernant le signal laser, l’opacification des échantillons avec un degré de surfu-sion inférieur à 20 °C (voir figure 5.6 (c) et (d)) commence avec une valeur plus élevée, respectivement 65 et 200 mV (environ 1,6 et 5µW de puissance laser) àt= 0 s. Cette valeur de transmission est inférieure à celle d’un matériau totalement liquide (dont la transmission pourrait atteindre 20 V, mais le signal arrive avant à saturation). Cette différence est essentiellement due à une cristallisation qui commence sur les parois, comme on peut le voir dans la figure 5.5 (d), et provoque une première atténuation du signal. Puis, le signal décroît doucement en raison d’une croissance concentrique du front de solidification et atteint sa valeur minimum quand le matériau est complète-ment solide.

Pour un degré de surfusion plus important (figure 5.6 (a) et (b)), le signal laser va d’abord chuter jusqu’à un minimum dans les premières secondes de la solidification, avant de ré-augmenter. Ce phénomène est certainement dû à des effets optiques : déviation du trajet laser dans les premiers temps de la solidification puis retour à une transmission plus directionnelle durant la solidification.

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Pour aller plus loin et comparer des durées de solidification obtenues à différents degrés de surfusion, nous souhaitions avoir un comportement monotone du signal laser entre 0 et 300 secondes. Nous n’avons donc pas considéré la singularité qui apparaît dans les 50 premières secondes. Pour cela, nous avons effectué une appro-ximation de l’évolution du signal laser avec une double exponentielle, donnée dans l’équation 5.10. Il est en effet usuel d’approximer la chute du signal lumineux avec une augmentation de l’épaisseur par une décroissance exponentielle [217]

f(t)=A×exp(B×t)+C×exp(D×t) (5.10) Cette double exponentielle est affichée en bleu sur les courbes de la figure 5.6. Cette loi empirique s’est bien adaptée aux données expérimentales, avec un coefficient de déterminationR2supérieur à 99,7 % entre 50 et 300 s. Cet intervalle de temps est sélectionné puisqu’il correspond à l’intervalle de temps où la décroissance du signal laser est monotone pour des degrés de surfusion élevés (∆T > 20 °C) avec une bonne correspondance (R2> 99 %).

Pour étudier le comportement en détail, les paramètres clés de ces résultats ont été reportés dans le tableau 5.1. Une fois la solidification déclenchée, la tempéra-ture va augmenter puis se stabiliser au niveau du liquidus (équilibre solide-liquide). En tenant compte des incertitudes de mesure, cette température a été considérée stable dès lors que sa dérivée en fonction du temps était inférieure à un seuil de 0,05 °C.s-1. Ce critère nous indique la fin de la recalescence, et le temps nécessaire pour l’atteindre correspond au temps de recalescencetrec. Ce phénomène est illustré dans la figure 5.7 (a). Cette recalescence n’a pas été considérée dans le calcul de la durée de solidification, qui ne concerne que la solidification résiduelle, comme exprimée par l’équation 5.6.

Tableau 5.1 –Principaux paramètres de l’évolution des signaux laser et thermocouple.

T (°C) 37 24 15 8

TC (°C) 21 34 43 50

trec(s) 7,1 11,6 15,6 29,0

Température maximale atteinte (°C) 57,1 57,2 58 55,1

Valeur du signal laser après 300 s (mV) 20,9 28,1 32,1 33,4 Plusieurs tendances se dégagent à partir de ces résultats. D’abord, la durée de recalescence a été multipliée par un facteur 4 lorsque le degré de surfusion est passé de 37 °C à 8 °C. Par conséquent, une libération de chaleur latente est plus rapide

pour une faible température de cristallisation (∆T plus élevé). Il est possible que ce phénomène soit lié à la vitesse de croissance du cristal comme le montrent Munakata et al.[191]. Cette vitesse de croissance serait alors liée à une extraction de l’énergie plus importante, comme l’ont supposé Dietzet al.[190].

Le diagramme de phase, présenté dans la figure 2.6, montre une température du liquidus située entre 57 et 58 °C. Cette température est atteinte dans la majorité des essais. Cependant, le plateau isotherme est plus éloigné de cette valeur lorsque le matériau est peu surfondu (∆T < 10 °C), comme illustré dans la figure 5.6 (d). Notre hypothèse est alors que la libération de chaleur latente est plus lente, comme le montre la durée de recalescence, et celle-ci ne parvient pas à compenser les pertes thermiques.

La fiabilité de ces résultats est évaluée au regard de la théorie. Les propriétés thermophysiques sont calculées à partir des équations 2.5 ; 5.7 et 5.8, adaptées à une fraction massique wAS=0, 57, obtenue grâce à la mesure ATG. Les durées de solidification théoriques ont été déterminées à partir de l’équation 5.6.

Les solidifications expérimentales sont considérées complètes au dernier instant où la dérivée de température par rapport au temps est nulle. Cependant, cette tem-pérature est enregistrée par pas de 100 ms avec une précision de±0,1 °C et sujette à des oscillations pendant la mesure, comme en témoigne la courbe noire de la fig-ure 5.7 (a). Ces oscillations peuvent alors dissimuler une décroissance réelle de la température qui correspondrait à la fin de la solidification. Pour éviter un tel biais dans les calculs de dérivée donc une erreur sur la durée réelle de la solidification, les températures mesurées ont été lissées par une moyenne mobile. Nous avons donc déterminé une valeur de moyenne glissante qui soit capable de mesurer le plateau de solidification de chacun des essais, et de s’adapter aux cas particuliers.

La figure 5.7 présente ainsi le cas spécifique d’un échantillon cristallisé à environ 50 °C (∆T ≈8 °C). Dans cet essai, on remarque que la température commence à chuter à partir de 170 s. Elle se stabilise ensuite autour de 215 s, ce que nous avons interprété comme étant la fin de la solidification. La figure 5.7 (b) s’est focalisée sur un intervalle restreint autour de 215 s, pour nous permettre de sélectionner la moyenne glissante. Cette valeur devait être la plus grande possible (afin de limiter les oscillations) tout en considérant l’ensemble du plateau isotherme. Dans cette figure, les lignes pointillées correspondent au temps où la solidification a été considérée comme terminée (dernier moment où la dérivée est nulle) pour différentes valeurs de moyennes glissantes. Par ailleurs, le temps de recalescence, égal à 35 s pour cet essai, correspond effectivement à l’instant où la dérivée de température devient inférieure à 0,05 °C.s-1.

Section 5.2 Durée de solidification mesurée par thermocouple 5 1 0 1 5 1 2 0 1 4 0 1 6 0 1 8 0 0 2 0 4 0 6 0 8 0 1 0 0 1 2 0 1 4 0 1 6 0 1 8 0 2 0 0 2 2 0 2 4 0 5 0